Le débat sur
la valeur de la monnaie unique européenne ne semble pas prêt de s’arrêter.
Déjà, avant
la crise de 2008, Louis Gallois, alors patron d’EADS, la maison mère d’Airbus,
s’en plaignait. Aujourd’hui, son
successeur le fait également, de même que le
patron du Medef.
Un niveau
toujours trop élevé
Début
2008, Louis Gallois avait justifié l’incorporation d’une part grandissante de
composants fabriqués en zone dollar pour assurer la compétitivité d’Airbus.
C’est ainsi que l’avionneur européen a choisi Spirit, aux Etats-Unis pour une
grande partie du fuselage de son dernier né, l’A350. C’est
aussi pour cette raison qu’Airbus a besoin de construire des usines
d’assemblage en dehors d’Europe, en Chine, mais aussi aux Etats-Unis, pour
ne pas perdre la main face à Boeing. Le problème est qu’à chaque fois, cela
signifie que les pays de la zone euro perdent des emplois, qui plus est,
hautement qualifiés, et souvent plutôt bien payés. Bref, l’euro cher a un lien
direct avec le niveau du chômage.
Fabrice
Brégier, patron d’Airbus, l’a affirmé dans un quotidien allemand, « estimant
que le niveau de la monnaie unique, préjudiciable à l’activité de l’avionneur,
n’est pas une fatalité ». Il soutient que « la
banque centrale européenne, la commission européenne et les gouvernements
doivent faire en sorte que nous arrivions à un niveau raisonnable pour
l’industrie. Ce n’est pas une fatalité que l’euro crève le plafond ».
Pour lui, la BCE « doit
faire ce que les Japonais ont fait l’an dernier et les Américains font tout le
temps : ils dévaluent sciemment leur monnaie. Je n’en peux plus du
discours en Europe comme quoi cela ne serait pas possible ». Il
souhaite un niveau de 1,2 à 1,25 dollars, contre
1,15 à 1,2 pour Pierre Gattaz, au lieu de 1,35 à 1,4 dollars récemment,
soit une dévaluation de 10 à 15%.
Mission
impossible pour monnaie unique
Mais ce
n’est pas tout. Statutairement, le mandat de la BCE est exclusivement limité à
la lutte contre l’inflation, un biais qui pousse à des politiques qui
augmentent la valeur de la monnaie. Et il est illusoire d’imaginer changer cela
car les Allemands le refuseraient. Nicolas Sarkozy n’a même pas essayer de le
faire en 2008 à Lisbonne, malgré sa campagne et le « non » de 2005,
qui le plaçaient pourtant dans la meilleure des positions pour le faire. Pire,
l’euro cher convient à certains pays, dont
l’économie est organisée pour avoir une monnaie chère, au premier rang desquels
l’Allemagne, qui peut importer des pièces détachées à bas coûts pour
améliorer sa compétitivité et dont la population peut voyager dans le monde à
bon prix. Plus globalement, différents
pays ont besoin de monnaies différentes…
La cherté de
l’euro est complètement structurelle, du fait des traités, mais
aussi de l’économie allemande, organisée pour une monnaie chère. Le
problème est que cela ne convient pas à beaucoup de pays et que cela provoque
une hémorragie industrielle continue et sans fin. Seule
la fin de la monnaie unique pourra enfin mettre fin à ce problème qui provoque
tant de chômage…
Ce débat sera sempiternel jusqu'à la fin de l'euro. Cela promet de durer tant que les Allemands y trouvent leur intérêt à la situation action actuelle. A moins qu'un évènement extérieur ne fasse exploser la zone euro comme un défaut argentin suite aux exigences exorbitantes des fonds vautours, ou comme l'effet d'onde de choc de la Banco Espirito Santo ou tout autre cas bancaire. Comme le dit Todd, le temps que nous soyons complétement désindustrialisés!
RépondreSupprimerJe crains que qu'un euro dévalué ne suffise pas pour la France. Il faut que DLR dénonce l'euro lui même, comme le fait Sapir.
RépondreSupprimerQuand on regarde de plus près notre balance commerciale on constate qu'on s'en sort bien avec les pays hors de la zone euro. Yann sur son blog avait montré un graphique édifiant à ce sujet où seule la Chine pose un souci mais bien moindre que les pays de la zone euro. Une zone ou se trouve la grande majorité de notre commerce.
l'euro trop cher, bien évidemment pour pourvoir être compétitif à l'exportation ? avec les charges et impots publics que nous supportons de 10% du PIB supérieur à nos voisins ???
RépondreSupprimerLa dette aussi monte
RépondreSupprimerhttp://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-22072014-AP/FR/2-22072014-AP-FR.PDF
Bien sur que la dette augmente, puis qu'on paie le fonctionnement avec des emprunts ...
RépondreSupprimerA lire absolument.
RépondreSupprimerOlivier Berruyer vient de faire paraître sur son site « lescrises.fr » un article exceptionnel sur la situation politique mondiale actuelle intitulé : « La guerre américaine contre la Russie est déjà en cours » (une évidence). Dans cet article, Paul Craig Roberts, économiste et journaliste américain, sous-secrétaire au Trésor dans l’administration Reagan, un des pères fondateurs des Reaganomics, fait des déclarations stupéfiantes qui entreront en résonance avec la réalité, en tout cas pour ceux qui ont pris la mesure de l’impérialisme sans foi, ni loi des Etats-Unis.
