Les
manifestations des forces de l’ordre, en plein état d’urgence, chose
théoriquement interdite, comme le note Jacques Sapir, démontre une bien une
profonde crise de régime. Mais, en
lisant les témoignages effarants de policiers à cette occasion, elles
révèlent également la profondeur du malaise d’un pilier de notre République,
abandonnés par absolument tous nos dirigeants.
Le produit
de la RGPP et du libertarisme
Mais
en écoutant les témoignages, on constate qu’il y a un double problème. Bien
sûr, il
y a un problème de droit, avec cette indulgence, pour ne pas dire cette
impunité, des délinquants, qui osent affronter directement ceux qui
assurent l’ordre public, au point que les policiers finissent par ne pas oser
se défendre. Mais on
voit aussi un énorme problème de moyens, avec nos policiers aux équipements
misérables, entre arme chargée à moitié, voiture qui affiche 250 000
kilomètres (outre
le fait de n’être souvent pas Français), l’absence d’aide pour l’entretien
de commissariats en piteux état. Ce manque de moyens, cela vient également de
l’étendue des tâches qui sont demandées en état d’urgence.
Tout ceci
aggrave une situation qui impose des patrouilles à deux, ce qui semble juste
pour patrouiller dans les zones sensibles. Enfin, les
policiers dénoncent une politique du chiffre qui les éloigne d’un traitement de
fond des problèmes. Tout ceci amène à prendre un peu plus de recul, et à
voir que la droite, et notamment Nicolas Sarkozy, a été au pouvoir pendant dix
des quatorze dernières années et demie, et que derrière
les agitations législatives et les déclarations martiales, elle a coupé des
milliers de postes et mis en place cette fameuse RGPP, qui porte une lourde
part de responsabilité dans le dénuement actuel des commissariats. Bref, la
droite est au moins aussi responsable que la gauche.
Les
annonces du gouvernement, après les premières mesures annoncées en début
d’année (hausse des effectifs ainsi que du traitement), contribueront sans
doute à améliorer l’ordinaire. L’allègement des tâches, l’alignement des
peines commises contre personne détentrice de l’autorité de l’Etat et un budget
additionnel de 250 millions d’euros pour l’équipement vont dans la bonne
direction. Mais comme
le dit Sapir, ce
sont des solutions conjoncturelles, de court terme. Bien sûr, ce n’est pas
en quelques jours que l’on peut traiter la question de la légitime défense ou
des zones de non droit et il vaut mieux prendre le temps de bien le faire, mais
cela aurait pu être fait depuis 2012, comme depuis 2002.
Les
91% de soutien à ce mouvement ne marquent pas obligatoirement un durcissement
sécuritaire, mais seulement la volonté d’un respect de l’ordre républicain
et de la défense du service public. Malheureusement, aucune
réflexion de fond n’est entamée à gauche comme à droite, et cette dernière
semble vouloir suivre le
mauvais exemple britannique avec toujours plus de coupes.
"cette fameuse RGPP, qui porte une lourde part de responsabilité dans le dénuement actuel des commissariats"
RépondreSupprimerS'il n'y avait que les commissariats qui étaient victimes de la fameuse RGPF. D'autres administrations régaliennes sont touchées par cette absurdité. Sous couvert de modernisation et de réforme de l'administration (une meilleure gouvernance et la simplification par la dématérialisation) la RGPF a taillé des croupières dans les postes, les moyens et le support de services tels que la douane ou les impôts (notamment les services d'enquête).On pourrait citer la jsutice ou encore la pénitentiaire.
Bah oui...ma brave dame, toute cette armada de fonctionnaires payée à pas faire grand'chose hein ?! la douane ça sert à quoi puisqu'il y a l'UE à 28 Etats membres (moins 1 dans les mois futurs).Y'a plus de frontières, hein ? Et les impôts ? A part pressuriser les petites gens ça sert pas à grand chose.
Alors certes la police c'est beaucoup plus visible. De plus,si l'on considère que la société est de plus en plus violente.
Mais ce qu'expriment les policiers c'est un ras-le-bol général de cette remise en cause de la puissance régalienne de l’État (là nous ne sommes plus dans la lassitude du pointage du doigt ressenti par les fonctionnaires ).
C'est plus profond et peut-être plus grave pour la République. C'est une façon d'alerter le citoyen qu'à force de tirer à boulets rouges sur la fonction publique sans réflexion préalable eh bien on glisse gentiment mais sûrement vers un minage de la puissance régalienne de l'Etat. On en arrive à croire que la privatisation pourrait aussi s'appliquer aux fonctions régaliennes.
