lundi 13 janvier 2020

La faillite de mai 1968, c’est aussi son apport presque nul pour la jeunesse (billet invité)


Billet invité de Rodolphe DUMOUCH, Professeur agrégé de SVT au lycée Jean-Moulin de Revin, Lycée européen situé dans la vallée de la Meuse
Depuis l’avènement du macronisme, s’achève l’ultime étape du glissement de l’héritage de mai 1968 vers le néolibéralisme autoritaire. Le retournement de ces gens-là s’est réalisé un peu comme sur un ruban de Moebius : ils sont passés de l’autre côté en restant sur la même face, ce qui explique que beaucoup de nos oligarques n’en ont même pas conscience. Certains parcours sont édifiants, comme celui de Pascal Bruckner, successivement maoïste, PSU, « nouveau philosophe », kouchnérien et partisan du bombardement de la Serbie en 1999, sarkozyste et maintenant macronien  zélateur de la retraite à 70 ans. De cette déchéance spectaculaire, on pourrait se consoler avec les quelques avancées « sociétales » dont nous aurions bénéficié. Parmi celles-ci, la soustraction des enfants et des jeunes gens à la « domination adulte ». 


Qu’en est-il ? 

Une évolution juridique freinée quand le législateur est issu de la génération des boomers


En France, le droit napoléonien classique niait toute capacité juridique aux « incapables » : les femmes et les mineurs, jusqu’à 21 ans. Une situation d’autant plus choquante que pour le service militaire et en cas de guerre, on était mobilisable dès 18 ans (et même dès le 1er janvier de l’année de ses 18 ans) tandis que pour s’inscrire sur les listes électorales, il fallait attendre le 31 décembre qui suivait le 21e anniversaire. Tout cela aurait dû révolter profondément en 1968, surtout avec les évènements d’Algérie, encore récents. Pour autant, ces thèmes ont été assez peu abordés pendant les évènements de mai. Cohn-Bendit s’inquiéta plutôt qu’on n’écrive pas un mot sur « les problèmes sexuels des jeunes », ce à quoi le ministre de la Jeunesse et des Sports, François Missoffe, lui répliqua qu’il avait bien une tête à avoir ce genre de problèmes. Toutefois, à l’époque, il ne s’agissait, en tout bien tout honneur, que de libérer les relations des jeunes gens entre eux, des adolescents entre eux.

Dans le sillage de l’époque, en 1970, la notion juridique de puissance paternelle a été remplacée par celle d’autorité parentale, mais le contenu de cette autorité ne varia pas, incluant toujours des dispositions permettant d’ouvrir le courrier de ses enfants, de forcer à pratiquer la religion des parents jusqu’à 21 ans, d’imposer un choix d’études ou de métier et même d’interdire à ses enfants de poursuivre des études au lycée et à l’université. Notons que, étonnamment, la contestation de l’ensemble de ces éléments n’apparaissait pas dans les revendications des 68tards ni des organisations lycéennes et étudiantes.

Plus tard, en 1974, Valéry Giscard d’Estaing abaisse la majorité à 18 ans mais sans remettre en cause le contenu de la minorité. Seul un grand juriste des années 1970, Jean Carbonnier, avait proposé des évolutions sur ce point mais elles n’ont jamais été suivies d’effet. Ce n’est que beaucoup plus tard, dans les années 2000, que le législateur et la jurisprudence françaises évolueront timidement… En fait, les boomers y ont été forcés, après 16 ans passés à traîner les pieds, par la signature Convention Internationale des Droits de l’Enfant en 1989 (arrêt de la Cour de Cassation du 18 mai 2005, quelques lois dont celle de 2013 sur le choix du prénom par les enfants adoptés de 13 ans et plus). Pourtant, par exemple, encore en 2019, l’orientation scolaire demeure un pouvoir discrétionnaire des parents. La famille peut ainsi forcer un lycéen à faire des études générales quand il veut aller en filière professionnelle, ou l’inverse, sans recours. La question n’a été remise à l’ordre du jour brièvement qu’en 2013, par la secrétaire d’Etat Dominique Bertinotti, avant de se voir éjectée par Valls lors de son arrivée à Matignon.



