jeudi 9 mai 2013

Quand le protectionnisme devient inévitable


C’est un livre important sorti pendant la campagne présidentielle. Franck Dedieu, de l’Expansion, Benjamin Masse-Stamberger, de l’Express et Adrien de Tricornot, du Monde, ont publié « Inévitable protectionnisme » l’an dernier. Le signe d’un basculement des médias sur la question du libre-échange ?



Le besoin de protectionnisme

Il y a quelque chose d’extraordinairement réjouissant à lire sous la plume de journalistes de l’Expansion, de l’Express et du Monde tous les constats poussés par Jacques Calvet, Emmanuel Todd, Philippe Séguin et Jean-Pierre Chevènement il y a vingt ans, rejoints aujourd’hui par Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Sapir ou Jean-Luc Gréau. Ils rappellent justement la croyance qui a animé nos dirigeants depuis tant d’années : « moins on entrave les mouvements des acteurs privés, mieux se portent le système économique et les différents agents qui le composent ».

Deux constatations sont venus remettre en cause la vision du monde des auteurs : l’explosion des inégalités salariales et les heurts de plus en plus violents du cycle économique, rappelant cette belle citation du Général de Gaulle : « le laisser-faire et le laisser-passer appliqué à l’économie (…) a souvent donné (…) au développement une puissante impulsion. Mais on ne saurait méconnaître qu’il en est résulté beaucoup de rudes secousses et une somme énorme d’injustices ».

Ils font une belle comparaison avec la guerre, citant Paul Valéry : « la guerre est faite par de braves gens qui s’entretuent sans se connaître au profit de gens qui se connaissent, mais ne s’entretuent pas ». Pour l’Europe et les Etats-Unis, les auteurs affirment que nous sommes dans un processus de « destruction destructice ». Reprenant une étude de la Banque Mondiale, ils affirment que la mondialisation en cours ne profite qu’à la Chine puisque s’il y a 517 millions de pauvres en moins, il y en a 627 millions de moins en Chine, ce qui signifie qu’il y en a 110 millions de plus ailleurs. Ils soulignent, en outre, que les modèles gagnants (Corée du Sud, Chine) sont protectionnistes.

Les auteurs affirment que « non pas que la libéralisation des échanges soit systématiquement à proscrire. Mais l’idée que celle-ci soit toujours, dans tous les lieux et tous les temps, la meilleure solution nous est de plus en plus apparue comme une folie ». En effet, ils constatent que tout cela produit du chômage et une paupérisation des classes moyennes et soulignent la logique absolutiste (pour ne pas dire autoritaire et anti-démocratique) des marchés. Ils se réclament d’une forme de libéralisme humaniste, équitable et tempéré et appelle par conséquent à un protectionnisme européen.

Pourquoi le libre-échange est une impasse

Les auteurs expliquent pourquoi l’Allemagne s’en sort mieux, rappelant aussi que « le pouvoir d’achat des salariés a constamment reculé (dans les années 2000) » : « l’usine du monde – la Chine – se construit avec des machines-outils allemandes. Et les nouveaux riches des pays émergents roulent dans des voitures allemandes ». Ils soulignent également que l’Allemagne a largement délocalisé la production de composants dans les pays d’Europe orientale, jusqu’à certains services (des grands hôtels de Berlin faisant laver et repasser leurs draps en Pologne pour baisser les coûts).

Ils démontent de manière très réussie la logique délétère de la mondialisation. Il développe longuement l’exemple de Siemens, qui signe en 2004 un accord avec les syndicats qui baisse de 30% le coût du travail pour son usine de téléphones mobiles (passage de 35 à 40 heures de travail pour le même salaire, avec suppression du 13ème mois) en menaçant de délocaliser en Hongrie. Puis en 2005, le groupe vend son activité à un groupe taïwanais, BenQ, qui met en cessation de paiement sa filiale allemande l’année suivante, laissant 3000 salariés sur le carreau.

