Après
avoir montré que le poids des dépenses publiques en France n’est pas si élevé
que les statistiques le laissent entendre, du fait de gros écarts de
périmètres entre pays, on peut pousser la démarche en montrant également que
notre pays consacre finalement assez peu de moyens à l’éducation nationale.
Notre
école publique abandonnée
Certes, cela
va à l’encontre de la propagande néolibérale fustigeant des professeurs qui
seraient trop nombreux et trop payés. Mais, de plus en plus de données et d’études
démontrent l’exact contraire, à savoir que la France manque de professeurs,
notamment dans le primaire (merci
la RGPP de Nicolas Sarkozy) et qu’ils sont relativement peu payés. Tout
d’abord, l’étude
PISA rapportait que les professeurs sont payés 7% de plus que le PIB par
habitant dans le premier cycle et 8% de plus dans le second, contre 24% et
29% en moyenne dans l’OCDE, soit 15 à 20% de moins !
Le
site La vie moderne y ajoute de
nombreuses statistiques, issues du rapport de la Cour des Comptes, dans une
analyse qui remet en cause les préjugés. D’abord, le site souligne qu’entre
2000 et 2009, le poids des dépenses d’éducation a légèrement baissé dans le
PIB, alors qu’il a augmenté de plus de 10% en moyenne dans l’OCDE. Et leur part
a aussi fondu de plus de 10% dans les dépenses publiques, contre une hausse
moyenne de 3%. Bien sûr, nous dépensons 5,9% du PIB pour l’éducation, contre
5,1% en Allemagne et 5,8% dans l’OCDE, mais cela oublie la démographie.
La
dégradation du statut des professeurs
Enfin, nos
enseignants sont 15 à 20% moins payés que dans la moyenne de l’OCDE, du fait
d’une perte de pouvoir d’achat de 7 à 8% depuis 2000 alors qu’il progresse en
moyenne dans les autres pays. Certains ont même choisi stratégiquement de
revaloriser les salaires des professeurs de 20% pour améliorer le niveau et
améliorer le statut de la fonction enseignante. Et quand on ajoute tous
les autres (nombreux) points évoqués par La
vie moderne, on comprend mieux pourquoi le
nombre de candidats au Capes s’effondre alors même que la crise devrait
pousser les étudiants vers la sécurité.
Bref, à
mille lieues de certains pourfendeurs irréfléchis de la dépense publique,
l’éducation est sans doute un domaine où notre pays ne met pas assez de moyens,
notamment dans le primaire. Malheureusement, les coups
de rabot de la RGPP de Nicolas Sarkozy ont encore aggravé la situation.
IL est clair que l' Education Nationale a raté le virage du numérique qui permet de faire plus avec le même nombre d'enseignants ; Nous sommes en 2013 et les professeurs sont obligés de corriger , cahier par cahier , souvent à la maison, des dizaines de cahiers, pas toujours de grande qualité ! On pourrait responsabiliser et revaloriser les enseignants en ne leur imposant pas un programme comme au pays-Bas où on impose par contre des objectifs de résultats à l'école et aux enseignants . Le Mammouth n'est pas prêt de maigrir mais prend le chemin de l'obésité !
RépondreSupprimerQuand les Français seront aussi civiques que les Hollandais, aussi disciplinés que les Allemands, aussi fair-play que les Anglais...on pourra copier coller ce qui se passe ailleurs.
SupprimerD'ici là, il faudra réfléchir un peu.
Par exemple, l'article vous montre, chiffre à l'appui, que l'éducation nationale n'a pas besoin de maigrir en comparaison de ses voisins. Ce qui ne correspond pas à votre dernière phrase.
Commentaire typique de quelqu'un qui a lu sans lire le billet... et refuse de comprendre car ennuyé que quelqu'un ou quelque chose lui démontre que ses préjugés sont un peu faux... pathétique!
SupprimerDommage de passer à côté du pédagogisme de gauche qui a fait des ravages...
RépondreSupprimerolaf
Certes, mais il est utile aussi de parler des moyens.
SupprimerAu cours du quinquennat de Sarkozy, c'était l'un des thèmes du rouleau compresseur médiatique. Et il ne faut pas être grand clerc pour s'imaginer que ce sera à nouveau le cas d'un nouveau quinquennat UMP.
(l'autre thème, c'était "l'autonomie des établissements", par lequel on faisait accroire aux proviseurs et principaux bedonnants et grisonnants qu'ils allaient se transformer en jeunes manageurs dynamiques, pour serrer les coûts justement...)
