Depuis
mardi, le krach de l’avion de la Germanwings, qui a fait cent cinquante
victimes, fait la une des
média qui nous abreuvent chaque jour de découvertes plus ou moins importantes.
Cette frénésie médiatique
n’est-elle pas totalement exagérée, même si le drame est absolument atroce.
Les
Experts Germanwings
Il est sans
doute naturel que l’atrocité, peu commune, du décès simultané de cent cinquante
personnes attire une telle
attention médiatique. Dans nos pays, un tel drame est heureusement
extrêmement rare. En outre, le fait que cela ne soit probablement pas un
accident mais, semble-t-il, le choix délibéré, et donc, de facto, le meurtre de
cent cinquante innocents par ce copilote qui se serait enfermé dans la cabine,
puis aurait alors envoyé l’avion dans la montagne, a de quoi susciter l’intérêt
et des questions, et donc remplir
des pages et des pages d’articles ou des de longues minutes de reportages ou de
commentaires. C’est un acte dont on se souviendra probablement pendant
longtemps.
Cependant,
on peut quand même se demander si la couverture de tous les
instants par les média, avec le compte-rendu de la moindre découverte,
intéressante ou non, par n’importe quel média, laisse un drôle de
sentiment. En fait, on a l’impression d’assister à une série télévisée
policière que l’on ne pourrait pas éteindre et qui se poursuit en parallèle
sur tous les sites et dans tous les journaux. Tout le monde répète les
mêmes informations, qui semblent nous parvenir sans le moindre filtre. C’est
ainsi qu’hier, c’est
l’interview de l’ancienne copine du copilote qui a fait la une, avec la
nouvelle qu’il aurait dissimulé un arrêt maladie qui couvrait le désormais
funeste mardi 24 mars.
Ni
distance, ni recul
Car comment
réfléchir avec sérénité aux implications de ce drame dans un tel contexte, où
il faut en permance réagir dans l’instant. Et on peut également aussi se poser
des questions sur la réaction du président de la République, prompt à dire
qu’il n’y avait aucun survivant. S’il est sans doute positif que
François Hollande se soit manifesté, vis-à-vis de l’Espagne et de l’Allemagne,
était-il nécessaire que cet événement occupe tant la présidence cette semaine ?
En cédant, comme ses prédécesseurs, au compassionnel, cela ne représente-t-il
pas un mauvais choix de priorités pour un chef de l’Etat qui a pourtant de très
nombreuses sujets à traiter, plus importants.
Naturellement,
je pense aux victimes, à leurs familles et leurs proches. Le scénario du drame
rend sans doute leur perte encore plus douloureuse. Mais cela ne doit pas
empêcher de se poser des questions sur le traitement médiatique de ce krach,
d’où tout recul semble absent.
Ce que tu appelles affolement, c'est aussi l'effet pervers de l'information à l'ère internet : l'information "payante" a eu le dessous, c'est l'information "gratuite" qui domine. Et le "gratuit", c'est la pub. Pour vendre de la pub il faut qu'un maximum de pages soient vues. Un excellent article rapporte moins que deux articles minables, dépourvus de fond et d'analyse, pondus à partir d'une dépêche afp ou de n'importe quelle source sans intérêt, si autant de visiteurs les ouvrent (et ils coûtent certainement beaucoup moins cher à produire).
RépondreSupprimerL'autre corollaire de ce problème, c'est que même si les trois quarts des internautes s'interdisent d'ouvrir la foule d'articles sans intérêt qui essaiment autour de chaque "moment" médiatique, si le quart restant ouvre cinq fois plus de pages, ils rapportent plus et restent donc le coeur de cible.
@Ronan. Bonjour.
RépondreSupprimerJe pense que vous exagérez un effet spécifique de l'ère internet. Cela ne reste qu'un moyen nouveau désormais exploité par les mêmes acteurs et leurs intérêts.
D'abord, il y a le formidable attrait pour les faits divers. Il y a plus d'un siècle, leurs exploitations a fait le succès du Petit Journal.
Plus proche, bien avant la pub gratuite Google, on a eu les affaires Bruay en Artois (une affaire de classe poussée par les média) ou Gregory (avec une implication forte des reporters eux-mêmes).
Donc, il n'est pas nouveau que les acteurs médiatiques veulent "profiter" de toutes les occasions.
Une bonne opportunité pour leur sucrer leurs subventions ?
Amike
"Se poser des questions sur le traitement médiatique de ce krach" va de soi, mais la question se pose de manière générale.
RépondreSupprimerComment comprendre, mais surtout accepter que ceux qu'on qualifie de journalistes saturent les écrans et les ondes en exploitant les faits divers, dont la place a cru de manière exponentielle ou en posant des questions sans intérêt qui n'abordent à aucun moment le fond des problèmes ? Du sensationnalisme pour vendre ou de belles opérations de diversion à l'exemple de l'allégorie qui dit que "quand le sage montre la lune, le sot regarde le doigt" à la différence que, dans notre affaire, ceux dont la mission est d'informer sont les sots qui font tout pour que les sages ne regardent pas la lune.
DemOs
On a souvent dénoncé dernièrement - à juste raison - le règne de l'émotion dans l'information et la politique. Voici un exemple parfait.
RépondreSupprimerIl faut comprendre que l'époque où la raison et la rigueur intellectuelle étaient mis en avant, entre les XVIe et XXe siècles, est aujourd'hui révolue.
Guadet
Au delà du médiatique il faudra se demander comment un président de la république peut se transformer en entrepreneur de pompes funèbres en oubliant qu'il a des ministres et des préfets pour cette mission...Moi je parlerai de surenchère médiatico-politique...
RépondreSupprimerJe rajouterais que quand ce sera un A 380...ils vont faire quoi?...avec 800 passagers...
RépondreSupprimer@ Ronan
RépondreSupprimerTrès bien vu !
@ Amike
Oui, Internet apporte un nouveau champ des possibles, mais il apporte aussi un culte de l’immédiat
@ Démos
Il faut noter aussi que la profession de journalistes subit aussi les difficultés du secteur
@ Guadet
Sans doute
@ Axel
Bien d’accord, il surfe sur le compassionnel