Pour eux, le libre-échange durable ne peut se faire qu’avec des pays similaires, citant Gabriel Galand et Alain Grandjean. Ils notent le rôle déterminant de la libre-circulation des capitaux, qui instaure une pression à la baisse sur le coût du travail. La Chine a accéléré le mouvement avec son entrée dans l’OMC en 2001. Ils soulignent que les pays européens ont des « désavantages compétitifs » dans cette mondialisation du fait d’une monnaie chère, de salaires élevés, une protection sociale avancée financée par une fiscalité importante, ce qui pousse les multinationales à délocaliser leur base fiscale.

Les auteurs ont compris que la convergence des salaires n’est pas possible en constatant qu’Adidas se plaint de la hausse des salaires en Chine et délocalise au Laos. Plus globalement, ils constatent une folle course au moins-disant salarial, social, fiscal et environnemental. Ils dénoncent l’immense casse sociale qui se produira en attendant que les salaires convergent à l’échelle de la planète. Ils citent Maurice Allais, pour qui « un libre-échange total entre l’UE et la Chine conduirait rapidement soit au développement d’un chômage démesuré, soit à un abaissement général des niveaux de vie européens ».

Virulents, ils dénoncent « la mise à mort des classes moyennes », citant Paul Samuelson, pour qui « pouvoir acheter de l’épicerie 20% moins cher chez Walmart ne compense pas nécessairement la perte d’un salaire ». Pour eux, le tournant du siècle a fait passer les classes moyennes dans le camp des perdants de la mondialisation. Ils citent les études d’Elizabeth Warren qui a démontré que leur pouvoir d’achat a significativement baissé depuis les années 1970, malgré le développement du travail des femmes. Ils notent que Paul Krugman, dans « L’Amérique que nous voulons » rappelait que le revenu médian a reculé de 12% depuis 1973, alors que celui des 1% les plus riches a doublé et celui des 0,1% a quintuplé.

Ils posent la question qui fâche : « et si cette paupérisation était liée à la manière dont la mondialisation a été organisée ? » et soulignent la perte de 2 millions d’emplois industriels en France. Pire, ils rapportent que que les délocalisations touchent le domaine des services, des études estimant le potentiel des emplois délocalisables entre 10 à 25% du nombre d’emplois total ! Ils soulignent que « le modèle cantonnant l’Occident aux activités de conception échoue à intégrer les différentes couches sociales ». Ils notent que « la classe moyenne d’Etat, longtemps préservée de cette loi de la jungle, est désormais dans la ligne de mire, du fait de l’appauvrissement des Etats, privés de base productive ».

« Inévitable protectionnisme » fournit un argumentaire, qui, à défaut d’être nouveau, est particulièrement complet et bien illustré par des exemples très parlants. En outre, il n’est pas issu de cénacles suspects d’a priori souverainistes ou anti-libéraux primaires…

Source : « Inévitable protectionnisme », Franck Dedieu, B Masse-Stamberger, A de Tricornot, Gallimard

Suite demain

28 commentaires:

  1. C'est exactement mon intime conviction. Mettre Pascal Lamy comme ministre au gouvernement serait un acte de haute trahison puisque il a été un des acteurs de cette paupérisation !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Si Pascal Lamy devrait entrer au gouvernement ce serait un signe de l'alignement complet sur le libre échange qui devrait entrainer le départ immédiat d'Arnaud Montebourg du moins s'il lui reste un peu de cohérence politique.

      Supprimer
  2. Encore un article très pertinent auquel je souscris totalement.
    Je rajoute que la monnaie émise (actuellement par les banques pour la plupart privées alors qu'il faudrait qu'elle ne le fut que par l'Etat souverain) circule au sein d'un pays en multipliant les échanges ( voir l'apologue de "la dame de Condé") mais qu'un déficit de la balance des transferts extérieurs (tous déficits extérieurs confondus) corresponds à une "fuite" de monnaie.

    La formule "Solde financier des ménages + Solde financier des entreprises + Solde financier des Administrations = Solde extérieur " est bien connue.

