Dans la série
des débats qui n’ont pas assez eu lieu pendant cette campagne, après l’Union
Européenne, remarquablement disséquée par Coralie Delaume et David Cayla,
les conséquences de cette révolution numérique, admirablement bien analysée par
Marc
Dugain et Christophe Labbé dans « L’homme
nu – La dictature invisible du numérique », un livre à lire
absolument.
La mise à
prix de notre liberté
Ils notent le
paradoxe d’avoir des attentats en ayant tant de moyens de surveillance,
démontrant qu’ils ne sont qu’un outil parmi d’autres. En outre, à chaque
attentat s’ouvre la possibilité de plus de contrôles et de surveillance alors
que parallèlement, Internet est devenu le propagateur du terrorisme :
« premiers vecteurs à l’échelon
mondial de la propagande djihadistes, les big data prétendent dans le même
temps apporter l’antidote en collectant massivement du renseignement pour les
agences d’Etat (…) une transaction ‘gagnant/gagnant’ ». Pour conclure,
on peut ajouter qu’Internet offre un moyen d’expression et même de starification
des terroristes, devenus les héros de la Djihad Académie.
Les auteurs
rapportent une anecdote de Vincent Bolloré, qui, en sortant de l’avion à San
Francisco pour rencontrer Google, avait reçu une annonce pour ses sushi
préférés dans un restaurant proche de son hôtel,. Pour eux, « Apple, Microsoft, Google ou Facebook
déteinnent 80% des informations personnelles numériques de l’humanité (…) le
nouvel or noir ». Pour les auteurs, « nos données numériques ne nous appartiennent pas (…) c’est une partie
de nous même qui nous est volée », et leurs ennemis sont les Etats,
qui peuvent encore les affronter. Les auteurs notent aussi que Google a créé,
avec l’accord du gouvernement, un fond dérisoire de 60 millions pour les média.
Pire, ils
rappellent que ces
entreprises sont des spécialistes de la désertion fiscale. En 2014,
Facebook a ainsi versé au fisc 319167 euros pour des bénéfices estimés à 266
millions, 109 fois moins que les impôts théoriques, grâce à la domiciliation de
ses profits européens en Irlande. Ils soulignent également les liens troubles
et tous les intérêts croisés entre cette industrie et les Etats-Unis avec le
rachat de Gemplus par un fond US lié à la CIA et dénoncent l’impérialisme des
Etats-Unis et la grande passivité européenne, qui laisse faire les grandes
multinationales étasuniennes sur son territoire. Plus globalement, ils
dénoncent l’idéologie libertaire et hyper-avide de toute cette nouvelle
économie.
Naturellement,
se pose la question du pourquoi nous laissons faire cela. Faisant la
comparaison avec 1984, les auteurs soutiennent que « la mise sous cloche (se fait) de manière beaucoup plus subtile et
indolore ». Demain je reviendrai sur les conséquences de cette
révolution numérique sur les individus.
Source :
« L’homme nu – La dictature
invisible du numérique », Marc Dugain et Christophe Labbé, Robert
Laffont et Plon
Remarquez, les souverainistes poutinophiles s'amusent aussi beaucoup avec le numérique pour produire du fake sur le compte offshore de Macron repris par MLP lors du débat du second tour :
RépondreSupprimer« J’espère que l’on apprendra pas que vous avez eu un compte offshore aux Bahamas »
Les frontistes sont de grand patriotes, n'hésitant pas à dauber un candidat sur la base de documents grossièrement falsifiés...
http://www.numerama.com/politique/254983-compte-offshore-demmanuel-macron-une-intox-venue-de-4chan.html
Oui, c'est aussi une conséquence des privatisations et de l'idéologie de la concurrence.
RépondreSupprimerIl y a certes un changement rendu possible et nécessaire par les possibilités techniques, mais les gouvernements qui veulent rester souverains (Russie et Chine) ne laissent surtout pas ce changement être piloté par des entreprises européennes. L'UE et son idéologie de la concurrence si, alors qu'elle avait tous les éléments techniques pour ne pas le faire.
