mardi 25 octobre 2011

Les Argentins votent pour la démondialisation


Dimanche, les Argentins ont réélu triomphalement Cristina Kirchner par plus de 53% dès le premier tour des élections présidentielles. Une belle victoire pour la dirigeante d’un pays qui montre que la démondialisation, cela marche, avec une croissance de 8% par an depuis 2003.

Le triomphe de Cristina Kirchner

La présidente de l’Argentine a donc été réélue triomphalement puisqu’il n’y aura même pas besoin d’un second tour. Elle a devancé le candidat socialiste, qui, avec 17%, a devancé pour la première fois le candidat radical qui n’a rassemblé que 12% des votes. Les Argentins ont donc choisi de prolonger le bail de la famille Kirchner puisque la présidente avait succédé à son mari Nestor en 2007, qui ne pouvait pas alors se représenter avec les lois électorales de l’époque.

Le couple Kirchner est arrivé au pouvoir début 2003 et a présidé au redécollage de l’Argentine après la terrible crise de 1998-2002. Après l’échec du lien entre le peso et le dollar, qui avait bien cassé l’inflation, mais qui avait également détruit la croissance, le pays avait dévalué de 72% et de fait défaut sur sa dette, provoquant une panique financière en 2002. Cependant, l’aggravation de la crise a été le prélude à un redécollage économique spectaculaire.

Une réussite économique

Bien sûr, l’Argentine souffre d’une inflation importante, mais l’ensemble des résultats économiques du pays est spectaculaire. Tout d’abord, le pays affiche une croissance de 8% par an depuis 2003 (à l’exception de 2009 naturellement). Certes, la crise a été violente, puisque le PIB avait reculé de 10% de 1998 à 2001 puis de 10% de plus sur la seule année 2002, du fait de la panique financière provoquée par la fin du lien avec le dollar et la conversion autoritaire des comptes privés.

Mieux, le taux de chômage, qui était de 23% en 2002, est retombé à seulement 7% aujourd’hui. Le taux de pauvreté s’est effondré. Bien sûr, le Monde essaie de présenter cette réussite comme le produit de la hausse du prix des matières premières. Comme si l’Argentine pouvait faire 8% de croissance annuelle de son PIB depuis près de dix ans seulement en vendant du soja ! Ceci est totalement ridicule, comme l’explique remarquablement bien Yann sur son blog.

Le pays du protectionnisme

En effet, cela ferait mal au Monde d’admettre que la recette du succès économique de l’Argentine est la démondialisation. Si Buenos Aires a réussi son redécollage économique, c’est en refusant toutes les règles économiques (anarchie commerciale, monétaire et financière) que le quotidien vespéral, qui se dit pourtant de gauche, défend. L’Argentine n’a plus rien emprunté aux marchés financiers depuis dix ans. Et c’est un choix politique (la Russie a choisi de revenir sur les marchés).

Mieux, le pays est un champ d’expérimentation inédit pour le protectionnisme et il s’attaque à des catégories de produits que presque plus personne n’imaginerait pouvoir faire produire en Europe. L’Argentine couvre aujourd’hui 30% de sa consommation de jouets, contre 5% il y a dix ans et ambitionne de passer à 50%. Buenos Aires a également imposé à RiM la fabrication du fameux Blackberry. Bref, l’Argentine démontre que le protectionnisme, cela marche !

Et cela marche aussi politiquement, quand on constate le triomphe électoral de Cristina Kirchner. L’opinion publique européenne est convaincue, comme le montre l’association pour un débat sur le libre-échange. Pourtant, les grands partis font la sourde oreille. Ils finiront par être balayés.

21 commentaires:

  1. Les grands partis finiront par être balayés ou nous balayer. On ne sait pas encore.

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  2. NOUS allons les balayer. Par contre, il y faudra peut-être une guerre civile. Parce qu'il n'y a pas que les grands partis qui bloquent tout, qui haïssent la France et qui méprisent les Français. Il y a aussi les média, les "grands intellectuels", comme BHL pour ne citer que lui, et les Belles Ames professionnelles.

    Triste à dire...

    Sancelrien

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  3. Huumm...Vous n'êtes quand même que des latins.

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  4. Un bel exemple comme quoi tout n'est pas foutu...
    Par contre, ca demande une bonne dose de courage tout ca... chose qui manque cruellement par chez nous... surtout quand on voit les super FESF qui sont en train de mettre en place, ou l'art et la maniere de repousser les vrais problèmes a plus tard... ca ne fera que plus mal.

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  5. C'est en effet un très bon exemple de ce que l'on peut faire avec de la volonté politique.

