Bien sûr, les
macronistes en appellent à l’unité nationale et demandent
d’éviter les critiques en cette période de crise. Mais cela se heurte à
deux limites. D’abord, il faudrait qu’ils soient plus exemplaires en la matière,
eux qui sont si prompts à incriminer
l’opposition ou les
français, quand
ce n’est pas l’ancienne ministre de la santé qui rompt les rangs le lendemain
des municipales. Ensuite, c’est
cette pression critique qui permet aussi d’avancer, comme le montre le report
des municipales…
Parapluie
et boucs émissaires
Bien sûr,
gérer une telle crise est extraordinairement complexe et dure. Mais ce qui
frappe depuis quelques jours, c’est à quel point la majorité cherche à se
protéger et à se défausser de ses responsabilités en incriminant les uns et les
autres. Dès
l’intervention du 12 mars, Macron s’est ainsi abrité de nombreuses fois
derrière l’avis des scientifiques pour justifier le maintien du premier
tour des municipales, alors que beaucoup plaidaient pour un changement de
direction, comme
dans le Quotidien du Médecin le 6
mars, ainsi que l’a rapporté le site Les
Crises. Et parallèlement, fuitait l’opposition du président du Sénat et
de Laurent Fabius à tout report, relayée
par des députés de la majorité. Mais ces deux épisodes posent des problèmes
de cohérence, et globalement de crédibilité.
D’abord, les
deux versions sont contradictoires : pourquoi
donc le président aurait proposé un report à Gérard Larcher si les
scientifiques ne voyaient pas de problème à l’organisation du premier
tour ? Les deux versions se contredisent et révèlent en creux,
logiquement, qu’une bonne partie du conseil scientifique était opposée au
maintien des élections du dimanche 15 mars. Et quelle
farce de vouloir nous faire croire que Macron aurait reculé face au président
du Sénat sur un tel sujet. Il a tout de même démontré une capacité à
avancer comme un bulldozer malgré l’opposition des partis adverses et de
l’opinion en de nombreuses occasions depuis son élection ! Ne peut-on pas
plutôt imaginer qu’il préférait politiquement que les élections aient lieu pour
solder un épisode politique peu en sa faveur ?
Le tour de
passe-passe qui a été réalisé sur le sujet a seulement pour but d’exonérer le
président de sa responsabilité dans la tenue du premier tour, au mépris de la
lutte contre la propagation de l’épidémie. Le rôle d’Agnès Buzyn n’est pas très
clair non plus. Sa
déclaration post-élection où elle incrimine président et Premier ministre
la met également en porte-à-faux par rapport à ses déclarations rassurantes du
mois de janvier. En outre, pourquoi avoir accepté de prendre la tête de la
campagne municipale à Paris et avoir abandonné son ministère si elle pensait
que les municipales n’auraient pas lieu ? Décidément, Macron semble avoir
un don pour s’entourer de personnes de petite qualité…
C’est encore
le cas avec Olivier Veran, qui
clame de manière orwellienne sa transparence. Son
interview dans le Figaro daté d’hier
est un monument de tout ce qui est exécrable en politique, digne des infox de
Trump. Sur le manque de masques, il incrimine les majorités précédentes en
détaillant tout ce qu’il a fait, démontrant de facto que l’Etat a agi bien tard,
étant donné le manque actuel de masques. Il soutient également que « les
masques sont inutiles pour se protéger », ce qui est faux puisque
cela protège les autres. Ne serait-il pas plus honnête de simplement dire que
nous manquons de masques et que nous privilégions les usages les plus
importants ? Et sur le manque de tests, il ose dire que la
non-systématisation « suivrait
scrupuleusement les doctrines de l’OMS », un énorme mensonge.
Le retour
des Gaulois réfractaires
Depuis dimanche
dernier, les français sont devenus l’autre bouc-émissaire de la macronie, les
images des parcs et marchés le dimanche ayant généré de nombreuses réactions.
La majorité serait donc contrainte de prendre des mesures plus strictes du fait
de l’irresponsabilité des français, qui
n’auraient pas bien pris la mesure de l’épidémie et tarderaient à adopter le
bon comportement, en somme un retour du discours sur les Gaulois
réfractaires... Mais là encore, ceux qui tiennent un tel discours sont mal
placés pour le faire… En effet, pas
plus tard que le 6 mars, Macron allait au théâtre et le faisait savoir.
