Hier, les dirigeants européens se sont de nouveau réunis pour essayer de trouver une solution à la crise qui secoue la zone euro depuis deux ans. Les annonces ont été repoussées à mercredi. Encore une fois, ils semblent vouloir acheter du temps sans véritablement régler les problèmes.
Une nouvelle victoire pour Angela Merkel
Comme d’habitude, la France est venue avec des propositions qui ont été retoquées par l’Allemagne. Les équipes de Nicolas Sarkozy souhaitaient en effet transformer le FESF en une banque et lui faire emprunter à la BCE pour démultiplier sa force de frappe. D’abord, on peut s’interroger sur une solution qui consiste à ajouter une couche de dettes européennes en plus des dettes nationales alors que les marchés sont méfiants à l’égard des dettes souveraines.
En fait, elle permettait de ne pas augmenter les engagements des Etats et revenait à une forme de monétisation déguisée des dettes souveraines, une solution proche de celle prônée par Chevènement. Mais l’Allemagne a dit « nein » et Nicolas Sarkozy a concédé que « ce n’est pas aux chefs d’Etat et de gouvernement de donner quelque instruction que ce soit » à la BCE, réaffirmant l’indépendance de la Banque Centrale Européenne, qu’il voulait pourtant réduire.
En outre, l’Allemagne aurait obtenu de faire accepter aux banques créancières de la Grèce une décote de 50%, plus proche de l’évaluation des marchés. Il y a quatre mois, cette solution était pourtant taboue. Une recapitalisation d’une centaine de milliards d’euros devrait également être entérinée. Reste un point d’incertitude : l’augmentation (ou non) des moyens du FESF. L’Allemagne s’y opposait malgré la pression des marchés, de la France et des eurocrates.
Vers une prolongation de la crise
Une telle issue, si elle était confirmée, aurait de nombreuses conséquences. Tout d’abord, elle confirme le discours des alternatifs, qui avaient été parmi les premiers à souligner que la Grèce n’honorerait pas sa dette, et ridiculise les dénis effarouchés du gouvernement. Le discours de NDA à l’Assemblée en mai 2010 prend une dimension prophétique. Il est un des seuls dirigeants politiques à avoir vu juste alors que le déni du PS et de l’UMP est démasqué.
Mais cet accord n’est pas sans poser de nombreux problèmes. Tout d’abord, comme le souligne Hervé Nathan sur son blog, il consacre la suprématie absolue de l’Allemagne qui, après avoir cédé au printemps 2010, dicte son agenda et annonce toujours plus de cette austérité délétère au reste de l’Europe. Suivant l’arrêt de la cour de Karlsruhe, Angela Merkel va soumettre l’accord au Bundestag, le seul à avoir le droit de se prononcer avant la réunion de mercredi.
Le second problème est qu’il est probable que cela repousse une sortie de la Grèce de l’euro. En effet, étant donné qu’Athènes se voit offrir une réduction de 50% de son fardeau, la Grèce va sans doute continuer pendant quelques temps à essayer de suivre les directives européennes. Il serait délicat pour les autorités de quitter l’euro après un tel geste, même si le pays a surtout besoin d’une dévaluation pour relancer son économie. Le supplice de l’euro pourrait durer.
Ils sont coincés par les échéances électorales et font tout pour faire tenir la situation jusqu’à ce moment là.
RépondreSupprimerIls savent bien que les seules solutions susceptibles de corriger un peu la situation serait un suicide électoral.
Et le problème c'est que plus on attend, plus les solutions seront dures et difficile a appliquer.
Attali avait écrit un papier là dessus sous forme d'une lettre d'Angela et Nicolas expliquant que les choses étant ce quelles étaient, ils préféraient prendre les mesures pour essayer de régler les problèmes en étant conscient que ça leur ferait perdre les élections. Malheureusement ce courage politique n'est que pure fiction.
Il ne faut pas non plus oublier que la France va perdre son fameux triple A au mois de Février: il ne faut pas trop s'illusionner sur le sens de l'avertissement de moody's. De plus, le meilleur élève (les EU) de la meilleure classe (le club des triples A) l'ayant perdue, tous les autres ont amenés à le perdre tôt ou tard. Dès que la France perd son triple AAA, la zone euro fait boum!
RépondreSupprimerEt clairement, dans ce cas, l'Allemagne a beaucoup à perdre. Ce qui ne laisse pas de s'interroger sur sa stratégie actuelle.