Chez certains de nos voisins européens, ce furent autant de questions traitées… au début du XXe siècle !

Les mouvements de contestations juvéniles ont peu été étudiés par les historiens mais quelques auteurs, dont Michel Fize et surtout Yves Bonnardel ont fait la synthèse. Il en exista durant tous les siècles. Parmi ceux-ci, fait largement ignoré en France, un mouvement juvénile de grande ampleur agita l’Allemagne et le monde germanique des années 1880 aux années 1920, avant d’être interdit par Hitler, la Jugendbewegung. En 1924, les jeunes Allemands obtinrent un statut de pré-majorité, applicable dès 14 ans, leur permettant de ne pas suivre la religion de leurs parents et, le cas échéant, d’en embrasser une autre. De même, en matière scolaire, les parents n’interviennent plus dans la scolarité ni dans l’orientation scolaire de leurs enfants à partir de cet âge. L’élève peut aussi refuser son inscription par ses parents en école confessionnelle grâce à un droit de veto. Etonnant qu’en France, on n’ait songé à de telles dispositions qui seraient une des réponses appropriées aux questions des écoles coraniques, des écoles intégristes comme les pseudo-scouts de Riaumont ou encore du port du voile imposé aux jeunes filles.

Ainsi, en Allemagne, un Gymnasist est traité comme un jeune adulte étudiant et il en découle l’absence de surveillants dans les lycées allemands. Ce fait est largement occulté et détourné par les technocrates qui veulent nous faire croire que les professeurs allemands sont beaucoup mieux payés parce qu’on leur dévoluerait ces tâches de surveillances. (Il est à noter, d’ailleurs, que M. Cohn-Bendit – encore lui – prend une part très active dans ces bobards sur le travail des enseignants allemands : il prétend notamment que sa femme, qui enseigne en Allemagne, « travaille beaucoup plus » et donne 24h00 de cours hebdomadaires contre 18 en France : il ne peut ignorer qu’en Allemagne, il s’agit de 24 séances de 45 minutes. Faites le compte. Il ment à dessein).

En Suisse, le code civil de 1907 inclut aussi une pré-majorité religieuse et, là-bas, le droit associatif est très ouvert aux mineurs. La Grande-Bretagne, par les apports de la Common Law et les ceux des droits coutumiers celtes, possède depuis longtemps des dispositions semblables. Notamment, de la même façon qu’en Allemagne, un droit de veto pour refuser son inscription en école confessionnelle et une pré-majorité religieuse, avec un seuil très bas : 12 ans. Tout cela a fonctionné pendant des décennies et même des siècles sans que l’on constate ce « laxisme » et cette indiscipline scolaire attribués, à tort, au relâchement des lois et règlements consécutive à mai 68. Les règlements intérieurs scolaires, d’ailleurs, se sont largement durcis depuis les années 1980-1990.

Dans la plupart de ces pays, le droit de vote à 16 ans est soit effectif (Canton suisse de Glaris, certains Länder allemands, Autriche, Ecosse, îles anglo-normandes…). Cela n’a été possible que parce que, préalablement, une large autonomie juridique a été construite pour les jeunes gens. Plaquer cette mesure en France, comme le propose l’éditorialiste de L’Express à l’écharpe rouge, sans se poser d’abord ces questions en amont n’a absolument aucun sens.