Des revenus 7 à 8 % au dessus du PIB/habitant ! Je me dis que si on sortait un PIB/"habitant vivant de son travail" :
RépondreSupprimer-qui comprendrait ceux qui travaillent et ceux qui bénéficient de prestations chômage, maladie, maternité et retraite (prestations liées à leur travail),
-excluant les enfants, les étudiants, les inactifs sans couverture, les retraités n'ayant pas ou très peu cotisé (fonds de solidarité),
alors on devrait dépasser le PIB/habitant de plus de 8 %, non ?
Franchement, je n'avais pas réalisé.
La reproduction des inégalités génération après génération semble donc induite par votre article. Pourriez-vous nous donner des éléments concernant les dépenses d'éducation à destination du secteur privé ? Suivons-nous la Corée du Sud ou Singapour (je ne sais plus) où les dépenses d'éducation non prises en charge par la collectivité sont de l'ordre de 3000 euros par enfant ?
RépondreSupprimerIl n'y a pas de reproduction des inégalités génération après génération.
SupprimerIl y a d'une part des changements de catégorie sociale (fils de profs en grandes écoles, fils d'immigrés devenant profs...) qui se font étape par étape ; et d'autre part des sociologues manipulateurs qui s'ingénient à masquer ces phénomènes, pour entretenir l'indignation des foules.
Les foules indignées étant celles qui achètent leurs ouvrages besogneux, et qui leur donnent une influence politique.
La reproduction des inégalités est une évidence facilement vérifiable par les statistiques d'origine ou de destinée sociales. Le problème est d'en cerner l'origine, pour réduire le poids de la naissance dans le parcours d'un individu. La faute (pas toujours innocente) des pédagogistes a été de croire que c'était le contenu de l'enseignement qui constituait le cœur de cette reproduction des inégalités, ce qui les a amenés à raboter les contenus, supprimer l'émulation, nier les inégalités de niveau et les différences de rythme et de talent.. Il en ressort une éducation vide et sans qualité, ennuyeuse et non discriminante. Résultat : on a affaibli le contrepoids que pouvait représenter l'excellence académique face aux logiques de la richesse et des relations. Les inégalités de destin se sont aggravées. Et les pédagogistes prétendent y porter remède en nivelant encore plus.
SupprimerCe serait a étudier en détail mais j'ai l'impression que les changements de catégories suivent une courbe en cloche comme souvent décrit dans les romans de Simenon
SupprimerBonjour à tous
RépondreSupprimerDe ce que je peux savoir les profs en Allemagne sont mieux payés qu'en France.
Or le métier est de plus en plus difficile , en raison des problèmes de discipline et d'incivilités dans beaucoup de classes.
Le problème de l'école est très compliqué, mais c'est l'une des priorités de notre pays.
Je pense que ce thème comme celui de la fiscalité doit revenir assez souvent sur ce blog. Ce n'est que mon avis, tous les thèmes méritent d'être traités mais certains sont plus importants que d'autres.
Pour le reste, bonnes fêtes de fin d'année à Laurent et tous ceux qui viennent sur ce blog.
L'argent est certes une compensation face à la difficulté, mais c'est aussi un baromètre de la considération dans laquelle on tient une profession. Or la massification et le pédagogisme taylorisent le métier d'enseignant, le réduisant à l'application de recettes "pédagogiques" pour inculquer un savoir lui-même réduit à un mode d'emploi... Il y a donc un lien étroit entre la paupérisation des enseignants, la baisse du niveau moyen et l'acharnement des bureaucrates du ministère à "réformer" sans cesse l'éducation. De plus, outre le découragement qu'elle peut produire chez certains profs, la baisse des rémunérations produit une crise de recrutement qui se généralise à toutes les disciplines, ce qui, à terme, interdira toutes sélection des futurs enseignants...
SupprimerJe ne suis pas un expert, mais je partage les observations de J. Halpern sur la reproduction des inégalités, comme sur l'acharnement de certains bureaucrates à empiler les réformes. Quand on est en dehors du système, on a réellement l'impression qu'il s'agit de querelles permanentes d'experts plus préoccupés par leurs dogmes que par l'éducation des jeunes.
SupprimerFaire de chaque Français un citoyen éduqué et formé est pourtant (pour moi) une des missions essentielles de l'Etat. C'est le modèle républicain. Et ce n'est pas la qualité et la volonté des professeurs, qui pourront pallier les erreurs de l'Education nationale, ni corriger les inégalités sociales.
Demos
Je crois que le critère le plus simple sur la considération dans laquelle nous tenons une profession est l'augmentation le sexe ratio favorable aux femmes .
SupprimerPlus il y a de femmes moins la profession est considérée et plus l'exercice de celle ci est difficile .
Avant les considérations matérielles et quantitatives, il y a la question de la nature du métier.
RépondreSupprimerC'est d'abord une profession intellectuelle, non d'exécutants subalternes ou de techniciens du pédagogisme chargés de mettre en œuvre les délires venus des Diafoirus incompétents et cooptés qui sévissent depuis 30 ans.
