Il n’y a pas
que Macron
qui va sortir affaibli de cette crise sanitaire qu’il
a si mal gérée. L’Union Européenne, une fois encore, ne sort pas grandie de
la crise que le continent traverse, entre son rôle dans la coupe des budgets
des systèmes de santé, son
incapacité à permettre des actions communes et ses choix
à contre-temps, provoquant
notamment la colère de l’Italie. Elle
n’en sortira pas indemne.
Déplaire à
tous et affaiblir les pays européens
Les crises
sont de cruels révélateurs pour l’UE, rappelant
ses méfaits, son dysfonctionnement et l’absence criante de tout bienfait pour
les peuples qui la composent. Une crise sanitaire pourrait être l’occasion
de se rapprocher des peuples, d’aider ceux qui sont les plus en difficulté pour
donner un visage plus humain au monstre technocratique de Bruxelles. Mais comme
en 2008, apparaît encore une fois que l’aide de son prochain et un simple
humanisme ne font pas partie du logiciel de cette organisation. Et devant la
crise, les pays finissent par décider chacun isolément, tant
il est impossible de faire quoique ce soit d’adapté avec une telle organisation.
L’UE n’est jamais là en cas de coup dur.
C’est ce que
l’Italie a compris douloureusement ces dernières semaines. Le drame que
traverse ce pays donnait une occasion unique à l’UE de redorer son image. Las, le
conseil européen de fin mars a été incapable de prendre des décisions, l’idée
des corona-bonds, proche des euro-obligations
de la crise de l’euro, ayant logiquement connu la même issue. Mais c’est toute l’Italie qui a été
profondément offensée, pour ne pas dire davantage. Le Corriere della Sera parle d’une « union qui ne fait pas la force », La Répubblica d’une « Europe
laide » et toute la classe politique semble à l’unisson, de la
majorité actuelle à l’opposition. Aujourd’hui, en Italie, des citoyens
postent des vidéos où ils brûlent le drapeau de l’UE en chantant l’hymne
Italien, en affirmant « qu’ils se
sauveront tout seuls ».
Pour les pays
du Sud, difficile de ne pas penser que l’UE et l’euro ont une part de
responsabilité dans le manque criant de moyens pour affronter la pandémie. L’austerité
y a été encore plus sévère qu’en France, où 69 000 lits ont été
fermés de 2003 à 2017, il faut le rappeler : l’Espagne
et l’Italie ont 2,4 et 2,6 lits de soins intensifs pour 1000 habitants contre 6
en Allemagne. Mais outre le fait d’avoir imposé une austérité qui laisse
les pays démunis face à la crise, à moins d’avoir anticipé,
comme l’a fait la Grèce, l’UE n’est pas là pour aider. Cette incapacité à aider les pays en
difficulté est d’autant plus révoltante que la
Chine, la Russie, et même Cuba aident concrètement les Italiens dans cette
crise. Enfin, comment ne pas également voir le rôle de l’UE dans les
difficultés d’approvisionnement de respirateurs, médicaments, tests ou masques,
imposant à la France
ou l’Espagne
de se fournir en Chine ?
C’est bien l’UE
qui fixe le cadre économique qui a poussé au départ de bien des producteurs de produits
clés de cette crise : abaissement des barrières douanières, mettant en
concurrence des producteurs européens aux coûts plus élevés, liberté de rachat
de nos entreprises, permettant à des prédateurs d’acheter un savoir-faire, puis
de délocaliser la production. Cette crise donne deux exemples effarants : notre
principale usine de masques fermée en 2018 après le rachat par un groupe
étasunien ou notre
usine de bouteilles d’oxygène, fermée fin 2019 après un rachat étranger... L’UE
a même eu le mauvais goût de donner son feu vert à un nouvel accord de
libre-échange, avec le Vietnam… Résultat, aujourd’hui, les pays européens
n’ont pas les capacités de production pour répondre à leurs besoins et sont à
la merci de producteurs étrangers qui ne se soucient que de leurs intérêts.
Même si tout
ceci est dénoncé depuis longtemps, le réaliser de manière aussi crue, en pleine
crise qui fait des milliers de morts, ne sera pas neutre. L’UE n’était déjà
plus populaire en Italie. Là, 88%
des Italiens pensent qu’elle ne les aide pas, et 67% qu’elle les désavantage,
poussant Salvini
à évoquer ouvertement une sortie de l’UE. Le Brexit n’est que le début de
la fin de l’UE.
