samedi 15 février 2014

Avis de reprise confirmé pour 2014, aussi illusoire soit-elle


Hier, les résultats de la croissance pour le 4ème trimestre 2013 sont tombés : avec 0,3% pour le trimestre et 0,3% pour l’année 2013 (du fait d’une légère révision à la hausse du reste de l’année), il semble bien que nous nous dirigions vers une reprise de l’économie pour 2014, aussi illusoire soit-elle.


Une performance meilleure que prévue

Les résultats du 3ème trimestre avaient été très décevants. Car, outre un recul de 0,1% du PIB (finalement stable), il fallait prendre prendre en compte la nette progression des stocks (0,6 point !), sans laquelle notre pays aurait affiché un très mauvais résultat. Du coup, comme on pouvait le prévoir, les stocks ont contribué de manière négative à la croissance (-0,3 point), mais tous les autres moteurs de la croissance étaient allumés au 4ème trimestre. Comme toujours à cette période de l’année, le commerce extérieur a contribué de manière positive (0,2 point), du fait de la progression des exportations.

Malgré les plans d’austérité et les hausses d’impôt, la consommation des ménages n’a pas faibli puisqu’elle progresse de 0,5%. Les bonnes performances du marché automobile ces derniers mois se traduisent logiquement dans les chiffres de croissance. Mais le point sans doute le plus important, c’est la croissance des investissements (0,6%). En effet, c’est la première fois depuis 2011 qu’ils progressent, après sept longs trimestres de recul. C’est sans doute un des meilleurs signes que le climat des affaires s’améliore. Même le nombre d’emplois a légèrement progressé également au 4ème trimestre.

Une reprise illusoire confirmée

La contrainte environnementale pourrait-elle retarder, voire remettre à jamais, la fin du travail ? 2/2



Billet invité de Thibault Laurentjoye, suite de la première partie

La double contrainte environnementale

Le poids que l'activité humaine en général fait peser sur l'environnement présente deux composantes : d'une part, la pollution au sens large, et d'autre part, l'épuisement des ressources naturelles.

La forme la plus souvent évoquée de pollution est celle liée à la montée du dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère, fréquemment évoquée comme source du réchauffement climatique. La focalisation sur le CO2 présente cependant plusieurs inconvénients. Tout d'abord, elle élude la responsabilité croissante d'autres gaz à effet de serre dans le réchauffement climatique, comme le méthane ou les hydrofluorocarbones. Par ailleurs, elle donne l'impression que le principal inconvénient des gaz émanant des voitures ou des usines se jouerait à des dizaines de kilomètres au-dessus de nos têtes dans la sphère céleste, alors que dès leur émission ils créent des problèmes bien plus proches de nous : irritation et infection des muqueuses respiratoires, risque accrû de cancers, etc. Enfin, l'effet de mode autour du CO2 a permis la création d'un marché des droits à polluer, qui n'a pas tenu ses promesses et a ouvert un nouveau terrain de jeu à la spéculation financière.

vendredi 14 février 2014

OGM : le nouveau coup d’Etat de Bruxelles


19 états (dont la France et l’Italie) qui sont contre, 5 qui sont pour (dont l’Espagne et le Royaume Uni) et 4 qui s’abstiennent (dont l’Allemagne). Que croyez-vous qui se passe dans l’Union Européenne : la commercialisation du maïs OGM Pioneer est autorisée dans toute l’UE !


Un immense scandale démocratique

Voilà un exemple qu’il va falloir répéter en boucle pour bien montrer le caractère anti-démocratique de cette construction européenne, qui s’est transformée en une monstrueuse organisation où la Commission peut imposer une décision avec le soutien de 5 états contre 19 ! Et même si l’Allemagne avait rejoint le camp des pays opposés, à 20 contre 5, l’autorisation de commercialisation du maïs OGM Pioneer serait quand même passée ! Mais comment a-t-on pu concevoir des règles aussi absurdes et contraires à la plus élémentaire démocratie ? Il est totalement ubuesque qu’un technocrate apatride et irresponsable puisse imposer sa volonté avec le soutien d’une petite minorité contre une large majorité.

