jeudi 25 janvier 2018

Le commerce : l’angle mort des gaz à effet de serre

Bien, ce n’est pas le seul, mais des papiers récents de Nicolas Meilhan, des éconoclastes, ont eu le grand mérite de pointer un des angles morts majeurs de la question des émissions des gaz à effet de serre. Les bonnes statistiques de la France ne sont qu’une vision parcellaire et superficielle de ce qui se passe car cela exclut les effets exportés par nos importations.



Exporter cette pollution que l’on ne veut pas voir


En fait, une partie des chiffres clés du climat publié par le ministère du développement durable il y a près de 2 ans sont passés un peu trop inaperçus, avant que Nicolas Meilhan les exhume sur son blog. Les chiffres sont assez stupéfiants. En effet, notre pays se présente souvent comme un modèle de vertu, avec une baisse de 20% des émissions de CO2 de 1995 à 2015. Mais cela est bien superficiel. D’abord, il faut la modérer par le fait que cette baisse ne repose que sur l’effondrement des émissions de CO2 par l’industrie manufacturière, en chute de 40% de 1990 à 2013. Et comme notre consommation n’a pas baissé, c’est parce que nous importons des produits que nous produisons avant.


En effet, une autre analyse, présente dans le rapport du ministère, affirme que notre consommation de CO2, en réalité, a progressé de 11% de 1995 à 2015, du fait de l’envolée des émissions associées aux importations, qui représentent aujourd’hui 55% de notre consommation, contre 33% en 1995 ! Bref, nous avons exporté une partie de nos émissions de CO2 en important une part grandissante des produits industriels que nous consommons. On note aussi que les chiffres des transports ne prennent pas en compte les transports internationaux, illusoirement, alors même que les émissions des poids lourds et véhicules utilitaires pèsent presque aussi lourd que le transport des particuliers.


Nicolas Meilhan pointe que la production électrique ne représente que 5% de notre bilan carbone, alors que tant d’initiatives se focalisent dessus. Que penser également de cette focalisation sur le transport routier particulier alors que le transport de marchandises représente probablement une part bien plus lourde de ce bilan, notamment avec l’explosion des chaines de production mondiales ? Le contraste entre le traitement fiscal du diesel pour les particuliers et le kérosène ou le fuel pour les transports de marchandises est aussi injuste qu’effarant. Bien sûr, il y a la course au moins-disant fiscal pour être « compétitif » mais cela revient aussi au moins-disant environnemental à l’échelle planétaire.

Dans la même veine, un essai de Guillaume Pitron, préfacé par Hubert Védrine, révèle « la face cachée de la transition énergétique et numérique », qui ne fait que « déplacer l’impact de l’activité humaine sur les écosystèmes ». En effet, cette transition repose sur l’extraction de métaux rares dont l’exploitation a « des impacts environnementaux plus importants que ceux de l’extraction pétrolière », avec des conséquences sanitaires parfois dramatiques, l’auteur évoquant des « villages du cancer » en Chine… Autre arnaque dénoncée par Nicolas Meilhan, la présentation de la transition énergétique en Allemagne, qui se fait avec plus de ce charbon dont les fines particules ignorent les frontières.


5 commentaires:

  1. Pour faire de la "com." comme pour la pub, il faut rester superficiel pour que personne ne puissent se poser des questions!

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  2. Entièrement d'accord pour taxer les pollueurs sur un pied d'égalité en fonction de leurs émissions uniquement et non de leur activité.

    Je n'ai jamais compris comment on pouvait instituer des taxes sous prétexte d'inciter à polluer moins et dans la foulée en exonérer les plus gros pollueurs sous prétexte de reconnaître leurs spécificités !

    Je me demande aussi depuis longtemps si la mer se viderait aussi vite de ses poissons si les pêcheurs payaient leur fuel eu même tarif que les particuliers.

    Attention toutefois à la concurrence internationale.

    Il ne faudrait pas que le transport à Marseille d'une marchandise fabriquée à Dunkerque ou inversement coûte plus cher que l'acheminement par bateau d'un article concurrent fabriqué en Chine.

    Il y a zéro taxe sur le carburant et zéro norme anti-pollution dans les eaux internationales, certains navires carburent même au pétrole brut pour ne pas payer le raffinage ni l'éventuelle taxe qui pèse sur celui-ci.

    Au fait il serait intéressant de voir si les traités de libre-échange qu'on nous passe les uns après les autres préservent la possibilité pour la France de conduire une politique indépendante en la matière.

    Ivan

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  3. Si la France retrouve un jour son indépendance , elle devra faire un plan d'investissement très lourd sur les transports.
    Avoir une SNCF puissante permettra de refaire de maillage du territoire abandonné depuis beaucoup trop longtemps au profit des métropoles.


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  4. "La plus grande part des émissions liées à l’alimentation vient d’ailleurs. Premier responsable, la production, qui en fonction du climat, peut générer d’énormes consommations d’énergie. Résultat, de nombreuses études ont montré qu’il est souvent préférable d’acheter un produit agricole qui a parcouru des milliers de kilomètres qu’un produit dont la fabrication locale consomme énormément d’engrais et d’énergie. Par exemple, 12 000 roses produites au Kenya et importées par avion génèrent 6 tonnes de CO2, contre 35 tonnes de CO2 pour les mêmes roses produites aux Pays-Bas, dont le climat impose de chauffer les serres au gaz naturel."

    "Le transport du producteur au consommateur ne représente que 4% des émissions totales générées par la nourriture. Et dans cela, le transport longue distance, par bateau ou même par avion, n’émet pas beaucoup car on y transporte de gros volumes. 80% des émissions de CO2 générées par le transport de la nourriture ont lieu à l'intérieur du pays de consommation : 30% proviennent du transport en camion, et 50% des trajets effectués par les acheteurs". . Transporter un kilogramme de fruits dans une voiture est bien plus polluant que des tonnes dans un seul gros véhicule !"

    http://education.francetv.fr/matiere/economie/premiere/video/consommer-local-pour-sauver-la-planete?sectionPlaylist&series=decod-eco

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  5. @ Ivan

    Il est bien évident qu’il faut pleinement compenser les différences de fiscalité écologique sinon, cela revient à seulement exporter notre pollution. Les zones internationales sont des trous noirs fiscaux et écologiques, en somme citoyens… Si ces traités l’empêchent, il faut les quitter.

    @ Cgrotex

    Très juste

    @ Anonyme

    Bien d’accord pour regarder un bilan global. Mais cela est moins vrai sur tout ce qui est pondéreux ou encombrants.

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