Sur l’A1, l’Etat capitule devant les voyous du voyage

C’est un fait divers qui a occupé l’actualité vendredi et samedi : des voyous du voyage ont mis en place un barrage sur A1 pour obtenir la libération d’un enfant incarcéré pour qu’il puisse assister aux funérailles de son père. Mais dans ce dossier, la réaction de l’Etat a été inadmissible.

Capituler sous la pression des voyous

Bien sûr, on peut quand même penser qu’il est normal qu’un fils puisse assister aux funérailles de son père, même s’il est incarcéré, pour plusieurs délits. L’humanisme et le respect de l’homme justifient que la Cour d’appel d’Amiens ait donné un jugement favorable à l’appel de la famille, après un premier verdict négatif. En revanche, le déroulé de ces dernières heures pose de nombreux problèmes. Vendredi soir, ils ont décidé de bloquer l’autoroute A1 dans les deux sens, en brûlant des palettes et des pneus et en coupant des arbres avec des tronçonneuses. Les forces de l’ordre les ont laissé faire, n’intervenant pas. Finalement, après que la justice ait annoncé vers 11 heures que le fils pourrait finalement assister aux funérailles de son père, les gens du voyage ont levé les barrages, une heure après.

Outre toutes les perturbations pour ceux qui n’ont pas pu emprunter l’autoroute A1, ou ceux qui ont subi des embouteillages, il ne faut pas oublier que les gens du voyage ont aussi dégradé l’autoroute (outre la coupe d’arbres environnant, une forme de vandalisme), imposant de couteux travaux et la poursuite de la fermeture de cette autoroute. Même si l’on peut imaginer que les plaignants avaient des chances de gagner cet appel, la séquence est désastreuse car, outre le fait que les forces de l’ordre aient laissé faire cette occupation de l’espace public, cela donne l’impression que la justice a reculé sous la pression de ces barrages, les justifiant a posteriori. Désormais, on sait que si l’on interrompt une autoroute, il est possible de faire reculer l’Etat, et les gens de voyage l’ont sans doute bien compris.

Ce qu’il aurait fallu faire

Il est absolument inadmissible que les forces de l’ordre, et donc à travers elles, l’Etat, ait laissé faire cette occupation de l’espace public, coupant un accès routier majeur et dérangeant ainsi des milliers de citoyens. Même si une intervention pouvait dégénérer, il fallait intervenir au plus vite et dégager dès samedi ces gens du voyage qui se croyaient tout permis pour bien leur signifier que l’Etat n’accepte pas qu’ils occupent ainsi l’autoroute et interrompent la circulation. Et si le droit le permet, il aurait été légitime de les sanctionner pour cette action. Il est totalement effarant qu’ils se sortent de cette affaire sans la moindre conséquence concrète, ce qui semble le cas ici. Ce faisant, cela représente un terrible encouragement à la perturbation de l’ordre public et à toute sorte de revendications similaires.

Cela n’exclut pas de permettre au fils d’assister aux funérailles de son père, ce qui semble humain, mais il n’est pas juste de laisser faire de telles perturbations à l’ordre public sans la moindre conséquence. Ce cas est symptomatique d’une époque qui consacre à la fois l’impunité grandissante des coupables de délits et une manière de fonctionner qui ressemble davantage à la loi de la jungle ou au chantage. Bref, ceci est tout le contraire de ce que l’Etat de droit devrait être. Il est désespérant de constater que tant de commentateurs de cette affaire n’aient pas davantage noté les aspects révoltants du laisser-faire de l’Etat, qui semble avoir perdu tout sens commun en laissant faire de la sorte un tel trouble à l’ordre public, sans la moindre sanction et tout en semblant céder au chantage des gens du voyage.

La vie en société, et dans un Etat de droit, suppose un minimum de respect des règles de vie commune. En laissant faire les voyous du voyage sur l’autoroute A1 sans intervenir, qui ont pu ainsi lever le camp quand la justice leur a donné raison, cela envoie un bien mauvais message à notre société.