lundi 23 avril 2018

Le dérisoire buzz protectionniste de Donald Trump

Le président des Etats-Unis n’a pas été un héros de télé-réalité pour rien. Il aime ce qui fait parler, agiter l’écume, sans se soucier le moins du monde du fond des choses. Après deux ans de bruits protectionnistes, la comparaison avec la réalité des mesures prises, notamment sur l’acier, par-delà les annonces bruyantes, montre qu’en matière de protectionnisme aussi, Trump n’est pas à prendre au sérieux.


La politique économiques, façon clash et buzz

La réaction apeurée des marchés en mars aux annonces protectionnistes du président des Etats-Unis en dit long sur la superficialité du monde financier. En effet, depuis le début, Donald Trump dit souvent tout et son contraire, notamment en matière économique. Il dit vouloir protéger les classes populaires, mais s’il est un point sur lequel il reste à peu près cohérent, c’est dans la prise de mesures favorables aux entreprises et aux plus riches. Déjà, dans la campagne, il avait tenu des discours contradictoires sur le salaire minimum. Et s’il parle de protectionnisme, en revanche, pas grand-chose de concret n’a été mis en place, le président se contentant de quelques dérisoires tweets il y quinze mois.

On en vient presque à se demander si cela vaut mieux que rien tellement il a suffi aux entreprises visées d’annonces souvent totalement dérisoires pour s’en sortir. Le cas de l’acier offre un nouvel exemple de la superficialité crasse de Donald Trump. Pour qui rentre un peu dans le détail des dernières annonces de mars, difficile de ne pas être saisi par le grand écart entre le bruit provoqué et la réalité des mesures. En effet, Challenges rappellait que, fin mars, le Canada, le Brésil, la Corée du Sud, le Mexique, l’Australie, l’Argentine, et les pays de l’UE sont exemptés de ces taxes. Le parallèle avec les statistiques d’importation d’acier du pays démontre la superficialité des annonces.


Car le Canada, le Brésil, la Corée du Sud et le Mexique représentent à eux seuls la moitié des importations d’acier des Etats-Unis. Au bas mot, on peut estimer que près des deux tiers des importations ne seront pas visées, d’autant plus que l’on peut imaginer que le monde des affaires saura argumenter pour rajouter de nouvelles exemptions du fait du péril que cela représenterait pour les industries consommatrices d’acier, comme le dit The Economist. En clair, pas grand chose ne changera, le monde des affaires va continuer à fonctionner comme avant, mais le président des Etats-Unis pourra se glorifier d’avoir mis en place des droits de douane totalement dérisoires sur des cibles dérisoires.

Il ne faut sans doute pas voir autre chose dans les annonces de guerre commerciale avec la Chine. Déjà, le fait de ne viser que 60 milliards de dollars de produits, pour un déficit bilatéral de plus de 300 milliards, en disait long sur la superficialité des annonces. Bien sûr, l’excité du réseau social a annoncé début avril qu’il pourrait augmenter l’addition de 100 milliards, mais le monde est de plus en plus habitué à ses foucades et on peut parier que plus le temps passera, plus le monde relativisera ses annonces davantage dignes d’une cour de récréation que du dirigeant d’un grand pays. D’ailleurs, l’évolution du Dow Jones depuis son élection démontre que les milieux des affaires lui font confiance.


8 commentaires:

  1. Quand vous avez taxé les importations d'acier, comment vous fabriquez des voitures aux USA ?

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    1. À courte terme, avec de l'acier importé un peu plus cher (ou pas… si les exportateurs se serrent un peu la ceinture et baissent leurs prix pour ne pas perdre trop de parts sur le marché américain). À plus long terme, avec de peut-être avec de l'acier américain redevenu compétitif, puisque moins soumis à la pression d'un dumping social et écologique étranger. Mais cela suppose une vraie stratégie industrielle.

      Oui, je sais : chaînes de valeurs, bla bla bla (je connais la vulgate : https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/le-protectionnisme-peut-il-briser-les-chai-nes-de-valeur-mondiales-675776.html)… On ne peut pas méconnaître non plus les risques liés au déclenchement de guerres commerciales. Mais on reste là dans la logique du modèle néolibéral. On peut aussi faire fonctionner un peu ses neurones et réfléchir à des alternatives (aucun rapport avec des utopies politiques ou sociales : les critiques du libre-échange débridé se réclament pour l'essentiel du keynésianisme…).

