jeudi 6 août 2015

Pourquoi les théories du complot existent-elles ? – 5ème partie (billet invité)

Billet invité de Marc Rameaux, que je vous recommande vivement, suite et fin de la 1ère partie, la  2ème partie, la 3ème partie et la 4ème partie. Il vient de publier « Portrait de l’homme moderne ».


5.    Une responsabilité accrue dans l’exercice du pouvoir


« Le pire ennemi de la connaissance n’est pas l’ignorance, mais l’illusion de la connaissance ». Il y a donc pire que l’ignorance crasse des complotistes, ce sont ceux qui se contentent de stigmatiser seulement cette partie sans l’équilibrer par une critique légitime de la société.

Cette forme de stupidité là est plus redoutable que celle des complotistes, parce qu’elle se pense intelligente. Elle ne voit pas son propre narcissisme qui consiste à s’auto-décerner le beau rôle, à être aveugle aux dogmes et aux intégrismes croissants qu’elle observe a contrario des héritages dont elle se prétend issu,  à ne montrer aucune empathie à des souffrances réelles, à se penser au-dessus des lois dans le détournement constant qu’elle fait du bien public et de la valeur des autres. Il ne faut montrer aucune complaisance vis-à-vis du complotisme, notamment le réfuter pied à pied lorsqu’il appelle à la haine et la destruction dirigées contre des boucs émissaires. Mais qui ne voit pas la trahison des élites sans vision et sans classe comme le compagnon maudit du complotiste a lui-même bien peu de vision, à moins qu’il ne veuille pas la voir.

La complexité de notre monde aurait nécessité une responsabilité accrue des élites dirigeantes dans l’exercice du pouvoir. Mais là où l’excellence aurait dû être en proportion, nous n’avons vu au contraire émerger que ceux qui ont détourné le complexe pour se créer des opportunités d’usages dévoyés. « Je n’aime pas les gens qui rendent l’eau trouble pour faire croire qu’elle est profonde » disait Confucius. Ceux qui ont passé leur temps à pêcher en eau trouble ne doivent pas être surpris que les esprits faibles finissent par y imaginer des monstres, alors que la dénonciation de la boue aurait été suffisante. Mais ceux qui sont censés avoir l’esprit pour le comprendre portent une responsabilité plus lourde que les esprits crédules, pour ne pas avoir agi en conséquence.


Si je crois aujourd’hui aux communautés de l’Orque, c’est parce que la bassesse de l’affrontement entre des élites dévoyées et leurs prétendus adversaires haineux et aigris a chuté à des niveaux qui me semblent irrattrapables dans la seule action politique. Pour y voir clair et retrouver des capacités d’action, il faut sortir de ce jeu social malsain, et en proposer un tout autre en contre-exemple. Tout est affaire une fois encore de contre-pouvoir. Le jeu malsain s’est développé comme un organisme vivant, selon les lois de l’intelligence collective. Seul un contre-organisme vivant possédera la vigueur de s’y opposer : les lois ou les actions revendicatrices auront toujours un temps de retard, tandis que la valeur de l’exemple permet de croître en symbiose de ce que l’on veut combattre. 

6 commentaires:

  1. Je ne suis pas sûr que la notion d'exemple soit si utile. L'exemple ne revient qu'à vouloir imiter une pseudo vie, c'est le langage des dominateurs zombies sans pouvoir et sans vie.

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  2. "La complexité de notre monde aurait nécessité une responsabilité accrue des élites dirigeantes."
    L'idée est séduisante, mais irréaliste. Ceux qui dominent, comme vous l'avez montré hier ("pervers narcissiques") ne sont pas les plus sages, les plus ouverts, mais les plus durs, les plus inhumains, n'ayant pas, selon la formule consacrée, "d'états d'âme".

    DemOs

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    1. Ce sont ceux qui dominent aujourd'hui mais il n'y a pas de fatalité à cela, car il existe un profil de bon dirigeant.

      Sachant aussi que tout n'est pas noir ou blanc et qu'il existe toujours au sein d'un même homme les deux profils : la part de Dieu et celle du diable.

      Le remplacement des dirigeants dignes de ce nom par des pervers narcissiques dans les 30 dernières années est un signe des temps, mais ce n'est pas une loi de l"histoire.

      Sur le sujet : http://le-troisieme-homme.blogspot.fr/2015/06/petit-precis-de-psychologie-du-dirigeant.html

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    2. Je serais intuitivement tentés par le fatalisme (pessimisme, réalisme ?) de DemOs sur sa vision des "élites".

      Tu dis qu'il existe un "profil de bon dirigeant" : des noms et des démonstrations dans l'Histoire svp, car de mon côté, je n'en vois guère (peut-être une nouvelles séries d'articles ?).

      Attention quand on met trop sur un piédestal ces "élites" (elles on été dévoyées, les pauvres, comme si à l'origine, elles étaient meilleures...) inconsciemment ou non, on s'enferme tout seul dans un rapport de dominant-dominé.

      Je pense qu'il est plus intéressant effectivement de parler de rapports de force, de réseaux d'influence, de dynamique, plutôt que de continuer à se laisser enfermer dans des notions telles que "élite" (qui selon la définition du Littré est "Ce qu'il y a d'élu, de choisi, de distingué", ça fait un peu droit divin tout ça non ?).
      Selon la définition du Larousse, l'"élite" est un groupe minoritaire de personnes ayant, dans une société, une place éminente due à certaines qualités valorisées socialement".
      Ce qui veut tout dire, "un groupe de personne valorisé par les possédant pour garder l'ordre et les privilèges établis".

      A quand une série d'articles sur les "rapports de force" actuels et les réseaux d'influence ?

      Merci néanmoins pour ces articles

      Jacko

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  3. Je ne pense pas que l'intelligence collective existe...

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    1. https://fr.wikipedia.org/wiki/Intelligence_collective

      Je vous laisse vous faire votre opinion à partir de ces éléments plus fournis.

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