mardi 6 janvier 2015

J-19 avant le début du démontage de l’euro ?


Dimanche 25 janvier, les Grecs sont appelés aux urnes pour élire une nouvelle majorité. Les derniers échos venus d’Allemagne semblent indiquer qu’une victoire de Syriza pourrait déclencher assez rapidement un début de démontage de la monnaie unique européenne dans les prochains mois.



Berlin et Athènes irréconciliables ?

Il y a quelques jours, le ministre de l’économie allemand, Wolfgang Schäuble, a jugé « que la Grèce était tenue de continuer sur la voie des réformes déjà engagées, ‘sans aucune alternative’, quel que soit le résultat du futur scrutin ». Cette position semble impossible à réconcilier avec celle du chef économiste de Syriza qui demande une nouvelle restructuration de la dette grecque, avec une décote d’au moins 50%, la fin de l’austérité et une hausse des salaires. Il faut dire qu’Angela Merkel a déjà eu du mal à faire passer les différents plans européens, au point qu’un nouveau parti, favorable au retour du deutsche mark, a pu émerger avec succès lors des élections européennes.

En outre, il est tout sauf évident que l’Allemagne soit si attachée à la monnaie unique européenne. S’il lui est difficile de prendre l’initiative d’en sortir, elle pourrait également créer une situation de blocage qui pourrait démarrer son démontage. Le cas pourrait se présenter dans quelques jours si Syriza gagne en Grèce. Le refus en bloc de toutes les demandes du nouveau gouvernement pourrait pousser celui-ci à opter pour la voie explorée par l’Argentine, faire défaut et revenir à sa monnaie. Certes, Berlin y perdrait mais serait alors protégé pour l’avenir. Ainsi, le démontage commencerait et se poursuivrait du fait de la pression des marchés et des conflits entre créditeurs et débiteurs européens.

Et si le supplice de l’euro continuait ?

Mais on ne peut pas exclure également que le gouvernement actuel l’emporte sur un fil, ou que le succès de Syriza ne débouche pas sur la crise terminale de la monnaie unique européenne. Après tout, d’une part, les hiérarques européens feront tout pour sauver leur vie. Et puis, il n’est pas inimaginable que Grecs et européens trouvent un accord complexe qui permette plus ou moins à tout le monde de sauver la face. Après tout, l’Allemagne domine la zone euro et pourrait vouloir perpétuer un système auquel elle s’est mieux adaptée que les autres, surtout si elle parvient à limiter ses engagements, comme elle l’a fait depuis cinq ans en refusant les euro obligations et autres folies européennes.

Bien sûr, Syriza ne pourra pas capituler en rase campagne et poursuivre la politique de son prédécesseur en oubliant l’intégralité de son programme. En même temps, tout le monde sait que dans le système actuel, la Grèce ne pourra pas rembourser sa dette, et Alexis Tsipras ne pourrait-il pas transiger sur une décote de 25% au lieu de 50% ? Ainsi, il montrerait qu’il a obtenu un vrai effort de ses créanciers tout en se montrant moins gourmand que pendant la campagne électorale, pour gagner leur approbation. On peut imaginer une modification de l’étalement ou des taux que paient la Grèce. Nul doute qu’ici les hiérarques européens ne manqueraient pas de créativité pour sauver leur tour de Babel monétaire.

Le scrutin du 25 janvier augmente la probabilité d’une fin de la monnaie unique dans les prochains mois, mais comme au début de la crise de la zone euro, ce n’est qu’une possibilité parmi d’autres. Les dirigeants européens ont malheureusement fait preuve de créativité pour sauver leur enfant monétaire…

14 commentaires:

  1. Scénario le plus probable, Syriza est élu, l'Europe lâche 25% de la dette grecque, ce qui représente peu au niveau européen et évite de perdre 100% en cas de sortie grecque de l'Euro, sans compter les turbulences politiques et sur les marchés.

    Syriza aura tenu en partie sa promesse, l'Allemagne aura calmé le jeu et acheté du temps pour pas si cher.

    L'avantage de la Grèce, c'est qu'elle est suffisamment petite pour que sa dette restructurée ne représente pas un problème réel à l'Europe.

