Des hypothèses irréalistes
Merci au Figaro d’avoir publié les hypothèses du plan concocté par la troïka technocratique avec le gouvernement grec. Elles méritent d’être détaillées. Le plan prévoit une contraction du PIB de 4% cette année, 1% en 2013 et un retour à la croissance à partir 2014 (2.5%, puis 3% en 2015). Le solde budgétaire primaire (avant intérêt) doit être équilibré en 2012 (contre un déficit de plus de 2% en 2011) puis atteindre 2% du PIB en 2013 et enfin 5% à partir de 2014.
Un tel scénario verrait la dette publique atteindre 198% du PIB en 2012-2013 (contre 113% en 2008, 145% en 2010 et 163% en 2011). Parallèlement, 150 000 postes de fonctionnaires devraient être supprimés en 5 ans, leur salaire, passé de 1976 euros en 2009 à 1679 en 2010, tomberait à 1185 euros en 2014 (-40% !), alors que celui du privé tomberait de 1164 euros en 2012 à 990 euros en 2014, le SMIC baissant de 22%, à 586 euros, et même de 32% pour les jeunes, à 511 euros.
Autant dire que ces hypothèses sont totalement farfelues et malhonnêtes. Comment la Grèce pourrait faire 2,5% de croissance en 2014 alors que le pouvoir d’achat va continuer à s’effondrer ? Il est bien évident que l’effet dépressif des plans d’austérité va plonger le pays dans une dépression économique qui va durer au moins jusqu’en 2014. D’ailleurs, il y a un an, la troïka annonçait 2,5% de croissance en 2012, ce qui montre bien que ses prévisions ne peuvent pas être prises au sérieux.
Un chèque en blanc pour l’euro
Cela fait maintenant près de deux ans que, comme d’autres, Jacques Sapir, qui vient de démonter ce nouveau plan, ou Nicolas Dupont-Aignan, je soutiens que ces plans mènent la Grèce dans une impasse. Ils sont totalement absurdes car, en faisant baisser le PIB du pays, ils font exploser la dette (passée de 113 à 198% du PIB en 4 ans !). Sans croissance, il est impossible de s’en sortir, comme l’expliquent les prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz ou Paul Krugman.
Bien sûr, les créditeurs privés sont mis à contribution, et c’est un progrès (obtenu par l’Allemagne, contre la volonté de la France). Les 210 milliards vont subir une décote de 53%. Mais il y a déjà 150 milliards de dettes grecques dans les mains d’institutions publiques, notamment européennes, et cette somme va continuer à augmenter puisque 130 milliards sont débloqués. Il est probable que la Grèce fera défaut sur cette somme car les hypothèses du plan sont bidon.
En réalité, comme le soutient Jacques Sapir, les gouvernements veulent éviter à tout prix une explosion de l’euro avant leurs élections (présidentielle en France, législatives en Allemagne l’an prochain). Pire, comme le souligne Régis Soubrouillard sur Marianne, cela se fait au mépris des plus élémentaires règles démocratiques, avec la tutelle de la Grèce, ou le MES. En réalité, la seule solution possible, c’est la sortie de l’euro, qui éviterait le calvaire de la baisse des salaires.
Patrick Artus avait bien vu les choses. L’économiste en chef de Natixis annonçait il y a quelques mois que le pays avait besoin d’une dévaluation interne de 35% pour retrouver sa compétitivité. C’est la voie malheureuse qui est suivie aujourd’hui. En revanche, on a oublié qu’il prédisait alors une baisse abyssale du PIB de 27% ! La réalité, c’est que le chemin suivi est intenable et que le peuple grec finira tôt ou tard par se révolter, comme l’avaient fait les Argentins fin 2001.
Je ne comprends pas pourquoi le simple départ de la Grêce mettrait fin à l'Euro.
RépondreSupprimerJard
Moi non plus. Ceci dit, sortir de l'Euro est une opération délicate, les grecs n'ayant plus aucune confiance dans leur classe politique d'incapables préfèrent rester dans l'Euro plutôt que de prendre le large avec des bras cassés à la barre du bateau.
SupprimerOlaf
@ Jard
SupprimerParce que la spéculation redoublerait sur l'Italie et l'Espagne. La Grèce est le premier domino. S'il tombe, tous les autres tombent avec lui après.