Conclusion 

On s’étonne que notre pays laïc, dirigée par les générations qui ont participé de près ou de loin à mai 68, avec un parlement dominé par les européistes, ne trouve pas inspiration chez nos voisins sur ces questions et préfère perpétuer le droit napoléonien. Voilà qui interroge. Serait-ce du nationalisme mal placé ? J’ai bien peur que non. La seule pré-majorité reconnue implicitement en France par le code pénal est la pré-majorité sexuelle à 15 ans, récemment revenue en débat sous l’expression « âge du consentement ». Est-ce un droit conçu pour favoriser l’autonomie des adolescents en la matière ou pour le profit de certains adultes ? L’actualité de fin 2019, avec la protection d’un satyre, durant trois décennies, par tout le microcosme parisien apporte un élément de réponse qui permettra à chacun de juger.

Une chose, en revanche, est certaine : l’apport de mai 68, pour les nombreuses générations de jeunes gens qui ont suivi les boomers, est quasiment nul – même pas les délégués de classe créés en 1969, mesure gaulliste qui avait été pensée auparavant... Tout le reste vient de Giscard d’Estaing, d’un vieux juriste protestant né au premier XXe siècle ou a été imposé par les traités internationaux après plus de 15 ans d’atermoiements. Le seul engagement qu’on peut reconnaître aux héritiers de 68 est leur combat « contre la fessée », ce qui est tout de même assez réducteur. Ainsi, non seulement les 68tards n’ont pas inventé l’eau chaude mais ils n’ont même pas eu l’ouverture d’esprit – eux qui se prétendent ouverts au monde – d’aller chercher l’eau chaude chez nos voisins où elle était inventée depuis longtemps.

On ne retiendra d’eux, finalement, que leur velléité de « jouir sans entrave », d’abord au lit et désormais en bourse, en communiant dans le macronisme. Il est sérieusement temps d’exercer un droit d’inventaire, voire plus.

14 commentaires:

  1. Vous avez raison si l’on considère « mai 68 » uniquement dans sa composante étudiante et parisienne. On peut même dire que ce mouvement donnait, dans notre pays, le signal de départ à l’homme libéral. « Jouissez sans entraves et vivez sans temps morts » et autres bêtises du même genre figurent déjà l’individualisme sans limite du monde moderne. La phrase de Finkielkraut « les tracts contestataires d’autrefois sont les directives gouvernementales d’aujourd’hui » prouvent bien la continuité entre le « mai 68 » étudiant et le libéralisme.
    Mais vous oubliez le « mai 68 » ouvrier qui a débouché sur les accords de Grenelle avec entre autres une augmentation de 35 % du SMIG (nom de l’époque) ! Roux de Bézieux en a des sueurs froides rien que d’y penser.
    Autrement dit, il ne faut pas garder de « mai 68 » le côté mythique, étudiant, quasi festif que se plaisent à rappeler les médias inféodés au système libéral mais conserver et s’inspirer du puissant mouvement ouvrier qui a vu le jour à ce moment là.

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  2. Il y a des choses qui me déplaisent dans votre article, comme par exemple l'utilisation du mot « boomer », un terme péjoratif qui rejette toute une génération à partir de préjugés. Et comme l'a très bien dit un autre commentateur, on ne peut pas réduire Mai 68 à Cohn-Bendit et Bruckner, car ce fut un mouvement social très important.

    Des jeunes bourgeois qui jouent les révolutionnaires et qui se rangent avec l'âge, ça a toujours existé, à toutes les époques. Quant au statut des mineurs, vous ne pouvez pas l'imputer aux seuls gens de Mai 68, ce sont des choix faits depuis des siècles par toutes les générations passées et présentes. Et croyez-vous que Giscard aurait légalisé l'avortement et mis la majorité à 18 ans s'il n'y avait pas eu Mai 68 ? J'en doute.

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  3. Merci à vous deux.
    Oui, j'ai oublié le mouvement ouvrier, tellement il a été effacé par cette oligarchie à laquelle j'ai trop réduit le mouvement.
    Cela dit l'objectif était de montrer que même sur le plan sociétal, le bilan est maigre. Non, je ne pense que sans mai 68 on n'aurait pas abaissé la majorité à 18 ans. En Angleterre, ça a été fait en 1970 (même si le contenu de la minorité est différent) mais en Belgique en 1991. Et je pense surtout que des juristes comme Carbonnier et plus tard Gisser avaient beaucoup plus à apporter.

