samedi 13 août 2016

Paris, Londres : études supérieures trop chères !

Ce n’est malheureusement pas une évolution nouvelle ou inédite. Les Etats-Unis ont atteint des somments aux conséquences effarantes, même dénoncées par certains ultralibéraux. Malheureusement, la tendance se propage avec un renchérissement du coût des études supérieures, à Londres et Paris.



Un dysfonctionnement profondément injuste

On connaît les grandes universités étasuniennes, où une année d’étude peut coûter plusieurs dizaines de milliers de dollars, et le cortège de dettes étudiantes. Malheureusement, la tendance se propage ailleurs : au Royaume-Uni, le triplement des frais de scolarité, à 9 000 livres par an fait que 62% des enfants venus des écoles publiques ont rejoint l’université en 2014, contre 66% l’année d’avant et 85% pour les enfants venus des écoles privées. En France, depuis plusieurs années, le prix d’une année de scolarité dans les écoles de commerce ne cesse de s’envoler : autour de 6 000 euros dans les années 1990, il atteint désormais jusqu’à 15 000 euros par an dans les plus grandes écoles. Une hausse à l’utilité profondément contestable et dont les conséquences, notamment sociales, posent problème.

The Economist, qui dénonce régulièrement la hausse du prix des universités outre-Atlantique, a montré que cette hausse du prix des études est totalement pharaonique et déconnectée de la qualité de l’enseignement fourni aux étudiants. Depuis 1978, le coût de l’université a été mulitplié par 12, une hausse 5 fois plus rapide que l’inflation. Mais cette envolée des coûts a servi à financer des campus somptuaires et une administration devenue aussi importante que le corps professoral, quand les étudiants ont vu leurs heures de cours tomber de 24 à 14 comme leur niveau, chose camouflée par des notations plus généreuses. Bref, le marché peut produire une éducation supérieure dysfonctionnelle où les établissements dépensent sans compter, sans le moindre bénéfice académique pour les étudiants.

Le problème est, comme le souligne Eric Verhaeghe dans le FigaroVox, que cela entretient le creusement des inégalités dans la société Française et contribue à instaurer une forme d’aristocratie financière moderne où l’immense majorité des classes populaires ne peuvent plus accéder aux meilleures études supérieures. C’est un point souligné par Paul Krugman dans son livre de 2008, qui montrait qu’un mauvais élève riche avait autant de chances d’aller à l’université qu’un bon élève pauvre. En 2015, The Economist soulignait que 80% des enfants du premier quart de revenus étaient diplômés du supérieur, contre 10% de ceux du dernier quart… Pour que l’ultralibéral The Economist en vienne à souligner le caractère inégalitaire des universités étasuniennes, il faut vraiment que la cote d’alerte soit dépassée.


Malheureusement, ces récentes statistiques montrent que l’Europe prend le chemin délétère des Etats-Unis. Bien sûr, les établissements ne font que suivre les règles de leur marché, et il ne faut pas forcément jeter la pierre au privé, mais cela montre surtout que l’Etat doit intervenir, sans doute pas comme Hillary Clinton le proposait il y a un an, mais bien plus comme le proposait Bernie Sanders.

14 commentaires:

  1. Ne pas jeter la pierre au privé???En matière d'éducation celà vous choquerait'il?

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  2. seuls les enfants d'élites auront accès à l'instruction !

    pour les classes moyennes s'en sera fini , cela se passera comme pour devenir connu en politique , sans avoir plusieurs millions devant sois , il sera totalement impossible pour le rêve d'accession .

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  3. Quand on voit que les écoles de commerce produisent des benêts comme Herblay, même gratuites c'est trop cher.

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  4. Si les études supérieures deviennent inaccessibles aux classes moyennes et populaires, la compétition devient bien moins dure pour ceux qui restent. On peut donc sans inconvénient baisser le niveau et diminuer les heures de cours.

    Plus les études sont chères, plus elles sont faciles et agréables pour ceux qui peuvent se les payer.

    De toute façon, sommes-nous bien sûrs que c'est la seule qualité des études supérieures qui explique la meilleure réussite professionnelle de ceux qui en bénéficient ? Il me semble que le réseau de relations que les jeunes tissent entre eux pendant leurs études est tout aussi décisif, sinon plus.

    En tout cas pour Pôle Emploi la question est tranchée depuis longtemps. Le premier conseil que donne l'agence aux chômeurs est de se constituer un réseau, car deux tiers des postes sont attribués au piston.

    Si l'économie crée juste assez d'emplois pour les enfants des classes supérieures, il n'y a pas de raison de permettre aux classes moyennes et populaires de suivre des études supérieures. N'est-ce pas déjà le cas depuis longtemps, en France comme en GB et aux USA ?

    Le renchérissement des études supérieures est la réponse logique et cohérente des classes possédantes au chômage de masse. A contrario si les rejetons des classes possédantes n'étaient pas assez nombreux pour pourvoir tous les postes intéressants, le patronat protesterait, et on entendrait à nouveau parler de la démocratisation des études supérieures comme mission à confier à l’État.