Pourtant, la situation italienne était déjà critique et des
voix se levaient en France pour appeler à des mesures de confinement… De
même, son
discours du 12 mars restait d’autant plus modéré qu’il ne voyait pas de
problème à appeler plus de 40 millions de français à aller voter trois jours
plus tard…
Bien sûr,
samedi
soir, le Premier ministre changeait de registre, mais là encore, le message
manquait de clarté du fait du maintien des municipales. Si les
images des foules de dimanche à Paris peuvent être choquantes, l’urgence de
rester chez soi ce jour-là n’était pas évidente quand 47 millions d’électeurs,
personnes âgées incluses, étaient appelés à voter le lendemain… Il est assez injuste
de s’en prendre de la sorte aux français alors que le discours officiel était
si peu clair et à mille lieues du discours tenu en Italie par exemple. Un
Michel Cymes, dont le discours semble surtout influencé par la position de
Macron, n’était guère inquiétant début mars, affirmant que les
virus « font partie de la vie (…) je
ne suis absolument pas inquiet », ou même le
10 mars lors de son passage dans Quotidien.
Il faut lui reconnaître d’avoir
admis cette semaine avoir probablement été trop rassurant. En somme, le
comportement des français a plus à voir avec la façon dont les élites
politico-médiatiques ont traité la crise sanitaire qu’avec une
pseudo-inconscience. Des semaines de réassurance et de manque de mesures fortes
ne pouvaient malheureusement pas créer un sentiment d’urgence dans la
population.
Sur la forme,
la succession des trois interventions du jeudi 12, samedi 14 et lundi 16, et le
durcissement des mesures montre surtout que le président n’a pas pris les
bonnes décisions le jeudi et que, devant son erreur, il a tergiversé, imposant
deux ajustements à deux jours d’intervalle, pour aboutir à un dispositif
correct. Même
si la dernière intervention semble avoir été appréciée (encore que 85% des
Français pensent que le confinement vient trop tard), on peut se demander
comment sera perçue la séquence globale. En outre, comme l’a bien
noté un David Desgouilles peu enclin à suivre l’injonction d’unité nationale
derrière le résident de l’Elysée, certains aspects de l’intervention
n’étaient guère réussis. Conseiller aux français de lire a un côté maternant et
condescendant davantange digne d’un autocrate. Et le
rabâchage du terme « guerre »,
suivi par Trump, fait communication un peu grossière…
Pour finir, le
discours quasiment alter-mondialiste tenu par le président ces derniers jours
n’était guère crédible. D’abord, le grand écart avec le promoteur de la
« start up nation » est un peu trop grand. Ensuite, cela rappelle les
discours de Sarkozy il y a dix ans, qui n’ont abouti à rien, comme
sur les parasites fiscaux. Bien sûr, notre modèle économique doit être
profondément revu, cette
crise étant bien une crise de la globalisation, pour
aller dans le sens de l’analyse de Michel Onfray. Mais pour l’instant, nous
en restons aux grandes déclarations de principe plus destinées à la
communication qu’autre chose. Il reste difficile de croire que quoique ce soit
de concret pourra aboutir à l’avenir tant
cela remet en cause les fondements du modèle globalisé défendu par l’UE et
soutenu par nos dirigeants.
Bref, la
gestion de la crise sanitaire par Macron et sa majorité est d’autant plus
critiquable qu’ils ne se cessent d’incriminer les uns et les autres alors
que les variations de leur ligne devrait inciter à plus de modestie. Et comme
les critiques semblent faire bouger les choses, il est essentiel de poursuivre
à développer un regard critique également sur le fond des dossiers, comme je
vais essayer de le faire dans le prochain papier qui sera publié lundi matin.
Très bonne initiative de votre part. Certes, on ne change pas de capitaine pendant la tempête. Alors on va garder notre capitaine de pédalo mais une fois au port, ça va chauffer.
RépondreSupprimerOn nous parle de foules de promeneurs, de marchés bondés... Je suis dubitatif. Lorsque je sors de chez moi pour aller me ravitailler, je ne vois que des rues désertes. J'ai l'impression que les médias sont en mode propagande et cherchent déjà à justifier des nouvelles mesures de restriction de nos libertés.