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    1. Mai 68 a été un accélérateur dans l'évolution des moeurs, pour le meilleur et parfois pour le pire. Il est probable que sans Mai 68, ces évolutions auraient eu lieu tôt ou tard, mais probablement plus tard. 1968 a été un événement mondial, avec des répercussions mondiales, ça ne concerne pas que la France.

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  4. Il y a un point qui me semble important de souligner. Mai 68 fut un grand moment d'anticonformisme, de contestation de l'ordre établi, de débat, d'aspiration à plus de liberté et de démocratie. Liberté des mœurs, bien sûr, mais aussi liberté d'expression et d'information. Juger cet événement à l'aune de l'évolution de ses acteurs qui ont vieilli et l'ont trahi ne me semble pas très juste.

    Il y a quelques jours, Laurent Herblay a publié un article sur Charlie. Eh bien, Charlie et Hara Kiri sont les enfants de Mai 68. Et lorsque l'équipe historique de Charlie fut décimée il y a 5 ans, j'ai pensé immédiatement que Mai 68 était mort, que la page était tournée. Et même si ce journal existe toujours, je pense que l'esprit qui l'animait à l'époque a disparu.

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    1. Comme beaucoup d'anti-conformismes, il a pu évoluer par la suite en conformisme. Ne serait-ce que dans le domaine vestimentaire avec les blue jeans...

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    2. Ah bon, alors tout le monde est conformiste à ce compte là, ceux qui portent un slip, ceux qui se brossent les dents, ceux qui portent un manteau en hiver...

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  5. Les années 50 et 60 ont été une tentative d'émancipation du carcan social d'une morale puritaine( pas de divorce, pas de contraception, pas d'avortement, pas de rapports intimes hors du mariage, peu de mixité, du racisme teinté de colonialisme... ) et c'était partout dans le monde occidental, avec les débuts du rock and roll, puis la pop, les expériences psychédéliques, la contestation de la guerre au Vietnam et les hippies. C'était un souhait de se débarrasser de la poussière de diverses formes de paternalismes étouffants.

    Résumer ces soulèvements à quelques opportunistes français qui ont retourné leur veste, c'est un peu court.

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  6. Je ne crois pas que notre pays soit encore dirigé par les générations qui ont participé de près ou de loin à mai 68.

    Celui qui avait 18 ans en 1968 en a maintenant 69.

    D'autre part, s'agissant des boomers, la majorité d'entre eux étaient trop jeunes en 1968 pour y participer, a fortiori ceux qui n'étaient pas encore nés. Rappelons que le baby-boom a culminé en 1967, et ne s'est achevé que dans les années 1970.

    Comme cela a été signalé, la plupart des jeunes qui ont participé à mai 1968 l'ont fait dans les usines et non dans les universités.

    Sinon, plutôt d'accord avec le constat général de l'article.

    Ivan

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    1. Bonjour Ivan,

      Merci pour votre post ! Juste une observation sur "la plupart des jeunes qui ont participé à mai 1968 l'ont fait dans les usines et non dans les universités."