Il fallait 21 pays, dont l’Allemagne, ou 22 sans elle – sur 28 – pour que la Commission ne l’emporte pas ! Malheureusement, ce n’est pas la première fois que l’Union Européenne a recourt à ces règles byzantines pour défendre la commercialisation d’OGM contre la très large majorité des opinions publiques européennes et même des gouvernements (renforçant sans doute l’opposition de la population). Déjà, la commission de Bruxelles avait tenté d’interdire aux Etats membres d’en interdire la culture. Il avait fallu l’opposition résolue de 80% des Etats pour mettre en échec les desseins délirants de Bruxelles. Pire, Monsanto et compagnie poursuivent leur offensive auprès des instances judiciaires.

L’Union Européenne, poison de l’Europe

La contrainte environnementale pourrait-elle retarder, voire remettre à jamais, la fin du travail ? (1/2)

Billet invité de Thibault Laurentjoye




La théorie de la fin du travail s'oppose légitimement aux thèses productivistes, dont elle pointe et résout les incohérences, en préconisant notamment une diminution progressive du temps de travail. Cependant, la faiblesse de cette théorie vient justement des prémisses qu'elle partage avec la thèse productiviste, prémisses desquelles sont éludées les questions de la pollution et de la rareté des ressources naturelles. Si l'on peut raisonnablement plaider en faveur de la réduction du temps de travail – conjoncturellement pour lisser l'activité et structurellement pour favoriser – la prise en compte de la contrainte environnementale incite à penser qu'un phénomène tel que la fin du travail ne pourra pas se produire au cours du prochain siècle, au moins.

L'oubli des ressources naturelles et ses conséquences


jeudi 13 février 2014

L’euro : trop cher pour la France et menacé par les juges allemands de Karlsruhe




L’euro cher, une calamité pour l’industrie

Déjà, la politique de franc cher des socialistes au début des années 1990 avait envoyé un million de français au chômage. Il y a six ans, l’euro cher avait plongé les économies européennes dans une récession avant la crise des subprimes. Aujourd’hui, à 1,36 dollars l’euro, les industriels français tirent la langue, comme Thales qui a annoncé un plan de compétitivité pour y répondre : à 1,25 dollars, cela va, mais le cours actuel annule l’effort du CICE, comme le rappelle même Arnaud Montebourg. En fait, il y a 6 ans, Airbus avait été contraint d’acheter plus de pièces détachées aux Etats-Unis pour rester compétitif par rapport à Boeing, comme l’avait dénonce Louis Gallois, quand il était le patron de l’avionneur européen.

C’est ce qui a poussé le ministre du redressement productif à demander à ouvrir « une bataille politique pour faire baisser l’euro ». Si le constat n’est pas faux (notamment quand il dit que « nous sommes victimes d’une guerre des changes à laquelle nous sommes les seuls à ne pas réagir »), il est illusoire. La France n’a pas de moyen pour changer quoique ce soit à la gestion de la monnaie unique. Pire, il n’est pas le seul dirigeant à demander cela : Nicolas Sarkozy l’avait fait en vain lui-aussi… Mieux, une étude du CAE pour Matignon indique qu’une baisse de 10% de l’euro ferait progresser le PIB de 0,6% en un an et 1% en deux ans. Le moyen de clouer le bec à ceux qui caricaturent l’effet des dévaluations.

Quand la zone mark se rebelle

La reconnaissance partielle du vote blanc

Billet invité de Magali Pernin, du blog Contre la Cour

Il aura fallu plus d'un an et demi de navette parlementaire pour que la proposition du groupe UDI visant à la reconnaissance du vote blanc soit définitivement adoptée.
Après deux aller-retour parlementaires, les sénateurs ont en effet adopté aujourd'hui en seconde lecture la proposition de loi.

Bien que satisfaits par cette approbation, les auteurs de cette proposition regrettent deux points : un calendrier retardé, qui empêche la comptabilisation durant les élections municipales, et la non prise en compte des bulletins blancs dans les suffrages exprimés.

La loi permet tout de même de donner une véritable définition juridique distincte au vote blanc.

Un calendrier repoussé

mercredi 12 février 2014

La Suisse défie l’autocratie néolibérale européenne


Dimanche, les citoyens suisses ont décidé de reprendre le plein contrôle de leurs frontières et d’instaurer des limites au nombre d’immigrés qui rentrent chaque année dans le pays. Ce vote, et les réactions qu’il a déclenchées, sont extrêmement révélateurs sur l’état du débat public en Europe et en France.