    Or notre cumul des déficits des soldes extérieurs s'établit à 323 milliards fin 2011. Il faut donc au fil du temps le ramener à zéro et l'un des moyens consiste en ce protectionnisme induisant des droits de douanes à l'importation, jusqu'à ce que nos balances soient équilibrées par secteurs (et en particulier avec l'Allemagne et la Chine pour les secteurs manufacturés, et l'Espagne pour les fruits et légumes), surtout les secteurs "employeurs".

    C'était aussi la philosophie de la "Charte de la Havane" dont Pascal Lamy n'est surement pas un grand défenseur ;-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La souveraineté d'un pays tient au fait qu'elle peut battre monnaie et faire la guerre, me semble-t-il. La France n'est donc plus un pays souverain, mais une province de l'UE. Aurons-nous bientôt l'honneur de voir bientôt le F ajouté à l'acronyme PIIGS ?

      Supprimer
    2. A.-J. Holbecq :
      « en particulier avec l'Allemagne et la Chine pour les secteurs manufacturés, et l'Espagne pour les fruits et légumes»

      Autrement dit, vous préconisez un protectionnisme non pas européen, mais français?

      Torsade de Pointes

      Supprimer
    3. @Torsade de Pointes

      Protectionnisme national par secteurs, oui... (il y a certains secteurs agricoles qui sont écrasés par nos voisins la plupart du temps du fait d'une réglementation européenne débridée)
      En outre je préconise la recherche d'une balance commerciale équilibrée avec les pays avec lesquels nous commerçons.

      Supprimer
    4. @ Torsade de Pointes

      Voici un témoignage de l'éditeur Yves Michel (sur facebook)
      // En effet, nous avons absolument besoin d'un certain protectionnisme, comme toute cellule a une membrane ! En tant qu'éditeur, je faisais travailler beaucoup un imprimeur situé à 500 m de mes entrepôts à Gap. Du fait de la concurrence déloyale de l'Europe de l'Est du Sud Est asiatique, cette imprimerie a fait faillite... Je dois recourir à d'autres imprimeurs, dont un près de Marseille: il vient d'être mis en redressement judiciaire. Depuis quelques années, la liste des imprimeurs en faillite s'allonge sans cesse. Que ferons nous quand nous aurons perdu tout le savoir faire de l'imprimerie en France?
      Et savez-vous quelle entreprise a pris la place de cet imprimeur gapençais disparu ? Je vous le donne en mille: un Leclerc... drive ! Si, il paraît que c'est une tendance lourde en France: les consommateurs ne veulent plus descendre de leur voiture pour faire leurs courses !
      Nos gouvernants sont aveugles à la réalité, piégés qu'ils sont dans leur idéologie néolibérale: disons STOP !//

      Supprimer
  3. Mais est-il raisonnable d'espérer un protectionnisme "européen" ? Emmanuel Todd, qui a longtemps défendu cette idée, n'y croit plus aujourd'hui. Ce protectionnisme européen ne nous protégerait d'ailleurs pas de la concurrence des pays européens qui font du dumping fiscal et social.

    RépondreSupprimer
  4. Il ne faut pas oublier la composante culturelle, le "mondialisme marchand", devenu financier, est aussi une machine à tuer les cultures localisées, l'aristocratie sans noblesse qui monopolise par cooptation les postes de décision est inculte, bornée par l'usage servile de l'anglais, elle est assensuelle (et donc sans identité sexuelle), superficielle, consommatrice, perméable, poreuse, hors-sol.
    Leur haine des nations n'est pas seulement structurelle - les états sont des freins à la rapacité matérialiste et à l'amusement échangiste (économique ou autre) - mais aussi culturelle, l'art de vivre en harmonie avec un passé, la préférence primordiale de l'humain, l'expérience accumulée, le progrès digéré, représentent ce qu'ils haïssent ; parce qu'ils ne le maitrisent pas, parce qu'ils n'ont pas la densité humaine qui convient, parce que, au fond, ils resteront toujours des puceaux immatures.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Belle analyse !

