Alors que
l’embargo russe menace notre filière agricole, un
papier du Monde prétend démontrer que
l’Espagne n’est pas vraiment responsable de la baisse du prix des pêches pour
nos producteurs. Mais bizarrement, à la lecture des pièces du dossier, on
en vient à la conclusion inverse.
Prix de
gros et prix de vente
C’est ici
que réside la contradiction de l’article qui passe de l’un à l’autre sans
comprendre qu’il y a deux problèmes distincts. Le Monde conclut : « accuser
l'Espagne de pratiquer du dumping n'est donc pas suffisant pour expliquer une
baisse des prix... qui ne se constate pas vraiment sur plusieurs années, ni sur
les marchés de gros, ni dans le panier du consommateur ». Car ce
n’est pas parce que le prix sur les étals a pris 56% en 7 ans qu’il n’y a pas
une baisse du prix de gros, que reconnaît le papier qui parle d’une baisse de
6%. Nous sommes dans la situation paradoxale d’une baisse du prix de gros et
d’une hausse de prix de vente, que
l’on retrouve pour beaucoup de produits agricoles, où ce sont les grossistes et
les distributeurs qui augmentent leurs marges, quand les agriculteurs sont pris
à la gorge.
En outre, de
manière assez extraordinaire, l’article
donne des éléments qui illustrent justement le dumping de l’agriculture
espagnole, citant le président de la FNPF, Luc Barbier, pour qui « la
cotation sur le marché de gros espagnol est le double du prix de vente en
France : en Espagne, on constate un prix moyen à 1,10 euro le kilo et ici
il arrive à 57 centimes », pénalisant les pêches françaises,
vendues à plus d’un euro le kilo. Résultat, la production a baissé de 50% en 10
ans alors que l’Espagne, qui gagne des parts de marché, produit de plus en
plus, au point que nous avons importé plus de 148 milles tonnes de pêches en
2013, principalement d’Espagne, qui s’appuie sur son prix plus compétitif.
Une
compétition déloyale
Le plus
incroyable est que nous connaissons les mécanismes qui permettent de protéger
l’agirculteur. La
PAC d’il y a plus de 20 ans avait des mécanismes qui permettaient d’assurer des
prix planchers permettant aux agriculteurs de vivre de leur travail au lieu de
cette terrible incertitude où le prix de vente peut tomber sous le prix de
revient, du fait d’aléa climatique, ou, le plus souvent, de la concurrence d’un
autre pays qui souhaite pénétrer le marché français. Qui plus est, cette loi de
la jungle limite notre capacité à maîtriser les normes sanitaires ou
qualitatives : le Bio français étant plus exigeant que le Bio européen, oh
suprise. Pire, le
traité transatlantique pourrait ouvrir notre marché aux produits étasuniens.
Bref, perte
de contrôle de ce que nous mangeons, soumission
de nos agriculteurs à un marché libre mais surtout sauvage. La loi du
laisser-faire et du laisser-passer aboutit à des résultats désastreux comme
nous le voyons ici. Et en plus, les prix de vente ne baissent même pas…
@ Laurent Pinsolle
RépondreSupprimerIl y a un truc que je ne comprend pas en France, bcp d'assocs pour les sans papiers, pour gaza pour ceci, pour cela, mais pas d'assocs qui viennent en aide aux agriculteurs ? Vous en conaissez une sérieuse ? Car je reflechi sérieusement à faire un don pour ces gens qui d'après que je lis en ont grandement besoin.
Il n'y a pas mieux pour défendre les producteurs et paysans que la confédération paysanne!
SupprimerJosé Bové dans son livre "Hold-up à Bruxelles" évoque la grande influence des lobbies de tout poil sur les institutions européennes.
RépondreSupprimerIl alimente son propos en partant de son travail d'eurodéputé siégeant notamment aux commissions "Agriculture" et "Commerce international".
Il consacre un chapitre au traité de libre-échange agricole entre l'UE et le Maroc. Il était rapporteur de la commission et s'est fait un devoir de dénoncer ce projet ficelé d'avance.