Ces pédagogos incultes me rétorqueront que je suis "réactionnaire"... Sauf que plus leurs idées sont appliquées, plus les règlements intérieurs des lycées deviennent durs et plus l'autoritarisme se développe : il y a une nette régression en le fonctionnement des lycées que j'ai connu comme élève et celui des lycées d'aujourd'hui, où j'enseigne les sciences naturelles.
Pour renforcer le savoir et le statut des professeurs, il faut notamment renforcer les liens avec la recherche et l'enseignement supérieur (comme le proposait Gilles de Gennes), permettre aux enseignants du secondaire de publier, de faire de la recherche, d'écrire des thèses (comme cela se faisait beaucoup plus avant). Cela suppose une liberté de s'organiser dans son travail et son emploi du temps et non la transformation en un métier de bureau pointant sur place toute la semaine, le rêve de la Dinde du Poitou.
Pour renforcer le savoir et le statut des élèves, il faut des savoirs solides, moins de "méthodologie" foireuse et moins de jargon techniciste, une responsabilisation des élèves et un statut qui les rapproche plus de l'adulte que de l'enfant (comme en Allemagne).
Cela dit, je partage cet excellent article pour mon syndicat (le SNALC) ainsi que pour la Société des Agrégés de l'Université.
Merci Laurent Pinsolle.
Avec votre idéologie, vous refusez la réalité de 80% des jeunes que vous souhaitez envoyer dans les usines.
SupprimerOn connaît l'idéologie élitiste du SNALC !
Mon pauvre anonyme, vous reviendrez me donner des leçons quand vous aurez interrogé lesdits jeunes avec qui je travaille...
SupprimerJ'ajoute que, parmi les politiques qui considèrent qu'il faut dépenser moins, nombreux sont ceux - parmi ceux que j'ai rencontrés en tout cas - qui font ce qu'il faut pour verser plus d'argent à l'enseignement privé. Etonnant, non ?*
RépondreSupprimerDemos
J'aimerais savoir quel est le taux de suicide et dépression grave chez les professeurs cela a l'air d’être un secret d’état ?
RépondreSupprimerJ'ai des enseignants dans ma famille je constate que ce n'est plus un métier valorisant donc même un salaire 20% supérieur c'est sans doute très insuffisant surtout dans les classes difficiles . Le problème n'est surement pas financier mais de respect et de morale républicaine si cela ne fait pas trop kéké .
http://www.causeur.fr/suicide-profs-education-nationale,23969
SupprimerIl s'agirait peut-être que le pouvoir arrête de faire de la com', des discours aussi creux que pompeux, se lance à corps perdu sur tous les sujets possibles et imaginables.
SupprimerQu'il définisse de vraies priorités et mette en place un vrai programme pour l'éducation.
Demos
Pour avoir enseigné à l'Éducation Nationale, je n'ai pas l'impression que les profs soient mal payés. Il faut aussi tenir tenir compte des 16 semaines de congés payés...
RépondreSupprimerCe qui rend le métier pénible ce sont les réunions qui ne servent à rien, les dossiers à remplir en multiples exemplaires, et les programmes bancales ou parfois infaisables dans le nombre d'heures imparties, les heures de cours supprimées pour des raisons diverses et les chefs d'établissements incompétents ou inertes. Il se pose aussi le problème du collège unique qui est un échec évident pour tous ceux qui y ont enseigné.
Avant de parler des salaires ou du nombre de poste, je pense qu'il faudrait d'abord revoir l'orientation et les programmes.
Antoine
Que les enseignants français soient mal payés est une réalité, les chiffres sont là pour le dire. Mais cela ne signifie pas que la part de la richesse nationale consacrée à l'éducation soit moins importante car la France se caractérise aussi par un nombre non négligeable de non enseignants dans l'éducation et par un plus grand nombre d'établissements scolaires.
RépondreSupprimerTrois phénomènes augmentent les coûts : 1 - la faible densité de la France (notamment par rapport à l'Allemagne) 2 - Un début d'étude plus précoce 3 - Un plus long étalement de la journée de classe.
Tous ces éléments qui favorisent la coïncidence entre le travail féminin et la maternité ont joué un rôle important dans la bonne tenue de la démographie française. Cela s'est fait aux dépens du niveau de vie des enseignants - sans doute faut-il le préciser.
Pour une fois je trouve l'article un peu léger. Il serait bon de comparer les temps de travail sur une carrière en même temps que la comparaison des salaires.
RépondreSupprimerEnsuite sortir une stat de 14,8 élèves / prof devrait amener une question : où sont-ils ? Demandez donc à vos enfants combien ils sont dans leur classe au collège.
