Billet invité de Marc Rameaux, qui vient de publier « Portrait
de l’homme moderne », suite de
la
1ère partie, et de la
2ème partie
3. Synthèse des
contre-arguments aux théories du complot
Les contre-arguments
aux théories du complot apparaissent de façon claire, une fois que les éléments
précédents ont été compris :
- Les jeux d’influence sont multiples, tandis que les complotistes voient toujours la main d’un groupe unique et tout puissant derrière de soi-disant « décisions » à l’échelle mondiale. Il n’y a pas de « décision » prise à l’échelle planétaire, mais des influences opposées qui se combattent et cherchent chacune à pousser leur point de vue.
- Il est absurde de dénoncer des « connivences » en tant que telles entre des groupes d’individus, le vivant étant constitué de connivences permanentes, qui sont au fondement des réseaux de relations. En réalité, nous ne nous indignons des connivences que lorsqu’elles sont contraires à nos intérêts ou à nos opinions, mais il nous paraît parfaitement normal et naturel d’établir nous-mêmes des connivences pour la poursuite de nos propres buts. Lorsque la connivence nous dérange, elle est complot machiavélique, lorsqu’elle nous convient, elle est association de gentlemen. Plutôt donc que de pointer les connivences avec force indignation, il faut plutôt se demander pour chacune d’entre elles si : 1. Elles sont bénéfiques à la société. 2. Elles se dévoilent de façon suffisamment explicite pour qu’un contrôle démocratique s’exerce sur elles. 3. Elles sont suffisamment équilibrées par des contre-pouvoirs pour ne pas dégénérer en abus de position dominante. Si une association d’intérêt ne respecte pas ces trois critères, il faut effectivement la combattre, non pas parce qu’elle est une association d’intérêt mais parce qu’elle peut être nuisible à l’ensemble du réseau de relations qu’est une société humaine.
- Les associations humaines, les meilleures comme
les pires, sont le fruit d’une génération spontanée, qui n’a rien de
miraculeux mais qui suit les règles de renforcement progressif des
relations entre des individus multiples. Ceux-ci communiquent par des
signaux de reconnaissance simples entre eux, montrant qu’ils poursuivent
des objectifs similaires, ou partagent des convictions communes sur les
comportements qu’ils estiment gagnants dans le jeu social. La meilleure
preuve en est que même dans les pires jeux d’association, celui d’une
mafia, les « parrains » ne sont pas des maîtres tous puissants
mais des rouages pouvant être facilement remplacés. Il y a bien un
« système » au sens logique et physique du terme, mais personne
ne l’a conçu, élaboré et mis en place, tout comme la fourmilière est la
résultante d’une série d’interactions entre individus. L’on pourrait nous
objecter que dans le cas où l’intelligence collective dérape vers de
mauvaises associations, une telle logique systémique dédouane les
individus de toute responsabilité personnelle. L’argument a été réfuté par
Michel Crozier : s’il n’y a pas de « grands responsables »
de telle ou telle association humaine, le choix de rentrer dans le jeu de
telle ou telle reste une responsabilité morale. Rentrer dans le jeu d’une
mafia fait de nous un mafieux, même si la compréhension globale d’une
mafia dépasse largement celle des intérêts individuels qui la constituent.
- Les réponses
ultra-coordonnées des logiques collectives font croire au complot, alors
qu’elles sont précisément la meilleure preuve d’une absence de complot et
au contraire d’une forme de « résonance sociale ». Il peut y
avoir de véritables complots dans l’histoire, comme par exemple la
conjuration de Catilina. Mais précisément, leur maladresse, leurs erreurs
parfois béantes gardent l’empreinte des intentions humaines. Seuls les
phénomènes d’intelligence collective permettent d’expliquer des réponses
aussi précises, rapides et implacables. Tous les phénomènes d’engouement
de société en sont la meilleure illustration. Lorsque ces
« résonances » s’effectuent au sein de cercles du pouvoir, la
suspicion de complot est encore plus importante. Pourtant les dirigeants
sont simplement des hommes, qui obéissent aussi à des engouements, qui
s’avèrent parfois d’ailleurs être des illusions. Les réponses très
coordonnées d’une certaine classe sont seulement la preuve qu’aucun groupe
humain n’échappe aux phénomènes d’intelligence collective, avec sa part
d’aveuglement et d’idéologie, non d’un quelconque complot.
- Même les phénomènes d’oligarchie, de cliques, de
castes défendant leurs intérêts propres au détriment de la collectivité
trouvent une bien meilleure explication par l’intelligence collective que
par les théories du complot. Nous ne nions pas ces phénomènes d’ententes
illicites ou de conflits d’intérêt : il suffit de lire les ouvrages
de Sophie Coignard – qui sont factuels – pour s’en convaincre. Mais ils
obéissent aux règles de formation de toute association d’intérêts humains,
tout comme les bonnes associations. Il s’agit encore une fois de ne pas se
tromper de combat : il est inopérant de dénoncer les connivences en
tant que telles, mais celles qui sont nuisibles et opaques. Elles ne font
partie que de la multitude des jeux croisés des intérêts humains. La
formation d’oligarchies, voire de mafias dans des cas extrêmes, s’explique
non par un quelconque complot, mais par le fait que suffisamment
d’individus peu regardants éthiquement envoient suffisamment de signes de
reconnaissance entre eux et bénéficient d’une opportunité pour s’engouffrer
dans l’aubaine. « Qui se ressemble s’assemble » dit le vieux
proverbe, résumant en un trait les lois d’association humaines, sans
besoin d’être un expert en sciences cognitives. Ces oligarchies naissent
généralement dans des situations où les contre-pouvoirs sont insuffisants.
