La
loi de 1973 sur le statut de la banque de France est une des lois qui suscitent
le plus de réflexions et alimentent un nombre de fantasmes incroyable. Non
seulement les apprentis complotistes ont tort d’un point de vue factuel, mais
ils ne prennent pas en compte le contexte de sa rédaction.
Délires complotistes et réalités juridiques
Alors
que la polémique semblait close l’an dernier grâce
à l’énorme travail réalisé par Lior Chamla et Magali Pernin, elle a
paradoxalement repris ce printemps, un an
après la publication de leurs travaux, avec la sortie du livre
de Pierre-Yves Rougeyron et l’article
de Michel Santi dans la Tribune.
Ignorant étrangement ces travaux qui ont pourtant agité Internet, ils font de
la loi du 3 janvier 1973 le point de départ de l’indépendance de la banque de
France, s’appuyant sur l’article 25 selon lequel « le Trésor public ne peut être présentateur de ses propres effets à
l’escompte de la Banque de France ».
Cette
interprétation est contredite par le
papier de Lior et Magali, que
j’avais résumé l’an dernier. D’abord, il faut rappeler que le premier
objectif de cette loi était de clarifier l’ensemble des textes concernant la
Banque de France, « 192
articles disséminés dans 35 lois ou ordonnances, 16 conventions, 6 décrets-lois
et 40 décrets ». Le fameux article 25 existait depuis 1936 et n’était
donc pas neuf. Mieux, la loi permettait toujours à l’Etat de passer des
conventions (devant être approuvées par le Parlement) avec la Banque de France
pour obtenir des avances (20,5 milliards en septembre 1973).
Mieux,
le contrôle de l’Etat y était encore renforcé en donnant à son représentant un
droit de veto sur les décisions. Bref, la rupture est bien davantage venue du
traité de Maastricht, qui a imposé à l’ensemble de la zone euro la vision
allemande de la banque centrale, prix à payer pour que Bonn accepte à l’époque
de sacrifier le deutsche mark, comme
le rapportent Magali Pernin et Lior Chamla dans leur critique précise et
argumentée du livre de Pierre-Yves Rougeyron, qui tord le cou à de
nombreuses contre-vérités. Le point de départ, c’est l’article 104 du traité de
Maastricht (article 123 du TFUE).
Du contexte historique et politique