La
tribune de 100 femmes défendant une « liberté
d’importuner » a déclenché une belle polémique (et
des dérapages de certaines de ses co-signataires), jusqu’à l’étranger où
certains ont souligné, admirativement, que seule la France pouvait s’attaquer à
#moiaussi. Malheureusement, la
polémique est tellement vive qu’il est souvent très difficile de sortir d’un
débat en noir et blanc.
Importuner
ou draguer n’est pas harceler
Je
pense démontrer depuis plus de dix ans un souci de la condition féminine et
n’avoir jamais donner prise à la moindre critique venue de féministes. J’essaie
de ne me prononcer sur un sujet qu’après y avoir assez réfléchi et je ne me
soucie que du fond, sans me soucier des personnes qui défendent les idées
auxquels je crois, comme
je l’ai montré en défendant par exemple le mariage pour tous. Si je ne me
définis pas comme un libéral, je ne me pense pas non plus anti-libéral, l’époque
tendant trop souvent à mettre en place une liberté excessive pour les plus
forts et de plus en plus restreinte pour les autres. Si en
2013, je m’étais opposé aux défenseurs de la liberté d’aller aux putes,
cette fois-ci, je rejoins la
prise de position d’Elisabeth Lévy, une des principales signatrices de la
fameuse tribune.
Sur les
réseaux sociaux, un très ancien commentateur du blog a exprimé sa déception à l’égard
de ma prise de position, affirmant que « cette tribune fait
l’apologie des agressions contre les femmes »,
qu’elle ferait « du harcèlement quelque chose de carrément
souhaitable », qu’elle viserait à « faire
taire les femmes qui dénoncent les harceleurs et les agresseurs », allant jusqu’à faire de la publicité à des
personnes évoquant carrément une « apologie du viol ». J’ai lu et relu cette tribune et je
ne vois toujours pas ce qui permet de faire de telles affirmations. Comme écrit
vendredi, les signataires commencent au contraire par rappeler que « le viol est un crime » et se
réjouir « de la légitime (et
nécessaire) prise de conscience des violences sexuelles exercées sur les
femmes » après l’affaire Weinstein.
Bref, comment
oser évoquer une « apologie du viol », ou
même des agressions, ou affirmer qu’elles visent à « faire taire les femmes
qui dénoncent les harceleurs » ? Cela n’a aucun sens sachant
que cette
tribune juge légitime et souhaitable la prise de conscience des violences
sexuelles exercées sur les femmes. Comme
bien vu par Marianne, sans épargner
les dérapages regrettables de certaines signataires, cette tribune pose des
questions parfaitement légitimes, du caractère expéditif de la justice
médiatique moderne, ou des excès poussés par certains, qui pourraient aboutir à
refuser la moindre drague. Ce faisant, elles
dénoncent un excès de puritanisme qui pourrait dessiner une frontière excessivement
sévère entre harcèlement et une simple « drague maladroite qui n’est pas une agression sexuelle ».
Après tout,
ce n’est pas parce que l’on se réjouit de cette libération de la parole et que
l’on souhaite tout faire pour mettre fin à ces agressions que l’on ne peut pas
s’interroger sur la frontière à mettre et s’inquiéter que l’on mette une frontière
trop restrictive. Pourquoi un tel débat ne serait pas légitime et pourquoi
faudrait-il l’accueillir d’une telle manière, en
accusant les signataires de la tribune de propos qu’elles n’ont absolument pas
tenus ? Encore
une fois, le débat se crispe excessivement, rendant impossible de voir les
nuances de gris, comme si la réalité devait forcément être noir ou blanc.
Heureusement, certaines
réactions à l’étranger sont beaucoup plus apaisées et positives pour cette
tribune.
Malheureusement,
le débat moderne se limite trop souvent à des caricatures et des clashs bien
superficiels, comme
le montre la réaction de Causette.