« Tout pouvoir corrompt, et le pouvoir absolu corrompt
absolument ». Un groupe humain détenant un pouvoir important dérapera
fatalement vers l’entente illicite s’il s’aperçoit qu’il n’a pas de
contre-pouvoir, c’est-à-dire qu’il bénéficie d’une totale impunité. Et il
ne s’agit pas là de complot, mais des lois de la dynamique des groupes.
Si nous représentons
la société comme une immense collectivité d’individus appliquant chacun des
stratégies d’association, de rupture, ou de trahison, il existera des
stratégies plus ou moins gagnantes ou perdantes. La société se moule sur les
stratégies gagnantes, indépendamment des buts, de la morale ou des intentions
de chaque individu. Une morale personnelle permettra peut-être à un individu isolé
de refuser sciemment certaines stratégies gagnantes pour des raisons
éthiques : il lui reste toujours le choix de rentrer ou non dans les jeux
offerts par la société. Mais si trop de stratégies gagnantes sont douteuses sur
le plan éthique, la société deviendra fatalement elle-même douteuse. C’est la
raison pour laquelle « à quel jeu joue-t-on ? » est la question
structurante de compréhension d’une société. Les règles du jeu sont rarement
explicites. Elles peuvent être enfouies dans l’inconscient collectif d’une
société, dans ses valeurs sous-jacentes. Mais elles déterminent les
comportements qui seront encouragés ou découragés, et par voie de conséquence
les types d’homme qui émergeront des jeux sociaux collectifs, qui seront à
l’image des valeurs que cette société véhicule.
Aussi, lorsqu’une
caste malhonnête émerge parmi la classe dirigeante d’une société, et qu’elle se
met à détourner les leviers de l’action collective à ses fins personnelles, ou
encore lorsque ceux qui sont censés représenter l’élite politique et économique
d’un pays sont devenus de toute évidence des usurpateurs, récupérant aux postes
de commandement intermédiaire le travail d’hommes bien meilleurs qu’eux, il est
tentant mais faux d’y voir la marque d’un complot. Une telle situation signifie
seulement que l’on a laissé s’installer des logiques collectives malsaines, des
jeux d’acteurs dans lesquels des comportements non méritocratiques s’avèrent
être des stratégies gagnantes.
Lorsqu’un réseau de
connivence s’est suffisamment renforcé par les lois de l’interaction
biologique, il peut représenter un véritable noyau dur au sein de la société.
En particulier, en l’absence de contre-pouvoirs, les jeux d’influence adverse
ne parviennent même pas à équilibrer de tels noyaux durs, leur conférant une
puissance hors-normes. D’où les comportements de caste renforcés décrits par Sophie
Coignard, allant du sentiment d’impunité à celui de trouver toute malversation
normale. L’on pourra nous demander dans ce cas pourquoi aller chercher une explication
adverse aux théories du complot, si le résultat est le même, à savoir un
pouvoir démesuré conféré à une petite minorité, qui ne tardera pas à se livrer
à toutes les formes d’abus de pouvoir. Lorsque de tels noyaux durs se sont
constitués, le résultat est effectivement le même, mais la différence dans
l’origine du problème a des répercussions considérables : quelqu’un qui
considérera qu’il s’agit d’un complot ex-ante,
préalable à la constitution du noyau, cherchera des boucs-émissaires au sein
d’un groupe d’hommes chargé d’incarner le mal. Celui qui verra dans la
formation de ces noyaux durs la résultante ex-post des jeux collectifs se dira simplement
que les règles de fonctionnement de la société sont défaillantes, et qu’elles
permettent à un comportement de profiteur d’être une stratégie gagnante.
L’action menée en conséquence sera très différente : elle ne consistera
pas en la recherche de boucs émissaires, mais en la réforme des règles du jeu
de la société, de façon à équilibrer à nouveau les pouvoirs par des
contre-pouvoirs, et favoriser à nouveau le mérite. Bien évidemment, un acteur
ayant tiré profit de façon outrancière des mauvaises stratégies sera sanctionné
pénalement, non parce qu’il en a tiré les ficelles mais parce qu’il est rentré
dans ce jeu.
Partie la plus intéressante des trois pour ma part.
RépondreSupprimerMais bon, le mot "complot", apparemment, on ne peut plus l'utiliser, c'est mal et ça fait de vous un complotiste et un adepte de la théorie du complot (c'est plus politiquement correct de parler d'alliance, de coup monté, de ligue, d'association, de conspiration (mal aussi certainement ?), de réunions, menées par des réseaux de connivence, d'intérêts ???...).