RépondreSupprimerVotre remarque est un peu naïve et m'étonne, car je suis habituellement plutôt d'accord avec vos analyses. "Lorsque je sors de chez moi"... Vous avez donc récemment visité toutes les villes de France, déambulé sur tous les marchés, arpentés tous les quartiers ? Renseignez-vous sur ce qui arrive dans certains quartiers (je dis bien CERTAINS, je ne généralise pas) à forte population immigrée/issue de l'immigration. On n'y respecte pas habituellement beaucoup la loi. Que croyez-vous qu'il s'y passe ? C'est le fait d'une minorité, mais ce n'est pas une consolation, parce que c'est le cas de la plupart des problèmes qui empoisonnent la vie de ces quartiers en temps ordinaire. Le Rassemblement national va en faire des gorges chaudes. Dommage peut-être, puisque je ne vote pas pour eux. Mais à qui la faute ? Les lepenistes vont encore nous citer Bossuet sur les inconséquents qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes. Qualifier cela de rhétorique réactionnaire ne va pas suffire. Si vous ne voulez pa un jour être gouverné par les gens du RN, ne traitez pas à la légère les problèmes qu'ils dénoncent comme cruciaux.
SupprimerJ'habite dans la banlieue parisienne, dans un quartier à "forte population immigrée" comme vous dites.
SupprimerAlors, on va dire que tout ne se passe pas partout de la même manière. Renseignez-vous sur ce qui s'est passé dans certains arrondissements à Lyon, par exemple. Mon intervention ne portait pas d'autre message : je ne me vois pas sortir de chez moi, observer ce qui se passe dans mon quartier et en conclure que les médias nous enfument parce que je ne reconnais pas ce qu'il disent dans mon expérience quotidienne limitée.
SupprimerCe n'est pas seulement mon expérience personnelle, c'est ce que j'entends autour de moi. Alors je veux bien que dans certains endroits, les gens ne respectent pas les consignes de sécurité, mais dans l'ensemble je pense qu'elles sont bien respectées.
SupprimerTout à fait d'accord avec vous sur la formule "dans l'ensemble". Mais je n'ai pas eu l'impression que les médias nous matraquaient de fausses nouvelles alarmistes sur ce point particulier : ils ont attiré l'attention sur des quartiers où les choses se passaient mal, ce qui est leur métier après tout. Par ailleurs j'avoue que ce que Pénicaud est de faire passer dans le droit du travail, sous prétexte d'urgence économique, m'inquiète au moins autant que les possibles atteintes aux libertés.
SupprimerCorrection d'un oubli : "est en train de faire passer"
SupprimerSi vous croyez que fermer les frontières empêche ce genre de pandémie, alors c'est que vous n'avez rien compris. Certaines régions de France sont plus atteintes que d'autres, vous les mettez où vos frontières à la con ? Il s'agit de clusters de pandémie, pas de pays. L'épidémie vient d'une consommation de chauve souris, nids à virus inventifs, en Chine qui n'applique pas correctement les normes agro-alimentaires qui sont pourtant diffusées mondialement. Aux chinois et aux autres de ne pas manger n'importe quoi sur le plan sanitaire. Vos frontières n'empêcheront aucune pandémie, pas plus qu'au moyen-âge quand les épidémies de peste étaient autrement plus meurtrières que le Cov 19.
RépondreSupprimerIntéressant de noter que contrairement à vos dires, la lutte contre la pandémie passe partout par des restrictions aux mouvements de personnes. S'il n'y avait pas d'échanges avec la Chine, l'épidémie ne serait pas chez nous... Après, aujourd'hui, cela ne règle pas tout (ce que je n'ai jamais dit), mais cela fait partie des mesures clés.
SupprimerCurieusement, Macron affirme que « le virus n'a pas de passeport » puis annonce, dans sa seconde allocution, la fermeture des frontières de l'espace Schengen !
Supprimer"la lutte contre la pandémie passe partout par des restrictions aux mouvements de personnes"
SupprimerJe n'ai pas dit le contraire, je dis juste que vos frontières nationalistes n'ont rien à voir avec la géographie d'une pandémie qui se fait par clusters, ville ou régions. Votre stupidité est sidérante, vous êtes con à bouffer du foin.
Si les gens ici étaient d'accord avec vous, avouez donc que vous en seriez tout peiné, n'ayant plus personne à insulter...
