C’est un
débat plus que légitime après
huit ans de politiques peu conventionnelles des banques centrales, aux
résultats médiocres. Aujourd’hui se
posent des questions sur les politiques alternatives qui existent et qui n’ont
pas été utilisées, notamment la
« monnaie hélicoptère », la distribution directe d’argent créé
par la banque centrale aux citoyens pour gonfler plus efficacement la demande.
L’assouplissement
quantitatif, pour le peuple
C’est
pourquoi revient dans le débat public une
idée défendue par Milton Friedman dans les années 1930, la distribution
pure et simple d’argent aux citoyens par la banque centrale pour créer un
pouvoir d’achat en supplément, avec pour objectif de soutenir la demande et
lutter contre les tendances déflationnistes. L’idée derrière cette idée
iconoclaste, est d’être une
alternative avec la relance par les dépenses publiques, que Milton Friedman
n’appréciait guère, préférant que chaque individu puisse utiliser l’argent
ainsi disponible de la manière dont il le souhaite. On peut donc
paradoxalement trouver une racine libérale derrière cette idée, évoquée au
début des années 1990 pour sortir les pays européens de la crise. Mais
l’hélicoptère pourrait aussi se coupler à une relance classique des dépenses
publiques.
Après tout, plutôt
que de racheter pour près de 1000 milliards d’euros d’actifs, la BCE
pourrait en consacrer la moitié pour distribuer la bagatelle de 1500 euros à
chacun des citoyens de la zone euro, ce qui relancerait la consommation, la
demande, et la croissance. Malgré tout, comme
l’écrit Romaric Godin dans la Tribune,
cette idée serait extraordinairement compliquée à mener dans la Tour de Babel
institutionnelle qu’est l’UE, ce qui plaide, une fois de plus, pour
le démontage de ce monstre monétaire qu’est l’euro. The
Economist a consacré un dossier sur le bilan
des politiques monétaires menées et aux alternatives possibles pour lutter
contre la prochaine récession (ce qui en dit long sur son
jugement sur la pertinence des politiques menées depuis plusieurs années, même
si elles vont dans son sens).
Mais le plus
frappant ici, qui n’est pas suffisamment mis en avant, et qui rejoint les
critiques de Krugman, qui
reprochait aux dirigeants d’aider les banques et non les citoyens lors de la
crise des subprimes, c’est bien cela : quels doivent être les
bénéficiaires de toutes ces aides ? Pour l’instant, la
Fed et la BCE choisissent les banques et le système financier, quand le
Japon choisit l’Etat et donc indirectement les citoyens avec la monétisation
des dettes. Et si on aidait directement les citoyens ?
On ne sait pas comment les citoyens utiliseraient cet argent : dans quelle proportion il serait consommé ou épargné. On pourrait craindre aussi que cette mesure relance les importations et détériore la balance extérieure sans créer d’emplois ni d’investissements. Une autre solution serait que la BCE finance des grands travaux comme la transition énergétique.
RépondreSupprimerC'est tout à fait mon avis ... la distribution hélicoptère serait une erreur (une de plus)
Supprimer@ Moi
SupprimerOu en pièces d'or...
Car la confiance dans une monnaie qui tombe du ciel explicitement risquerait de diminuer très fortement.
Dans le contexte actuel, l'argent ainsi tombé du ciel sera thésaurisé (la très faible inflation et le pessimisme des anticipations y encouragent), soit dépensé à acheter des produits majoritairement étrangers, au vu de la désindustrialisation poussé de l'économie française et de ses problèmes de compétitivité. C'est autant de gagné pour les Chinois ou les Allemands, mais l'économie française n'en profitera guère. Prétendre relancer la consommation dans la zone euro en affectant d'ignorer l'hétérogénéité des niveaux de compétitivité en son sein et dans le monde relève de l'aveuglement ou de l'escroquerie intellectuelle. Le problème est que le carcan du système euro n'offre pas de solutions alternatives.
SupprimerYPB
Jacques Sapir ne veut pas monter dans cet hélicoptère :
RépondreSupprimerhttp://russeurope.hypotheses.org/4827
si cela marche aussi bien que les taux negatif (cf le Yen qui augmente, consommation en berne) cela ne va pas aller loin.
RépondreSupprimermode avocat du diable, il serait plus efficace que la BCE donne ces 1000 milliards pour des depenses d'infrastructure, comme herbergement des millions de "chances" envahissant l'europe cette annee.
On peut compter sur l'hostilité allemande à un tel onéreux système pour sauver l'euro, loin d'être infondée. Je pense que l'euro sera fini lorsque les Allemands en auront marre des couleuvres que la BCE leur fait avaler pour une monnaie qui leur est encore favorable. Lorsqu'elle ne le sera plus il siffleront la fin de "la récréation".
RépondreSupprimerC'est un jeu de bonneteau car les états sont garants de la BCE, ca revient à augmenter la dette des états par un autre jeu d'écriture, ce que l'Allemagne ne laissera pas passer.
