J’ai été interpellé sur Twitter concernant la capacité de Marine Le Pen à gagner la présidentielle de 2022. Et avec le récent ralliement de cadres de Debout la France, il me devient nécessaire de faire un point, à la fois sur l’évolution du paysage politique dit souverainiste, sa capacité à mettre en échec Macron en 2022, et ce qu’il faudrait faire pour y arriver dans les prochains mois.
Les Le Pen ne sont-ils pas une impasse pour la France ?
Comment pourrait-elle gagner face au réflexe de « front républicain » en 2022 ? La légère remontée actuelle de Macron dans les sondages peut en effet laisser penser qu’il a de la marge face à Marine Le Pen. Malgré tout, je pense que le contexte de 2022 sera trop différent de celui de 2017 pour conclure de la sorte. En 2017, Macron avait réussi à répliquer la recette gagnante de Sarkozy en 2007, effaçant son statut de sortant par un discours de rupture. En 2022, il sera le sortant et devra tout assumer : ses réformes anti-sociales (retraites, droit du travail), le fait d’être clairement le « président des riches », celui qui a suscité la mobilisation des Gilets Jaunes, celui qui a mal géré la crise sanitaire. En outre, il ne faut pas oublier qu’il affrontera un contexte économique très différent puisque nous allons payer la note de la crise économique en 2021 et en 2022 : faillites, chômage et austérité à venir…
Parce que nous sommes encore aujourd’hui au « quoiqu’il en coûte », et en pleine crise sanitaire, deux facteurs qui favorisent Macron, on peut se demander si son avance déjà réduite dans les sondages n’est pas finalement fragile, et susceptible de se réduire, jusqu’à un éventuel basculement en 2022. Bien sûr, ce scénario n’est pas le plus probable, mais je persiste à penser aujourd’hui que c’est une vraie possibilité. Marine Le Pen peut parfaitement se contenter d’un projet beaucoup moins ambitieux économiquement, pour ne pas se faire prendre en défaut sur ce sujet qu’elle n’a jamais cherché à maîtriser. Elle peut se contenter d’une pure posture protestataire recentrée sur les sujets d’ordre et d’immigration, et compter sur le rejet massif d’un président largement détesté par une partie de la population. Si le rejet de Le Pen dominait en 2017, celui de Macron pourrait être plus fort en 2022.
En outre, elle a réussi à faire le vide autour d’elle. Entre la droitisation de Macron et l’abandon par Le Pen de bien des aspects plus sociaux de son programme, Les Républicains sont en très grande difficulté. La ligne Fillon, incarnée par Bruno Retailleau, n’a pas le même espace qu’en 2017 tant Macron s’est droitisé, comme l’indiquait le vote aux élections européennes, malgré la ligne Wauquiez / Bellamy. Et même s’il est le favori des sondages, Xavier Bertrand reste très loin du second tour… En outre, après l’échec des européennes (1,17% des voix) l’UPR d’Asselineau s’est fracturé. Et c’est au tour de Debout la France de traverser une grave crise avec le départ de nombreux cadres pour soutenir Marine Le Pen, sachant qu’une frange hostile à tout rapprochement avec elle était déjà partie en 2017 du fait de la prise de position d’entre deux tours. Les choix de NDA ont fini par le priver à la fois de son aile la plus sociale et hostile au RN, puis de ceux qui en sont les plus proches, qui pourront y gagner des mandats...
Mais le choix Le Pen peut-il vraiment être considéré comme le moins mauvais ? Il faut reconnaître que les immenses torts causés par Macron, qui laisse solder notre patrimoine industriel et mène des négociations révoltantes avec l’UE qui pourraient mener au démantèlement d’EDF, donnent du crédit à cette thèse. Néanmoins, pour suivre Marine Le Pen depuis son ascension, j’ai du mal à lui accorder le moindre crédit. Elle ressemble finalement à tous ces politiciens sans colonne vertébrale idéologique, capable de défendre tout et son contraire, sur l’économie et l’UE notamment. Elle me semble bien légère à tous les points de vue pour mener une politique vraiment différente de celle menée depuis des décennies, même sur les sujets les plus importants de son mouvement. Il faudra une détermination et une solidité intellectuelle sans faille pour vraiment changer les choses. C’est peu de dire que cela ne lui ressemble pas, elle qui a abandonné la bataille de la monnaie en plein combat électoral en 2017.