Quelques jours après, je persiste à penser que cette tribune est parfaitement
légitime, que son propos est beaucoup plus équilibré que ses détracteurs ne le
disent et pose
des questions extrêmement actuelles sur l’évolution de nos sociétés.
Il est important en effet de débattre sereinement, et d'être vigilant devant le risque de dérive et d'excès de ce tous sites de dénonciation.
RépondreSupprimerMais avec leur tribune sur la liberté d'importunité, elles s'y sont pris comme des manches. Le texte est très mal rédigé, le retour de flamme était évident. Franchement, quelle idée d'avoir laissé pensé qu'une main sur un genou c'était pas si grave que ça ! Alors que c'est précisément pour exprimer le raz-le-bol devant ce "c'est pas si grave que ça" que toutes ces voix se sont levées ...
L'intention des signataires de la Tribune était surement bonne, mais avec ce très mauvais texte elles se sont tirées une balle dans le pied.
... et d'ailleurs nous venons d'apprendre que Catherine Deneuve reconnait que ce texte est imparfait. Elle vient de publier une très pertinente clarification :
Supprimerhttp://mobile.lemonde.fr/societe/article/2018/01/14/catherine-deneuve-presente-ses-excuses-aux-victimes-d-actes-odieux-qui-ont-pu-se-sentir-agressees-par-la-tribune_5241610_3224.html
La tribune en soi ne me choque pas. Après tout si cela me choque, je peux regarder ailleurs. Non ce qui fait polémique à mon sens dans cette tribune c'est le manque de distinction très claire entre le droit de draguer lourdement et le fait de l'accepter et de savoir s'en défendre et la phase harcèlement. La frontière entre les 2 est certes ténue mais les signataires n'ont pas marqué assez leur désapprobation sur le calvaire que peuvent vivre un certain nombre de femmes quotidiennement. Biensûr dès le début de leur pétition elles affirment nettement et clairement que le viol est un crime. Mais après c'est beaucoup plus dilué, peu exprimé. Or, au quotidien les femmes peuvent être victimes de viol (hélas...et ce qui est INACCEPTABLE c'est que seulement 10% de plaintes car les femmes ont du mal à exprimer leurs souffrances) mais pas que.Bien souvent elles sont importunées voire harcelées subissant des attouchements etc...Voler un baiser à une femme amoureuse de l'homme qui lui vole le baiser c'est romantique. Coincer une femme contre un mur ou dans un ascenseur et essayer de lui fourrer sa langue dans la bouche pour soit-disant lui donner un french kiss, c'est une agression. Un mec qui se frotte dans le métro (au point de laisser des traces de son frottement dans certains cas...c'est arrivé à 3 filles de mon entourage dont une dame de 50 ans) c'est une agression. On pourrait multiplier les exemples. Tout ça pour dire que la tribune parue dans le monde ne fait pas assez le distinguo. Et donc une idée de banalisation se dégage du texte ou du moins peut être compris ainsi.
RépondreSupprimerBonne journée
Sylvie
Merci Sylvie pour avoir relevé cette subtilité. je pense que vous avez raison dans votre approche de la polémique sur cette tribune. Ce n'est pas de revendiquer une liberté de se faire draguer, maladroitement ou même lourdement, qui est à remettre en cause mais bien le fait que les signataires n'ont pas assez marqué la frontière entre l'approbation d'une femme de se faire lourdement draguer voire voler un baiser et celles qui sont harcelées. Et le harcèlement, l'atteinte à la vie privée, la menace ou encore l'insulte arrivent plus vite qu'on ne le pense dans ces cas-là. Je n'ai pas vécu directement mais je l'ai vu à l'oeuvre il y a plusieurs années lorsque je bossais en contrat étudiant dans une grande enseigne. Des remarques sexistes quotidiennes voire de l'insulte, des propositions grasses pour faire rire la galerie régulièrement etc...Il y a des femmes qui savent répondre à cela et d'autres qui ne savent pas ou ne veulent pas et finissent par se retrouvées piégées dans la perversion du harceleur.