Il aurait été possible de faire autrement, et de ce point de vue les déclarations de Fillon en début d'année se vantant d'avoir privatisé France Telecom montrent à quel point médias et politiques n'ont rien compris (ou affectent de).
par des entreprises américaines
SupprimerMichel Serres a analysé la mutation technologique que nous vivons comme le 3ème grand bouleversement pour l'Humanité après l'écriture et le développement des transports. Cette numérisation de la société est inévitable, elle est la source de nouveaux emplois, de nouveaux rapports etc...Impossible d'y échapper ! En revanche, ce qui FAIT TRES PEUR, c'est que comme d'hab' nos gouvernements n'ont rien vu venir, n'ont rien anticipé notamment en matière de vie privée, protection des données, sécurité informatique etc...Mais sont-ils les seuls fautifs ? On va me dire que les grands holding, groupes de cette numérisation ne forcent personne, de toute façon ils n'ont pas à le faire ainsi va le monde...et que donc chaque citoyen n'est pas obligé de tout balancer sur Internet via les réseaux sociaux, les achats en ligne, l'organisation de ceci ou de cela par Internet etc...Oui mais le web marketing marche tellement bien que les personnes en sont arrivés à croire que sans Machin-Chose ou Trucmuche ou Bidule sur le Net pas de salut ! Alors pouvons-nous résister à cette avancée inéluctable ? Pour l'instant je dirai non et oui en même temps. Non car Internet c'est quand même pas de facilités à portée de clic qui vous arrange bien la vie et oui car pour le moment nous ne sommes pas obligés d'avoir un compte truc, un compte chose, un compte machin, on n'est pas encore obligé d'accepter la dématérialisation de nos factures d'eau, d'électricité, de gaz, du loyer etc...les impôts, on y vient donc le reste suivra. Dans le même temps on demande toujours plus de flexibilité, de facilité, de prix moins chers, de faire ceci ou cela en 3 clics etc...tout comme pour le low cost ou l'on vit dans l'illusion de la bonne affaire ou de la quasi gratuité. Bah l0 on vit dans l'illusion de la vitesse et du bien fait. Or après on viendra pleurer car les pauvres caissières, vendeurs etc...perdront leur job. C'est maintenant qu'il faut anticiper le XXIIème siècle et s'interroger sur ce que l'on veut: se foutre à poil numériquement ou garder encore une certaine pudeur désuète mais source de protection.
RépondreSupprimerSylvie
Je ne vois bien l'intérêt d'avoir des factures ou documents fiscaux sur du papier quand le numérique permet de les remplacer, le tout est d'être équipé en pare feux, anti virus et clés token.
SupprimerIl y a eu bien plus de révolutions technologiques que Serres le dit : l'apparition du langage articulé, la taille du silex puis la métallurgie permettant des outils et des armes de guerre, l'agriculture et la domestication génétique des plantes et animaux, les premières monnaies sous forme de poisson séché par exemple...
@ Sylvie & Anonyme 6 mai 2017 11:31
SupprimerJe suis sur la même longueur d'onde que Sylvie. Tout le monde a un pare-feu, un anti-virus et autres sécurités. Le problème se situe plutôt au niveau des entreprises, administrations etc...qui stockent vos données personnelles et confidentielles. Or, l'actualité fait état d'attaques pirates de grosses entreprises ou d'administration pendant lesquelles les données des clients, des usagers sont volées. Par ailleurs, ces données (sauf les administrations) sont vendues, échangées entre entreprises. Or, quand l'entreprise est basée dans un autre pays que la France, il n'est pas sûr et certain qu'une loi type 1978 informatique et libertés soient appliquée ou alors si elle est comment l'est-elle ? Comment faites-vous pour accéder facilement à vos données et en demander l'effacement etc...Donc si la dématérialisation pose de graves questions et problèmes. Quant à Michel Serres: je suis d'accord avec lui il y a bien eu 3 grandes mutations dont la numérisation des échanges et de la société, ce que vous citez ne sont que des satellites de ces évolutions.
En tout cas merci pour cet échange !
Bon week-end prolongé
Fred
@ Anonyme 10h28
RépondreSupprimerC’est juste
@ Sylvie
Je suis bien d’accord. Il faudrait un ministre des questions éthiques pour traiter de ces sujets notamment
@ Fred
Et outre les attaques informatiques, il y a aussi tout le problème de certains modèle économiques, qui visent à rendre leurs utilisateurs dépendants pour en tirer des rentes, sans hésiter à détruire de nombreux éco-systèmes