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  6. L'argentine est un trés bon exemple de démondialisation, mais en entendant les commentaires sur europe 1 ou France info concernant la réelection de Kirchner on ne peut qu'être déprimé. Pas un mot sur la politique protectionniste du pays, la croissance de l'argentine justifie le succés de Kirchner sans que personne ne justifie cette croissance, tout au plus un mot sur l'exploitation des matieres premiere, un autre sur l'inflation (évidement, ca on ne passe pas à coté) mais sur la politique commerciale hétérodoxe du pays, rien !
    Aprés cela comment voulez vous que le citoyen lambda qui écoute d'une oreille distraite les infos percoivent la pertinence e l'argumentaire protectionniste si même les exemples concret de succés ne lui sont pas rapportés ou de manière partiel et partial ?

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  7. L'Europe est un beau fromage pour ses parlementaires, déjà très bien payés, qui font du présentéisme fictif :
    http://dotsub.com/view/01ad2718-073c-474a-ac40-c7a72e199d55

    Olaf

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  8. «Il va falloir faire appel au crédit international». Pour accéder au crédit, l'Argentine doit d'abord payer sa dette envers le Club de Paris (8 milliards $US avec les intérêts), mais cette opération a pour préalable un audit du FMI auquel le pays refuse de se soumettre.

    http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/334390/argentine-les-limites-du-modele-kirchnerien

    Olaf

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  9. @ MAX,
    Cela ne doit pas vous étonner! Vous devez bien savoir de quel côté penchent les médias depuis au moins la campagne référendaire de mai 2005!

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  10. Article très intéressant.

    Par ailleurs, j'ai écouté Nicolas Dupont Aignan sur France Culture à midi. Il s'en est vraiment bien sorti, mais ce que je trouve le plus significatif c'est que non seulement le journaliste ne poussa aucun de ces cris d'orfraie que l'on entend habituellement quand on raconte des choses raisonnables, mais même qu'il semblait trouver les propos de Nicolas Dupont Aignan tout à fait pertinents. C'est un bon signe.

    Par ailleurs, je crois que la comparaison avec le pétainisme que NDA utilise désormais régulièrement pour décrire la position de nos dirigeants est aussi avisée que particulièrement bien venue sur le plan polémique. C'est le genre de retournement symbolique qui retient l'attention et qui payera.

    Emmanuel B

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  11. Apparemment, personne n'a lu l'article que j'ai mis en lien.

    Au moment du défaut argentin, il n'y avait pas de crise systémique, l'Argentine pouvait exporter, le soja entre autres à des prix élevés, maintenant ça va changer, d'autant plus que tous cherchent à faire baisser leur monnaie ou leurs salaires( solution UE ).

    Olaf

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  12. @ Olaf

    J'ai lu ce papier, mais même The Economist est plus mesuré sur l'Argentine alors que ce journal a été fondé au 19ème siècle contre le protectionnisme. L'histoire du soja est totalement ridicule. Même si la production de soja pèse 5% du PIB, l'Argentine fait 8% de croissance tous les ans...

    Bien sûr, l'économie argentine souffre de déséquilibres, et notamment d'une inflation très forte, qu'il faut contenir, mais je crois que cette présentation est extrêmement partielle et partiale.

    Le discours des médias à cet égard est particulièrement intéressant. Ce n'est pas grave qu'ils n'en parlent pas. Nous pourrons le développer pendant la campagne et nos contradicteurs seront coincés.

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  13. Le soja n'est qu'un exemple de l'ex récente politique protectionniste et mercantiliste de l'Argentine, que je ne condamne pas, mais qui a ses limites temporelles dans un système échangiste global qui rentre en récession systémique. Encore une fois, je répète que la donne a changé, l'histoire ne repasse pas 2 fois les plats.

    Donc si vous voulez débattre avec vos contradicteurs, préparez les arguments...

    Olaf

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  14. Mazette écoutez un peu ce que dit Paul Krugman à la fin de cette vidéo. C'est cash.

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  15. Très juste mais vous ne dites pas toute l'histoire:

    Nucléaire, protectionnisme et violer le FMI : Comment gagner une présidentielle au 1er tour !
    http://www.solidariteetprogres.org/Nucleaire-protectionnisme-et-violer-le-FMI-Comment-gagner-une_08189

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  16. Cinquante-trois pour cent des voix pour une idée qui a tiré les argentins de la déconfiture monnétaire et industrielle, non, ce n'est pas ce que j'appelais un triomphe : cela pose vraiment une question d'éducation civique...ou de mode de scrutin...ou de machisme crasse...à moins que tous les candidats en lice aient été peu ou prou démondialisateur !...?