      Supprimer
    2. "l'aristocratie sans noblesse qui monopolise par cooptation les postes de décision"

      C'est tout a fait ça et je pense que cela nous montre que nous ne sommes pas en democratie mais dans une sorte d'oligarchie qui obtient le consentement du peuple par la tromperie grace à des mass medias que les riches possedent. Une alliance entre la classe politique incestueuse et la caste de riches proprios du CAC 40 pour conserver ses privileges. Il faut en informer les français.

      Supprimer
  5. Nommer Lamy ministre ou Premier ministre ne changerait rien à l'affaire. Cela démontrerait juste, s'il en était besoin, que les socio-libéraux mettent en oeuvre une politique ultra-libérale et répondrait à la question de savoir si Hollande va infléchir sa politique destructrice et incohérente.

    Il me semble que nous n'avons pas besoin d'attendre un changement de gouvernement pour connaître la réponse : le changement - celui que nous attendons - ne viendra pas de socio-libéraux français aussi bornés que couards.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. QUOI ! Si je suis premier ministe vous allez voir si ça va pas changer ! roountoudiou !!!

      Supprimer
  6. Sony remercie le yen qui l'a aidé à revenir dans le vert après 4 ans rouges :

    http://www.leparisien.fr/flash-actualite-economie/sony-remercie-le-yen-qui-l-a-aide-a-revenir-dans-le-vert-apres-4-ans-rouges-09-05-2013-2790827.php

    Comme quoi les dévaluations de la monnaie ne servent à rien, au dire de certains « experts ».

    Saul

    RépondreSupprimer
  7. "En outre, il [l'appel au protectionnisme] n’est pas issu de cénacles suspects d’a priori souverainistes ou anti-libéraux primaires…"
    Belle formule d'auto-dérision.
    Reste maintenant à connaître le sort des trois journalistes dans leur rédaction, avant puis après la publication de leur ouvrage hétérodoxe. On peut toujours espérer que l'entrée en dissidence fait réfléchir les partisans de l'orthodoxie et les amène progressivement à changer de ton sinon d'avis par rapport aux arguments qui leur sont parfois opposés.
    Je crains surtout que pour eux, un membre de la caste qui sort de l'orthodoxie ne soit en perdition intellectuelle et morale. Il n'y a qu'un cercle de la raison.
    Cela n'enlèvera rien à sa qualité, mais je crains fort que cette étude ne convainque que ceux sont le sont déjà. Il n'y a pas de vrai dialogue possible avec les libre-échangistes et fédéralistes européens.
    Francis Commarrieu.

    RépondreSupprimer
  8. Antoine Dumini9 mai 2013 à 17:13

    Un excellent livre sur ce même thème à lire absolument: "Leur grande trouille: journal intime de mes pulsions protectionnistes" par le journaliste, et rédacteur en chef du Journal Fakir, François Ruffin.
    http://www.alternatives-economiques.fr/leur-grande-trouille--journal-intime-de-mes--pulsions-protectionnistes-_fr_art_1115_56711.html

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Fakir publie toujours des articles très instructifs. Ainsi, je me souviens d'une histoire récente, qui a trait au sujet évoqué aujourd'hui. LVMH, la société du milliardaire français, décidait de transférer la fabrication de costumes Kenzo en Pologne pour un prix de revient de 40 euros au lieu de 80 euros pour le même
      travail réalisé en France par un sous-traitant. Bilan de l'opération : 160 licenciements.
      A titre d'information, les costumes en question étaient vendus 990 euros pièce. Etonnant, non ?

      Supprimer
  9. Je ne vois pas en quoi le rétablissement d'un protectionnisme au niveau de l'UE dans les années qui viennent permettrait une restauration du secteur industriel français.

    On évoque tous les jours le modèle allemand basé sur la modération salariale globale (dans les services par ex.) doublée d'une sous-traitance délocalisée hors zone euro à l'Est, modèle qui conduit à "aspirer" toute l'industrie rivale des adhérents à la monnaie unique.
    Les industries française, belge, italienne... entre autres ont du souci à se faire tant que l'euro subsistera - on n'a pas fini de voir les usines fermer, avec un rythme qui s'accélère d'ailleurs depuis quelques mois.