Si on reprend la définition de "complot" du Littré : "Résolution concertée secrètement et pour un but le plus souvent coupable." ; du Larousse : "Par extension, projet plus ou moins répréhensible d'une action menée en commun et secrètement".
Cet article ne met pas du tout l'accent sur l'une des composantes essentielles du mot qui est le "secret" :
- fruit de tous les fantasmes (parfois délirants, OK)
- MAIS AUSSI de toutes les manipulations et désinformations.
Bien souvent, quand on se pose des questions sur le système et/ou que l'on essaie de dénoncer les décisions et comportements de certains acteurs (bien souvent en haut de la pyramide), sans même jamais soi-même parler de complot, on se voit traité de complotiste par eux-mêmes ou par des chevaliers blancs (de bonne ou de mauvaise foi) et le mot complot revient sur la table, bien pratique car permettant facilement d'utiliser les bonnes vieilles techniques de désinformation et d'évitement du débat (indignation, rumeur, confusion, division, diversion, dénigrement, ridiculisation...).
J'ai l'impression que cet arme de "théorie du complot" est bien souvent également utilisée par les forts pour :
- brouiller les cartes
- caricaturer, ridiculiser, voire menacer certains "déviants" de la thèse officielle
- promouvoir l'auto-censure
- éviter toute tentative de travail d'investigation
- bannir à jamais le début d'une tentative de sens critique
***Jacko***
Attendez les deux dernières parties de l'article, elles devraient répondre à certaines de vos interrogations.
SupprimerCar l'objet de l'article entier est de montrer que le véritable problème n'est pas de dénoncer les théories complotistes - souvent ridicules - mais les comportements qui les nourrissent : ceux de classes dirigeantes qui se pensent intelligentes en se montrant cyniques, mais qui sont tout autant aveuglées par leur propre suffisance. La question du complotisme comme prétexte et couverture à toutes les malversations est abordée dans les deux derniers chapitres.
Si vous souhaitez anticiper, l'article est présent in extenso sur mon blog ainsi que dans "l'oeil de Brutus" :
http://le-troisieme-homme.blogspot.fr/2015/07/pourquoi-les-theories-du-complot.html
http://loeildebrutus.over-blog.com/2015/07/pourquoi-les-theories-du-complot-existent-elles.html
J'attends donc les 2 derniers articles, merci :)
Supprimermême si ce ne sont pas des interrogations, mais plutôt des constatations, intuitions.
Une analyse détaillée et nominative des réseaux d'influence actuels et classes dirigeantes diverses et variées (niveau Monde) m'intéresseraient également, avec leur lot de motivations, d'outils (manipulations, médias...), d'interférences, voire de contradictions.
***Jacko***
S'il y avait vraiment auto-organisation ou intelligence collective véritable, le monde n'en serait pas où il est actuellement!
RépondreSupprimerIl n'y aurait pas de cycle création-destruction! Toute création serait permanente ou du moins tendrait vers la permanence!
L'intelligence, la vraie, d'inspiration spirituelle, s'occupe de l'ensemble de l'humanité, du Tout, sans en exclure une partie.
Il n'y aurait pas de riches, de pauvres, de maîtres, de valets..., tous serait considérés également sur un monde d'intelligence.
L'intelligence de l'ego, la raison, lorsqu'elle déraisonne nous démontre sa limite et son imperfection. À partir de là, nous ne pouvons plus parler d'intelligence véritable, ni d'intelligence collective, mais plutôt d'un fac-similé d'intelligence avorté, d'un substitutif d'intelligence qui n'a rien d'Intelligent; se traduisant par un collectif d'egos se croyant intelligents qui, tirant la couverture chacun sur son bord détruisent ou déchirent le tissus social, à la place de le souder de le fondre en Harmonie et en Paix.
Autrement dit, l'intelligence collective véritable n'existe pas sur ce monde!
Le Christ en chacun de nous rétablira l'Intelligence, la seule authentique, car contrairement à l'ego de nature satanique et Luciférien, lui, agit dans l'intérêt de l'ensemble et non d'une communauté d'egos tissant des liens fragiles entre eux afin d'exploiter, d'asservir, la majorité de l'humanité.
Il y a des évolutions de convergences d'intérêt de classes dominantes.
RépondreSupprimerLes états nations ne sont qu'une portion de l'histoire, mais ayant entrainé le principe de guerre totale depuis les Assyriens.
L'erreur des promoteurs de l'Europe c'est de prétendre que l'UE se justifie du fait d'éviter 14-18 et 39-45 de se reproduire, alors que c'est la dissuasion nucléaire et l'union des nations occidentales dans l'OTAN contre l'URSS qui a pacifié l'Europe. Donc, c'est tout de même une union d'états contre l'URSS qui a prédominé et pas des états nation isolés et libertaires souverainistes.
La constitution d'états nations étudiée sur des millénaires montre le degré d'accroissement de la violence guerrière qui en est issu, c'est indéniable. Les états ne sont pas l'origine de la civilisation sur le temps anthropologique long.
http://lavoiedelepee.blogspot.de/2015/08/les-epees-la-guerre-premiere-de-la.html?spref=tw
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