Bonne journée à vous !
Viou
Quand on voit la réponse donné a ce malaise, on constate l'incompréhension totale de ceux qui nous gouvernent, pour une raison simple; ils sont au service d'une autre "entité" que celle de la France!
RépondreSupprimer@ Anonyme qui a signé Viou
RépondreSupprimerBien d'accord avec vous ! la police est l'exemple le plus visible et le plus alarmant mais ce sont toutes les fonctions régaliennes de l’État qui sont touchées par un appauvrissement qui conduit "gentiment" à une privatisation de ces services publics qui doivent rester dans le giron de l’État. Car il s'agit de son fondement même.
Cordialement,
Stéph'
Un mauvais exemple britannique qui semble en passe d'appartenir au passé avec Theresa May qui rompt, sur bien des points, avec l'héritage de Margaret Thacher.
RépondreSupprimerDonner des moyens supplémentaires, recruter des agents toutes catégories confondues, augmenter les budgets...ok. Mais le temps n'est-il pas venu de s'interroger sur ce qui doit relever de l'Etat de ce qui peut être passé dans un secteur public au salariat géré par le code du travail comme dans le privé ? Avoir des fonctionnaires assermentés par l'Etat, très bien payés, très bien pourvus en moyens et ressources, avec l'emploi à vie afin, avec des perspectives d'évolution réelles et intéressantes, une véritable formation professionnelle vérifiée régulièrement au cours de la carrière etc... afinde préserver ces fonctions et les fonctionnaires qui s’y rattachent à la collusion, le conflit d'intérêt et la corruption (autant que faire se peut) et d'avoir une puissance, une force d'intervention, un socle de la puissance publique. Il ne s'agirait pas uniquement de mettre les fonctions dites régaliennes dans cette redéfinition de la fonction publique, mais s'interroger sur qui doit être gardé dans la sphère de l'Etat et comment y pourvoir.
RépondreSupprimerAmicalement,
V. de Seine & Marne
@ Viou & Steph’
RépondreSupprimerBien sûr, il n’y a pas que les forces de l’ordre. La situation est proche dans l’éducation, avec une chute préoccupante des candidatures pour devenir professeur, au point qu’il y a moins de candidats que de places parfois.
@ Anonyme
Certes, beaucoup de choses indiquent qu’elle va dans une meilleure direction, mais attendons encore un peu avant de juger définitivement
@ V
Mais les fonctionnaires ne sont pas très bien payés. Nos professeurs sont payés au lance-pierre selon l’OCDE. Je pense que le danger du moment est bien plus dans le recul de l’Etat, qui vend à des intérêts privés des pans du service public qui ne devraient pas quitter son giron. Je pense aux autoroutes, qui sont une rente pour Vinci & co, et qui ont supprimé des milliers d’emplois aux péages…
Bonjour Laurent,
RépondreSupprimerMerci pour votre message.
Je suis bien d'accord avec vous. Le but ce n'est pas de privatiser de fond en comble la fonction publique mais de s'interroger sur que l'Etat doit garder dans ses compétences (et il ne s'agit pas uniquement de se borner à l'armée, la police). Vous dites que les fonctionnaires sont mal payés. Je pense qu'il faut nuancer le propos. Mais Si l'Etat entamait une rélle réforme avec un réel effort sur ce qui doit être de ses prérogatives et de ce qui peut être concédé au privé je pense que l'on avancerait (quoique on pourrait créer un véritable salariat public). Les autoroutes que vous citez est un bon exemple. Cela n'a l'air de rien mais la liberté de circulation auquel a droit tout être humain se trouve entravée par des intérêts privés...tout simplement par l'application de tarifs toujours plus exponentiels. Par ailleurs, c'est donné une partie du territoire à des sociétés privées (bon...je caricature mais c'est quand même pas mal cela). Donc je reviens à ce que je disais au début: l’État doit absolument faire l'inventaire de ce qui doit être de son ressort direct. Une fois l'inventaire fait recruter des fonctionnaires, les assermenter, les payer plus que correctement, leur garantir un soutien légal et matériel dans leurs actions. Cela ne veut pas dire pour autant que l'Etat laisse tomber tout le reste. La loi reste de son initiative.Mais bon... Si l'Etat n'était pas miné dans son rôle vis à vis des puissances de l'argent (pour reprendre l'expression d'un ancien président) ou n'avait pas abandonné une partie de sa souveraineté ...
Bonne journée à vous !
V.de Seine et Marne