Demos
Le plus bas historique de l’Euro/dollar a été atteint le 26 octobre 2000. Ce jour-là 1 euro valait 0,8252 dollar. Le plus haut historique a été atteint le 15 juillet 2008. 1 euro valait alors 1,6038 dollar. En 2012 (avant le “Draghi put”) au moment où il y avait des inquiétudes sur la viabilité même de la zone euro, l’Euro/dollar a atteint un plus bas à 1,2042, encore très au-dessus du plus bas historique de l’an 2000. On est remonté en 2014 à en plus haut de 1,3994. Au moment où j’écris ces lignes on est à 1,3461. C’est à dire en hausse de 63,12 % par rapport au plus bas historique et en baisse de 19,14% par rapport au plus haut historique. J’ai trouvé une évolution des balances commerciales de l’Allemagne, depuis 1970, et de la France, depuis 1960, en pourcentage du PIB.
RépondreSupprimerhttp://perspective.usherbrooke.ca/bilan/tend/DEU/en/NE.RSB.GNFS.ZS.html
http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/tend/FRA/fr/NE.RSB.GNFS.ZS.html
Ainsi en l’an 2000 (année du plus bas de l’euro) l’Allemagne a un excédent commercial de 0,31% du PIB , la France de 1%. Celle-ci faisait mieux que l’Allemagne en matière d’excédent commercial en 2000! Aujourd’hui en gros ce sont 200 milliards d’euros d’excédents commerciaux annuels pour l’Allemagne contre un déficit de 60 milliards d’euros pour la France. Quand on regarde des données anciennes on voit que l’Allemagne faisait même des déficits commerciaux annuels. L’excédent commercial allemand n’explose véritablement à la hausse que dans les années 2000, au moment l’euro s’apprécie très fortement, pour atteindre un record de 7% du PIB en 2007. Ce qui s’est passé est assez facile à comprendre. En gros dans les années 2000 l’Allemagne faisait l’effort d’adapter sa stratégie économique à la monnaie forte et profitait de l’affaiblissement et de la stratégie des pays qui faisaient une politique de la demande en ayant fait la bêtise d’avoir la même monnaie forte que l’Allemagne dans une zone de concurrence "non faussée".
Pour en revenir à la période la plus récente, on voit que la conjoncture s’améliore dans de grandes zones monétaires. Taux de chômage au Japon de 3,5% en mai, au plus bas en près de 17 ans. Aux USA, en juin 2014, à 6,1%, soit une baisse de 1,4 point sur un an. Au Royaume-Uni, le chômage baisse encore fin mai, à 6,5%. Dans l’OCDE (34 pays dont 15 membres de la zone euro) le taux de chômage était stable à 7,4% en mai 2014. Il était, ce même mois, à 11,6% dans la zone euro, en repli par rapport en plus haut de l’an dernier à 12%.
Le fait que le taux de chômage est structurellement plus élevé dans la zone euro que dans d’autres zones monétaires est sans doute quelque chose de plus évident aujourd’hui qu’il y a une dizaine d’années. Par rapport à d’autres zones monétaires la zone euro prise globalement a de plus mauvais résultats en matière de taux de chômage et d’évolution du PIB, mais pas en matière d’excédents commerciaux. Grâce à l’Allemagne et aux politiques d’austérité dans les pays du sud, je crois savoir que l’excédent de balance courante de la zone euro atteint des sommets en ce moment, ce qui contribue à soutenir l’euro malgré la politique de la BCE de taux bas ou négatifs, le taux de chômage élevé, la perspective de déflation et la faible croissance. À court terme l’euro pourrait toutefois se déprécier légèrement en raison de l’amélioration de la conjoncture dans certains pays qui pourraient relever leur taux d’intérêt. Il en est question aux USA et au Royaume-Uni.
Sur le plus long terme le fait que notamment deux pays de la zone euro qui sont « Too big to fail », à savoir la France et l’Italie, sont de plus en plus à la dérive, finira par poser des problèmes malgré la volonté unanime des dirigeants politiques européens et de l’oligarchie européenne et mondiale de maintenir l’euro à tout prix pour préserver des intérêts financiers.
Saul
A propos du lien entre pouvoir et monnaie (Paul Craig Roberts sur le site lescrises.fr ) :
Supprimer« Du point de vue du pouvoir de Washington, la perte du statut de monnaie mondiale serait dévastatrice parce que c’est précisément là que se situe l’assise du pouvoir. C’est de là que Washington tient son hégémonie financière et c’est pour cela que Washington peut imposer des sanctions à des pays souverains. Par conséquent, si Washington voit ce statut lui échapper, si le dollar cesse d’être la monnaie de réserve mondiale, nous assisterons à un profond affaiblissement du pouvoir de Washington ».
Demos
Votre scénario de 2017 pour la crise de l'euro va se réaliser avec l'arrivée de Marine Le Pen au pouvoir en 2017 puisque même Jean Luc Mélenchon le pense!
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