La dictature du laisser-passer

Il est effarant que Le Monde évoque « la perception d’une immigration incontrôlée » quand  le solde net migratoire suisse, 80 000 personnes, est 5 à 10 fois plus important qu’en France, 1% de la population tous les ans ! L’UE a essayé de ne pas réagir de manière trop outrancière à la votation, constatant qu’elle « va à l’encontre du principe de libre-circulation des personnes entre l’UE et la Suisse » et dit examiner « les implications de cette initiative sur l’ensemble des relations (entre l’UE et la Suisse). Dans ce contexte la position du Conseil fédéral sera aussi prise en compte ». Mais la fin indique bien que l’UE essaie d’obtenir d’une main ce que les électeurs veulent lui reprendre de l’autre.

Cette Europe a la mauvaise habitude, totalement anti-démocratique, de vouloir remettre en question le vote des peuples, comme cela a été fait avec les votes de la France et des Pays-Bas en 2005, ou de l’Irlande en 2008. La commissaire de sinistre mémoire en France, Viviane Reding, a d’ailleurs déclaré que « les britanniques ne pouvaient pas prendre une décision informée sur la question de rester ou non dans l’UE ». En clair, si le peuple risque de mal voter, il ne faut pas le faire voter. Dans l’esprit de la Vice-Présidente de la Commission Européenne, il faudrait peut-être un permis de voter réservé aux citoyens informés… que pourraient sélectionner des agences européennes, tant qu’à faire.

Ce que cela dit sur l’UE et la France

Le traité transatlantique (TTIP), ou l'aboutissement du règne de l'oligarchie


Billet invité de l’Oeil de Brutus


Avant l’été, Jean-Michel Quatrepoint avait déjà tiré la sonnette d’alarme : L’accord commercial transatlantique sera une catastrophe pour la France. Mais il était encore quelque peu optimiste. Car sur le sujet du TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership), l’Union européenne montre clairement son vrai visage, tant sur le fond (les dogmes néolibéraux libre-échangistes, instruments au service des lobbys des multinationales), que sur la forme (la mise à l’écart de tous les acteurs représentant un tant soit peu le processus démocratique : élus, gouvernements nationaux, société civile). Sentant la pression montée sur le sujet, la Commission européenne vient de geler (jusqu’au mois de juin, c’est-à-dire après les élections européennes) les négociations relatives au processus de règlement des différends. Mais ce n’est là que l’arbre qui cache la forêt. Car tous les autres chapitres de discussion se poursuivent.

mardi 11 février 2014

Les Suisses reprennent le contrôle de leurs frontières





Finalement, 50,3% des Suisses ont soutenu l’initiative lancée par l’UDC visant à restreindre l’immigration dans leur pays. Une décision démocratique qu’il convient de respecter et qui révèle également la nature autoritaire de certaines institutions ou éditorialistes qui la critiquent.



Un simple contrôle des mouvements de personne

Tout d’abord, il faut relativiser le choix des Suisses. Premièrement, 50,3% de la population s’est prononcée en faveur de ce texte. Il s’agit donc d’un simple choix démocratique qui devrait être pris pour tel. Ensuite, on peut rappeler qu’il s’agit de revenir à la situation de 1999, avant les accords avec l’UE. Que l’on sache, la Suisse n’était pas une horrible dictature xénophobe à cette époque. Enfin, il faut lire le texte de la proposition de loi, qui n’a absolument rien de xénophobe. Il propose seulement de fixer des quotas pour le nombre d’immigrés acceptés chaque année (incluant le droit d’asile) et affirme la primauté du droit suisse sur tout traité international sur la question de la circulation des personnes.

Bref, même si la campagne a sans doute été l’occasion de dérapages, il s’agit simplement pour les Suisses de reprendre le contrôle de qui rentre chez eux, chose somme toute logique pour un petit pays riche de huit millions d’habitants au milieu d’un ensemble d’un demi-milliard de personnes. Il n’est pas choquant que la population ait voulu mettre un frein à une immigration nette de 80 000 personnes par an comme le rapporte le Monde, soit 5 à 10 fois plus qu’en France, proportionnellement. C’est un peu comme si les Suisses voulaient pouvoir à nouveau pleinement décider qui peut rentrer dans leur maison ou non, ce dont les textes européens les privent en partie, comme cela est le cas dans toute l’UE.

