La campagne de Sarkozy descend toujours plus bas

Pour l’instant, cette campagne présidentielle est très décevante. Outre des temps de parole qui sont bien loin de l’équité théorique demandée par le CSA, l’équipe au pouvoir semble avoir fait des coups bas contre l’adversaire sa stratégie à défaut de pouvoir convaincre sur son bilan ou ses idées.

Les snipers de la Sarkozie

En regardant Nathalie Kociusko-Morizet sur Dimanche Plus, on comprend que le président de la République fait de l’attaque sa meilleure défense. Mais cette attaque est trop systématique et outrancière pour être crédible. François Hollande est simultanément critiqué pour être trop à gauche quand il propose d’instaurer une tranche à 75% d’impôt sur le revenu et d’être trop modéré quand la ministre souligne qu’il ne prévoirait pas de remettre en cause le bilan législatif de son adversaire.

Les attaques contre la violence verbale du PS font doucement rire tant les coups sont plus bas du côté de l’UMP. Attaqué sur ses vacances sur le yacht de Vincent Bolloré, Nicolas Sarkozy a répliqué en soulignant que Valérie Trierweller travaillait sur une chaine de son groupe, sans que l’on voit en quoi les deux pouvaient être comparables… Et le fait d’évoquer « l’épuration » que François Hollande préparerait dans la haute administration est doublement choquant.

Tout d’abord, l’emploi de ce terme est franchement choquant, car il recouvre des réalités bien précises (épuration des juifs par le régime nazi, épuration ethnique dans l’ancienne Yougoslavie ou en Afrique), sans commune mesure. Ensuite, cela est risible de la part d’un président qui a fait autant valser la haute administration, notamment préfectorale. Enfin, les dérapages incessants et calculés du ministre de l’intérieur sont d’une bassesse bien peu digne de la fonction.

Une campagne extrêmement décevante

Au final, le spectacle politique offert par les deux grands partis qui trustent 60% du temps de parole est bien décevant devant les enjeux actuels. Même si le PS n’échappe pas aux excès, l’UMP utilise la violence verbale, à la fois pour détruire son adversaire, mais aussi pour regagner les voix parties au FN. Mais ces excès sont bien trop caricaturaux pour parvenir à convaincre les Français, après cinq années d’agitation qui ont totalement démonétisé la parole présidentielle.

En fait, Nicolas Sarkozy semble vouloir appliquer la stratégie qui avait été appliquée contre Lionel Jospin en 2002. Et il est vrai que le durcissement de la campagne avait mis en difficulté un premier ministre qui avait fini par subir l’usure du pouvoir, d’autant plus qu’il avait renoncé à agir tant sur les délocalisations (Vilvoorde) que la sécurité (en étant « naïf »). Mais il oublie que là, c’est lui qui est au pouvoir, depuis longtemps. Et François Hollande ne fait pas peur, contrairement à lui.

Malheureusement, ce tir de barrage et cette prédominance dans les médias des deux grands partis ne permettent pas l’émergence de vrais sujets. Pourtant, ils ne manquent pas. Les deux derniers traités européens (le MES et le TSCG) auraient mérité un vrai débat lors de cette campagne. De même, nous devrions débattre de la décision de la BCE de prêter 1000 milliards d’euros aux banques privées alors que les Etats s’imposent des cures d’austérité parfois barbares.

Il faut espérer que la période d’égalité de temps de parole permettra de débattre sérieusement du fond. Malheureusement, il semblerait que certaines chaines et stations aient choisi de réduire la voilure de leurs émissions politiques plutôt que de donner la parole aux « petits » candidats…