    En revanche, si l'Italie ou l'Espagne proposaient un deal similaire, l'affaire serait autrement plus sérieuse.

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  2. Si le 25 janvier Syriza est porté au pouvoir alors les exigences de Tsipras vont mettre à rude épreuve l'UE et si les eurocrates font des concessions significatives alors la Grèce risque d'être un précédent dans lequel l'Italie et l'Espagne pourrait s'engouffrer c'est pourquoi l'Allemagne et les eurocrates feront les concessions les plus minimes possibles et alors tout dépendra d'Alexis Tsipras et de sa réelle volonté de soulager vraiment le calvaire de son peuple. L'intransigeance de Berlin et Bruxelles peut susciter celle des Grecs.
    Espérons que Tsipras tienne bon, ne céde pas!

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  3. Syriza dit et répète qu’il n’est pas question que la Grèce sorte de l’euro, alors pourtant qu’un sondage montre que 52 % des Grecs aimeraient revenir à la drachme. Tsipras n’utilise donc pas une sortie de l’euro comme un moyen de pression pour obtenir une réduction de sa dette et un relâchement de l’austérité. C’est sans doute une erreur. Je pense qu’il n’obtiendra pas grand-chose, voire rien.

    Il va se passer avec Syriza ce qui s’est passé à chaque fois qu’un parti de gauche arrive au pouvoir. Souvenez-vous de Mitterrand en 1981 : il a pris de mesures de relance, mais deux ans plus tard, ne voulant pas sortir du SME, il a complètement changé de politique. Souvenez-vous encore de Jospin disant qu’il allait renégocier les critères de convergences, ce qu’il n’a pas fait. Ou de Hollande disant qu’il ne ratifierait pas l’accord Merkozy, or il l’a ratifié.

    Syriza a une rhétorique radicale mais son programme l’est beaucoup moins, il ne parle plus ni de sortir de l’euro ni de suspendre la dette de la Grèce. Il va donc, je le crains, se « papandréouiser » et subir le même sort que le Pasok, ce qui va faire le jeu d’Aube Dorée qui sera le seul parti à proposer une vraie rupture. J’espère me tromper.

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  4. @LP,

    Un indice signifiant sur la doxa néo-libérale contemporaine : Syrisa est taxé de gauche radicale dans beaucoup de médias. Syrisa est simplement de gauche, et en aucun cas radical dans son positionnement. En France, il y a longtemps qu'on ne sait plus ce que c'est que la gauche. Démontage de l'euro en vue, c'est une excellente nouvelle, ce d'autant plus que cela précipitera la chute de l'UE.

    Encore un excellent article LP.

    Cordialement.

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  5. Dans le dernier sondage en date, 74,2% des personnes interrogées estiment que la Grèce doit rester dans la zone euro "à tout prix", contre 24,1% qui sont d'un avis contraire.

    http://www.zonebourse.com/actualite-bourse/GreceSyriza-a-plus-de-3-points-devant-la-droite-sondage--19613409/

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    1. C'est curieux car un sondage Gallup dit exactement le contraire : 52 % des Grecs seraient pour la sortie de l'euro contre seulement 32 % qui seraient contre.
      http://blogs.mediapart.fr/edition/que-vive-la-grece/article/040115/les-grecs-et-lunion-europeenne-sortir-de-leuro-mais-pas-de-lue-sondage

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  6. Le chef économiste de Syrisa propose de reprendre pour la Grèce le plan de réduction de la dette qui avait été accordé à la RFA en 1953 par ses créanciers d'alors, dont la Grèce :

    http://www.spiegel.de/wirtschaft/soziales/griechische-staatsschulden-syriza-fordert-von-deutschland-revanche-a-1011371.html

    Diplomatiquement c'est habile.

    Ivan

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  7. Sortir de l'euro est nécessaire, mais ne se fera pas sans mal et sans résistance de ceux qui en profitent. Tsipras me paraît bien léger pour affronter ceux qui n'ont pas hésité à utiliser en Ukraine les néo-nazis pour mettre leurs hommes au pouvoir.

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  8. Le mot de l'année 2015 : le Grexit (= Greece exit).

    Mardi 6 janvier 2015 :

    Allemagne : pour le patron de l’Ifo, la Grèce doit quitter la zone euro pour éviter le défaut.