    Mais à cela s'ajoutent les choix de règlement de la crise de l'Euro par la très libérale Commission Européenne (et ses acolytes "travaillant" de concert BCE/FMI/gouvernements nationaux, ne les oublions pas) qui imposent déjà une sévère cure d'austérité aux PIGS à coups de reculs sociaux, baisse des salaires et des retraites, coupes budgétaires, privatisations des secteurs de rente... avant de passer à d'autres (suivez mon regard...)

    De facto, tous les pays de la zone euro sont forcés à reprendre une course effrénée aux avantages comparatifs et à la compétitivité intrazone qui fait que, aujourd'hui, l'industrie espagnole reprend par exemple des parts de marché à l'export à ses voisins (la France en particulier, ce qui obligera celle-ci à s'aligner - cf les négo salariales chez Renault Espagne et France).

    Si rien ne change, d'ici quelques années, des pans entiers de l'industrie auront disparu et/ou on assistera à la généralisation des baisses de salaires et avantages sociaux dans tous les pays éclopés de l'UE, France comprise évidemment... Et il sera trop tard pour reconstruire quoi de ce soit.


    En cas de sortie de l'euro, les dévaluations compétitives dans l'union réduiront la domination allemande (c'est bien pour cela que l'Allemagne ne sortira pas de l'euro tant que ses concurrents européens ne seront pas totalement par terre), mais elles renforceront aussi la fragilité de la France face à des pays déjà meilleur marché (comme l'Espagne), ce qui l'affaiblira encore davantage.

    Ce qui fait que la sortie de l'euro ne peut se faire sans remise en cause de l'appartenance à l'UE dans sa forme actuel (liberté de circulation des capitaux, marchandises, main d’œuvre...).
    D'où la nécessité de disposer d'un possible recours à un protectionnisme NATIONAL (quel "gros mot"), au moins temporaire et sélectif des branches les plus déficitaires (l'automobile par ex.) - à l'image de la Corée du Sud par ex. - pour restaurer les marges des entreprises et l'emploi.

    Ce protectionnisme à dimension variable, raillé partout comme étant "égoïste", "court-termiste" aurait l'avantage de remettre le pays sur les rails, à conditions toutefois que les élites françaises en jouent (pour une fois) le jeu - ce qui n'est pas acquis...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. "De facto, tous les pays de la zone euro sont forcés à reprendre une course effrénée aux avantages comparatifs et à la compétitivité intrazone qui fait que, aujourd'hui, l'industrie espagnole reprend par exemple des parts de marché à l'export à ses voisins (la France en particulier, ce qui obligera celle-ci à s'aligner - cf les négo salariales chez Renault Espagne et France)." : c'est exactement ça. D'ailleurs, contrairement à ce que sous-entend ici l'article (malgré tout intéressant) de L. Pinsolle, l'Espagne est loin de pénaliser la France qu'en matière agricole (et on pourrait dire la même chose pour l'Italie).

      Supprimer
    2. Il faut bien comprendre que les mécanismes qui ont conduit à la mise en place de l'Union Européenne et de la Mondialisation sont les mêmes :

      Dans un premier temps, une ouverture des marchés dans le but proclamé (et d'un certain coté louable) d'aider les faibles à rejoindre le camp des forts (au prix d'une métamorphose des économies selon un processus schumpétérien de destruction créatrice). A noter à ce propos que les libéraux nous « vendent » leur salade au nom d'une soi-disant efficience économique (on ferme des usines pour ouvrir des centres de recherche) permettant un accroissement général des niveaux de vie (le « gagnant-gagnant »). Celui-ci est perceptible dans la phase de croissance qui suit la libéralisation (je peux acheter ma télé moins chère et je peux vendre mon fromage partout ailleurs), croissance en grande partie soutenue par un recours de plus en plus lourd à l'endettement généralisé des populations (en Occident mais aussi en Chine...).
      En réalité, cela abouti à une mise en concurrence de tous contre tous (mais pas des vendeurs de Champagne ou de voitures de sport italiennes), concurrence qui finit par affecter une grande partie de la population qui n'a pas eu le malheur de se spécialiser (cf. le recul du pouvoir d'achat « réel » des classes moyennes en Occident depuis 1970), mais aussi les États. Si cela marche dans un premier temps, on voit bien que le système dérape pour arriver à l'étape suivante : une crise structurelle.