Une critique très révélatrice

Qu'est-ce que la compétitivité territoriale ? (3/3)


Billet invité de Gilles Ardinat, Professeur agrégé et docteur en géographie, auteur de « Comprendre la mondialisation en 10 leçons » (Ellipses, 2012)



Cet article a été publié dans le dernier numéro de la RPP (Revue politique et parlementaire, juillet-décembre 2013, n°1068-1069). Le blog gaulliste libre vous présente ici le troisième tiers de cet exposé, après avoir publié le premier et le second.

VII) Une injonction contradictoire ?

lundi 10 février 2014

Chevènement, historien de la première guerre mondiale


« 1914-2014, l’Europe sortie de l’histoire » est un livre majeur, absolument remarquable. Dans un premier temps, l’auteur démonte de manière implacable la fausse interprétation qui domine au sujet des causes de la première guerre mondiale, tout en expliquant les raisons de cette interprétation.


Aux sources de la première guerre mondiale

La cause communément admise est le nationalisme des nations européennes, mais, pour Chevènement « ses causes profondes sont plutôt à rechercher dans les contradictions de la première mondialisation ». Il cite Tony Judt pour qui le XXème siècle glisse « dans l’obscurité de la mémoire approximative (pour devenir) un palais de la mémoire morale, un musée des horreurs historiques pédagogiquement utiles (…) Le problème de cette représentation lapidaire du siècle dernier comme un temps d’horreurs uniques (…) est le message qu’elle charrie : que tout cela est désormais derrière nous, que le sens en est clair et que nous pourrons maintenant avancer, délestés des erreurs passées, dans une époque meilleure et différente ».

Pour l’auteur, il y a une question de l’hegemon de la mondialisation. L’Angleterre déclassa les Pays-Bas au XVIIème siècle, puis fut contestée par l’Espagne et la France. Début du 20ème siècle, l’Allemagne contestait cette position comme la Chine conteste aujourd’hui celle des Etats-Unis, dans un même contexte de « retour à une forme de capitalisme dur, essentiellement financier ». Il cite Suzanne Berger, qui parle de la période avant 1914 comme de « la première mondialisation », sous l’égide de la Grande-Bretagne, alors talonnée, voir dépassée par l’Allemagne, pendant que la France décroche. De 1871 à 1914, la France est restée stable, à 40 millions d’habitants, alors que l’Allemagne est passée de 40 à 65 millions. Mais notre pays garde une forte puissance financière. Le partage colonial était achevé.

L’Allemagne, responsable du déclenchement de la guerre

Le PS veut casser les retraites


Billet invité de l’Oeil de Brutus, dont vous pouvez retrouver le blog ici

Le blog Contre la Cour publiait il y a quelques jours un article extrêmement intéressant sur le vote des eurodéputés français au Parlement européen pendant la législature qui touche à sa fin. Pour ceux qui avaient encore des doutes, on ne peut qu’y constater la forte convergence de votes entre les eurodéputés issus du PS et de l’UMP, confirmant donc qu’il n’y a guère plus que l’épaisseur d’un papier à cigarette entre ces deux clans[i].


dimanche 9 février 2014

Le Pen / Moscovici : le débat de l’angoisse


Lundi, Marine Le Pen et Pierre Moscovici ont débattu sur France 2 dans l’émission d’Yves Calvi. Un débat que j’ai essayé de regarder avec le minimum de parti-pris (certains d’entre vous doivent sourire) pour essayer de restituer ce qu’un électeur normal pourrait en avoir tirer.



Moscovici, beau parleur eurolibéral gonflé

A moins d’être un militant socialiste absolument convaincu par la politique menée depuis près de deux ans (cela existe-t-il seulement ?), il était sans doute difficile de ne pas être choqué par le discours du ministre de l’économie. Certes, son discours eurolibéral, qui consiste à dire que, l’Allemagne réussissant avec la même monnaie que nous, la direction à suivre est la la baisse du coût du travail et rigueur budgétaire, offre un semblant de vraisemblance. C’est la ligne de la politique de l’offre désormais défendue par le président de la République. Mais un Jacques Sapir, qu’il a scandaleusement qualifié d’économiste d’extrême-droite (et qui lui a répliqué sur son blog), aurait mis en miette son argumentaire.