    Après Angela Merkel, c’est au tour de Hans-Werner Sinn, patron de l’Ifo, d’évoquer sans tabou l’hypothèse du Grexit.

    C’est ce que l’on appelle « jeter de l’huile sur le feu ». Après la chancelière allemande Angela Markel, qui a fait savoir qu'une sortie de la Grèce de la zone euro n'est plus un problème, le patron de l’institut Ifo, Hans-Werner Sinn, scelle le destin de la Grèce. Ces propos sont rapportés par l'agence Handelsblatt. Pour Hans-Werner Sinn, la Grèce peut éviter un défaut en sortant temporairement de la zone euro.

    « Avec une forte coupe de la dette, évidente ou dissimulée, il y aurait une autre banqueroute. S’ensuivraient de nouveaux prêts et de nouvelles coupes de la dette, encore et encore lors des prochaines années, si on ne rétablit pas la compétitivité du pays via une sortie de la zone euro et une dévaluation de la monnaie », renchérit-il.

    Ce n’est pas la première fois que l’homme évoque le « Grexit », un scénario qui coûterait 77 milliards d’euros à l’Allemagne, selon les calculs de l’Ifo. Et 66 milliards d'euros à la France. « La situation grecque est insupportable pour la population et les prêts continus ne sont pas soutenables pour la communauté », a-t-il déclaré, rappelant que la Grèce a subi une chute de 30 % de sa production industrielle par rapport aux niveaux d’avant la crise.

    http://bourse.lesechos.fr/infos-conseils-boursiers/actus-des-marches/infos-marches/pour-le-patron-de-l-ifo-la-grece-doit-quitter-la-zone-euro-pour-eviter-le-defaut-1023134.php

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  9. La seule chose qui est soit certaine c’est que les choses ne se passeront pas douleur. Soit l’Allemagne et la troïka refuse tout allègement de la dette grecque et tout abandon de l’austérité et dans ce cas on mettrait Syrisa dans une situation humiliante où il pourrait choisir de sortir de l’euro, même s’il ne le souhaite pas, soit on accorde à la Grèce une partie de ce qu’elle souhaite, par exemple une réduction de 25% de la dette, comme suggéré par cet article, qui la porterait de 175% à 131% du PIB, ce qui ne serait clairement pas suffisant. Mais combiné à un quantitative easing de la BCE qui pourrait acheter de la dette grecque sur le marché secondaire on pourrait permettre à la Grèce de se libérer de la tutelle de la troïka et revenir emprunter sur les marchés et financer son programme économique et social. Mais comme la dette Grecque est maintenant détenue par des prêteurs publics, même à seulement 25% ça coutera au budget de la France, de l’Allemagne, etc.

    Article :

    Une facture qui pourrait atteindre 42 milliards d'euros pour la France. Voir :

    http://www.lepoint.fr/economie/retour-de-la-crise-grecque-la-france-risque-plus-de-40-milliards-06-01-2015-1894395_28.php

    C'est dire les risques insensés pris pour préserver l'euro. Divisé par quatre si on a de la chance. Et puis ça ne serait qu’une première facture à payer. Selon toute vraisemblance d’autres suivront.

    Saul

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  10. Il y autant de cynisme chez les uns que de lâcheté chez les autres. Qui va l'emporter le 25 janvier ? Ceux qui écrabouillent tout sur leur passage ou ceux qui ont peur de leur ombre ?

    DemOs

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  11. @ Anonymes et moi

    Tristement d’accord. C’est malheureusement le scénario le plus probable

    Etonnants ces sondages, mais la façon de poser la question joue sans doute

    @ Anonyme 12:54

    Très juste. Même moi, je dis gauche radicale, alors que je devrais dire gauche républicaine

    @ Ivan

    Pas mal en effet

    @ Jacques

    Pire, je pense que cela est dur pour les Grecs qui ne veulent pas être seuls face à la Turquie et qui ont encore du mal à dire non à tout ce qui vient d’Europe

    @ BA

    Merci pour l’info

    @ Saul

    Ils peuvent aussi jouer sur les taux d’intérêts, la durée et sans doute d’autres choses auxquelles nous n’avons pas encore pensées…

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  12. Sur l’allongement de la durée des prêts j’ai placé par erreur ma réponse sur le topic « 2015 : l’année où les contradictions de l’euro exploseront en Grèce ? »:

    http://www.gaullistelibre.com/2015/01/2015-lannee-ou-les-contradictions-de.html

    Affaire à suivre. De toute façon on sera fixé dans quelques semaines en cas de victoire de Syrisa.