@ Olaf
Cela joue. Mais la torture qui leur est infligée devrait finir par les faire changer d'opinion, comme l'Argentine auparavant.
Pour moi, j'ai rencontré le patron le patron d'Europe France Inventeurs ce matin et je les ai mis en contact avec AIS pour que l'on travaille sur des propositions concrètes.
Dans cette affaire nous ne sommes plus depuis longtemps dans le domaine de l’économie mais dans l’irrationnel c'est pourquoi la fin de l'euro et de l'ue peut arriver demain ou pendant que j’écris cette phrase ou dans 10 ans .
SupprimerLP
SupprimerL'AIS qui comprend des inventeurs remarquables et des juristes spécialisés a toutes les informations, textes, jurisprudences, concernant les propositions de lois systématiquement rejetées par le gouvernement, le PS et le MEDEF. L'obstruction est complète. La nomenklatura oligarchique fait consciencieusement son boulot de destruction.
Olaf
Je suis tombé hier soir sur le journal télévisé de M6 que j'ai regardé jusqu'au bout.
RépondreSupprimerPas un mot sur le MES, pas un !!!
Et en conclusion : "nous revenons sur la principale information de ce journal, le placement en garde à vue de DSK...."
Exaspérant ? désespérant ? Je ne sais plus quoi penser. J'admire la détermination de Nicolas DUPONT-AIGNAN, je voterai pour lui des deux mains.
Anthony
Demander à la Grèce un solde primaire positif est totalement ridicule: vous avez vu ceux de la France depuis quelques années ?
RépondreSupprimerBen les voilà : http://monnaie.wikispaces.com/file/view/chap_4_-_1_copie.png/301202482/800x487/chap_4_-_1_copie.png
Merci beaucoup Laurent pour cet article clair et synthétique, comme toujours. Je te signale juste une petite erreur: dans l'avant-dernier paragraphe, tu as oublié "compétitivité" (dernier mot de la première phrase).
RépondreSupprimerTythan
Mardi 21 février 2012 :
RépondreSupprimerAide record pour la Grèce, mais les inquiétudes persistent.
De nombreux économistes doutent que le nouveau plan de sauvetage soit le dernier chapitre de la crise grecque et de celle de la dette. Beaucoup parient à terme sur une banqueroute du pays, estimant que la zone euro cherche surtout à gagner du temps pour pouvoir renforcer d'ici là ses défenses.
Pour le responsable de l'institut Bruegel, Jean Pisani-Ferry, le plan ne fait sans doute "que repousser l'échéance funeste", car "la Grèce ne va pas mettre en oeuvre l'austérité promise et va se retrouver au bout du compte à devoir décider de sortir de l'euro ou à être poussée vers la sortie".
http://www.boursorama.com/actualites/aide-record-pour-la-grece-mais-les-inquietudes-persistent-4f014e8c4dffd920e84d53a48a63cb1d
La Grèce ouvre le chemin pour la France :
RépondreSupprimerhttp://www.lemonde.fr/idees/article/2012/02/21/triple-a-au-nord-triple-ruine-au-sud_1646344_3232.html
Intéressant article. Je crois toutefois que la plus grande illusion, tant en France qu'en Allemagne, ce serait de croire que ça ne concerne que les égoïstes/fainéants/fraudeurs/incapables (rayez la mention inutile, messieurs les libéraux) du Sud. Que ce soit l'Italie ou l'Espagne qui tombe, maintenant, ça entraînera tout le monde, sans exception aucune.
Supprimer@ BA
RépondreSupprimerHier, j'étais sur France 24 et nous étions tous d'accord (avec Dessertine et Stredyniak) pour dire que le plan ne marchera pas. Y-a-t-il un analyste sérieux pour dire qu'il va fonctionner ?
http://www.france24.com/fr/20120221-debat-Grece-Crise-economique
@ Tythan
Merci.
@ A-J H
Ils demandent 5% d'excédent primaire et disent que cela serait compatible avec une croissance de 3% par an.
@ Anthony
Très juste
@Laurent
SupprimerQui peut encore croire qu'une croissance de 3% est possible en Grèce avec une monnaie deux fois trop forte ???
Sterdyniak a été très bon dans ce débat, il me semble que c'est une des premières fois qu'il se résout à envisager une sortie de l'euro...
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