      Cette crise structurelle, qu'elle soit provoquée (les subprimes aux US) ou inéluctable (la croissance dans un monde fini) est l'occasion de pousser plus avant les principes du libéralisme : les maillons les plus faibles du système-monde (les PIGS en Europe par ex. sont condamnés – sous peine de mise en faillite (ce qui n'existe pas en théorie lorsque les états ont leur souveraineté) – à revoir à la baisse, l'un après l'autre, le niveau de vie de leur population en échange d'une aide financière (au profit de leurs seuls banques) et de la privatisation des secteurs de rente (l'eau, l'énergie, demain l'air?) au profit de mains toujours plus puissantes et réduites en nombre (les 0,1 % les plus riches).

      La mise en coupe réglée d'un nombre croissant de pays (les pays du « Club Med », mais gare à celui qui n'obéit pas comme la Hongrie !) a pour but de mettre sous domination des états autrefois indépendants par l'UE (et derrière elle son maître, les US) en faisant fi des principes démocratiques.


      Le plus remarquable dans ce processus, c'est qu'il a fallu pour arriver à ce résultat une alliance contre nature entre des firmes multinationales anglo-saxonnes (originaires des berceaux de la démocratie moderne) et le Parti Communiste chinois. Cocasse quand on pense comment les US traitent les pays (inoffensifs pour eux et utilisés uniquement pour leur rôle d'épouvantail) qui veulent essayer de se maintenir en dehors de leur aire de domination (les pays de l' »Axe du Mal » comme l'Iran, Cuba ou le Vénézuela de feu Chavez...). Mais cela n'étonne plus personne !

      A croire que chacun est mûr pour se faire e....... A propos, demain est le jour de la commémoration de l'esclavage... Bienvenue dans ce meilleur des mondes !

      Supprimer
    3. Classes dominantes riches, peu nombreuses, organisées depuis toujours (Trilatérale, Bilderberg, Forum de Davos, FMI, OMC, UE ...) et sans rival depuis la chute du mur de Berlin versus plusieurs milliards de consommateurs/salariés/citoyens aussi manipulés que résignés. Cela conduit à une aspiration toujours plus forte des richesses par cette minorité, qui met tous les autres : femmes, hommes, enfants, en concurrence.
      Un monde merveilleux qui se crée sous nos yeux, une
      ruche dont nous serions devenus à notre insu les travailleurs, destinés à produire et à disparaître.

      Supprimer
  10. "Des pans entiers de l'industrie auront disparu". Je pense que la formule "auront disparu" est inadéquate et qu'elle doit être remplacée par "ont déjà disparu et continueront à disparaître". En effet, les dégâts sont déjà extrêmement importants après plusieurs décennies de casse industrielle. Je vous rappelle que la destruction de l'industrie a commencé dans les années 70 par la sidérurgie, qui n'existait quasiment plus sauf peut-être à Florange. Vous connaissez la suite.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'était sous-entendu. Merci pour cette précision.

      Supprimer
  11. On va déjà voir les réactions chinoises si l'UE met en place un protectionnisme de 47% sur le photovoltaïque originaire de ce pays (qui dans ce domaine à triché de manière encore plus flagrante et a été pris la main dans le pot de confiture) :

    http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/05/06/bruxelles-veut-taxer-de-30-a-60-le-photovoltaique-chinois_3171484_3234.html

    Vu les premières réactions chinoises, ça pourrait être le début d'une guerre commerciale et l’amorce de la mise en place de barrières sur un nombre plus important de produit.