Artus dit que la Grèce ne pourra jamais s'en sortir, même avec un défaut, même avec une dévaluation, car elle n'a plus de base industrielle et une sortie de l'euro aurait pour effet de renchérir ses importations sans pouvoir accroître ses exportations. Ce ne serait pas un problème de compétitivité car le coût de la main d'oeuvre en Grèce est déjà faible par rapport aux autres pays européens. Autrement dit l'UE serait condamnée à subventionner la Grèce ad vitam aeternam...
RépondreSupprimer"Artus dit que la Grèce ne pourra jamais s'en sortir, même avec un défaut, même avec une dévaluation, car elle n'a plus de base industrielle et une sortie de l'euro aurait pour effet de renchérir ses importations sans pouvoir accroître ses exportations."
RépondreSupprimerIl faudrait se référer au texte original mais je ne vois pas comment on peut soutenir cette idée. Il existe toujours un taux de change qui permet d'exporter ce qu'on fait le moins mal (fut-ce des olives et du tourisme) et de réduire massivement les importations - ce qui permet forcément de reconstituer des bases industrielles. Ce qui est vrai c'est que pour un pays dopé pendant 10 ans aux transferts de capitaux, l'atterrissage est douloureux... Mais il n'y a pas de véritable choix.
Cela vaut aussi pour la France : l'affaiblissement industriel est masqué par les entrées de capitaux, et le coup d'arrêt nous coûtera cher (a minima les trois points de PIB de notre déficit commercial, plus la détérioration de nos termes de l'échange). Mais le mal est fait ; et le choix est entre la purge éternel avec l'euro ou la reconstruction de notre appareil productif avec une monnaie indépendante et une politique volontariste.
@ J. Halpern
RépondreSupprimerArtus a publié plusieurs petites études où il dit cela, la dernière en date est sortie aujourd'hui :
http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=60553
Il y distingue trois types de pays en crise : ceux qui connaissent une crise de liquidité mais qui ne sont pas insolvables, ceux qui sont insolvables mais qui peuvent s'en sortir, et ceux qui ne peuvent pas s'en sortir, ce qui serait le cas de la Grèce et peut-être du Portugal.
Une dévaluation a des conséquences positives et négatives, il faut donc voir selon les pays si les avantages l'emportent sur les inconvénients. Dans le cas de la Grèce, compte tenu que son appareil productif ne permettrait pas d'améliorer beaucoup ses exportations, les désavantages l'emporteraient.
@ J. Halpern
RépondreSupprimerVoir aussi l'étude suivante :
http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=60389
Je cite : "d’autres pensent que l’amélioration de la compétitivité de la Grèce ne
pourra se faire que par la sortie de l’euro et la dévaluation, afin de rendre
rapidement la Grèce attractive comme lieu de production. Cette théorie est
bizarre : le niveau des coûts salariaux est bas en Grèce (graphique 4) et, on va le
voir, la taille de son industrie est faible."
Le fond du problème est que la Grèce s'est fourvoyée dans une impasse. Le développement d'une industrie suppose une monnaie faible et un niveau élevé d'intervention publique pour constituer un savoir-faire et des avantages comparatifs industriels - c'est exactement le contraire qu'on lui a fait faire. Je ne suis pas sûr qu'Artus veuille dire autre chose, il indique que la dévaluation ramènera la Grèce à ses avantages comparatifs "statiques", à savoir essentiellement le tourisme. Je le cite : " la Grèce s’appauvrit et perd sa population jusqu’au point où la demande intérieure devient si faible que les excédents du tourisme couvrent le déficit industriel." C'est ce qui se produit en l'absence de politique volontariste de promotion de l'industrie dans un pays sous-développé - type Côte D'ivoire, pour simplifier. Mais avec la même base de départ, on peut bifurquer vers l'industrialisation - type Corée ou même Tunisie.
RépondreSupprimerLa difficulté pour les Grecs est que l'épreuve de l'appauvrissement général est socialement beaucoup plus destructrice qu'une pauvreté stable dont il s'agirait de s'extirper. La décomposition sociale et politique rend encore plus difficile les politiques de redressement. Ces dernières supposent cependant, et je n'en démords pas, la restauration d'une monnaie nationale, à moins, comme le dit Artus, de se résoudre à "subventionner la Grèce jusqu'à la fin des temps" (et aussi l'Italie, l'Espagne... ?).
Le fait est que NS est seul devant les autres pays, le seul à vouloir défendre les avantages des banques françaises, comme d'habitude la politique pour les bling blings.
RépondreSupprimerOlaf
L'entêtement des dirigeants européens à maintenir artificiellement un système ne peut produire que tôt ou tard les pires catastrophes économiques et sociales et favoriser la violence sociale et le recours aux extrêmes.