Il met en lumière le fait que le développement de l'agriculture marocaine se fait uniquement sur un schéma exportateur, via la constitution de très grandes propriétés au main essentiellement de 3 sociétés, dont une française et une aux mains du roi du Maroc lui-même. Les petits paysans marocains se font expropriés sous couvert de développement durable. La réserve en eau dans un pays sous-doté est dangereusement sur-exploitée.
J.Bové explique qu'en tant que rapporteur, le fait qu'il laissait percevoir un avis négatif sur ce traité, l'a soumis à de multiples pressions et même tentative de corruption.
Il dénonce le double-jeu de Xavier Beulin, le président de la FNSEA qui l'aurait appelé pour le convaincre qu'il s'agissait d'un bon traité, ce alors même que la filière Fruits et Légumes (FLF) de la FNSEA s'est opposé au projet.
Il explique que Beulin, via sa société Profiteol, préparait un accord de développement des oléagineux au Maroc...cherchez l'erreur.
Le problème premier des agriculteurs français, c'est de faire confiance à la FNSEA pour les défendre. Alors que la direction de celle-ci est trustée par des hommes d'affaires de connivence avec l'industrie agro-alimentaire, et non des agriculteurs.
La FNSEA est sous contrôle d'hypocrites qui jouent à fond la carte du libre-échange européen, tout en jouant la démagogie anti-environnemental devant les préfectures et des petites actions en supermarché juste pour illustrer le journal du syndicat (financé par les Chambres d'Agriculture sur deniers publics!)
Le retour à l'ancienne PAC n'est pas la solution.
RépondreSupprimerElle garantissait des prix plancher aussi bien sur le marché intérieur que sur le marché mondial, ce qui impliquait des subventions à l'exportation dévastatrices pour les agriculteurs non subventionnés des pays pauvres.
D'autre part le prix plancher étaient garanti à tous les agriculteurs, même ceux qui n'en avaient pas besoin, raison pour laquelle cette ancienne PAC n'a pas pu empêcher les grosses exploitations d'évincer les petites. Le prix plancher qui sauve de la faillite la petite exploitation dont le coût de production est supérieur au cours mondial garanti un superprofit indu à la grosse exploitation dont le coût de production serait sinon compétitif sans plus. Inévitablement le petit finit par vendre au gros.
On a même vu surgir ex-nihilo des productions concurrentes qui n'auraient jamais dû être rentables, et ne le sont devenues que grâce aux prix garantis par la PAC, comme la tomate de serre hollandaise chauffée.
L'agriculture était devenue une charge pour le pays et certaines années il aurait mieux valu payer les agriculteurs français à ne rien faire, cela aurait permis d'économiser des milliards, car le montant des aides publiques à l'agriculture dépassait le revenu agricole. On avait d'ailleurs commencé à rémunérer la jachère pour juguler la surproduction.
Ce système ruineux était indéfendable. Revenir à l'ancienne PAC est la dernière chose à faire si on veut comme gilco86 réduire les dépenses publiques. Ce serait aussi ressusciter la guerre des subventions agricoles entre l'UE et les USA, qui avait coûté si cher aux contribuables des deux côtés de l'Atlantique, et acculé à la faillite tant de paysans du tiers-monde.
Ivan
Les subventions à l'exportation doivent être abolies, elles sont une honte !
RépondreSupprimerhttp://webdoc.rfi.fr/dark_side_tomato/
Ivan
@ Gilco56
RépondreSupprimerSi vous ramenez tout aux dépenses publiques, je vais supprimer vos commentaires comme ici car je ne vais pas démarrer un débat sur le sujet tous les jours.
@ Jauresist
Merci pour ces infos
@ Ivan
D’accord sur la garantie des prix à l’exportation. Et il faut sans doute des mécanismes dégressifs également. En revanche, pas du tout d’accord pour dire que c’est une charge. C’est un élément essentiel de notre pays, qui mérite d’être défendu. Le terme « ruineux » n’a pas de sens (et n’est pas justifié…). Les Etats-Unis y mettent beaucoup d’argent également.