En Europe, la
Grèce, 2% de la zone euro, endetté à 180% du PIB, occupe une bonne part de
l’attention des dirigeants du continent depuis plus de 5 ans. Pourtant, le
Japon, dont
la dette publique est bien plus lourde, démontre qu’un
autre mode d’organisation monétaire et financier change totalement la donne.
Dettes
publiques et relativité
Le
contraste entre le Japon et les pays européens est assez effarant. Sur
notre continent, l’union monétaire a poussé les pays membres à adopter des
camisoles budgétaires extrêmement strictes, imposant un relatif équilibre du
budget et quand les Etats, désarmés de leur banque centrale, se retrouvent
contraint à réclamer le soutien financier des autres membres de l’UE, ils
doivent passer sous des fourches caudines humiliantes, austéritaires et
contreproductives, comme on peut le voir en Grèce. Dans cette europe, la
dette publique ne saurait dépasser 60% du PIB, et, selon
l’infâme TSCG, les déficits budgétaires structurels ne sauraient aller au-delà
de 0,5% du PIB ! Résultat, le continent ne parvient pas à sortir de la
crise déclenchée par la crise financière de 2008, du fait de politiques
d’austérité destructrices.
Le Japon
semble vivre dans un monde parallèle tant
il s’affranchit des règles budgétaires en vigueur dans ntore continent. A
peine élu, alors que la dette publique était déjà supérieure à 200% du PIB et
les déficits, autour de 10% du PIB, Shinzo
Abe avait présenté un plan de relance pour sortir de la déflation.
Aujourd’hui la
dette publique atteint la bagatelle de 246% du PIB et les déficits encore 7% du
PIB malgré une forte hausse de la TVA. Les chiffres sont d’autant plus
marquants que la
population du pays diminue déjà et devrait passer de 127 à 87 millions
d’habitants d’ici à 2060. The
Economist dénonce donc dans un papier le manque
de réalisme des autorités japonaises, au-delà de l’optimisme.
Selon l’OCDE, la dette publique du Japon dépasserait 400% du PIB en 2040 avec
1,5% de croissance.
De vrais
choix politiques
Mais ce
qu’il y a aussi d’intéressant avec le Japon, c’est que tous les opposants à la
monétisation de la dette publique agitent des exemples extrêmes
d’hyperinflation pour s’y opposer, même face à des propositions modérées. Or,
ici, Tokyo
pratique une monétisation massive, mais dont les effets sur l’inflation
sont presque jugés insuffisants, ce qui montre qu’il est possible de monétiser
sans finir dans la situation du Zimbabwe. En fait, elle
a juste permis au pays de sortir d’une déflation endémique. Après les
soubresauts consécutifs à la hausse de la TVA, il faut noter que le
PIB a progressé de 3,9% en rythme annuel au premier trimestre 2015, un
signe du succès des politiques menées par la majorité actuelle.
Merci au
pays du Soleil Levant de montrer à nos pays européens qu’il y a d’autres voies qu’une
banque centrale et une monnaie sorties du cadre démocratique. Un cas de
plus qui démontre que les « arguments » agités par certans ne sont
pas sérieux puisqu’ils sont démontés ici.
Et un système "monnaie pleine "ou "100% monnaie" (ou chartaliste), ça ne serait pas beaucoup mieux ?
RépondreSupprimerAttention au terme "dépolitisation de la banque centrale"...
RépondreSupprimerPour les eurocrates, qui ont introduit ce "concept", il s'agit de dire que le sujet ne doit plus être soumis au débat démocratique.
Mais ça ne signifie pas que la banque centrale européenne ne fait pas de politique.
Attention toutefois avec près de 250% du PIB, le Japon n'est pas une référence.
RépondreSupprimerConcernant la conséquence de la monétisation massive par la BOJ, la bulle financière a remplacé l'hyperinflation.
D'après le gouvernement japonais, des taux à 10 ans au-delà de 3% rendraient la dette incontrôlable. Avec la fin des QE de la FED et le début de la remontée des taux directeurs, les taux vont commencer à monter.
Le problème dans ce genre d'opération, c'est pas la phase actuelle, c'est de savoir quand la BoJ va stériliser la monnaie et surtout de quel montant.
RépondreSupprimerTrop tôt casse la croissance, trop tard augmente le risque hyper-inflationiste lors de la reprise de croissance et du déversement de liquidités crédits aux particuliers et aux entreprises.
Quand à connaitre le montant que la BoJ devra stériliser, ni trop, ni trop peu, il faut une boule de cristal.
Donc jusqu'ici tout va bien, sauf que le moment dangereux c'est l’atterrissage, la 2 ème phase, et tout peut aller très vite dans un emballement complet, comme quand un réacteur nucléaire part en vrille.
Et là, la taille du réacteur est gigantesque, sans précédent, surtout que la FED et dans une moindre mesure la BCE ont fait du similaire.
