Les
nouvelles économiques venues du Japon depuis quelques jours peuvent sembler
mauvaises, entre
une baisse du PIB de 0,2% au 3ème trimestre, et un
nouveau recul mensuel des prix de 0,1% en octobre. Faut-il y voir l’échec
des Abenomics ou seulement l’écume de la vague ?
Verre à
moitié vide, ou à moitié plein ?
Bien sûr, pour
les détracteurs des Abenomics, le recul du PIB et la baisse des prix montrent
que la politique du Premier ministre, Shinzo Abe, est un échec. Après tout,
le pays reste loin de l’objectif de 2% d’inflation affiché par la banque
centrale et la conjonction de ces deux indicateurs complique la tâche d’une
majorité qui s’est fixé comme objectif une croissance du PIB nominal. Mais,
comme souvent, les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît. D’abord, si
les prix affichent un recul de 0,1% sur un an, ils sont en hausse de 0,7% sur
un an hors prix de l’alimentaire et de l’énergie, qui affichent un fort
recul conjoncturel. Ensuite, il
faut se souvenir que le PIB du Japon avait bien progressé au premier trimestre
et surtout que la population du pays baisse, ce qui relativise les chiffres du
PIB.
En effet, The
Economist avait publié un papier très
intéressant sur les « années perdues » du Japon, qui montrait que
quand on raisonne en PIB par habitant, la performance économique du pays est
finalement assez peu éloignée de celle des Etats-Unis ou des pays européens.
En outre, les variations trimestrielles du PIB ne sont pas toujours très
signicatives : il vaut mieux considérer les variations sur un an, qui ont
plus de sens. En outre, point crucial, certes fortement influencé par la
démographie déclinante du pays (mais qui ne suffit pas à certains pays
européens), le
taux de chômage est tombé à son plus bas depuis 20 ans : à peine 3,1% de
la population active. Mieux, pour relancer l’économie, le
salaire minimum devrait progresser de 3% par an, qui devrait passer de 780 à
1000 yens par heure.
De la
pertinence des Abenomics
En effet, Shinzo
Abe vient d’annoncer une hausse de plus de 25% du salaire minimum, quand
l’Europe ne parle le plus souvent de baisse ou de gel (à l’exception de
l’Allemagne). Idem sur le plan de rachat de dette publique par la banque
centrale. Parti
sur un rythme pourtant déjà extrêmement fort d’environ 10% du PIB par an au
printemps 2013, devant la difficulté à casser la déflation qui frappe le
pays depuis des années, le
pouvoir n’a pas hésité à accélérer le plan de rachat de dette publique,
protégeant l’Etat des marchés, et a actionné le levier des salaires. Quel
contraste avec les politiques des pays européens ! Il semble que nos dirigeants
persistent dans les erreurs du passé du Japon en
fermant les yeux sur les changements récents qui remettent sans doute trop en
cause les dogmes actuels.
Merci au
Japon de démontrer qu’il est possible de mener des politiques différentes,
tournées vers le bien-être de tous, comme
« l’assouplissement
quantitatif pour le peuple » défendu par Adair Turner, mis à la
tête de l’instance de régulation financière britannique après l’effondrement de
Lehman Brothers.
Je me marre toujours lorsqu j entend parler de récession au Japon avec un chômage à 3% max, et un manque de main d'œuvre flagrant, pas de crime, une paix sociale totale, une population homogène
RépondreSupprimerJ adore le Japon (j y vais skier )
Cette vision bienveillante du Japon est juste. Bien sûr que le Japon s'en sort mieux que nous, et s'en sortira toujours mieux: ce qu'on appelle ici l'immigration n'y existe pas. Avec le développement de la robotique, le vieillissement de la population n'est pas un problème. L'arrêt de la croissance démographique est d'ailleurs nécessaire: sur la même surface que l'Italie, avec encore moins de surface cultivable, il y a deux fois plus d'habitants. Cette modération démographique est une contribution à la paix dans le monde. Bravo le Japon!
RépondreSupprimerPetite précision : le PIB a baissé car les entreprises ont déstockées. La demande a progressé de 2,1% en rythme annuel, donc pas de quoi s'alarmer outre mesure d'autant plus.
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