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  17. Tout à fait d'accord avec vous, Laurent, les pays qui se refuseront à évoluer dans le sens de l'Argentine vivront dans les années à venir des temps tellement difficiles que les pouvoirs autistes seront balayés, à l'instar de ce qui s'est passé dans une partie du monde musulman.

    Cette folie furieuse qui a consisté à ouvrir les marchés à tort et à travers est en train de tout détruire sur son passage. Seul le retour à une économie et une finance strictement régulées pourra redonner un espoir. C'est aussi le seul moyen de retrouver une industrie manufacturière digne de ce nom en France. Seuls les pays qui garderont une industrie puissante auront un véritable espoir de développement. Les autres, y compris ceux qui vivent sur des rentes financières ou de matières premières, seront tôt ou tard condamnés au déclin et à la paupérisation de leur population.

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  18. En parlant de démondialisation (un terme mal choisi) une réaction à l'anathème de Bolchevisme intenté par Copé contre Montebourg (ºC).

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  19. Laurent, si vous étiez en Argentine, vous ne mettriez pas longtemps à vous rendre compte que toutes ces mesures relèvent de la démagogie. Il n'existe pas de vraie ligne idéologique derrière. A quoi bon parler de protectionnisme quand les acquisitions d’entreprises argentines compétitives par des capitaux étrangers (américains, brésiliens ou chinois) se sont multipliées au cours des dernières années.
    La majorité des poids lourds du secteur agroalimentaires sont aujourd’hui aux mains de capitaux étrangers (Quickfood acquis par le brésilien Marfrig, Brasserie Quilmes par AmBev et Avex dernièrement a Brasil Foods). Il en va de même pour l’industrie (Acindar acquis par Arcellor Mittal, Ciment Loma Nerga par le brésilien Correa, Ciments Minetti acquis par le suisse Holcim) et la finance (Banco Patagonia par le brésilien Itau, filiale locale de Standard Bank par les chinois), tout cela sans que le gouvernement dise un mot.
    A la fin du mandat de Nestor Kirchner en Octobre 2007, on dénombrait 438 entreprises vendues á des capitaux étrangers, et ce pour une valeur de US$18,7 milliards. Je n’ai pas les chiffres de ces 4 dernières années mais cette tendance ne s’est pas atténuée, au contraire. Le real fort a permis aux brésiliens de mettre la main sur les entreprises les plus compétitives de leur voisin, et les chinois s’en sont donné á cœur joie, en achetant des terres agricoles á tout va.
    Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais pour moi cette braderie des forces vives de l'économie locale n'est pas trés compatible avec le concept de démondialisation.

    Si vous deviez chercher un exemple pour la France, penchez-vous plutôt sur le Brésil, oú l'Etat stratège projette la puissance économique du pays hors des frontières tout en protégeant son marché interne.

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  20. @ Olaf

    Je maintiens. Le soja, c'est l'arbre qui cache la forêt. Avec 8% de croissance par an, le pays a sans doute doublé depuis 2002. Soit un PIB qui passe de 100 à 200, avec 10 de soja. En supposant que les ventes de soja ait triplé, cela veut dire qu'un peu plus de 6% de la croissance de l'Argentine vient du soja depuis 10 ans. C'est anecdotique.

    Vous pouvez lire le papier de Yann qui montre que la stratégie de reconquête de l'Argentine repose bien plus sur l'industrie et le protectionnisme, même si pas grand monde ne veut l'admettre.

    On verra si les prévisions catastrophistes de ce papier se vérifient. Mais, à titre personnel, je n'y crois pas. J'y vois plutôt le papier d'un néolibéral dogmatique. Les papiers de The Economist sont beaucoup plus équilibrés alors qu'ils sont résolument hostiles à toute forme de protectionnisme.

    @ Anonyme

    53% au premier tour, c'est énorme, d'autant plus que le candidat socialiste a fait 17%.

    @ Jean-Marie

    J'ai fait des papiers sur le Brésil également. La politique argentine me semble cohérente : protectionnisme commercial mais pas de protection des entreprises locales, qui peuvent être rachetées. On peut critiquer ce second choix, mais le premier est une politique cohérente et appliquée à un grand nombre de secteurs.

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  21. Jean-Marie, c'est justement le contraire : il doit son enrichissement actuel aux mesures libérales du gouvernement Cardoso, légèrement corrigées mais jamais remises en cause par Lula puis Rousseff.
    L'Argentine a une politique mille fois plus protectionniste que le Brésil et la croissance du PIB, même si elle est bonne au Brésil, n'a rien de commun...

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