    Ne nous faisons pas d'illusion, ce n'est pas demain la veille.

    Ivan

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  5. Les normes d'urbanisme malthusiennes (hauteurs limites de construction, densités maximales d'occupation des sols, sites inconstructibles etc) qui ont creusé une terrible pénurie de logements dans les grandes villes servent aussi les intérêts de la classe possédante face au chômage de masse.

    Les rejetons des classes possédantes sont clairement avantagés sur le marché du travail face à ceux des classes populaires et moyennes quand ces derniers ont été chassés en lointaine banlieue, et partent avec le handicap de devoir passer deux heures par jour sur la route ou dans les transports pour pouvoir disputer les emplois aux fils de la bourgeoisie, qui seuls désormais peuvent se loger en ville.

    D'ailleurs bien avant le renchérissement des frais universitaires proprement dit les familles des classes populaires puis moyennes ont commencé à renoncer à envoyer leurs enfants faire des études supérieures, à cause de l'impossibilité pour ceux-ci de trouver à se loger en ville.

    Je crois que les premières pannes du défunt ascenseur social ont été causées par les normes d'urbanisme malthusiennes.

    Ivan

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  6. Et cela est encore plus grave qu'on pourrait croire car les normes d'urbanisme malthusiennes, réponse des classes possédantes au chômage de masse, augmentent en retours encore le chômage de masse. En effet les loyers exorbitants appauvrissent les ménages qui doivent se saigner aux quatre veines pour les payer, et dépriment la demande globale, donc l'activité et l'emploi.

    Historiquement les normes d'urbanisme malthusiennes ont été le premier facteur structurel de chômage dans notre pays dès le début des années 1980, bien avant l'intégration européenne puis le démantèlement de l'assurance vieillesse.

    Ivan

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  7. "car deux tiers des postes sont attribués au piston."

    C'est l'une des causes majeures de l'état mauvais de l'économie française, le piston comme critère de recrutement et pas la compétence, ce qui entraine un management de nullards dans un pays quasi-bananier du plus haut niveau de l'état au plus haut niveau des entreprises.

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  8. "C’est un point souligné par Paul Krugman dans son livre de 2008, qui montrait qu’un mauvais élève riche avait autant de chances d’aller à l’université qu’un bon élève pauvre".
    Et là, on n'en est qu'à la phase d'entrée en université.

    Un mauvais élève riche a 10.000 fois plus de chance de trouver un bon stage, un bon job, d'être bien payé et de "faire carrière" qu'un bon élève pauvre.
    ça a toujours été comme cela, mais en ce moment, un peu plus qu'avant.

    ***Jacko***

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  9. @ Anonyme 9h21

    Les écoles de commerce sont para-publiques (elles dépendent des CCI) : dans les deux cas que je cite, les problèmes viennent de choix de l’éducation supérieure publique malheureusement. Parfois, le privé peut aussi avoir du bon.

    @ Ummite

    C’est le risque

    @ Ivan

    En effet, c’est une forme de protection financière, dénoncée par Krugman et Stiglitz aux USA. Sur le piston, je ne pense pas que 2/3 des recrutements viennent de là, loin de là. Les enjeux d’une embauche sont trop importants. Je crois que ces cas sont rarissimes. Le réseau joue sur d’autres choses : une bonne préparation notamment. Sur le logement, vos points sont intéressants.

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  10. "Sur le piston, je ne pense pas que 2/3 des recrutements viennent de là, loin de là."

    A part votre doigt mouillé, comme d'habitude, quelles sont vos sources ?

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    1. 19 ans de vie professionnelle dans des entreprises qui embauchent des cadres

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  11. " Le marché de l'emploi est, en France, composé de 30 % de marché ouvert, et de 70 % de marché caché"

    https://fr.wikipedia.org/wiki/March%C3%A9_du_travail

    C'était déjà le cas à l'époque ou Pôle Emploi s'appelait encore l'ANPE. Alors même que la publication des offres étaient obligatoire (elle ne l'est plus) 70% des créations d'emploi n'étaient pas publiées, mais réservées à l'avance et attribuées au piston.

    Et que faisait l'ANPE ? Au lieu de sévir contre les patrons qui violaient la loi elle distribuait aux chômeurs des brochures (j'en ai eu entre les mains) qui leur expliquaient l'importance de se constituer un réseau, et leur conseillaient de ne pas trop compter sur l'ANPE pour trouver du travail.

    Ivan

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  12. "elle distribuait aux chômeurs des brochures (j'en ai eu entre les mains) qui leur expliquaient l'importance de se constituer un réseau"

    C'était déjà le cas il y a 20 ans, mais Herblay vit sur une autre planète.

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  13. A propos du système actuel pourri, corrompu, ici, comme de l'autre côté de l'Atlantique, lisez le très bon article de Chris Hedges, un excellent journaliste américain, article intitulé "escroc contre escroc". Ou Clinton et Trump sont décrits tels qu'ils sont : deux représentants du système dominant.

    DemOs

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