A
la surprise de la plupart des analystes, la Fed a décidé de maintenir son
programme de rachat de bons du Trésor et de titres. Avec la baisse progressive
du taux de chômage et l’approche du cap des 7%, beaucoup pensaient, comme
The Economist, qu’elle
ralentirait son programme.
Ecarter
les nuages noirs
Aujourd’hui,
la croissance étasunienne semble robuste et tout semble réuni pour une
accélération en 2014, autour de 3% en rythme annuel. En effet, l’explosion
de la production d’hydrocarbures de schistes, la
très forte reprise de l’immobilier (qui stimule l’activité doublement, par
la construction, mais aussi l’effet richesse produit pour les ménages et les
institutions financières) et le desserrement de la contrainte budgétaire, avec
la réduction rapide des déficits, concourent tous pour faire de
l’année prochaine une belle année pour l’économie étasunienne et enfin
accélérer la réduction du chômage.
Du coup, Ben
Bernanke avait toutes les raisons pour commencer à réduire son programme de
rachat de 85 milliards de dollars par mois. The
Economist notait justement qu’une légère
réduction revenait à seulement diminuer le soutien à l’économie, et qu’on était
loin d’une politique restrictive. Mais deux facteurs clés ont
sans doute fait pencher la balance : les
républicains et les démocrates ne parviennent toujours pas à se mettre d’accord
pour augmenter le plafond de la dette (ce qui doit être fait mi-octobre),
ce qui créé une incertitude malvenue, qui peut peser sur la croissance et la
reprise
Ensuite, les taux longs, qui
étaient tombés à 1,6% au printemps, sont brutalement remontés en quelques mois,
à 3% en septembre. Cette remontée est dangereuse à plusieurs titres pour
l’économie. Tout d’abord, elle va peser sur le déficit puisque le coût de la
dette sera plus important pour l’Etat. Ensuite, elle renchérit le financement
de l’économie. En surprenant les marchés, la Fed a cassé le mouvement de hausse
puisque les taux à
dix ans sont retombés à 2,75%. Wall Street sait désormais que la priorité
de la banque centrale étasunienne est le soutien à l’activité, d’autant plus
que l’inflation est faible.
Des
conséquences lourdes
Cependant,
la décision de la Fed n’est pas sans poser plusieurs problèmes. En effet, si
la mondialisation empêche la hausse des prix des biens de consommation, du fait
de la concurrence des pays à bas coûts, l’inflation n’a pas disparu :
elle s’est déplacée sur les actifs, entre Wall Street qui
bat les records d’avant la crise et les prix de l’immobilier qui
progressent de plus de 10% aujourd’hui (certes, à un niveau qui semble encore
raisonnable). Mais toute cette monétisation pourrait bien nourrir une bulle
pour les prochaines années, dont l’éclatement pourrait être plus douloureux
qu’en 2008.
Si Ben
Bernanke a sans doute raison de vouloir éviter toute menace pour l’économie
réelle, en revanche, garder ouvert le robinet à liquidités sans avoir
véritablement remis la bride sur les établissements financiers est très
dangereux. Ce faisant, il sème les graines de la prochaine bulle et du prochain
krach.
Merci pour ces explications qui rendent compréhensibles les décisions prises et leurs possibles conséquences, meme pour des non spécialistes, bravo!
RépondreSupprimer".... toute cette monétisation pourrait bien nourrir une bulle pour les prochaines années..."
RépondreSupprimerC'est précisément parce que la bulle existe aujourd'hui qu'il lui (la FED) faut infléchir légèrement la direction de l'argent qui circule sous son égide ( REVERSE REPO).
Ceci dans le seul et unique but : sauver une fois de plus les fonds spéculatifs et autres fonds vautours !!! car il y a une forte menace d’explosion de la bulle actuelle : l’économie états-unienne sans la production purement financière serait à son niveau de l’an 2000.
Depuis le début de la crise ( 2008) la masse monétaire M2 états-unienne s’est accrue de 2.5 trilliards de usd (2008/2013) Ce surcroît d’argent créé par la FED est resté… dans les caisses de la FED…. sous la rubrique -réserves excédentaires- des Banques autorisées (primary dealer) au guichet de la FED.
Les encours bancaires de prêts à l’économie sur la même période 2008/2013 sont passés de 7 trilliards de usd à … 7 trilliards de usd .(zero prêt à l’économie américaine en provenance du surplus de liquidité de la FED)
(1 trilliard est l’équivalent de 1000 milliards et c’est la nouvelle unité de compte)
Les 2,5 trilliards de usd s’ils sont gelés pour l’économie réelle n’ont pas pour autant disparu du circuit financier. Estampillés collatéral AAA, ces 2500 milliards constituent la ressource essentielle de l’activité spéculative des agents financiers américains( shadow banking).
Hors cette activité spéculative est débridée comme jamais (Derivatives, Money market, Swaps de toute nature,Futures….) tant et si bien que le volume américain du shadow bankink tangente les 300 000 milliards de dollars en notionnel.
(Ceci en dit long sur les mécanismes inédits de création monétaires pirate car hors champ des banquiers centraux)
Et c’est bien cette bulle là souterraine et croissant dans un univers parallèle qui menace aujourd'hui d’exploser car les positions spéculatives (OTC) n’obéissent à aucune règle prudentielle.
Donc la FED ne peut se permettre ni des faux pas qui provoqueraient l’explosion de cette bulle là ni couper le robinet à liquidités brutalement.
L’argent mis sur la table depuis 2008 par la FED n’a eu pour seul effet mais important effet que d’adresser le bon signal monétaire permettant aux marchés financiers américains de poursuivre leurs activités spéculatives et il faut le dire très lucrative.
Les arguties de macroéconomique keynésienne qui alimentent les discours politiques des libéraux de tout acabit sur les objectifs supposés de la FED ne sont qu’un trompe l’œil.
La FED défend certes l’intérêt supérieur de la nation américaine mais aussi et surtout les intérêts bien compris des banques d’affaires et toute son action est orientée vers cet objectif de valeur.