Supprimer"vos frontières nationales rien à voir avec la géographie d'une pandémie". FAUX. Cas extrême, un pays qui vivrait en autarcie l'aurait évité. Et les pays moins ouverts semblent en tirer bénéfice (cf Japon malgré sa proximité géographique et économique avec la Chine). Bon appétit pour le foin !
SupprimerMême The Economist, pas vraiment de mon bord politique, est d'accord : https://www.economist.com/finance-and-economics/2020/03/12/throughout-history-pandemics-have-had-profound-economic-effects
SupprimerEt donc avec des hôpitaux alsaciens surchargés qui envoient des malades dans des hôpitaux en Allemagne proches de la frontière, ça vous scandalise ? Je confirme, vous êtes un sinistre crétin, voire un criminel !
SupprimerLe problème, c'est la sous-estimation des conséquences de l'intensification des flux (touristiques, migratoires, allers-retours entre pays pour raisons familiales) induite par la mondialisation. Il y a une quinzaine d'années, le SRAS était resté limité à Hong Kong et deux pays d'Asie du Sud-est. Mais en quinze les choses ont eu le loisir de s'intensifier. A la limite, le pouvoir en place peut être critiqué pour un aveuglement sur une globalisation qu'il défend comme indispensable à la France (comme Sarko en 2007, comme Hollande à mots couverts). Sauf qu'il n'est même pas sûr qu'il aurait réagi en cas de mini-crise type Corée 2015 (un homme d'affaires avait ramené de Dubaï une variante du COVID, l'effet fut limité mais le pouvoir en tira les conséquences). Car on parle de personnes qui étaient en partie là au moment de la crise des Bonnets Rouges et qui n'ont pas prévu celle des Gilets Jaunes. Un peu comme si le culte du présent des médias avait atteint nos élites.
RépondreSupprimerJZ
Cher Laurent,
RépondreSupprimerMerci de poursuivre ce blog. Vos réflexions qui nourrissent le débat sont plus que jamais indispensables.
Merci. Long papier demain sur le fond.
SupprimerJe me doute que vous avez beaucoup à lire, mais les remarques de l'économiste néochartaliste William Mitchell sur les conséquences de la pandémie pour la pensée économique méritent le détour : http://bilbo.economicoutlook.net/blog/?p=44507
SupprimerYPB
Sur la question des tests, il semble que personne ne croie plus les mensonges du gouvernement consistant à présenter leur faible nombre comme relevant d'une stratégie cohérente conforme aux demandes initiales de l'OMS : "La limitation, à ce jour, des tests aux seuls personnels de santé présentant des symptômes du virus résulte d’une insuffisante disponibilité des matériels" vient d'estimer le Conseil d'État (https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/statuant-en-urgence-le-conseil-d-etat-rejette-la-demande-de-confinement-total-et-enjoint-au-gouvernement-de-preciser-la-portee-de-certaines-interd).
Supprimer@ YPB
RépondreSupprimerMerci pour le lien. Très intéressant. Il a un style plaisant pour ne rien gâcher.
@ Anonyme
D'où le changement de doctrine d'hier annoncé par Olivier Véran, mais qui va mettre du temps à être mis en pratique.
Les frontières n'arrêtent pas les particules fines qui contribuent à la transmission de virus... Mais comme n'avez aucune culture scientifique, vous racontez vos âneries.
RépondreSupprimerhttps://www.rtbf.be/info/societe/detail_le-coronavirus-pourrait-rester-plusieurs-heures-dans-l-air-a-cause-de-la-pollution-atmospherique?id=10464049
@ Troll de service
SupprimerL'étude italienne qui a prétendu démontrer le lien entre pollution de l'air et transmission du Covid-19 a été accueillie avec beaucoup de scepticisme, du fait de nombreux biais méthodologiques : https://www.marianne.net/societe/le-covid-19-transmis-par-les-particules-fines-l-etude-italienne-n-est-pas-une-demonstration
Les zones les plus affectées par l'épidémie en Italie du Nord sont les plus polluées par les particules fines, certes. Mais ce sont aussi des zones à très fortes densités de population, dans lesquelles l'épidémie a forcément le plus de chance de se répandre.
Quand on prétend avoir de la culture scientifique, on ne confond pas hypothèses et certitudes validées.
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