Désir, Moscovici, MAM, Morano : l’Europe, poubelle politique des euro béats

Article publié en premier lieu sur le Figarovox

Hier, Harlem Désir a été nommé secrétaire d’Etat aux affaires européennes. Un énième cas où un poste européen se révèle être une confortable échappatoire pour un politique en disgrâce ou défait. Quelle curieuse conception de l’Europe de la part des partis qui ont pourtant construit l’UE !

Voie de garage politique

Vous êtes un ministre que l’on souhaite exfiltrer pour n’importe quelle raison, que ce soit des dérapages bling bling ou un trop effacement ? Vous êtes un dirigeant de parti dont personne ne reconnaît l’autorité et qui a fait la bourde de reprendre le président de la République sur l’affaire Léonarda ? Vous avez été battu aux dernières élections mais avez un certain poids politique ? Les postes de l’UE sont faits pour vous si vous êtes au PS ou à l’UMP. Après 18 mois guère convaincants à la tête du PS, Harlem Désir vient de trouver une belle échappatoire, comme secrétaire d’Etat aux affaires européennes. Pierre Moscovici, qui ne s’est pas imposé à l’économie, devrait devenir commissaire européen.

Pour être franc, Désir est loin d’être le seul responsable de la défaite des élections municipales. Hollande et son équipe étaient bien davantage visés par les Français. Le PS affirme que son passé de député européen le qualifie particulièrement pour le poste, mais il n’était pas très impliqué à ce poste, figurant parmi les moins présents. L’utilisation de l’UE comme voie de garage est aussi courante à l’UMP, pour trouver un autre mandat aux défaits de 2012, comme Nadine Morano ou Michèle Alliot Marie, après en avoir fait un moyen de sortir Rachida Dati du gouvernement en 2009… Bref, on ne compte plus les exemples d’hommes ou de femmes politiques en difficulté qui se sont tournés vers l’Europe.

Une cage bien dorée

Il faut dire en plus que les postes européens ne sont pas les moins intéressants financièrement. Quand les députés nationaux touchent chaque mois 7100 euros bruts et disposent de 6400 euros de frais de représentations, et 9500 euros pour leurs équipes, les députés européens touchent près de 8000 euros bruts, auxquels s’ajoutent 4300 euros d’indemnités forfaitaires, des indemnités pour frais de restauration, d’hébergement et de voyages et plus de 21 000 euros pour les collaborateurs. Il faut rappeler également que les commissaires européens sont bien mieux payés que les ministres français. A défaut d’être un jackpot médiatique, les postes européens sont souvent un jackpot financier.

Cela explique sans doute que cela attire des personnalités souvent connues, anciens ministres notamment pour l’UMP et le PS. Mais il est paradoxal pour ces deux partis d’utiliser l’Europe comme une voie de garage (aussi dorée soit elle) pour leurs figures en échec. Pourquoi donner toujours plus de pouvoirs aux instances européennes pour y envoyer après coup un personnel politique de second choix ? Cela ne va contribuer à améliorer l’image d’une Union Européenne déjà discréditée. Malgré tout, ce ne sera pas un bon sujet pour le FN, tant Marine Le Pen a abusé depuis 10 ans, se comportant comme une touriste du parlement et se distinguant par une présence et une activité extrêmement faibles.

L’attitude du PS et de l’UMP à l’égard de l’UE est totalement schizophrénique. Traité après traité, ils y transfèrent une part grandissante du pouvoir politique, tout en ne souhaitant pas l’exercer, à moins d’être en échec au plan national. Et si cela était très révélateur sur leurs motivations profondes ?