RépondreSupprimerAbraxas, c'est évident : l'Allemagne est le pays qui ait le plus à perdre de la fin de l'euro, et sans doute même le seul. C'est pour ça qu'il ne faut surtout pas attendre quoi que ce soit de l'Allemagne en ce sens : les menaces de Merkel sont suffisamment fortes pour humilier les pays affaiblis par l'euro mais suffisamment faibles pour ne constituer que des paroles en l'air.
RépondreSupprimerQuant à subventionner la Grèce ad vitam aeternam, ça n'est même pas faisable, alors ne parlons pas de l'Italie ou de l'Espagne, qui sont des économies beaucoup trop importantes...
« Quant à subventionner la Grèce ad vitam aeternam, ça n'est même pas faisable, alors ne parlons pas de l'Italie ou de l'Espagne, qui sont des économies beaucoup trop importantes... »
RépondreSupprimerEn fait, c’est le principe du fédéralisme : les états les plus riches paient pour les états les plus pauvres, tout comme en France les régions les plus riches paient pour les régions les plus pauvres. Par exemple, le contribuable français subventionne la Corse ad vitam aeternam…
Artus ne dit pas d’ailleurs qu’il faudrait payer éternellement pour l’Espagne et l’Italie, seule la Grèce et peut-être le Portugal seraient dans une situation d’insolvabilité définitive.
Albert.
Puis-je signaler ce billet : Georges Ugeux, les banques et le debt-equity-swap.
RépondreSupprimer@ Anonyme
RépondreSupprimerArtus se trompe. Comme le note J Halpern, une dévaluation permettrait tout d'abord de relancer le tourisme : plus de visiteurs dépensant davantage. Ensuite, pour l'industrie, c'est une question de volonté et de protectionnisme. Il suffit de voir l'Argentine (cf papier du jour). Ils sont en train de reconstruire une industrie du jouets par exemple. Et la part de l'industrie et de l'agriculture est plus forte qu'en France...
Mardi 25 octobre 2011 :
RépondreSupprimerL'Europe au bord de la crise de nerfs.
http://www.leparisien.fr/economie/l-europe-au-bord-de-la-crise-de-nerfs-25-10-2011-1685170.php
Mardi 25 octobre 2011 :
RépondreSupprimerEuro : pour Fillon, un échec du sommet ferait basculer l'Europe "vers des terres inconnues."
François Fillon a estimé devant les députés UMP qu'un échec du sommet de la zone euro mercredi "pourrait faire basculer le continent européen vers des terres inconnues", dans des propos rapportés de source proche du groupe UMP et confirmés dans son entourage.
"La pression ne cesse de s'accroître sur la zone euro et sur l'ensemble de l'économie mondiale", a souligné François Fillon.
"Il est incontestable que les prévisions de croissance de l'économie mondiale sont en train de baisser de façon brutale", a-t-il ajouté.
"Si les résultats du sommet européen sont positifs, le pessimisme sera enrayé sur les perspectives de croissance, a jugé le chef du gouvernement. Mais, a-t-il ajouté, nous vivons des jours cruciaux : si le sommet était un échec, cela pourrait faire basculer le continent européen vers des terres inconnues".
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5gzlmU7KIgLcCmrFFfgXNO-6Od9zQ?docId=CNG.5f713e4bee096d0983ae7bd253e79907.631
Mercredi 26 octobre 2011 :
RépondreSupprimerL'Italie émet 10,5 milliards d'euros d'obligations, forte hausse des taux.
L'Italie a émis au total mercredi 10,5 milliards d'euros d'obligations dont les taux d'intérêt ont une nouvelle fois augmenté, signe de la méfiance des investisseurs, a annoncé la Banque d'Italie.
Dans le détail, le Trésor italien a émis 8,5 milliards d'euros d'obligations à six mois et 2 milliards de certificats du Trésor zéro-coupon à deux ans, atteignant ainsi son objectif grâce à une demande soutenue qui s'est élevée au total à plus de 17 milliards d'euros.
Mais la péninsule a dû concéder une nouvelle fois une hausse des taux d'intérêt en raison de la méfiance des investisseurs.
Les taux des titres à six mois ont fortement progressé à 3,535 % contre 3,071 % lors de la précédente émission similaire le 27 septembre, tandis que les taux des certificats à deux ans ont augmenté à 4,628 % contre 4,511 %.
http://www.romandie.com/news/n/_L_Italie_emet_105_mds_EUR_d_obligations_forte_hausse_des_taux261020111110.asp
Plus les jours passent, plus l'Italie emprunte à des taux de plus en plus exorbitants.
Plus les jours passent, plus l'Italie se rapproche du défaut de paiement.
L'Italie sera le quatrième domino à tomber.