      Mes parents ont vécu Mai 68 chacun de leur côté (se sont rencontré après ;-)). Ma maman : 18 ans employée dans une blanchisserie industrielle de la petite couronne rouge parisienne. Mon père : ouvrier dans le bâtiment immigré. Quand je parle de Mai 68 avec eux, sur la partie qui a participé, qui est au fondement, qui était le plus représenté etc...Bien que tous les 2 vivaient à Paris, dans des quartiers très populaires (populeux et prolo' pour reprendre l'expression de ma mère) Mai 68 était conduit par de jeunes bourgeois des universités et qui se castagnaient au quartier latin (les bourgetons toujours selon Maman). Quand je leur oppose comme vous le fait que ces jeunes sont allés dans les usines et ont entraîné les ouvriers. Ca rigole à gorge déployée. Réponse: ma poule, les usines où sont allés ces jeunes c'était des grandes usines comme à Billancourt pour citer la plus célèbre. Les usines, ateliers ou entrepôts où je bossais on ne les a pas vus. Ils ne venaient pas. C'était un monde très clos. Et mon père d'ajouter à moitié en français à moitié dans sa langue maternelle : ils ne venaient pas sur les chantiers. Ils ne montaient pas sur les échafaudages ou ne descendaient pas dans les fondations des immeubles. Le bâtiment menininha (expression affectueuse pour dire petite fille) a toujours été loin des préoccupations des syndicats, des mai 68 etc...Tu n'as que des immigrés ! Les seules fois où on avait vu des jeunes étudiants c'était dans les bidonvilles de Champigny ou Nanterre. Là il faut reconnaître qu'ils nous ont pas mal aidé.
      Du coup, j'ai demandé à d'autres membres de ma famille et belle-famille, ouvrier,employés d'usine, d'ateliers etc...en région parisienne : aucun n'a vu ces étudiants. Comme me l'a rappelé il y a peu un oncle par alliance : en premier il fallait pas désespérer Billancourt. Les autres suivraient ou pas...En revanche, tous (dont mes parents) reconnaissent les avancées de mai 68 pour les salariat notamment les accords de Grenelle.
      Pour le reste, ils n'ont vu personne. Ah si ! la police pour certains pour aller ramasser les poubelles à Paris à cause de la grève des éboueurs !
      Bonne journée à vous.
      Sylvie

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    2. Merci Sylvie, et bonne année à vous aussi.

      Je parlais bien sûr des jeunes ouvriers qui ont fait grève en mai 1968, profitant du fait que la police était très occupée avec les universités.

      Ivan

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    3. Ah ok....Alors mea culpa je n'avais pas compris dans ce sens là. Cela dit toutes les usines, tous les ateliers...et tous les secteurs n'ont pas connu des mouvements de grève (parfois très importants). Les grandes usines, entreprises sûrement sur les petites entreprises ou le bâtiment beaucoup, beaucoup moins voire quasi nul.
      Meilleurs voeux aussi pour 2020
      Et au plaisir de vous retrouver sur le blog de Laurent ;-)
      Sylvie

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  7. @ Rodolphe

    Merci pour ce papier qui apporte un point de vue très rafraîchissant sur mai 68. En effet, je n’avais jamais imaginé que, finalement, le bilan sociétal de mai 68 pour la jeunesse était très limité. Je pense que ce seul point de vue est extrêmement intéressant, sans forcément faire un bilan global, incluant la dimension sociale. Je ne suis pas spécialiste, mais finalement, l’émancipation a commencé avant (vote des femmes, pillule, possibilité pour les femmes d’avoir leur autonomie financière) et a continué après (Giscard). Du coup, on peut en effet questionner l’apport de mai 68 à ce mouvement et s’il n’était pas centré sur un individualisme préfigurant la montée détestable du néolibéralisme.

    @ Sylvie

    Merci pour ce témoignage intéressant

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    1. Comme je l'ai dit plus haut, Mai 68 a été un accélérateur de l'évolution des mœurs, mais au-delà de cet aspect, qui est finalement secondaire, Mai 68 a été un grand moment d'expression à plus de liberté et de démocratie, et son bilan ne peut se juger que sur le long terme. A court terme, Mai 68 a été un échec politique puisque le gouvernement sortant a gagné les élections législatives. Il marque aussi la fin de la période gaulliste, mais là encore, ce ne fut qu'un accélérateur de l'Histoire, la fin du gaullisme étant de toute manière inéluctable et se serait terminée avec la disparition du général de Gaulle, en 1970. Il faut tout de même se souvenir que de Gaulle, avec la régionalisation et la participation, avait tenté de répondre à cette aspiration populaire qui a éclaté en Mai 68. Contrairement à vous, il avait vu le côté positif de cet élan.

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