      La réflexion sur le protectionnisme est entachée de préjugés difficiles à déraciner et tend à fonctionner de manière circulaire. Un numéro de 2016 du Flash-Éco de Natixis (25 mars 2016 – N° 343 : http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=90392) faisait ainsi un sort particulier aux tenants de la sortie de l'euro et du protectionnisme.

      Deux arguments notamment étaient invoqués :

      « Plusieurs partis populistes dans la zone euro préconisent la sortie de l’euro et/ou la mise en place de mesures protectionnistes (droits de douane ou quotas sur les importations...). Ces partis ne comprennent pas les caractéristiques contemporaines de l’économie mondiale :

      - les dettes et actifs extérieurs sont devenus de très grande taille, alors qu’ils étaient de très petite taille dans le passé. Une sortie de l’euro et une dépréciation du taux de change rendraient insupportable le poids de la dette extérieure brute en euros ;

      - depuis 20 ans, il y a eu « segmentation de la chaîne de valeur » (des processus de production). De plus en plus, les produits importés n’ont plus de substitut fabriqué domestiquement, ce qui explique que la dépréciation du change et les droits de douane ont comme seul effet de rendre plus chers les produits qu’il faut continuer à importer […] ».

      Le premier point présente comme une vérité d'évidence qu'il n'y aura pas redénomination dans les monnaies nationales reconstituées de la dette libellée en euro. Qu'on puisse en douter, estimer l'opération délicate, discuter de ses modalités, est une chose. En ignorer dogmatiquement la possibilité relève de l'idéologie.

      Le point relatif à la segmentation des chaînes de valeurs n'est pas contestable, mais il est associé, comme toujours à l'argument complémentaire selon lequel les produits importés n'ayant plus de substituts produits localement, déprécier la monnaie ou accroître les droits de douane ne ferait que renchérir leur coût. Le fait qu'une large part des produits industriels importés soient de fait substituables à condition de le vouloir et de mettre en œuvre des stratégies pertinentes est ici sciemment ignoré. L'argument est de nature circulaire : puisque l'industrie nationale régresse, les importations ne sont pas substituables et mettre des freins à l'entrée de produits industriels étrangers serait contre-productif ; mais de ce fait, l'industrie nationale, soumise à une concurrence déloyale, ne peut que dépérir… Et la boucle est bouclée.

      Oui, la politique de Trump est, pour l'heure tout au moins, un trompe-l'oeil. Mais cela ne fait que renforcer la nécessité de réfléchir à la possibilité d'un protectionnisme éclairé et ciblé (https://acteursdeleconomie.latribune.fr/debats/opinion/2018-03-20/protectionnisme-americain-une-reponse-apaisee-s-impose-772463.html).

      YPB

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  2. "la nécessité de réfléchir à la possibilité d'un protectionnisme éclairé"

    Bla bla bla, l'industrie automobile US va s'en prendre plein la gueule, alors votre baratin tortillé du cul ne sert à rien !

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    1. Donnez-vous la peine de lire l'article de Poissonnier que j'ai cité (les références de l'auteur sont ici : https://www.grenoble-em.com/annuaire/hugues-poissonnier), la notion qui vous échappe est expliquée. Même un quasi-analphabète comme vous doit pouvoir comprendre. Courage, vous pouvez y arriver ! On a vu plus idiot que vous parvenir à s'instruire, après tout (non sans difficulté, à vrai dire...).

      YPB

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    2. Avec un acier sur-taxé, l'automobile US est morte.

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  3. Vos analyses ne reposent que sur une presse néolibérale donc partiale. L'objectif majeur, le pays-cible principal est la Chine, collatéralement l'Allemagne, et le bras de fer USA-Chine ne fait que de commencer ce qui relativise largement votre analyse.

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  4. Hilarant !

    A pleurer de rire !

    Aux Etats-Unis, les super-héros se multiplient : Batman, Spiderman, Catwoman... L'Union européenne a elle aussi son super-héros. Son nom ? Captain Europe. Sa mission ? Défendre les valeurs européennes face aux attaques eurosceptiques. Sous sa cape aux couleurs de l'UE, se cache en réalité un fonctionnaire européen... Nous sommes allés à la rencontre de ce personnage hors du commun.

    https://www.youtube.com/watch?v=xKvZC3z2ud8

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  5. @ YPB

    Le contraste entre vos interventions et celles, lapidaires et superficielles du troll ultralibéral, en dit long sur la force des arguments des deux camps. Merci à vous.

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