lundi 2 mars 2020

Nouvelle preuve du poids de l’immigration sur les salaires






Quand moins de migrants viennent aux USA



Si, en matière de protectionnisme, derrière les déclarations fracassantes, et malgré quelques mesures, Trump est plus modéré qu’il ne le semble, cela est probablement un peu moins le cas en matière de flux migratoires. C’est The Economist qui évoque la question dans un long papier en se demandant s’il y a un lien entre baisse de l’immigration et augmentation des salaires aux Etats-Unis. La bible des élites globalisées souligne que pour la première fois depuis 50 ans, le nombre d’immigrés diminue outre-Atlantique, avec un solde net migratoire tombé à 595 000 personnes en 2019, contre une moyenne à plus de 950 000 de 2013 à 2017, notamment des immigrés peu qualifiés.


The Economist y voit à la fois la conséquence des mesures prises par l’administration Trump que de sa rhétorique hostile qui freine probablement la venue des migrants. Et même si le faible taux de chômage joue probablement un rôle dans la croissance inédite depuis longtemps des bas salaires outre-Atlantique, The Economist ne peut que reconnaître le rôle de la baisse de l’immigration au regard d’une analyse de Gordon Hanson, d’Harvard. D’abord, les professions qui ont le plus recours aux travailleurs étrangers sont celles où les salaires progressent le plus. En outre, cela est confirmé géographiquement, avec une hausse supérieure des salaires dans les métropoles où le nombre d’immigrés a baissé.



Mais ces conclusions cadrent mal avec les idées de The Economist, donc l’hebdomadaire évoque un biais court-termiste à ce bilan et essaie de se convaincre qu’à moyen terme, les gains disparaissent car l’offre d’emplois s’ajusterait à la baisse, soutenant que l’immigration apporte de la croissance économique. Mais ce faisant, The Economist fait mine d’oublier que cette croissance globale n’a aucune intérêt s’il n’y a pas de croissance par habitant ou si, justement, cette croissance est inégale, et ne profite pas aux classes populaires, comme cela est le cas depuis une quarantaine d’années.



En outre, cette nouvelle étude confirme d’autres études, toujours évoquées par The Economist, à qui il faut reconnaître son ouverture d’esprit et sa capacité à traiter de faits et d’opinions qui vont contre la sienne. Il y a moins de deux ans, il évoquait les conséquences du Brexit à venir en notant la très forte baisse du solde migratoire en provenance de l’UE, qui avait changé le rapport de force en faveur des travailleurs. Plus avant, il avait évoqué une étude, controversée, sur l’impact de l’arrivée de migrants cubains en Floride en 1980, qui avait provoqué un décrochage des bas salaires par rapport au reste du pays. Ce n’est pas pour rien que le patronat est en général toujours accueillant pour les immigrés.



En 1894, Jaurès soutenait que « ce que nous ne voulons pas, c’est que le capitalisme international aille chercher la main d’œuvre sur les marchés où elle est le plus avilie, humiliée, dépréciée, pour la jeter sans contrôle et sans réglementation sur le marché français, et pour amener partout dans le monde les salaires au niveau des pays où ils sont le plus bas ». En somme, rien n’a changé…

1 commentaire:

  1. En fait ça dépend de la rigidité des salaires, et aussi si les emplois proposés aux immigrés pourraient être occupés par des Français. La situation en France n'est pas forcément la même qu'aux USA ou en Grande-Bretagne, même si, c'est vrai, le code du travail a considérablement été assoupli depuis quelque années. Néanmoins on voit bien qu'en France, on a un taux de chômage structurel qui est plus élevé qu'ailleurs.

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