    RépondreSupprimer
  12. La sortie de l'euro combinée avec une dévaluation du Nouveau franc comme la réévaluation du nouveau DM comme de toutes les monnaies issues de l'euro aura un effet protectionniste qui contribuera à la réindustrialisation de notre pays. La déclaration d'Oscar Lafontaine co-fondateur de la monnaie unique en tant que patron du SPD avec son rival et Chancelier Gerard Schröder, pour la fin de l'euro et le retour à un SME rénové est un signe de l'évolution des esprits en Allemagne avec la création du parti "Initiative pour l'Allemagne".

    RépondreSupprimer
  13. En ce qui me concerne , ce ne sont jamais les idées qui ont fait bouger les choses mais la faim , les pénuries alimentaires. Quand je vois que les chinois n'ont plus de lait digne de ce nom pour leurs bébés et qu'il y a des circuits parallèles en Europe pour vider nos stocks , lentement nous arrivons à la famine. Alors il ne sera plus le temps de savoir s'il faut être protectionniste ou pas ,chacun défendra sa nourriture avec des armes ! Vous croyez que j'exagère alors vous ne faites pas preuve de clairvoyance et de sagesse !

    RépondreSupprimer
  14. Salut Laurent, j'avais été plus sévère que toi sur certains points (http://www.lalettrevolee.net/article-inevitable-protectionnisme-franck-dedieu-benjamin-masse-stamberger-adrien-de-tricornot-101818711.html)

    ce que je leur reproche principalement :

    "Cette partie se termine par le cadrage d'un protectionnisme qui serait acceptable aujourd'hui.

    Là est le défaut énorme du livre. On lit en effet que le «bon» protectionnisme est européen, forcément européen, quasiment sous peine de dérive fasciste : "Quand on ethnicise la notion de citoyenneté dans un pays, lorsqu'on défend l'idée d'une sorte d'appartheid de la protection sociale [...] alors l'idée d'un protectionnisme national [...] vient naturellement à l'esprit des démagogues".

    Contrairement au reste de l'ouvrage, la volonté de précision et de didactisme s'efface, au profit de la pétition de principe la plus grossière. Après deux ou trois petit paragraphes destinés à invalider un protectionnisme national, l'auteur du chapitre s'attribue un brevet de vertu morale à peu de frais : "Avis aux vendeurs d'illusion et autres penseurs de comptoir : aujourd'hui, seul le cadre européen est adapté pour préserver les intérêts commerciaux de la France. Le véritable protectionnsime vertueux..."

    Il s'agit donc de remplacer la doxa à la Alain Minc par une autre, tout aussi méprisante et, disons-le, méprisable."

    RépondreSupprimer
  15. @ Exvil

    Si Pascal Lamy rentrait au gouvernement, ce serait un 1983 au carré, l’exact inverse du hollandisme révolutionnaire. Mais ce serait logique de la part d’un président héritier de Delors et Jospin.

    @ A-J H

    Bien d’accord. Bientôt sur le blog le résumé de ton dernier livre, très bon manuel à destination des profanes et que je recommande vivement à des proches !

    Bien d’accord sur le protectionnisme national.

    @ Anonymes

    Très juste sur la souveraineté monétaire. J’ai parlé du protectionnisme européen le lendemain.

    @ Saul

    Merci pour l’info

    @ Francis

    Je pense justement que non. Il est positif de voir des failles dans le camp d’en face.

    @ Antoine

    Merci pour l’information.

    @ Anonyme

    Merci pour l’information

    @ Anonyme 9 mai 18:38 et 21:43

    Je suis bien d’accord

    @ Anonyme 9 mai 19:28

    C’est vrai pour certains secteurs.

    @ Red2

    Merci pour l’information.

    @ Edgar

    Je pense qu’il vaut mieux saluer une nette inflexion dans la pensée de ces journalistes (qui n’est pas évidente pour eux : j’ai pu assister à un débat où ils étaient mis en procès de manière très agressive par certains). Je pense qu’il vaut mieux saluer ces évolutions plutôt que les agresser.

    RépondreSupprimer