En fait, son discours semblait totalement déconnecté de la réalité. Voilà un ministre qui dit qu’il a réglé les problèmes de déficit de la France alors qu’en deux ans et 60 milliards d’efforts, les déficits n’ont baissé que de 16 milliards. Voilà un ministre qui annonce que la reprise est là, alors que le pays est revenu en récession en 2013 ! Voilà un ministre qui parle de solidarité avec la Grèce alors que le chômage atteint 27% et que le pays subit une crise monstrueuse. Voilà un ministre qui ose dire que ce n’est pas la rue qui gouverne juste après le retrait du projet de loi sur la famille suite aux manifestations. Difficile d’être rassuré quand il disait que la France est un grand pays, la 5ème économie du monde.

Une Marine Le Pen anxiogène

Qu'est ce que la compétitivité territoriale ? 2/3


Billet invité de Gilles Ardinat, Professeur agrégé et docteur en géographie, auteur de « Comprendre la mondialisation en 10 leçons » (Ellipses, 2012)



Cet article a été publié dans le dernier numéro de la RPP (Revue politique et parlementaire, juillet-décembre 2013, n°1068-1069). Le blog gaulliste libre vous présente ici le deuxième tiers de cet exposé, après avoir publié le premier. La troisième est dernière partie sera publiée prochainement.

IV) Les classements de la compétitivité.

samedi 8 février 2014

Le monde selon les néolibéraux


Il y a quelques jours, L’œil de Brutus présentait une vision radicale de nos sociétés dans le futur. Bien sûr, cela est sans doute exagéré. Mais quand on va à la source de la pensée néolibérale, on se dit que, dans la durée, la tendance est bien celle d’une société extrêmement inégale et aux relents autoritaires.

Toujours plus d’inégalités

La montée des inégalités est spectaculaire. Les revenus réels moyens ont progressé de 17% depuis 1973 aux Etats-Unis, ce qui est déjà faible. Mais en réalité, les revenus des 90% les moins riches ont baissé de 13% sur la même période. Cela a été compensé par la forte hausse des 10% les plus riches, et plus encore, du 1% le plus riche (+187% !!!). Les revenus des 90% les moins riches sont aujourd’hui au même niveau qu’en 1965 ! Et la situation s’aggrave puisque 95% de la hausse des revenus depuis 2009 est allée au 1% le plus riche. La moyenne (+6,1% en 3 ans) ne veut rien dire puisque pour 90% de la population, les revenus baissent de 1,6% quand ils montent de 31% pour le 1% le plus riche…

Ces chiffres poussent les néolibéraux à s’interroger. The Economist a consacré un long papier au dernier livre de Thomas Piketty, « Le capital au 21ème siècle ». Mais le titre « tous les hommes sont créés inégaux » indique que l’hebdomadaire en tire la conclusion que la montée des inégalités est consubstancielle au capitalisme (on suppose qu’il exclut en effet les Trente Glorieuses, qui avaient vu une grande compression des inégalités, du fait de taux d’imposition marginaux – entre 60 et 80% - qu’il considère sans doute comme excessifs). Dans « La moyenne est finie », Tyler Cowen soutient que seule une élite de 10 à 15% de la population profitera de la croissance à l’avenir, laissant 85% sur le côté.

Expliquer les inégalités et non les combattre

Interview d'Hervé Kempf : la nécessaire et inéluctable "grande convergence" 1/2


Billet invité de Pascale Fourier, repris de son nouveau blog Il faut le dire, que je vous recommande vivement. Vous trouverez la suite mardi prochain sur son blog.

Hervé Kempf, journaliste, collaborateur au site reporterre.net, auteur de Fin de l’occident, naissance du monde, Éditions du Seuil


Pascale Fourier  :  « La fin de l’occident »… Cela semblait peu optimiste. Moi qui me lamente déjà quand je pense que l’Europe est en train de perdre son rang, déclassée qu’elle est par la montée en puissance des pays émergents, le livre allait me déprimer de façon absolue. Dans son livre Hervé Kempf parle non seulement de la fin de la prééminence des pays les plus riches, mais de la nécessité d’un appauvrissement des occidentaux. Cet appauvrissement, il le souhaite. Sous ces dehors doux -parce qu’il semble doux- Hervé Kempf semblait donc parfaitement effrayant. Et c’est ce que je lui ai dit !

vendredi 7 février 2014

La Grande-Bretagne sous stéroïdes financiers


L’accélération de la croissance outre-Manche a fait de Londres le modèle qu’il faudrait suivre. Passons sur les leçons de l’histoire qui avaient déjà fait de ce pays un modèle avant qu’il ne s’effondre (comme d’autres), la simple lecture de The Economist montre que cela est totalement exagéré.



