lundi 29 juin 2015

La pseudo interdiction d’UberPOP, cache-sexe de l’inaction du gouvernement



UberPOP, l’arbre qui cache la forêt

Il est assez effarant que le débat se concentre sur UberPOP, oubliant le versant principal de la concurrence déloyale que mènent les VTC aux taxis. Dans un dossier très détaillé, la Tribune explique bien les enjeux du dossier. UberPOP est l’offre à prix encore plus bas du géant californien, officiellement du covoiturage rémunéré, avec des conducteurs qui n’ont ni formation ni assurance spécifique… Les autres offres d’Uber rentrent dans le cadre légal des VTC, qui inclut désormais une formation, mais qui profite toujours d’une fiscalité complètement décalée par rapport aux taxis, même si, passé un certain chiffre, il faut passer en statut d’autoentrepreneur, le tout sans la moindre licence.

Pire encore, comme le souligne le directeur d’Uber France, les textes ne sont pas très clairs puisque même si le gouvernement juge UberPOP illégal, « quatre tribunaux indépendants (…) se sont prononcés, les uns après les autres, refusant l’interdication, disant qu’il n’y avait pas de trouble manifestement illicite » et la légalité de loi Thévenoud (sur les VTC) sera étudiée par le Conseil Constitutionnel. Bref, le cadre juridique qui encadre l’activité des VTC ne semble ni clair, ni suffisant, permettant aux opérateurs de s’engouffrer dans la brèche grande ouverte, rendue à peine moins grande par une loi Thévenoud d’autant plus difficile à mettre en œuvre qu’il n’y a pas d’interprétation claire sur son sens.

Un gouvernement aux abonnés absents


Bref, l’action du gouvernement est extrêmement superficielle puisqu’il n’agit que sur une petite partie du problème : UberPOP et non l’ensemble des VTC, qui devraient, a minima, payer le même niveau de taxes que les taxis, et compenser également l’absence de licence à payer pour exercer leur activité. Mais, même sur ce périmètre restreint et insuffisant, le gouvernement n’a pas été capable de pondre une loi efficace, puisque la situation actuelle est extraordinairement confuse d’un point de vue législatif. D’où sans doute les déclarations à l’emporte-pièce du président et de son minitre de l’intérieur, pour essayer de donner le change malgré cela. Mais difficile d’être trompé par ces postures.

En outre, les réactions superficielles du président de la République et du ministre de l’intérieur juste après des manifestations ponctuées d’actes violents peuvent donner l’impression qu’ils donnent une prime à ces violences… Bref, tout dans les réactions du gouvernement à la montée en puissance déloyale des VTC est à côté de la plaque. Et quel aveu d’impuissance que de se défausser sur la justice et les forces de police ! On se retrouve dans une situation proche de la Californie, où ce sont les juges qui ont cassé les avantages déloyaux d’Uber, et non une décision politique. Bienvenue dans un monde où les politiques construisent un monde si complexe qu’il organise une irresponsabilité générale.


Les taxis ont mille fois raison de manifester contre la concurrence déloyale des VTC. Et même si l’Etat a en partie démissionné et que l’on peut comprendre leur colère face à ces pirates habiles qui exploitent leurs propres compatriotes pour les dépouiller, cela ne justifie pas les violences commises.

11 commentaires:

  1. Bonjour Laurent.

    Votre croisade contre Uber me met mal à l'aise, et je vais essayer d'exposer mon avis de la manière la plus courtoise et argumentée qui soit en ma capacité.

    En fait, j'ai du mal à comprendre sur quelles bases rationnelles on devrait interdire ce nouveau service. Car il me parait que l'argument sur la "concurrence déloyale" reste léger : où s'arrête-t-il ? Le blogging fournit à l'internaute un décryptage de l'actualité gratuit, produit par des gens non ou mal rémunérés, et sans exigence de formation. Si l'on suit votre raisonnement, est-ce une concurrence déloyale faite aux journalistes de la presse traditionnelle et doit-elle donc être également interdite ?

    L'argument "concurrence déloyale" me laissant sur ma faim, je me permets donc de pousser la réflexion plus loin en étudiant les forces en présence.

    D'un côté, nous avons les chauffeurs de taxis français. Ce sont des gens qui appartiennent à la catégorie des petits rentiers, puisqu'ils tirent une rente d'un capital investi initialement et de leur situation de monopole. De fait, ils se permettent des abus, notamment des tarifs exorbitants (globalement bien plus chers à Paris qu'à Londres selon mon expérience personnelle), un service limité voire parfois pénurique, une forme de culture de la magouille... Pour l'anecdote, il m'est déjà arrivé de devoir payer plus de 70 euros un trajet entre mon domicile en zone 3 et la gare Montparnasse, soit davantage que le billet de train qui m'emmenait ensuite à l'autre bout de la France ! Évidemment, on s'était bien gardé de me prévenir à l'avance que des tarifs "spéciaux" étaient en application ce jour-là (un 1er Mai).

