dimanche 1 juillet 2012

La trahison européenne de François Hollande


Bien sûr, Libération a titré « Hollande 1, Merkel 0 », suite au sommet européen de cette semaine. Mais cette interprétation des choses révèle surtout le biais partisan du quotidien de gauche. Car, dans la réalité, c’est bien le président français qui a largement capitulé dans l’histoire.

Retour en arrière

On allait voir ce que l’on allait voir. En 2007, le candidat Sarkozy proposait de renégocier un traité européen limité aux questions institutionnelles prenant en compte le « non » de 2005, de réformer la BCE et de mettre en fin à l’euro cher. En quelques semaines, il avait abandonné toutes ses promesses, d’euro moins cher, de BCE au service de la croissance ou d’un nouveau traité européen prenant véritablement en compte le vote des Français deux ans auparavant. La trahison était totale.

Cette année, François Hollande tenait un discours assez proche, dénonçant l’Europe construite par le président sorti et la chancelière allemande. Il dénonçait cette Europe de l’austérité, qui ne se préoccupait jamais de la croissance. Il proposait alors un plan de croissance, une mutualisation des dettes européennes, une monétisation des dettes par la BCE, bref une réorientation radicale de la direction européenne dans cette crise de la zone euro dont nous ne sortons pas.

Malgré le soutien de quelques alternatifs, on pouvait douter de la réalité de ces promesses électorales. Frédéric Lordon avait aussi brillamment que cruellement fait un sort à ses promesses, évoquant les reniements du gouvernement socialiste en 1997. Et pouvait-on véritablement attendre une révolution européenne de la part du fils politique de Delors et Jospin ? Depuis 1983, le Parti Socialiste a toujours choisi l’idée européenne contre le peuple français.

Des vessies pour des lanternes

Il est proprement stupéfiant que la presse de gauche présente l’accord de cette semaine comme une victoire de François Hollande. En prenant du recul, on se rend compte qu’il a cédé sur les euros obligations, qu’Angela Merkel a heureusement envoyé au cimetière des idées délirantes des eurocrates, sur la monétisation des dettes publiques. Et il vient d’annoncer qu’il allait rapidement soumettre au parlement le fameux pacte budgétaire qu’il avait tant critiqué.

Et contre ces trois choses, qu’a-t-il obtenu. Un plan de croissance franchement dérisoire. Car derrière les 120 milliards annoncés, il y a en réalité 55 milliards de crédits non utilisés, 10 milliards de capital pour la BEI (qui se transformeront en 60 milliards de crédit) et 5 milliards de project bonds. Le tout devrait être dépensé sur une période trop longue pour avoir le moindre effet. En clair, François Hollande a accepté le pacte budgétaire pour seulement 15 milliards de nouveaux crédits !

Et ce ne sont pas les mesures annoncés vendredi au petit matin qui justifient davantage les renoncements de François Hollande. Un projet nébuleux d’aide directe du MES aux banques plutôt qu’en passant par les Etats, qui ne fait que renforcer davantage l’irresponsabilité du système bancaire et sa ligne de crédit infinie aux fonds publics. Et un projet de rachat des dettes souveraines par le même mécanisme européen dont les conditions ne sont pas encore bouclées.

Bref, Frédéric Lordon avait bien raison. Les socialistes n’ont j’amais su défendre les intérêts du peuple français quand le projet européen est en question. Il faut dire qu’il paraît que c’est en Corrèze que l’on dit que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent…

7 commentaires:

  1. Comme d'habitudes les socialistes sont bien plus européistes avant que d'être socialistes. Il préféreront tous les compromis possibles avant que la réalité ne les contraigne à reconnaître l'échec de cette europe.

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  2. @Laurent Pinsolle
    La vraie ligne de clivage sépare d'un coté les européistes convaincus de l'UMP-PS-EELV-Modem et d'un autre coté les eurosceptiques dont fait partie DLR. Que Hollande ne fasse pas mieux que Sarkozy était gravé dans le marbre avant même son élection, nous sommes tous d'accord.
    Faudra t-il attendre que les évènements nous donnent raison ? L'implosion de l'euro s'annonce petit à petit et les nuages noircissent l'horizon : après la Grèce, l'Irlande, le Portugal voici que l'Espagne appelle à l'aide depuis cette semaine. Les dernières décisions prises vendredi sont des caches-misère qui ne font que reculer l'échéance de quelques mois. Cette fois, je prends date sur le naufrage de l'euro et la dissolution de la BCE... suivi d'un maintien de l'UE en l'état avec des coopérations bipartites entre certains pays.
    Affirmer qu'une faillite de l'euro revient à une disparition de l'UE est le dernier (piètre) argument des européistes !

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  3. La trahison commence en 86 avec l'Acte unique ; tout le reste en découle. Il n'y a plus depuis longtemps d'autre logiciel politique au PS que le libéralisme (gauche américaine, de Lasch à Michéa) européiste et son cheval de Troie qu'est l'UE. Tout le reste est du théâtre : un jolie divertissement organisé par la sphère journalistico-médiatique !

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  4. Très honnêtement, êtes-vous si surpris que cela ?

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  5. En accord avec votre billet toujours très bien charpenté et équilibré, par contre encore classer aujourd'hui les socialistes dans la catégorie politique « de gauche » ou bien le quotidien « Le Monde » dans la catégorie « Presse de Gauche » ne me semble plus très pertinent. Le temps a passé depuis l'époque d'Hubert Beuve-Méry, notamment la période de Jean-Maris Colombani qui a « normalisé » l'exception que représentait auparavant ce quotidien qui n'était déjà que de centre gauche. Pour citer maintenant un quotidien de gauche, autant citer le journal « L'Humanité » sur le pacte budgétaire :

    http://www.humanite.fr/monde/hollande-enveloppe-le-traite-austeritaire-dans-un-paquet-cadeau-et-le-soumet-ratification-4998

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  6. @ Gilles

    Très juste. Je devrai mettre "de gauche" entre parenthèses quand je parle du PS et du Monde, ce que je fais parfois, mais que je devrais faire systématiquement.

    @ Global

    Très juste. Chevènement a bien souligné que l'Acte Unique a été le point de départ.

    @ Santufayan

    Complètement d'accord, à la limite que cela pourrait malheureusement durer quelques années et non seulement quelques mois.

    @ Cording

    Ils n'accepteront jamais l'échec de leur Europe

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  7. Lundi 2 juillet 2012 :

    La Cour des comptes lance une alerte : la dette publique devrait dépasser 90 % du PIB fin 2012 (pour mémoire, elle était de 64 % fin 2007). La dette publique imputable aux programmes d'aide aux pays en difficulté (prêts bilatéraux ou par l'intermédiaire du FESF) devrait s'élever à 50,2 milliards fin 2012, contre 14,5 milliards fin 2011 - soit une hausse de 1,8 point de PIB.

    http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/07/02/20002-20120702ARTFIG00615-la-dette-depassera-90-du-pib-fin-2012.php

    Cette dernière phrase est très importante : l'aide de la France aux pays de la zone euro en difficulté a coûté 14,5 milliards d'euros fin 2011. L'aide de la France aux pays de la zone euro en difficulté coûtera 50,2 milliards d'euros fin 2012.

    Et encore, il ne s'agissait que d'aider la Grèce, l'Irlande et le Portugal.

    Quand la France va devoir aider l'Espagne et l'Italie, combien de centaines de milliards d'euros cela nous coûtera-t-il ?

    C'est ça qui est génial avec la zone euro : les dominos tombent les uns après les autres.

    Les trois premiers dominos qui sont tombés vont faire tomber tous les autres.

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