Une croissance totalement déséquilibrée

Le plus amusant est qu’il y a quelques jours, The Economist avait manipulé les chiffres pour montrer le plus grand dynamisme de la Grande-Bretagne par rapport à la France. Il faut dire que le pays affiche fièrement 1,9% de croissance sur l’année 2013, alors que la zone euro est en récession. Cependant, depuis un an, le même journal n’a cessé de nous alerter sur ses déséquilibres économiques : bulle immobilière, bulle de crédit, manque d’investissements, salaires en baisse, reprise par une consommation à crédit. Bref, même les britanniques reconnaissent que leur économie est déséquilibrée.


 En effet, il y a un grand paradoxe dans la reprise britannique. Elle repose sur la consommation des ménages alors même qu’ils perdent du pouvoir d’achat de manière continue depuis 2008 ! En effet, le moteur du crédit tourne de manière inquiétante : la croissance de la masse monétaire est revenue à 9% par an, le rythme d’avant la crise de 2008, qui a mené des banques à la faillite. Et cette masse de crédits finance notamment une nouvelle bulle immobilière, les prix étant repartis à la hausse, et faisant du pays un des pays les plus chers au monde. En effet, cette masse de crédit ne sert pas à financer des investissements, qui sont en recul de 20% par rapport à 2006, malgré la réussite de l’automobile.

Des modèles à la mode en économie

L'Europe est-elle plus "à gauche" que ses états membres ?


Billet invité de Coralie Delaume, publié sur l’Arène Nue, qu’elle vient de relancer, avant la parution de son livre


A l’approche des élections européennes de mai 2014 et de la « déferlante eurosceptique » qu’on nous promet, il semble que l’Europe et ses institutions, soient devenue diablement prudentes. Pour un peu, elle passerait pour moins libérale voire pour plus « à gauche » que les différents États membres.

Pas très difficile me direz-vous, puisque nombre desdits États sont gouvernés par des conservateurs. Certainement vous répondrais-je, un peu vexée. Mais ils ne le sont pas tous. En tout cas pas la France, qui est dirigée par des socialistes paraît-il, même s’il faut le dire vite.
Quelques éléments témoignent de la prudence de sioux dont font actuellement preuve nos technocrates préférés. C’est qu’ils ont l’instinct de survie, les bougres. Ils le savent pertinemment : plus d’Europe supranationale, plus de technocrates. Il faut leur faut donc éviter que le bazar ne s’autodétruise complètement. Or pour l’éviter, il faut agir. Il faut « faire des trucs  ». Illustration.
La politique monétaire et la gestion de la crise de l’euro1

jeudi 6 février 2014

Argentine, Vénézuela, Russie : entre modèle et contre-modèle


Parler de ces trois pays est compliqué. D’une part, certains les présentent comme des (quasi) dictatures gérées en dépit du bon sens et ne devant leur salut qu’à leurs ressources naturelles. D’autres les présentent comme des modèles et refusent toute critique. La vérité est sans doute entre les deux.



Ce qu’ils font de bien

Dans son édition du 1er février, The Economist consacre un dossier à charge contre Poutine et un article sur l’Argentine et le Vénézuela, « les économies les plus faibles (d’Amérique Latine) au point de rupture ». Mais l’hebdomadaire néolibéral y fait encore preuve d’une partialité assez effarante et bien peu factuelle. Attribuer la réussite de l’Argentine au soja est ridicule, comme le montre Olivier Berruyer dans un dossier absolument remarquable sur le pays : le PIB réel par habitant a augmenté de 50% en 11 ans et l’agriculture pèse seulement 10% du PIB. Si le soja apporte des devises, il n’explique qu’une petite part de la croissance, bien plus basée sur l’industrie du fait d’une vraie polique protectionniste.



C’est d’ailleurs une grande réussite de l’Argentine que d’avoir réussi à relancer son économie après avoir commis l’imprudence de s’arrimer au dollar, en protégeant son marché et ses industriels de l’anarchie commerciale, à la manière des pays asiatiques. Mieux, le pays a réussi à nettement réduire les inégalités, le chômage et la pauvreté. C’est d’ailleurs un aspect important de la réussite du Vénézuela d’Hugo Chavez, qu’il doit en partie à la manne pétrolière, mais en partie seulement car dans beaucoup de pays qui sont dans la même situation, cette manne tend souvent à ne profiter qu’à une toute petite minorité (les oligarques et les multinationales qui exploitent avantageusement les ressources).