RépondreSupprimer"Deux réponses existent, cependant. La première est que l’on peut changer les lois budgétaires. Plusieurs pays, dont l’Allemagne et la Suisse, ont adopté des lois qui imposent la discipline budgétaire, non pas année après année, mais sur une longue période qui recouvre les hauts et les bas conjoncturels. Inscrire une telle exigence dans la constitution est bien plus sain que d’y parler de déchéance de nationalité."
http://www.telos-eu.com/fr/europe/economie-europeenne/le-roi-draghi-est-nu-vive-la-relance-budgetaire.html
Laissons la déchéance de nationalité tranquille !
SupprimerPar contre, il est extrêmement malsain de vouloir inscrire dans la constitution un programme économique.
Cela traduit un refus de démocratie... et une volonté de diaboliser le principe de gouvernement.
"il est extrêmement malsain de vouloir inscrire dans la constitution un programme économique."
RépondreSupprimerIl ne s'agit pas d'un programme économique mais de limites qui laissent malgré tout une large marge de manoeuvre. Vous trouvez sain que les élus fassent n'importe quoi avec l'argent de l'état pour leurs manoeuvres électoralistes ?
Il s'agit donc bien d'un programme économique.
SupprimerVous ne faites que confirmer le déni de démocratie... les choix économiques qui ne vous plaisent pas sont soit-disant démago : "manoeuvres électoralistes".
Un programme économique ne doit pas être inscrit dans un la constitution ; c'est pas le rôle de la constitution.
Et le but n'est pas de mettre hors de portée du débat démocratique les programmes économiques.
Un peu de rhétorique pour finir : poser des limites économiques, c'est complaire à l'électorat dont vous faites parti... il est important de ne pas laisser aux élus libéraux la possibilités de se lancer dans des manoeuvres électoralistes pour complaire à l'électorat libéral (c'est démago).
Je trouve particulièrement malsain que le gouvernement fasse n'importe quoi avec l'argent public pour enrichir encore davantage des multi-millionnaires qui passent leur temps à dire que l'Etat ne devrait pas intervenir tout en recherchant constamment l'intervention de l'Etat à leur seul profit.
Le problème que pose la constitutionnalisation des règles de discipline budgétaire n'est pas que politique. C'est aussi une très mauvaise idée sur le plan économique, pour les pays du moins qui disposent d'une vraie monnaie souveraine (ce qui exclut évidemment les prisonniers de la zone euro). Voir ce qu'en disent les néochartalistes (Modern Money Theory dans le monde anglo-saxon) : R. Wray, W. Mitchell, etc.
SupprimerYPB
Cette idée d'hélicoptère qui donnerait du pognon directement aux braves citoyens sans aucune compensation, je n'y crois pas un instant.
RépondreSupprimerSi les banques centrales ne savent plus quoi faire de leur pognon, elles n'ont qu'à réduire fortement la dette des états (pour rappel, l'IR en France ne sert qu'à rembourser les intérêts de cette putain de dette), et imposer par la suite aux états de faire de vraies politiques d'investissement, style grands travaux, virage écolo, incitations aux économies de proximité et aux services publiques également de proximité, et tout le toutim.
***Jacko***
Très cher Jacko,
Supprimermais la BCE y pense justement... rendez vous compte du nombre d'hélico qu'il va falloir fabriquer... ça va donner de l'emploi... nécessiter des infrastructures... tout ça tout ça.
Bref des grands travaux...
Si on peut même plus rigoler...
Les nuances de Dupongnangnan :
RépondreSupprimer"Côté nuances, il s’en prend plus franchement que le Front à l’«assistanat» et souhaite, lui, «faire maigrir un Etat-providence devenu obèse»."
http://www.liberation.fr/france/2016/03/29/dupont-aignan-l-etoile-du-perche_1442657
De nos jours, on a plutôt à faire à un rouleau compresseur qu'à un hélicoptère et nos marionnettes européennes (les dirigeants)ne semblent pas le moins du monde disposés à lâcher du lest. J'ignore quel est votre environnement, mais, moi, là où je suis, je vois que les robinets budgétaires laissent passer de moins en moins de liquide dans l'économie réelle. La solution passe par une remise en cause radicale des structures et politiques REACTIONNAIRES actuelles. Ne nous leurrons pas, nous n'obtiendrons rien en bricolant, ni en rêvant.
RépondreSupprimerDemOs
@ Moi
RépondreSupprimerC’est sûr, les modalités sont importantes, pour ne pas qu’une part trop importante parte dans des importations. Et je reste partisan de grands travaux. C’est un débat qui me semble intéressant. Merci pour le lien
@ YPB
Comme je l’écris, à la base, il faut revenir aux monnaies nationales
@ Anonyme
Bien évidemment ingérable dans la zone euro. De telles lois Suisse et Allemande me semblent anormales dans une démocratie. On peut ajouter que de telles lois semblent délirantes étant donné ce qui s’est passé depuis 10 ans et qui a imposé des réponses qui sont sorties des cadres préconçus d’avant
@ Abd_Salam
Bien d’accord. Merci pour votre défense de la démocratie