Si 2 ou 3 de ces réacteurs monétaires s'emballent en même temps sur la base de taperings loupés, ça va secouer très fort.
Le japon est une grande une grande puissance économique, industrielle, exportatrice et qui est un État souverain. Ça ne se compare pas à la zone euro qui est un cadre particulier, totalement bancal (où les États membres se sont fixés des règles budgétaires contraignantes, dans le but d’éviter qu’un État membre soit contraint de secourir financièrement un autre État membre, handicapé par une monnaie surévaluée et d’autres problèmes) et à la situation de la Grèce dans la zone euro.
RépondreSupprimerToutefois le service annuel de la dette finira par devenir trop élevé, même au Japon. Dans ce cas, celui-ci appliquera éventuellement une recette proposée par l’économiste Patrick Artus pour la zone euro : «Comment faire un «haircut doux» sur les dettes publiques de la zone euro ? Je le cite : «Nous proposons donc une vraie monétisation : la BCE achète la quantité nécessaire de dettes publiques des pays de la zone euro, puis ces dettes publiques sont annulées. Les taux d’endettement publics baissent alors vraiment. Ceci nécessite bien sûr une modification des règles de fonctionnement de la BCE si la perte induite fait disparaître son capital, elle ne doit pas être recapitalisée par les budgets des Etats, car alors la dette publique détruite serait immédiatement recréée. Il faut que la BCE puisse durablement fonctionner avec un capital négatif.»
http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=68014
Que ce soit cette solution ou une autre (100% monnaie, monnaie pleine…), il faudra innover car le système financier actuel n’est plus adapté aux situations couplées qui s’auto-entretiennent de croissance faible et d’endettement de plus en plus élevé des États.
Saul
La reprise économique japonaise peut aussi s'expliquer par la baisse du pétrole et des matières première.
RépondreSupprimerSauf que la France est encore moins excusable de ne pas en profiter.
Ivan
Oui, voir le Flash-Éco de Natixis du 23 juillet : http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=86274
SupprimerSans la conjonction de la baisse du pétrole et de la dépréciation de l'euro, la croissance française serait nulle, celle de l'Allemagne réduite à presque rien et l'Italie serait en récession.
YPB
Le Japon, c'est aussi la dèche la pauvreté, les sans abris. Une autre face de la réalité dont les médias ne parlent jamais ou si peu. Mieux vaut parler et écrire toujours, ici comme ailleurs, sur les mêmes sujets mille fois ressassés : la croissance, les guerres, les faits divers ... Jusqu'au dégoût.
RépondreSupprimerDemOs
DemOs
Quand j'écris "ici comme ailleurs", je fais référence aux quatre coins du monde et non au blog de Laurent.
Supprimer@ A-J Holbecq
RépondreSupprimerBien sûr, ce serait bien, mais le point de ce papier était de mettre en perspective le débat que nous avons en Europe sur les dettes publiques
@ Abd_Salam
Très juste, il vaut mieux utiliser « sortie du cadre démocratique », que j’utilise aussi. En effet, la BCE fait de la politique
@ Cyril
Pas une référence ? Pourquoi ? Pas sûr que le Japon soit davantage victime d’une bulle financière que les autres grands pays comparables. Bien sûr qu’au-delà de 3%, cela compliquerait les choses. Mais c’est l’intérêt de la monétisation
@ Anonyme
Voilà pourquoi je pense qu’il faut remettre la politique monétaire dans le cadre démocratique, en en confiant le contrôle au gouvernement et avec un débat parlementaire sur la politique monétaire
@ Saul
Mais la monétisation à l’échelle de la zone euro, c’est infaisable. Cela n’est gérable qu’à l’échelle d’une nation. La proposition d’Artus me semble impossible
@ Ivan
La relance budgétaire et la politique monétaire expliquent beaucoup (puisque la reprise a démarré avant la baisse du pétrole et des matières premières
@ Démos
Je serais curieux d’avoir des liens pour réfléchir à cet aspect
Sur la pauvreté au Japon un article intéressant http://transcontinentales.revues.org/747
RépondreSupprimerLe Japon ne peut plus se financer avec l'épargne japonaise, désormais il y a plus d'utilisation de l'épargne que de nouvelle épargne, et ça va s'amplifier à cause du vieillissement de la population. Il n'y a plus que la planche à billet. ça finit toujours de la même façon.
RépondreSupprimer"Mais la monétisation à l’échelle de la zone euro, c’est infaisable. Cela n’est gérable qu’à l’échelle d’une nation."
RépondreSupprimerPourtant la BCE a largement tordu le bras aux traités avec les QE, il y a aussi les bail out soit disant interdits, la restructuration de la dette grecque, le MES, le FESF...