    De l'autre côté, qu'avons-nous ? Les utilisateurs d'UberPop me paraissent très majoritairement des jeunes (numérique oblige), aux revenus limités (étudiants, jeunes actifs) et qui cherchent à économiser sur leurs frais de déplacement. Les chauffeurs d'Uber sont quant à eux des personnes peu qualifiées, qui cherchent un revenu et une activité "décente" dans notre société désindutrialisée et à chômage de masse.

    Bref, après avoir dressé ce tableau, ma solidarité "intuitive" va tout naturellement envers les utilisateurs et les chauffeurs d'Uber, et à l'encontre des chauffeurs de taxis, qui me paraissent s'accrocher dans une logique corporatiste à leurs privilèges et à leur rente. In fine, la triste réalité à accepter pour eux est que "n'importe qui" peut faire le même métier, en mieux et moins cher. Plutôt que tout casser, ils devraient donc plutôt améliorer leur offre : tarifs plus raisonnables, meilleur quadrillage, connaissance des parcours, conseils touristiques, que-sais-je...

    De façon plus générale, je remarque chez vous à la lecture quotidienne de vos billets une forme de ce que j’appellerais "l'interdictionnisme". A vous écouter, il faudrait tout ou presque interdire : Uber, le BitCoin, la prostitution, l'Anglais dans l'espace publique, le Roundup, les OGM, la GPA, la châlutage profond, le cannabis... Bien sûr, tout n'est pas infondé, bien loin de là, et il ne s'agit pas de tomber dans le Cohn-Bendittisme cras "il est interdit d'interdire". Mais ne trouvez-vous vas pas qu'il s'agit d'une forme de solution de facilité ou de paresse intellectuelle : plutôt que de penser à ce que la société pourrait gagner à tel ou tel autre phénomène complexe et comment, on se contente de mettre en valeur ses aspects les plus négatifs pour demander son interdiction... Pour ma part, je préfèrerais toujours les *régulations*, ciblées et réfléchies, plutôt que les *interdictions,* souvent trop simplistes.

    Bonne journée.

    Talisker.


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    1. La paresse intellectuelle ne serait-ce pas plutôt de ne voir que le côté pseudo-sympa et soi-disant cool-moderne de l'offre VTC ?

      Le VTC est organisé par des rentiers eux-mêmes qui exploitent des gens -les chauffeurs- qui ont toutes les contraintes à leur charge : assurance, carburants, etc.

      Vous ne voulez focaliser votre attention que sur les clients et les chauffeurs-VTC...
      Quid des profiteurs qui organisent les plateformes VTC ?...

      Profiteurs qui pour proposer des tarifs "avantageux" se doivent de ne pas payer de cotisations sociales ! ET ne répercutent qu'à minima les coûts d'exploitation de l'activité de transport des personnes.

      Pourquoi donc toujours avancer une analyse partielle des choses ?
      Les torts des chauffeurs de taxi, d'accord ; mais pourquoi ne pas analyser vraiment ce qu'est l'offre VTC dans l'intégralité de son mécanisme ?

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    2. Il n'est pas question d'interdicton mais de régulation , on peut interdire les produits cancérogènes comme le round up sans chercher à proscrire la recherche OGM , interdire la GPA sans être opposé au mariage homo qui n'implique pas de marchandisation du corps d'autrui ,s'opposer au chalutage en eaux profondes qui brise le cycle de renouvellement de la faune sans militer pour le calage définitif des bateaux de pêche...

      Je vous poserai la queston autrement : la rente des taxis est-elle plus néfaste pour la collectivité que l'exil fiscal d'UBER ?
      Vous voulez que la rente des taxis saute , pourquoi pas , mais pourquoi le faire en utilisant Uber ?

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    3. @ Tasliker,
      Relever l'escroquerie qu'est le système VTC, c'est justement réfléchir à ce que des phénomènes -absolument pas complexes- peuvent offrir ou non à la société.

      Il n'y a rien de complexe dans la question des VTC ! leur seul intérêt est de n'avoir pas à payer les cotisations sociales ET les coûts d'exploitations.

      Soit on supprime les obligations des chauffeurs de taxi et ça limite grandement l'intérêt des VTC -qui ne peuvent plus se distinguer sur les prix- !
      Soit on soumet les VTC aux obligations des chauffeurs de taxi, et ça tue le VTC direct !

      Tasliker, en vérité, vous préférez des autorisations simplistes à des interdictions réfléchies...

      Vous ne voulez voir que des aspects positifs imaginaires à opposer à la caricature que vous faite de l'opinion des autres, soi-disant des interdictionnistes simplets.

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  2. Il y a un autre aspect extrêmement grave dans cette affaire d'Uber. La question majeure n'est pas tant celle des taxis clandestins que celle du versement à un parasite milliardaire d'une partie de la course.

    Cela veut dire, qu'à terme, on remplacera encore une profession composée d'indépendants par des serfs franchisés. Exactement ce qui s'est passé avec nos épiciers remplacés par des cerrefour market. Exactement ce dont rêve Leclerc avec les pharmaciens, ce dont rêvent les eurocrates avec les notaires, etc.