Nicolas Baverez, que je n'apprécie guère, a écrit une tribune dans le Figaro d'aujourd'hui intitulée : L’âge de l’« hélicoptère monétaire ». En voici quelques extraits :
RépondreSupprimer« Au plan économique, la crise du coronavirus acte la mort définitive de la mondialisation libérale, qui se trouvait plongée dans le coma depuis le krach de 2008. » (…) « L’hélicoptère monétaire participe enfin du repli des grands blocs sur eux-mêmes, ce qui accélérera la désintégration des échanges et des paiements mondiaux, et crée une menace d’éclatement de la zone euro en raison de la divergence entre les pays du Sud, qui lui sont favorables, et les pays du Nord, qui lui sont radicalement hostiles. » (…) « La stratégie de l’hélicoptère monétaire se résume à la magie de l’argent gratuit et illimité, qui se termine inéluctablement par des catastrophes économiques et financières ruineuses pour la population et dévastatrices pour la démocratie. La mise en garde lancée par Maurice Allais n’a jamais été plus actuelle : « Le mécanisme de la création de monnaie par le crédit est certainement le cancer qui ronge irrémédiablement les économies de marché de propriété privée. »
Le nouveau QE de 750 milliards d'euros décidé par la BCE va conduire à ce que la banque centrale européenne détienne une masse de dettes souveraines. Elle va alors devenir la principale créancière des états de l'UE, ce qui va lui donner un moyen de pression sur ces états, comme on a pu le voir dans le passé avec l'Italie et la Grèce.
RépondreSupprimerCela pose un problème démocratique important dont peu de gens ont aujourd'hui conscience.
SupprimerTrès bon résumé de ce qui attend les Italiens si, une fois de plus, une solution à l'allemande s'impose, dans cet échange entre Sébastien Cochard et Alberto Bagnai au sujet de déclarations récentes du président de l'Eurogroupe, Mario Centano : https://twitter.com/SebCochard_11/status/1246585161115938821
RépondreSupprimerEn résumé, le sort de la Grèce : un petit coup de pouce pour aider à surmonter la crise liée à la pandémie, suivi de la mise en place, d'une camisole austéritaire sous surveillance européenne.
YPB
L'UE est morte au moment de la crise grecque un peu comme le socialisme français est mort en 1983 (et pourtant il a fallu 35 ans pour que le tournant de la rigueur soit assumé via Macron). Parce qu'à ce moment-là on a bien vu les limites du rêve fédéraliste. En effet, il ne faut pas croire qu'un Kohl aurait plus osé braver la peur du peuple allemand de payer pour les pays du Sud qu'une Merkel. Si Kohl a longtemps hésité à faire avancer l'UE, c'est pour cette raison qui est une ligne infranchissable pour un dirigeant allemand. De même que le projet franco-italien de coronabonds n'aura jamais lieu.
RépondreSupprimerUne fois ceci posé, je ne crois pas que l'UE soit seule responsable des difficultés liées à la crise. Les problèmes posés par l'intensification des flux de personnes et la globalisation économique seraient là sans elle. En revanche, sa conception en fait un facteur aggravant de la crise: 1) elle rajoute au flux dont je parle une zone de libre circulation des bien et des personnes qui va favoriser dérégulation et évasion fiscale. 2) l'euro étant conçu sur le modèle du mark, le seul moyen de récupérer de la compétitivité se fait via la baisse du coût du travail, ce qui favorise un dumping social.
Ceci dit, je doute hélas à court terme que ça soit la fin de l'UE: ses élites ont besoin d'une zone dans laquelle Berlin est le premier de la classe pour faire passer des choses qui arriveraient plus lentement via le suffrage universel, les retraités aiment naturellement une monnaie alignée sur celle d'un pays vieux, le patronat allemand ne laissera jamais liquider une monnaie qui permet au pays de disposer de facto d'une dévaluation compétitive ad vitam eternam, les pays de l'Est sont les alliés de Berlin et enfin nos élites pensent qu'apparaître comme le copilote de Berlin est une garantie d'éviter des réformes à la Thatcher. Sur ce dernier point, j'ai tendance à penser que ce n'est pas la vraie raison de la confiance des marchés en la France. Les marchés voient bien la différence de gestion budgétaire avec Berlin MAIS ils nous voient comme un pays disposant de plus d'atouts économiques de long terme que le reste du continent (plus qu'une Italie qui a présenté plus de budgets équilibrés que la France par exemple).
JZ
Termine suas dificuldades de dinheiro com minha oferta de empréstimo. Eu ofereço 5000 a 200 000 000 € com um 3% interesse um e-mail de ano: danielagrosu1976@gmail.com
RépondreSupprimer