mardi 14 octobre 2014

Standard & Poors alimente les thèses austéritaires





L’ivrogne qui prétend assurer l’ordre

Il est tout de même effarant que Standard & Poors se pose comme le censeur des gouvernements de la planète. En effet, il ne faut pas oublier que les agences de notation n’avaient absolument pas vu venir la crise des subprimes, qu’elles avaient même alimentée en accordant des AAA à des titres qui se sont révélés plus tard comme hautement toxiques. Six ans après, presque personne ne rappelle la faillite complète des agences de notation, qui portent une part de responsabilité dans la plus grosse crise financière des quatre vingt dernières années. Du coup, il est tout de même culotté que les chauffards de la finance donnent des leçons aux Etats qui ont sauvé le château de cartes qu’ils avaient construit.

Après, il faut néanmoins reconnaître que cette annonce n’est pas illogique. Le gouvernement annonçait il y a 18 mois qu’il atteindrait un déficit budgétaire de 3% du PIB en 2015 après avoir fait 4,3% en 2013. Cet été, le ministre du budget a annoncé qu’en 2014, le déficit atteindra finalement 4,4% et qu’il vise 4,3% l’an prochain repoussant à nouveau de deux ans l’objectif d’un déficit à 3% du PIB. Même si ce dérapage n’est pas si énorme que cela quand on considère ce qui se passe dans le monde, et le fait que presque jamais l’Etat n’a emprunté si peu cher (1,25% à 10 ans), ce qui contredit quelque peu le jugement de l’agence de notation, on peut néanmoins comprendre le jugement de Standard & Poors.

Une perte complète des repères

Au final, même s’il faut relativiser cette annonce, les précédentes n’ayant strictement aucun impact pour la France (ou les Etats-Unis), il reste incroyable que l’on accorde la moindre importance à ces agences de notation dont on se sait pas pour quelles raisons il faudrait leur accorder le moindre crédit après la crise financière de 2008. Non seulement elles ont été aveugles sur la dangerosité des produits structurés issus des subprimes, mais en plus, dans le cas des obligations d’Etats, elles ne semblent que tourner avec le vent, comme on a pu le voir avec la Grèce, ou même avec la France. Leurs notes ne bougent qu’en fonction des évènements récents, sans jamais anticiper quoique ce soit.

Pire encore, Standard & Poors ajoute sa voix à celles des austéritaires, qui retrouvent de la voix un peu plus de 18 mois après que le FMI ait finalement tranché en donnant raison à tous ceux, qui, comme Krugman ou Sapir, alertaient sur les dangers des politiques de réduction des déficits publics en cas de faible croissance. Tous les austéritaires, comme Yves Jego, en campagne pour la présidence de l’UDI, samedi sur Europe 1, en font leur miel pour proposer une accélération de l’austérité, alors même que le principal problème des pays européens est le manque de croissance. Il est tout de même effarant de persister à ce point dans l’erreur alors même que l’expérience 2011-2013 le démontre.

Plus globalement, cet épisode démontre deux choses. D’abord que dans notre époque, la politique se fait bien à la corbeille, que ce soit sur la compétitivité ou l’austérité. Mais cela montre aussi une incapacité de nos dirigeants à tirer les leçons des erreurs passées.

4 commentaires:

  1. Le première fois que j'ai entendu ce nom, "standard & poor's", c'était en 2001. Un ignoble article de l'infâme Patrick Fauconnier qui prônait, tel Terra Nova aujourd'hui, l'instauration de frais d'inscription à l'université de l'ordre de 5000 euros.

    Apparemment, cette agence parasitaire "notait" les universités à l'époque et était déjà très appréciée des petits milieux à fric de notre chère oligarchie journalistique.

    RépondreSupprimer
  2. Decidemment Laurent Pinsolle vous avez toujours l'habitude de passer à côté de la plaque des infos importantes :
    http://www.marianne.net/Contre-la-pression-normative-americaine_a241783.html

    RépondreSupprimer
  3. "Il ne faut pas oublier que les agences de notation n’avaient absolument pas vu venir la crise des subprimes.".

    Est-ce une bonne blague, Laurent ? La question ne se pose même pas. S&P et les "autorités" financières et politiques n'allaient quand même pas empêcher leurs amis financiers, ceux qui financent les agences et les actionnaires, de faire des affaires. Ils ne voyaient pas plus les manipulations malhonnêtes des banksters, qui titrisaient les dettes des emprunteurs (subprimes), qu'ils ne voient aujourd'hui les mêmes utiliser les RMBS, Residential Mortgage Backed Security, un produit financier dérivé issu de la titrisation. Pas plus en tout cas que le comité de Bâle, qui a décidé d’élargir les réserves de liquidité aux obligations d’entreprises notées A+ à BBB-, à certaines actions et à certains emprunts hypothécaires. S&P continuent à se moquer du monde, car ceux qui ont la possibilité de s'exprimer dans les médias officiels sont, soit des idéologues, rarement, soit des imbéciles incultes, parfois, soit des corrompus, le plus souvent. Et ce ne sont pas nos brillants et intègres dirigeants politiques qui ouvriront les yeux de nos concitoyens. Bien au contraire.

    Demos

    RépondreSupprimer
  4. Laurent,
    Tous les gens sérieux s'accordent pour dire que rien n'a changé dans le monde de la finance depuis 2007 : mêmes méthodes, mêmes produits pourris, même spéculation ... d'autant que les politiques d'ici et d'ailleurs n'ont même pas été fichus d'interdire ou de taxer les opérations qui doivent l'être parce qu'elles sont toxiques. Les socialistes français ont même freiné les autres pays européens. Un comble, non ?

    Demos

    RépondreSupprimer