Quand au Japon, toute nation soit il, ça ne l'a pas empêché de se mettre dans une mouise noire, dont il est loin d'être sorti...
Il ferait mieux de faire défaut sur une partie de sa dette détenue en grande partie par des riches japonais au bénéfice de la classe moyenne japonaise et de cesser d'entretenir des entreprises zombies pour redonner du souffle à nouvelles entreprises émergentes.
Mener une politique keynésienne dans ces conditions, plus le déclin démographique qui ne peut pas porter de croissance, mieux vaut qu'une partie de la population aisée prenne sa paume et assainir les comptes publics moribonds.
Déclin démographique ou pas la croissance ne crée plus d'emploi ou seulement a la marge
Supprimerpatrice lamy26 juillet 2015 19:15
RépondreSupprimerIl faut 1,5 de croissance pendant plusieurs années en France pour résorber le chômage, autant dire que c'est pas gagné.
@ Patrice
RépondreSupprimerMerci
@ Toutatis
Pour l’instant, nous sommes loin de l’hyperinflation. Certains critiquant au contraire le fait que toutes les mesures prises ne le soient pas suffisamment. A moins que vous disiez qu’en général, la planche à billet ne pose pas de problème (même si cela peut être le cas, cf Argentine ou Vénézuela plus récemment)
@ Anonyme
Sauf que le QE européen a consisté essentiellement en du crédit pour les banques, et non du rachat d’actions. Les quelques mesures timides de monétisation de dettes publiques sont encore réalisées à l’échelle nationale d’ailleurs. Le Japon ne va pas si mal que cela si on étudie les statistiques par habitant :
http://www.gaullistelibre.com/2011/12/un-autre-regard-sur-la-crise-japonaise.html
Le Japon montre qu’il n’y a pas besoin de provoquer un grand choc
Avec une population vieillissante la demande japonaise ne sera pas soutenue, les vieux consomment peu en dehors des soins de santé sur la fin de vie. Le QE de la BCE concerne le rachat des obligations d'états sur le second marché, c'est une monétisation, et apportent de la liquidité aux banques qui suralimentent les marchés d'action ou immobiliers.
RépondreSupprimerLe choc c'est quand le couvercle qui maintient les liquidités dans le chaudron des actions ou des réserves bancaires dans la BoJ sautera.
Vous ne comprenez toujours pas les effets de précontrainte à détente explosive des politiques d'expansion monétaire, vous restez scotché à un modèle linéaire de circuit monétaire non disruptif qui serait purement keynésien.
laissez ce pauvre Keynes tranquille, bon sang ! ^^
SupprimerKeynes a seulement pour opinion que les Etats doivent intervenir dans l'économie... il ne simplifie rien.
On lui fait dire des choses simplistes = on trahit son discours idéologique (notamment on lui faisant dire : ouvrer les vannes de la dépense public en grand, ne comptez pas, claquer du fric ! gaspillez ! -par ex-).
Ensuite, entre ce que la BCE voudrait que les banques privées rachétent... et ce que les banques privées rachétent... on dirait que les deux parties (BCE et banques privées) n'ont pas le même scénario.
Vous l'écrivez vous-même, les banques privées font tout pour se goinfrer sur les marchés d'action et l'immobilier.
"les Etats doivent intervenir dans l'économie"
RépondreSupprimerOui et comment, quand l'état ne comprend plus rien ?
Ce n'est pas l'Etat qui ne comprends plus rien. Ça c'est encore de la propagande ultra-libéral.
SupprimerC'est marrant, car la situation actuelle, c'est justement parce que l'Etat écoute et fait ce que les ultra-libéraux demandent.
"Ça c'est encore de la propagande ultra-libéral."
RépondreSupprimerEt quand l'état grec s'endette jusqu'au cou alors qu'il a reçu de surcroit des fonds structuraux de l'UE pendant des décennies, c'est de la propagande ultra-libérale ?
C'est toi le propagandiste totalement grotesque avec tes anathèmes permanents, tu es une plaie, un véritable troll insupportable, une insulte constante à la réflexion. Tu es incapable d'articuler trois arguments les uns derrière les autres. Putain, mais ferme ta grande gueule !
les fonds STRUCTURELS et non structuraux.
Supprimer"Les fonds structurels européens sont des fonds visant à permettre aux États membres de l'Union européenne d’être solidaires les uns des autres tout en restant compétitifs dans l’économie mondiale. ..." (source Wiki). Enfin, c'est la définition, parce que question solidarité, il faudra repasser ...
DemOs
Il n'y a pas d' "ultra-libéraux" en Europe continentale, il n'y a que des partisans du capitalisme de connivence. La plupart de leurs adversaires sont d'ailleurs quasiment du même type, sauf qu'ils ne défendent pas les mèmes lobbies.
RépondreSupprimerCe commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
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RépondreSupprimerYes read more details here.
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