Parmi tous
les travers des Etats-Unis, l’état de sa démocratie n’est pas le moins
préoccupant. Outre l’effarante palinodie
démocratique de l’élection de Georges Bush en 2000, on peut évoquer le poids
trop important de l’argent, le rôle assez détestable des lobbys, mais aussi les pratiques profondément
autocratiques de redécoupage des circonscriptions.
Une
autocratie sous influence ?
Que dirait-on de la Russie si son gouvernement redécoupait de manière aussi arbitraire et caricaturale les circonscriptions de manière à maximiser le nombre de sièges obtenus en entassant les électeurs de l’opposition dans des ensembles aux formes improbables, où elle gagnerait avec 70 à 80% des voix, tout en se construisant des sièges avec une marge raisonnable ? Poutine serait traité de dictateur et beaucoup de belles âmes le condamneraient. Mais pourquoi ne s’élèvent-ils pas contre le gerrymandering étasunien, une pratique qui remonte à 1811, contraction du nom du gouverneur Gerry et de la salamandre, dont la forme évoque celle d’une circonscription conçue de la sorte.
En effet, aux
Etats-Unis, quand un parti est au pouvoir, il redessine les circonscriptions
pour maximiser son nombre d’élus et les partis ne reculent devant aucune
extravagance pour arriver à leurs fins, n’hésitant pas à changer
radicalement les frontières électorales et à adopter des formes extravagantes.
Le principe consiste à entasser ses opposants dans des circonscriptions homogènes
et à se construire des majorités sensibles mais pas excessives ailleurs.
Résultat, avec un même nombre de voix que l’autre parti, celui qui a fait le
découpage peut obtenir deux fois plus de sièges, comme le montre cet exemple
du Wisconsin rapporté par The Economist
qui parle « d’élus qui choisissent
leurs électeurs ».
Ces pratiques dignes de
républiques bananières sont aujourd’hui sous le feu de la Cour Suprême, quelques états, notamment la Californie, commençant à remettre en
question cette pratique démocratiquement détestable. Mais ce n’est pas la seule
maladie dont souffre la démocratie étasunienne, droguée à l’argent dans des
proportions effarantes : la campagne de 2016 a coûté
pas moins de 3 milliards de dollars, quand l’élection française de 2012 en a
coûté 66 millions et que le record européen, les législatives britanniques de
2015, n’ont coûté que 87 millions, près de 10 fois moins à taille comparable ! Une
tendance qui s’accentue, le cap du milliard ayant seulement été dépassé en
2008.
La Cour
Suprême a malheureusement accentué le phénomène en levant tout plafond aux
dépenses des PAC, des comités d’actions politiques privés, d’autant plus que Barack
Obama a laissé faire, alors que son adversaire de 2008, John McCain, souhaitait
au contraire réformer le système. Le problème est que tout cet argent n’est pas
désintéressé. The Economist
soulignait il y a plus de trois ans que « quand il s’agit de mettre en place une politique, les opinions des
entreprises et des riches semblent davantage compter » en s’appuyant sur une
étude statistique reposant sur 1779 enquêtes d’opinion aux Etats-Unis, une
évolution soulignée par Joseph Stiglitz dans « Le triomphe des inégalités ».
La bible des
élites globalisées affirmait alors « le
danger, c’est un cercle vicieux où les hommes politiques adoptent des
politiques qui favorisent les plus riches ; ce qui donne à ces derniers
plus d’argent avec lequel ils peuvent faire du lobbying auprès des politiques,
ce qui aboutit à des lois qui leur sont plus favorables, et ainsi de suite ».
Comment ne pas faire le lien avec le lourd dossier Monsanto, qui, comme en
Europe, obtient un large soutien des autorités aux Etats-Unis. On peut évoquer le
Monsanto Protecton Act, qui la
protège même en cas de contestation judiciaire, les voyages payés par l’Etat
pour convaincre des officiels ou du trafic d’influence dans les agences de
régulation…
Quel meilleur
symptôme du mauvais état de la démocratie étasunienne que
le niveau de participation ? N’est-il pas inquiétant que près de la
moitié des citoyens ne se déplacent pas pour élire leur président, sans
parler des manœuvres de certains pour la limiter ? Voilà qui en dit
sur les dysfonctionnements de ce pays qui voulait être un modèle et qui devient
de plus en plus un contre-modèle.
C'est sûr que le financement de la campagne de Sarko par Kadhafi, c'est tellement plus démocratique...
RépondreSupprimerLa démocratie américaine a été confisquée au profit d'un "deep state" dès 1828, si l'on en croit Peter Dale Scott Ce sont les banquiers qui ont commencé cette conquête souterraine du pouvoir, tout en laissant au "bon peuple" l'illusion d'un président et d'un congrès élus démocratiquement. Le système s'est révélé au grand jour (enfin, presque) lorsque que Dick Cheney a pris le pouvoir éxécutif le 11 septembre 2001, Bush ayant été "exfiltré" de la Floride vers la Cote Ouest, en application du programme "Continuity Of Government"
RépondreSupprimerBien sûr. Et ce sont en fait des lézards géants qui sont derrière tout cela, courageusement dénoncés dans la série V.
Supprimer@anonyme 12:43
SupprimerBien vu !! Moi j'aurais bien donné mon âme au "deep state" pour un rencart avec Jane Blader.
Fiez vous à cette analyse théologique de frère Paoli, Herblay :
RépondreSupprimerhttp://www.atlantico.fr/decryptage/francois-baroin-face-au-piege-obsession-auto-realisatrice-rapprochement-droite-avec-fn-paul-francois-paoli-3208917.html
" Le Front national est ce qu'il est mais il n'existe pas pour rien et il ne représente pas les forces du Mal."
Vous pouvez laisser tomber les sanbenito et les tonnelets d'eau de Lourdes.
@ Anonyme 17h15
RépondreSupprimerQui a dit qu’il représentait les forces du mal ?
@ Anonyme persévérant
Il n’y a pas discussion. Vous répétez les mêmes arguments sans prendre en compte ce que je prends le temps de vous répondre. Comme j’ai autre chose à faire que de répéter cent fois les mêmes choses, je mets à nouveau fin au débat en supprimant vos commentaires (et je poursuivrai), en attendant un prochain papier qui ranimera le débat (d’ici quelques semaines).