Pour moi, Marine Le Pen présidente, cela ressemblerait à du Trump : sur le fond, beaucoup de continuité, à quelques gesticulations près pour donner le change à son électorat. Car dans le cadre de l’UE, avec la libre-circulation des biens, des capitaux et des personnes et l’étroite camisole légale européenne, la politique est tellement contrainte qu’elle finirait forcément par rentrer dans le rang, comme Tsipras. En outre, sans mandat populaire de rupture réelle donné par le peuple, elle serait rapidement confrontée à la résistance de tous les contre-pouvoirs existants, qui ne manqueraient pas de se mobiliser face à elle. C’est pourquoi sa volte-face européenne la disqualifie tant à mes yeux. Sans mandat clair pour une sortie rapide de l’UE et l’euro, la plupart des changements seraient impossibles, et vouloir le faire dans un second temps me semble un exercice aussi improbable que stérile, tant toutes les oppositions pourraient alors se coaliser contre ce projet, comme nous avons pu le voir avec le Brexit.
Mais tout ceci ne dit pas quoi faire demain. Dans l’idéal, je pense qu’il faut rassembler tous les partisans d’une rupture complète avec l’Union Européenne. Idéalement, il faudrait réunir de Georges Kuzmanovic, qui fait un beau travail de fond avec son mouvement, à Florian Philippot, que j’ai soutenu lors des élections européennes, en passant par Aurélien Bernier, les chevènementistes prêts à franchir le Rubicon, Julien Aubert, François Asselineau et Nicolas Dupont-Aignan, s’ils jouaient collectif, ou certaines figures de Front Populaire, comme Céline Pina, sous réserve de soutenir une rupture pleine avec l’ordre européen. L’initiative de Generation Frexit, d’appeler à un référendum sur le Frexit me semble ainsi une bonne idée actuellement à la fois sur le fond, mais aussi pour créer du lien dans la sphère dite souverainiste, et je suis fier de faire partie des premiers signataires de la pétition pour ce référendum. Il faudra savoir s’unir sans pour faire de compromis sur la sortie de l’UE, un pré-requis.
Bien sûr, alors que nous sommes à moins de 18 mois du premier tour, cela peut sembler insuffisant pour éviter de se retrouver avec une redite du duel de 2017. Mais sans figure rassemblant le camp dit souverainiste pour le moment, cela me semble la meilleure voie à suivre. Et entre la fin 2015 et mai 2017, tant de choses s’étaient passées que tout reste possible, effondrement de Macron, de Le Pen ou des deux, étant donné que les Français ne veulent pas d’une réédition du duel de 2017…
Est-ce à dire que nous risquons d'avoir E.Macron pour un 2ème tour de piste en 2022 ?
RépondreSupprimerNoëlle
Il faut être humble : nous ne savons absolument pas ce que sera l'élection de 2022. Le précédent de 2017 nous invite à la prudence : personne n'avait vu venir Macron ni le « dégagisme » qui a éliminé Hollande, Sarkozy, Juppé, Fillon...
RépondreSupprimerJe constate simplement que peu de gens souhaitent un nouveau duel Macron/Le Pen, de même qu'entre 2012 et 2017, peu de gens souhaitaient un nouveau duel Hollande/Sarkozy (qu'on nous présentait pourtant comme inéluctable).
De plus, la crise sanitaire et la crise économique qui va suivre vont encore rebattre les cartes.
Mais ce que l'on peut constater, hélas, c'est que la critique de la monnaie unique, qui était présente il y a quelques années, n'existe plus. On ne parle plus de sortir de l'euro, ni chez les Insoumis, ni au Rassemblement National. Et c'est la même chose en Italie puisque la Ligue de Salvini et le Mouvement 5 Etoiles y ont également renoncé.
