C’est une
histoire absolument abracadabrantesque. Aux
Etats-Unis, une entreprise de biotechnologie a racheté les droits d’un
médicament, puis a annoncé vouloir en multiplier le prix par 55, déclenchant
une polémique reprise par Hillary Clinton ! Une histoire révélatrice de
notre époque.
Robin des
bois inversé
Mais
jusqu’où va l’indécence du capitalisme moderne ? GSK commercialisait le
Daraprim, un
médicament contre les infections parasites, et notamment la toxoplasmose, une
infection particulièrement dangereuse pour les personnes qui ont un système
immunitaire affaibli, comme les patients atteint du SIDA ou victimes de
certains cancers. Outre-manche, ce médicament est vendu autour de 20
dollars pour 30 comprimés par GSK. Mais
les droits du médicament pour les Etats-Unis ont été vendus en 2010, puis après
une nouvelle vente, ont été récupérés par Turing, qui a annoncé une
augmentation de son prix de 13,5 à 750 dollars par pilule ! Quelques
jours plus tard, l’entreprise a annoncé reconsidérer cette hausse de prix. Certains
justifient cela par la maximalisation des intérêts des actionnaires.
The
Economist précise qu’il ne faut pas s’attendre
à ce que des concurrents viennent perturber les plans très lucratifs de Turing
puisqu’il s’agit d’un médicament à faible volume, et les coûts des tests
nécessaires seraient rédibitoires. La pratique de Turing n’est malheureusement
pas nouvelle puisque Valeant
a acheté les droits de deux médicaments pour le cœur avant d’en monter le prix.
Horizon a multiplié par 7 le prix du Vimovo, un médicament anti-douleur après
l’avoir racheté à Astra Zeneca en 2013. Selon
The Economist, les prix des
médicaments ont augmenté de pas moins de 127% depuis 2008, contre 11% pour les
prix à la consommation. Avec les systèmes de santé publics et les
mutuelles, certains laboratoires pharmaceutiques semblent prendre la
collectivité pour un distributeur d’argent.
Le
néolibéralisme n’est pas libéral
Cela pose
aussi la question des règles publiques, qui laissent faire de tels
comportements, et qui peuvent mêmes les nourrir, de manière directe ou
indirecte, dans le cas des médicaments, payés par la collectivité ou des
mutuelles, qui y gagnent en voyant leur chiffre d’affaire augmenter aussi vite
que leur intérêt pour des citoyens qui ne peuvent plus payer les rançons
médicamenteuses demandées par certains
gangsters du médicament comme Turing. Même si on ne peut pas nier les
progrès apportés à notre santé par certains laboratoires, ces comportements
totalement abusifs amènent à se poser la question du cadre réglementaire à
mettre en place pour éviter de tels abus. En effet, il y a une responsabilité
des Etats qui ont mis en place ce système, où la privatisation de la santé n’en
baisse pas le coût.
Ce faisant, le
néolibéralisme révèle aussi qu’il finit par s’éloigner du libéralisme en
privilégiant la rente, le monopole et l’abus sans la moindre vergogne. Il
faudra se souvenir de ces pratiques pour construire un système qui ne les permet
plus, ou, a minima, les sanctionne à leur juste mesure.
Une telle politique n'est possible que dans une société ultra-inégalitaire. Pour soutirer un maximum d'argent aux plus riches il faut pratiquer des prix qui placent les plus pauvres dans l'impossibilité de se soigner. Dans une société où les inégalités seraient restées raisonnables un tel modèle économique ne marcherait pas.
RépondreSupprimerEn retour cette politique commerciale aggravera encore les inégalités dont elle se nourrit.
On a un problème très similaire en France avec le logement. Pour pouvoir extorquer aux classes moyennes et supérieures des loyers vraiment monstrueux il faut organiser une pénurie telle que nombreux sont les pauvres qui ne peuvent pas se loger du tout. Si tous les français avaient un revenu identique cela ne marcherait pas, et il serait plus lucratif pour les spéculateurs d'autoriser la constructions de tous les logements nécessaires pour satisfaire les besoins du peuple, afin d'avoir un maximum de clients qui paieront tous à peu près le même loyer.
En retour la pénurie de logements aggrave encore les inégalités qui fondent son modèle économique.
Ivan
Monsieur Herblay,
RépondreSupprimerLe "néolibéralisme" ne s'éloigne pas du libéralisme... il est la stricte application du libéralisme. Rien de plus, rien de moins.
Quand l'Etat se tait réellement (comme le veut la doxa libérale), quand l'Etat ne fait pas son boulot (réglementer), quand l'Etat n'arbitre plus entre les différents intérêts particuliers ; il y a le véritable libéralisme.
Il n'y a pas plus de bon libéralisme qu'il n'y a de bonne monarchie absolue.
A l'origine, le libéralisme avait pour but de lutter contre les abus du pouvoir ; mais une fois que le libéralisme triomphe, que le libéralisme est la seule doctrine qui a voix au chapitre : le tyran est le libéralisme.
C'est le principe même du libéralisme que de penser que les intérêts privés feront une société juste du seul fait qu'il y a des intérêts particuliers libres ! (les vices privés font la vertu public, parait-il)
Cette affaire illustre aussi à quel point il est ridicule de culpabiliser les citoyens qui gaspillent les médicaments. En aucun cas il ne sera possible de faire des économies sur les médicaments en réduisant les quantités consommées, puisque les laboratoires riposteraient immédiatement en augmentant leurs prix.
RépondreSupprimerIvan