En fait, et c’est aussi le point commun avec la Russie, ces pays défendent leur intérêt national en refusant la dictature intellectuelle néolibérale et sans se soucier de la bien-pensance occidentale qui ne semble pas toujours appliquée avec la même rigueur pour un pays comme l’Arabie Saoudite, où pourtant, il n’y a ni démocratie, ni droits des femmes, qui ne peuvent même pas conduire… On peut d’ailleurs noter qu’il n’y a pas que les oligarques qui tirent profit de la manne des matières premières en Russie, comme le montre le redressement spectaculaire de sa démographie depuis la fin des années 1990, avec 50% de naissances en plus et un taux de fécondité passé de 1,2 en 2000 à plus de 1,7 !

Ce qu’ils font de moins bien

Qu’est-ce que la compétitivité territoriale ? (1/3)


Billet invité de Gilles Ardinat, Professeur agrégé et docteur en géographie, auteur de « Comprendre la mondialisation en 10 leçons » (Ellipses, 2012)



Cet article a été publié dans le dernier numéro de la RPP (Revue politique et parlementaire, juillet-décembre 2013, n°1068-1069). Le blog gaulliste libre vous présente ici le premier tiers de cet exposé. La suite de l’article fera l’objet de deux publications ultérieures.

Introduction : un discours omniprésent.

mercredi 5 février 2014

Le retour du débat sur l’euro


Pourquoi et comment démonter l'euro : Entretien... par dlrtv


Alors que les angoisses des marchés se sont déplacées sur les pays émergents et que les pays « aidés » par l’Europe parviennent à nouveau à lever des capitaux, le débat sur la pertinence de la mise en place de la monnaie unique rebondit, avec notamment la publication d’un dossier par Marianne.

L’échec de la tour de Babel monétaire européenne

Il y a quatre ans, les partisans de la monnaie unique prédisaient les dix plaies d’Egypte au pays qui oserait sortir de l’euro : forte récession, envolée du chômage, appauvrissement général et même potentiellement défaut sur la dette. Le problème est qu’aujourd’hui, tout cela s’est passé, mais pour les pays en difficulté de la zone euro qui ont souhaité y rester. Alors que la Grèce a déjà « bénéficié » de deux réductions de sa dette, une troisième décote est d’ors et déjà envisagée aujourd’hui, démontrant l’absurdité crasse des plans mis en place à partir de 2010, dont même le FMI doutait alors de l’efficacité.

A cela s’ajoute le jugement de plus en plus unanimement critique des économistes sérieux. Des 9 prix Nobel d’économie euro-critiques, Joseph Stiglitz vient de décocher une nouvelle flèche : « En Europe, le problème fondamental, c’est que l’euro était une grosse erreur. Et les dirigeants de l’Europe doivent trouver que faire avec cette grosse erreur ». En outre, personne ne comprend bien le modèle économique de cette europe qui semble faire de la déflation salariale son modèle et s’étonne d’être retournée en récession alors qu’elle applique des recettes du passé, qui avaient déjà échoué sous Laval.

Démonter l’euro : une urgence !

Néolibéralisme et féodalisme


Billet invité de l'Oeil de Brutus, qui reprend des réflexions – et les élargit – issues d’un billet antérieur publié ici.



Imaginons un instant que nous soyons allés jusqu’à l’extrême logique libérale : tout est privatisé. Par exemple, la sécurité. C’est-à-dire que dans ce domaine (comme dans tous les autres), vous devez souscrire un contrat d’assurance auprès d’une entreprise privée qui en retour se charge d’assurer votre sécurité[i]. Bien évidemment, l’enfant de pauvres n’a pas ce luxe. Il peut donc allégrement se faire tabasser et racketter à la sortie de l’école. En fait, c’est encore plus simple que cela : il ne va pas à l’école puisque celle-ci étant également privatisée, ses parents n’ont pareillement pas les moyens de la lui payer[ii]. Ils n’ont d’ailleurs également pas les moyens de le nourrir : au chômage dans le monde ultralibéral, on ne touche pas d’aides sociales[iii].