SupprimerDe façon globale, je ne parle pas du viol qui pour moi relève vraiment du crime pénal par excellence, mais toues ces attitudes poussives, limites agressions, ces méthodes de harcèlement posent la question de l'éducation des garçons. Alors certes l'éducation ou l'absence d'éducation ne font pas tout mais elles expliquent pas mal de choses.
Bonne soirée
l'Anonyme du jour
PS: cher Laurent meilleurs voeux pour 2018, ainsi qu'à tous les habitués ou non de votre blog. Me voilà reparti pour un an de lecture de vos billets ! (Bon...je ne réagis pas tout le temps car certains sujets m'échappent ou alors je n'ai pas le temps).
bonjour de mon ile déserte , Bonne année à L H et ses blogueurs rémi de Rouen.
RépondreSupprimerLundi 15 janvier 2018 :
RépondreSupprimerLes riches, grands gagnants des premières mesures de Macron, selon l’OFCE.
D’après l’Observatoire français des conjonctures économiques, « les 5 % de ménages les plus aisés capteraient 42 % des gains » liés aux réformes d'Emmanuel Macron.
Jeudi 28 septembre 2017 :
Le Secours populaire face à « un raz-de-marée de la misère ».
« Un raz-de-marée de la misère » : le président du Secours populaire particulièrement touché par les retraités qui demandent à manger.
En marge de la manifestation des retraités contre la hausse de la CSG, Julien Lauprêtre, président du Secours populaire, a témoigné jeudi 28 septembre sur franceinfo du « drame » des personnes âgées touchées par la pauvreté. Celui qui le touche « le plus ».
« Le nombre de personnes âgées qui viennent demander de l’aide au Secours populaire français est en augmentation croissante, a-t-il détaillé. L’année dernière, nous avons aidé trois millions de personnes en France et il y avait parmi elles de nombreux retraités. C’est un raz-de-marée de la misère. »
« C’est le drame qui me touche le plus, voir des retraités qui ont travaillé toute leur vie et qui viennent demander à manger au Secours populaire, c’est vraiment douloureux. »
http://www.francetvinfo.fr/economie/retraite/un-raz-de-maree-de-la-misere-le-president-du-secours-populaire-particulierement-touche-par-les-retraites-qui-demandent-a-manger_2393236.html
@ Anonyme
RépondreSupprimerEn effet, il y avait des points contestables
@ Sylvie
Je suis d’accord. Il ne faut pas prendre à la légère le harcèlement. Je ne pense pas que les signatrices de la tribune le font, mais du fait d’un débat penchant dans un seul sens, elles ont sans doute voulu rééquilibrer les choses, quitte à porter le flanc à cette critique, même si elle refuse le harcèlement et n’exprimant peut-être pas tout à fait assez l’importance de la chose
@ L’anonyme du jour
Merci pour votre commentaire et tous mes vœux à vous aussi !
@ Rémi
Bonne année également
@ BA
Merci pour cette mise en perspective
"Si en 2013, je m’étais opposé aux défenseurs de la liberté d’aller aux putes, cette fois-ci, je rejoins la prise de position d’Elisabeth Lévy, une des principales signatrices de la fameuse tribune."
RépondreSupprimerPour mémoire, ce qu'Elisabeth Lévy écrivait dans une tribune parue dans Le Monde en novembre 2013 :
« Les « salauds » sont des violeurs, des agresseurs, des mâles dominants qui imposent à coups de force et de fric leurs dégoûtants désirs – des hommes, quoi. »
Autrement dit, les mâles dominants qui imposent à coups de force et de fric leurs dégoûtants désirs sont banalement ... des hommes.
Telle est l'idée malsaine que Mademoiselle Lévy se fait des hommes. Harvey Weinstein semble être son modèle d'homme. Peut-être le genre d'homme qu'elle fréquente...