    Voir aussi : Berlin se prépare à une sortie de la Grèce de la zone euro:

    http://www.latribune.fr/actualites/economie/union-europeenne/20150107trib76aaea832/berlin-se-prepare-a-une-sortie-de-la-grece-de-la-zone-euro.html#xtor=AL-13

    Grèce : les électeurs mis en garde sur une sortie de l’Euro:

    http://www.midilibre.fr/2015/01/06/les-electeurs-mis-en-garde-sur-une-sortie-de-l-euro,1106916.php

    "Les Grecs qui vident leurs comptes et les investisseurs qui sonnent la curée : voilà à quoi ressemblerait un "Grexit" (la sortie de la Grèce de la monnaie unique), selon des économistes.

    Un gouvernement qui refuse d'honorer ses prêts, la BCE qui se fâche, les Grecs qui vident leurs comptes et les investisseurs qui sonnent la curée : voilà à quoi ressemblerait un "Grexit" (la sortie de la Grèce de la monnaie unique) selon des économistes, plutôt incrédules. A chaque fois depuis le printemps 2010, la dramaturgie est la même : une échéance pour la Grèce (élections, versement financier), un commentaire venu d'Allemagne et les Bourses plongent à l'idée d'une sortie de la Grèce de la zone euro, un "Grexit" ("Greece" et "exit").
    Cette fois encore, cela n'a pas raté : samedi, Der Spiegel glissait que la chancelière Angela Merkel était prête à laisser la Grèce sortir de la zone euro, au cas où la Gauche radicale (Syriza) remporterait les législatives du 25 janvier, et remettrait en cause la rigueur.
    "Athènes refuse de payer"
    Le leader de Syriza, Alexis Tsipras, veut en finir avec l'austérité imposée par la troïka des créanciers internationaux (UE, BCE, FMI) contre 240 milliards d'euros de prêts. Il souhaite aussi restructurer la dette, en clair, renégocier les crédits. Les marchés ont rapidement réagi à la rumeur venue de Berlin : taux d'intérêt des pays solides en chute libre (Allemagne, France), débandade lundi des places boursières et euro déprimé. Le scénario décrit par Alexandre Delaigue, professeur d'économie à Saint- Cyr, les inquiète : "Les négociations entre le nouveau gouvernement grec et la troïka se tendent et n'aboutissent pas. A une échéance de paiement de dette, Athènes refuse de payer. Cela inquiète tout le monde, les Grecs vont précipitamment retirer leurs économies des banques, craignant une sortie de l'euro ; les investisseurs retirent leurs capitaux."
    L'appartenance d'un pays à l'union monétaire est "irrévocable"
    Exsangues, les banques grecques réclament alors une aide urgente de la BCE : "Si la BCE émet des conditions et que Syriza refuse, d'un coup, la devise créée par la banque centrale grecque cesse d'être des euros comme les autres", soit un "Grexit" de fait. Athènes "doit alors mettre en place un mécanisme de contrôle des flux de capitaux pour éviter leur fuite, émettre de nouveaux billets dont la valeur diminuerait rapidement par rapport à l'euro, ce qui rendrait inéluctable un défaut total sur sa dette libellée en euro", explique l'économiste. La Commission européenne insiste sur le fait que l'appartenance d'un pays à l'union monétaire est "irrévocable". Mais "même s'il n'y a pas de clause" prévoyant qu'un pays quitte la zone euro, "il reste possible de trouver une construction juridique" qui le permette, estime Janis Emmanouilidis, de l'European Policy Center.

    Saul

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  13. Pourquoi les Européens devront accepter un allègement de la dette grecque :

    http://www.lepoint.fr/economie/pourquoi-les-europeens-devront-accepter-un-allegement-de-la-dette-grecque-07-01-2015-1894586_28.php#xtor=CS3-192

    Saul

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