Le
serpent de mer de la Côte Basque n’était donc pas complètement mort. Il
avançait en coulisses, avant que des informations ne se mettent à fuiter, provoquant
l’émotion de supporters attachés à ces clubs centenaires. Un projet qui n’a
aucun sens, culturellement comme économiquement.
Destruction
de bien culturel et de lien social
Un club de
rugby, dans une ville comme Bayonne, dont je suis originaire, a une place
particulière dans la vie d’une grande partie de la population. L’Aviron
Bayonnais est au cœur de l’ADN de la ville et de bien des habitants qui se
passionnent pour la vie du club, souvent en famille. Le club anime les
discussions et les repas, tout comme le BO à Biarritz également. Et parce que
le club a été fondé en 1904, des générations de Bayonnais se sont transmises la
passion du club. L’Aviron Bayonnais fait partie de l’identité, de ce que sont,
de nombreux habitants de la ville, et je peux imaginer qu’il en va de même pour
le Biarritz Olympique. D’où la
grande émotion suscité il y a plus d’un an quand le premier projet de fusion
avait émergé avant d’échouer et à nouveau aujourd’hui, comme
le manifeste la mobilisation de jeudi.
Bien sûr,
certains trouveront qu’il y aurait plus de sens à n’avoir qu’un seul grand club
de rugby sur la Côte Basque, plutôt que deux, étant
données les difficultés du BO, rétrogradé l’an dernier, et de l’Aviron, qui se
bat pour son maintien. Mais après tout, Oyonnax, avec ses 22 000 habitants,
réussit bien comme d’autres « petites » villes en football comme en
rugby. Ensuite, il est tout sauf évident que le produit de la fusion soit un
succès : je vais y revenir. Mais surtout, cela nécessite la mise à mort
d’au moins un des clubs, voir plus probablement des deux dans les conditions
actuels. Et
cela n’est pas acceptable car ces clubs ont un rôle trop important dans la vie
sociale locale pour laisser faire des expérimentations hasardeuses vouées à
l’échec qui ne laisseront qu’un champ de ruine dans le cœur de beaucoup.
Quand 1 +
1 = 0, ou le Titanic financier à venir
Se pose aussi
le problème de la manière dont ce projet de fusion avance. L’ancien
président de l’Aviron, Philippe Neys, souligne que son successeur, Manu Mérin,
et le patron du BO, Serge Blanco, mentent. Cela, et le
compte-rendu de RMC Sport, démontrent que le projet avance sans
discuter avec des parti-prenantes essentielles, comme les supporters, ou même,
semble-t-il, les maires, qui
ont dit n’être au courant de rien. Pourtant, un club de rugby n’est rien
sans sa ville d’origine ou les supporters abonnés. Comment prétendre construire
quoi que ce soit sans eux ? C’est un projet qui doit rassembler et ici,
seuls les egos, le goût du pouvoir et les intérêts financiers semblent rentrer
en compte.
Enfin, il
est tout sauf évident que fusionner deux clubs, dont un, le BO, est en grave
difficulté financière depuis plus d’un an (on
évoque un déficit de 1,7 millions) permettrait de créer un club en bonne
santé. Car, même avec plus d’argent des sponsors, les engagements de la somme
des clubs seraient sans doute bien plus importants que ceux d’un seul club.
Donc, le point mort de la nouvelle entité aurait toutes les chances d’être plus
élevé… Pire, il serait totalement illusoire de croire que les abonnés des deux
clubs sacrifiés viendraient soutenir le monstre ainsi créé, qui aurait digéré
le club de leurs cœurs. Il est probable que ce projet finirait en un coûteux
club sans supporter, et donc voué à l’échec.
Voilà pourquoi
j’apporte un soutien sans réserve à toutes les initiatives pour s’opposer à ce
funeste projet, et
notamment cette pétition. Ce projet n’est qu’un nouvel exemple de ces
délires de grandeur et de puissance totalement irréalistes. Et il piétine aussi
l’identité de milliers de personnes qui sont attachés à ces pilliers du
patrimoine local que sont l’Aviron Bayonnais ou le Biarritz Olympique.
@Laurent Pinsolle,
RépondreSupprimeron sens le vécu :-)!
Ca me rappelle une discussion que j'avais eue, il y a dix ans de ça, avec un ancien collègue bayonnais, grand amateur de rugby et lui-même ancien joueur à l'Aviron Bayonnais.
A l'époque, supporter du Stade Français (je lui encore: personne n'est parfait...), je l'interrogeai sur le BO, le grand rival de mon club favori, qui était alors au sommet du rugby français: et bien, figurez-vous que bien que fier d'être basque, il me dit pis alors que pendre du BO, ce que ne manqua pas de l'étonner, alors que son Aviron Bayonnais se morfondais en D3, à l'époque...
Je n'ai jamais vu à ce jour, dans aucun sport de haut, une telle animosité envers deux clubs voisins: ça vous situe l'ampleur du problème!
Sinon, pour en revenir à la logique économique, celle de la fusionite, elle est à l'oeuvre à tous les niveaux de la société, à telle point qu'elle est totalitaire: l'UE en est le plus magnifique exemple, avec son dogme d'un état fédéral créée, d'abord à l'insu, puis contre les peuples des nations européennes. On pourrait aussi parler des regroupements des régions (qui m'indiffère, vue que je réclame leur disparition...), mais au final, votre anecdote est symptomatique car elle préfigure un projet beaucoup plus inquiétant, selon moi, d'un point de vue démocratique ET républicain: celle de la fusion des communes!
C'est un vieux serpent de mer de la technocratie européenne, auquel la France a échappé, alors que durant les années 60 et 70, les pays voisins regroupaient leurs communes à tour de bras. Mais j'ai pu constater que, tant en Belgique qu'au Royaume-Uni, ces fusions ne marchent pas d'un point de vue économique, mais plus grave, d'un point de vue symbolique, les habitants des communes "fusionnées", quel que soit leur âge, continuent à parler de leur ville comme si existait encore pour elle-même, et non comme un quartier d'une grande commune!
Bref, on sombre une fois de plus dans le délire, et dans le dogme, et ce, au nom d'une sacro-sainte compétitivité, qui justifierait les économies d'échelle.
Le problème, c'est que ces fusions d'ensemble servent à masquer la démission des citoyens à défendre un cadre plus conforme à leurs intérêts...
CVT
@ CVT
RépondreSupprimerUne forte confrontation sportive, c'est sûr, au point que l'on préfère souvent soutenir un club parisien plutôt que le rival. Mais malgré tout, un fort lien entre les deux villes, même si nous sommes différents.
Le président de l'Aviron aurait indiqué que la fusion ne serait plus à l'ordre du jour... Pour le moment. Il faut rester vigilant.
Ces fusions posent beaucoup de questions...Il me semble que c'est tout le rugby pro qui va mal avec une course à l'argent et un recrutement massif de joueurs étrangers. Combien de joueurs basques à l'Aviron ou au BO?
RépondreSupprimerCependant, il me semble que des équipes de provinces pour jouer la Coupe d'Europe, avec des joueurs sélectionnables en équipe de France, seraient utiles.
Antoine
@ Antoine
RépondreSupprimerPas si cela casse des clubs
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