Il me semble peu probable que d'ici 2022 un mouvement d'opinion en faveur d'une sortie de l'UE et de l'euro puisse voir le jour, d'autant plus que ce débat est verrouillé par les médias, et son aspect trop technique ne le rend pas populaire ni facilement accessible. De plus, les gens ou partis qui y sont favorables sont divisés.
En revanche, je pense que la crise économique peut faire éclater la zone euro. Je m'attends davantage à voir l'euro sombrer de lui-même que disparaître par la volonté des dirigeants politiques.
Si EM repasse en 2022 la France est définitivement foutue. MLP n'est malheureusement pas une alternative crédible. Je n'oublie pas que de tout temps ce (genre de) parti s'est toujours soumis à la finance. Alors qui pour incarner le souverainisme et l'identité nationale ? Montebourg va y aller. Mais peut-on encore faire confiance à un socialiste ? En attendant 2021 risque d'être très chaud...
RépondreSupprimer@Anonyme12 décembre 2020 à 09:24
SupprimerMontebourg n'est plus au PS. Mais le problème, c'est qu'il a quitté la vie politique en 2014 pour fonder une entreprise. Il a essayé de revenir en 2017 mais il a perdu la primaire. Aujourd'hui il est sans parti, sans structure et je vois mal les partis existants se ranger derrière lui. Il n'est pas en situation d'être candidat car il n'est pas homme à se lancer seul dans l'aventure comme l'a fait Mélenchon. D'ailleurs, s'il voulait être candidat, il faudrait qu'il le dise sans tarder et il ne le fait pas.
« Pour moi, Marine Le Pen présidente, cela ressemblerait à du Trump : sur le fond, beaucoup de continuité, à quelques gesticulations près pour donner le change à son électorat. Car dans le cadre de l’UE, avec la libre-circulation des biens, des capitaux et des personnes et l’étroite camisole légale européenne, la politique est tellement contrainte qu’elle finirait forcément par rentrer dans le rang, comme Tsipras. »
RépondreSupprimerJe trouve très étrange la comparaison avec Tsipras (homme politique culturellement très à gauche et pro-migrants), avec lequel elle n'a que très peu de points communs. Si Marine Le Pen arrivait au pouvoir, elle ferait certainement une politique qui ressemblerait beaucoup à celle de Viktor Orban en Hongrie.
@ Noëlle,
RépondreSupprimerIl y a forcément un risque. Après, Hollande n’a pas pu se présenter en 2017, et Macron peut toujours perdre, comme beaucoup de présidents sortants…
@ Moi
Bien d’accord. C’est pour cela que mon papier n’est pas conclusif. Que la critique de la monnaie unique ait disparu n’est pas forcément un problème. Cela veut dire que ce thème peut aussi être repris. Bien sûr, il n’est pas très probable qu’un grand mouvement pour un Frexit émerge d’ici à 2022, mais cela me semble possible et l’opposition des média, loin de le desservir, pourrait l’aider au contraire (cf 2005). En revanche, il faudrait un rassemblement de ses partisans.
@ Anonyme
La France ne sera jamais fichue. Au pire, davantage abîmée, mais on peut toujours reconstruire. Montebourg ? Certaine de ses idées sont bonnes, mais il a aussi été ministre de Hollande et a donc été en partie complice de ce mandat effarant. Un socialiste comme figure de proue, c’est quand même spécial. En revanche, comme membre, important, d’une équipe, pourquoi pas ?
@ Marc-Antoine
Ici, je parle plus de forme et de carcatère. Je pense qu’il y a les deux en elle, un peu de Trump et un peu de Tsipras. Et je me demande si elle n’est pas davantage le second que le premier. Je l’imagine plus comme un Tsipras cédant beaucoup sous la pression de tous les autres que comme un Trump ou un Orban qui parle fort. Je ne suis pas sûr qu’elle résisterait autant qu’eux sur la forme, mais si sur le fond, elle penche bien sûr plus de leur côté.
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