Pour répondre à votre question, les Français et les Allemands font à peu près autant d'heures de cours par an, avec des nuances : Les professeurs français travaillent davantage que les Allemands en primaire, moins qu'eux en collège et autant en lycée. Les chiffres sont de 2012. En règle générale, les enseignants français font un peu plus d'heures dans l'année que la moyenne de l'OCDE.
Supprimer@ Exvil
RépondreSupprimerCe n’est pas une question d’obésité mais de suivre la révolution numérique ou non. A priori, il faut le faire mais je ne sais pas si nous sommes en retard ou pas. Après, il ne s’agit que d’un moyen d’éduquer. L’essentiel est ailleurs, dans les méthodes et les programmes. Avoir les moyens les plus modernes au service de mauvaises méthodes et de mauvais programmes n’apporte pas grand chose.
@ Olaf
Il y a un lien vers un papier où j’en parlais. Je ne peux pas reprendre à chaque papier tout ce que j’ai écrit auparavant. Là, je voulais enrichir la question des moyens, uniquement.
@ Rieux
Juste, mais cela n’enlève rien au fait que nos professeurs sont moins payés que les professeurs dans d’autres pays, ce qui semble paradoxal vu le parcours scolaire nécessaire
Sur la part du privé, je n’ai pas suffisamment creusé la question. Aux Etats-Unis, le poids est beaucoup plus lourd pour le supérieur (60% des dépenses contre moins de 20% en France), de mémoire. Vous avez des liens vers des études dans le papier sur les 56% de dépenses publiques.
La reproduction des inégalités est multi-factorielle :
- le développement du secteur privé joue sans doute un rôle
- mais on peut y ajouter la faillite de l’école à instruire tous les élèves (pb de méthodes, de programmes, de motivation, sélection, récompense et localisation des professeurs)…
@ J Halpern
Merci pour vos précisions. Bien d’accord sur la considération. Il est important que le métier de professeur soit bien considéré pour attirer de bons professeurs. Aujourd’hui, il l’est moins, d’autant plus qu’ils sont souvent mal traités.
@ André
C’est juste. C’est un sujet d’importance en effet. Merci. Bonnes fêtes à vous.
@ Démos
Je suis bien d’accord. Logique malheureusement, car ils veulent faire reculer l’Etat
@ Rodolphe
Merci pour toutes ces précisions.
@ Patrice
Il n’y a pas que le salaire, mais cela joue tout de même. Il y a beaucoup de raisons à cela : les affectations qui déracinent les professeurs, dans des classes difficiles, le tout sans toujours beaucoup d’aide. Voilà des pistes d’amélioration.
@ Antoine
Par rapport au niveau d’étude, si. Par rapport à nos voisins, si. Et par rapport à il y a quelques années, si également… Mais d’accord sur le reste également
@ Léonard
Je vais rechercher mais de manière contre-intuitive, j’ai vu qu’au contraire, il y a peu de non enseignants à l’éducation nationale par rapport à l’OCDE. Je vais rechercher le lien. Merci pour les réponses.
@ Anonyme
La comparaison vaut pour l’évolution par rapport au passé et par rapport aux autres pays.
La problématique générale de l'enseignement est à revoir dans notre pays, comme réviser à la baisse certaines dotations de l'Etat aux collectivités locales les plus dépensières, et cela à tous les degrés de la décentralisation. J'ai proposé un système de péréquation "économe" à celui de "péréquation "financière", dans ma réforme de la carte administrative, car il y a trop de gaspillage dans nos deniers publics. Cela dit, concernant, la différence entre le privé et le public, je ne vois aucune discrimination dans le fait d'attribuer des utiles subventions pour les établissements privé les plus méritants, alors que le budget de l'Education nationale n'a jamais été aussi gros, et laxiste. Dans mon esprit, quand je parle du privé c'est pour un motif d'efficacité et non pour une notion religieuse. La laïcité doit demeurer. Néanmoins, je prends l'exemple de ma nièce dont les parents ont des revenus très modestes, fut placée dans une institution privée pendant 3 ans et le coût fut relativement supportable et la qualité de l'enseignement indiscutable, c'est donc souvent une idée reçue que de prétendre l'inverse. Les dysfonctionnements dans notre système éducatif public, n'est pas du à une affaire de toujours plus de moyens, mais à l'inadéquation avec le monde réel. Notre système éducatif doit rester public, certes, mais il est bien pauvre en modèle exaltant. Il faudra bien un jour le réformer vraiment et arrêter la politique des pansements...à courte vue. Le grave recul, est d'avoir accepté la massification dans l'enseignement général au détriment de l'enseignement technologique et professionnel dont je suis issu. Nous avons depuis longtemps (Mai 68), dévalorisé la filière de l'apprentissage qui une voie d'excellence débouchant directement sur l'emploi, cette filière va du CAP au diplôme d'ingénieur !
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