Billet invité de
Nicolas Gonzales du 14 août, que
vous pouvez retrouver sur son Tumblr
* 0% de croissance au second trimestre en zone euro et en France, -0.2 en Allemagne et en Italie
* un plancher de 0.4% d’inflation en rythme annuel en zone euro, avec un -0.7% d’inflation au mois de juillet (!) peut être dû à des facteurs exceptionnels
* -0.3% de la production industrielle en juin là encore en zone euro…
Plus que tout, ce qui incite quand même au pessimisme, ce sont toujours les mêmes erreurs d’analyses des mêmes économistes qui devraient pourtant, vu le casier de leurs erreurs précédentes, être mis à la cave, entre le vieux buffet de la grand-mère décédée et le bac à recyclage. Ainsi aujourd’hui, Nicolas Bouzou, “economist, writter, TV commentator” comme il se décrit lui-même sur Twitter (je ne savais pas que TV commentator était un métier, c’est quoi la formation pour faire ça ??) qui touite : “Croissance nulle en raison d’une baisse de l’inv. et d’une stagnation des exports. Le pire des scénarios. Il faut un pacte de resp au carré.” A ce niveau là, ce n’est même plus une erreur d’analyse, c’est du déni. Mais que peut-on attendre d’autre d’un TV commentator ? Il y a certes bien un problème d’offre en France, que l’on constate simplement par la désindustrialisation du pays et le déficit structurel de sa balance commerciale, mais il y a aussi et surtout un problème de demande, écrasée par les plans de rigueur budgétaire et les baisses, relatives ou absolues, sur le coût du travail. Penser la solution en articulant les deux aspects (pour la France) doit manifestement être trop compliqué. Tirer les leçons des échecs répétés des plans de désinflation compétitive aussi…
Autre erreur fréquente : celle qui consiste à dire que l’euro n’est pas un facteur déflationniste, qu’il n’est pas trop cher, parce que la zone euro réalise environ 200 milliards d’excédents sur le reste du monde. C’est ce que fait Guillaume Duval (plutôt bon par ailleurs, m’est avis…) dans un article assez partagé d’Alternatives Economiques. C’est oublier un peu vite que ces 200 milliards masquent d’énormes divergences entre les différents pays de la zone euro, et que le fait d’avoir une monnaie unique ne protège pas les pays déficitaires des crises de balances commerciales d’autrefois, celles-ci passant simplement par le canal des taux d’intérêts, comme l’a bien montré la crise de l’euro entre 2010 et 2012. Et c’est précisément pour résorber ces déséquilibres internes, creusés par l’euro, que l’on a mis en place les plans d’austérité et de baisse du coût du travail ! L’euro est donc bien un facteur déflationniste massif. Aussi, je veux bien que certains nous affirment qu’il suffirait d’arrêter ces plans pour conjurer le risque déflationniste, mais alors c’est la crise de l’euro qui finirait assez rapidement par repartir de plus belle. Or on sait que la solidarité européenne n’est ni voulue ni possible (l’Allemagne ne peut pas payer 200 milliards par an, ce qu’il faudrait pourtant dans ce cas). Cela impliquerait donc la fin de l’euro monnaie unique, et tout l’éventail des possibles qui le remplacerait plus ou moins avantageusement (du retour sec aux monnaies nationales en passant par une monnaie commune). Mais de cela, pour tous les Guillaume Duval de la terre, il n’est toujours pas question…
Cette crise économique est une crise globale. C’est l’ensemble du capitalisme financier, avec sa cohérence institutionnelle (monnaie forte et taux d’intérêts bas, entreprise actionnariale, libéralisation des marchandises et des capitaux, salaire médian stagnant et inégalités grandissantes, Etat plus ou moins stratège) dans la diversité de ses acceptions nationales et continentales, qui est entré en crise. Ni les politiques conjoncturelles, ni les réformes structurelles, ne le sauvera. La crise s’estompera seulement lorsque nous aurons pensé de façon cohérente, et que cette réflexion sera suffisamment partagée pour faire aboutir à un compromis institutionnalisé, les nouvelles institutions cohérentes d’un nouveau type de capitalisme. Réforme de l’euro, de l’organisation des entreprises, du commerce mondial, de la finance, du rapport salarial, du fonctionnement de l’Etat : ce sont toutes ces questions qu’il faut penser en même temps, et en articulation avec les considérations socio-politiques (sans économicisme)… et si possible, en cohérence, dans le temps et dans les thèmes, avec la crise que nous traversons aujourd’hui.
Excellent article... Je ne vous contredirai que sur un point : le vieux buffet de la grand-mère.
RépondreSupprimerLes vieux buffets sont à garder précieusement en ces temps d'obsolescence programmée. En effet, la dernière saleté moderne achetée chez Conformisma est prévue tomber en ruine dès qu'on la déplace et ne supporte pas le moindre déménagement.
Petit jeu amusant et intéressant sur les déclarations d’Hollande dans les colonnes du Monde : compter rapidement les verbes d’action sur sa politique (15) et les expressions négatives sur le constat (7).
RépondreSupprimerLes verbes d’action, ce qu’il fait quoi, sont : améliorer (3f), moderniser (2f), présenter (2f), adapter (2f), accélérer, inciter, orienter, demander, développer, accroître, avancer, inverser, lancer, mobiliser, faire émerger. Un vrai James Bond notre cap’taine de pédalo !
Les expressions négatives (au moins 7), c’est pas lui, mais les autres, sont : insuffisant, austérité, défausser, aggraver, détériorer, grincheux.
Il y a de quoi être convaincu qu’on est face à un homme déterminé, non ? Si vous ne l’êtes pas, vous aurez au moins une réserve de mots pour jouer au scrabble dans votre maison de retraite, hi, hi …
Demos
"C’est l’ensemble du capitalisme financier, qui est entré en crise .... Ni les politiques conjoncturelles, ni les réformes structurelles, ne le sauvera". Changeons de perspective et ne regardons pas dans le rétroviseur pour juger du présent. Qui vous dit que cette situation de "crise" ne durera pas ? Elle sert les intérêts de l'oligarchie, elle est un excellent levier pour redistribuer les cartes en faisant exploser le système actuel. La question n'est pas pour moi de savoir qui sauvera le capitalisme, mais plutôt de se demander ce qui le remplacera et dans quel état nous serons, nous qui ne faisons pas partie des "élites" à ce moment-là.
RépondreSupprimerDemos
Pour sortir de la pensée hégémonique je vous propose de lire:
RépondreSupprimerhttp://www.lacrisedesannees2010.com/2014/08/fin-de-l-euro-et-fin-de-la-privatisation-des-monnaies.html