Les résultats du
« super Mardi » des primaires démocrates ont apporté leur lot de
rebondissements. D’abord, le
pari de Bloomberg de faire l’impasse sur les premiers Etats et de tenter
d’acheter son élection a totalement échoué. Mais il faut aussi reconnaître
que Biden, à la dérive il y a quelques
jours,
effectue un retour spectaculaire et a, malheureusement, pris l’avantage sur Sanders.
Bis
repetita pour Donald Trump ?
Jusqu’à la
Caroline du Sud, la candidature de Biden, pourtant longtemps favori des
sondages, semblait en très grande difficulté et Bernie Sanders faisait alors
figure de favori. Mais coup sur coup, en une semaine, la
très nette victoire dans cet Etat, puis les retraits de Buttigieg et Klombuchar
en sa faveur juste avant le Super Tuesday et sa victoire globale le
propulse à nouveau dans la position de favori. Cela est d’autant plus vrai que Bloomberg
s’est rangé derrière lui après son retrait, permettant à l’ancien
Vice-Président d’Obama d’unir totalement le clan dit modéré (qui ne souhaite
presque aucun changement) face à un Bernie Sanders, qui, s’il
gagne la Californie, fait désormais figure d’outsider.
La première
leçon, positive, de ce scrutin, est l’échec
complet de la candidature Bloomberg. Le milliardaire, ancien maire,
républicain, de New York rêvait d’un duel avec l’autre milliardaire new-yorkais
qui domine la vie politique étasunienne. Les
centaines de millions de dollars dépensés n’y ont rien fait, un résultat
assez rassurant : la candidature démocrate ne peut pas être achetée,
quelles que soient les sommes mises sur la table, Bloomberg
ayant dépensé autant que tous ses adversaires réunis… Un résultat
probablement logique, tant offrir au pays un duel entre milliardaires
new-yorkais pouvait sembler peu attractif pour des démocrates qui sont tout de
même sensés être le parti du peuple…
En revanche, je
ne peux qu’être déçu par une telle tournure. Certes, la partie n’est pas
terminée, mais il faut reconnaître que Sanders
n’est plus favori. Pourtant, des deux, c’est
lui qui propose de réparer le modèle étasunien, en rétablissant la justice
sociale, ou en proposant enfin de mettre en place une couverture santé pour
tous. Des propositions qui profiteraient particulièrement à l’électorat
noir, qui préfère étonnamment un vote superficiellement communautaire en faveur
de l’ancien Vice-Président d’Obama, alors même que le parcours de Sanders, et
sa lutte contre la ségrégation raciale comme étudiant, devrait lui permettre de
faire au moins jeu égal avec Biden auprès de cet électorat…
Pire, on peut
penser que Biden est l’adversaire idéal pour Trump, sur
la même ligne conservatrice qu’Hillary Clinton, qui ne propose que des
changements à la marge, pas de quoi retourner l’électorat populaire blanc, dont
l’attrait pour Trump lui avait probablement donné la victoire en 2016. En
outre, l’état de la conjoncture, et la hausse des bas salaires, en
partie du fait de la politique migratoire de l’administration Trump,
pourrait bien consolider les positions des républicains dans l’électorat
populaire et sceller une nouvelle défaite des démocrates face à ce
président baroque qui poursuit pourtant surtout une politique en faveur de
l’oligarchie, même s’il sait y apporter quelques touches plus populistes.
Bien sûr,
rien n’est joué, d’autant plus que mardi,
les Etats du Sud étaient dominants. Il faut espérer que le
programme de Sanders visant à rétablir la justice fiscale et mettre en place un
service public de la santé parvienne à convaincre les électeurs des primaires
démocrates. Sinon, il est à craindre que les Etats-Unis poursuivent dans l’impasse
qui est la leur…
Probable qu'il y aura un match Biden vs Trump et que Trump sera réélu. Le parti Démocrate américain va connaître les mêmes difficultés que les parti socio-démocrates en Europe. Au RU non plus, Corbyn n'a pas réussi à s'imposer.
RépondreSupprimerAlors oui Sanders est moins ultralibéral que Bidden mais d'un autre côté son étatisme peut représenter un repoussoir pour les modérés. Et face à un candidat à l'image très clivante une figure plus neutre et rassembleuse n'est pas une mauvaise idée sur le papier. Ou plutôt: ne serait pas une mauvaise idée si l'élection était au suffrage universel direct. Or il suffit à Trump de gagner les fiefs républicains, la Floride et l'Ohio pour être réélu. Pour l'Ohio, même si sa posture protectionniste est cosmétique, elle est là tandis que les Démocrates n'ont pas trouvé le moyen d'apparaître protecteur des classes populaires sans passer par des solution social-démocrates classiques pas en phase avec l'esprit américain. En Floride, Bidden pourrait payer la main tendue d'Obama à Cuba. Même si on est loin de la bataille de chiffonniers démocrates du début des primaires, Trump a encore la main.
RépondreSupprimerEt pour finir, au rayon de ces "modèles à imiter vendus par les élites", il faut savoir que les Américains perçoivent désormais leur société comme une société de reproduction sociale où l'on peut descendre mais plus monter. Quel contraste avec l'image passée d'une société moins instruite que les sociétés européennes mais où l'ascenseur social apparaissait vu d'Europe comme une réalité. Une image vantée par Sarkozy puis Macron qui n'est plus ce qu'elle était sans que l'élite politique française en ait tiré les conséquences.
JZ