    Ils nous préparent une société où il n'y aura plus de véritable liberté d'entreprendre, où tout sera soumis et aseptisé, formaté par des grosses sociétés.

    Au Moyen Âge, c'était "pas de terre sans seigneur", bientôt ce sera "pas d'activité sans franchise". Ce n'est autre que l'instauration d'un proxénétisme généralisé, d'une économie mafieuse au profit de quelques trusts, le tout sous les applaudissements des crétins néolibéraux. C'est d'abord pour cela qu'il faut détruire Uber, même si les taxis méritent d'être défendus contre la campagne médiatique orchestrée contre eux depuis 15 jours (vous êtes vraiment sûr que les journaleux ne reçoivent pas d'ordre ??).

    J'espère que, rapidement, une application gratuite viendra faire concurrence déloyale à l'ignoble Travis Kalanick, ce qui au moins permettra aux taxis clandestin de frauder mais sans reverser de commission. Quitte à faire de la prostitution, au moins qu'elle se fasse sans maquereau.

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    1. La question majeure n'est pas tant celle des taxis clandestins que celle du versement à un parasite milliardaire d'une partie de la course.

      vous parlez de la famille Rousselet? c'est drolement malpoli!

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  3. Ne pas parler de G7 et des problèmes de licence dans un article sur les taxis montre le degré élevé de superficialité d'Herblay :

    Seul ou presque, Djillali Ouanfouf crie au scandale. Le secrétaire général du Syndicat de défense des conducteurs du taxi parisien (1.700 adhérents, dont 60% de locataires), estime que "la situation des locataires tient de l'esclavage moderne. Il s'indigne :
    Ces chauffeurs, aux deux tiers d’origine étrangère, paient environ 4.500 euros mensuels au siège de G7."

    S’y ajoutent quelque 400 euros pour ceux qui prennent la radio (50 euros supplémentaires la nuit). Et 25 à 30 euros par jour de gazole. Djillali résume :
    Avant même d’avoir roulé, ils ont déboursé 200 euros chaque matin… Avec moins de 10 courses quotidiennes, contre plus de 20 autrefois, il triment 11 heures par jour, 7 jours sur 7, juste pour rester la tête hors de l’eau."

    http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/20150212.OBS2398/comment-le-roi-des-taxis-compte-contrer-uber-au-detriment-des-clients.html


    De fait, la pénurie n’a jamais été aussi grande. Allez trouver un taxi à 20h à Paris ! Il y a aujourd'hui 15 600 taxis dans Paris ; il y en avait 14 00 en 1992 et plus de 25 00 en 1925. Les comparaisons avec d’autres grandes villes au monde qui n’ont pas ce système de quotas indiquent qu’un nombre double de taxis serait aujourd'hui possible pour Paris.

    http://www.telos-eu.com/fr/societe/une-astuce-financiere-contre-la-penurie-de-taxis.html

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  4. @ Talisker

    Je pense qu’il faut l’interdire car il permet d’exercer un pays quasiment sans payer de taxes et de cotisations sociales, soit une concurrence déloyale destructrice de notre modèle social.

    Assez bien vu sur les blogueurs, mais en même temps, il existe une liberté de parole, Internet étant un nouveau véhicule pour la liberté de parole des citoyens.

    Il ne faut pas exagérer sur les taxis. Je suis un usagé régulier, et je trouve que le niveau de service est bon. Pas d’accord sur les tarifs non plus. Les tarifs de Londres ne me semblent pas meilleur marché que ceux de chez nous, loin de là. En outre, les taxis sont loin d’être des nantis profitant d’une niche. Leurs revenus sont faibles par rapport aux exigences de leur métier.

    Le raisonnement que vous menez sur UberPop pourrait aussi pousser à accepter un SMIC jeunes, non ?

    L’interdiction n’est en aucun cas une solution de facilité ? Ne serait-ce pas le laisser-faire qui est une solution de facilité ? Il faut savoir mettre des interdits, comme nous le faisons avec les feux rouges par exemple pour éviter que la route soit une jungle. Une société, ce sont des devoirs et des droits. Vouloir refuser tout devoir (et donc les interdictions ou les contraintes qu’ils impliquent), c’est aussi affaiblir les droits.

    Après, si Uber fonctionnait avec les mêmes contraintes que les taxis (y compris un équivalent de licence, les mêmes impôts et cotisations sociales), pourquoi pas ?

    Je n’ai jamais dit qu’il fallait interdire toute recherche sur les OGM

    @ Abd_Salam et Rodolphe

    Bien d’accord

    @ Anonyme

    Critiquer Uber n’exonère pas de critiquer les abus des autres sociétés…

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    1. Merci pour votre réponse étayée.

      Talisker.

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    2. et la G7 et ses 17.500 esclaves, elle vous dit merci? avec un bénef à 25% ils peuvent faire un geste.
      évidemment le pauvre gars qui a payé une plaque à 200.000 euros il y a 5 ans doit s'arracher les cheveux...

      http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/20150212.OBS2398/comment-le-roi-des-taxis-compte-contrer-uber-au-detriment-des-clients.html

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