Le débat organisé par France 2 entre Gérald Darmanin et Marine Le Pen au sujet de la loi anciennement nommée « contre le séparatisme » a suscité beaucoup de commentaires. De manière à échanger sur l’issue de ce débat, le premier pour la présidente du RN depuis celui de la présidentielle, voici mon sentiment, qui reste assez partagé plus d’une semaine après l’émission.
Un débat politique n’est pas un grand oral
Mais si cette prestation correspondait sans doute aux exigences d’un Grand Oral, face à une Marine Le Pen bien moins sûre d’elle, hésitante sur les chiffres et plus friable dans son argumentation, Darmanin faisait très blanc bec technocrate prétentieux dans sa bulle face à Marine Le Pen. L’air de supériorité et l’assurance qu’il a affichés pendant tout le débat étaient assez décalés par rapport au bilan du quinquennat, notamment sur ces sujets et en contradiction complète avec ses dires du début de l’émission où il vantait au contraire son parler vrai. Par delà un certain manque de respect républicain à l’égard de la présidente du RN, son discours butait sur de nombreuses limites. Je ne suis pas certain que le magma technocratique de mesures soit extrêmement convaincant pour rassurer les français.
En outre, plusieurs points de faiblesse sont apparus. D’abord, la querelle sur les chiffres ne parvenait pas à cacher le fait que les statistiques de l’immigration sont en hausse depuis des années, à rebours du souhait les français. Ensuite, le ministre n’a pas pu défendre le fait d’imposer de nouvelles règles à des religions qui ne posent pas problème pour en appliquer à celle dont sont issus les islamistes. Enfin, sa critique de la mollesse de Marine Le Pen est extraordinairement périlleuse, même venant du flotteur droit de la macronie, d’autant plus qu’elle a dit qu’elle aurait pu signer son livre. C’est un nouvel épisode paradoxal où LREM et RN sont à fronts renversés, comme à Perpignan sur l’ouverture des musées. Ce faisant, ne risque-t-il pas de perdre la frange la plus hostile au RN de l’électorat de la macronie, sans pour autant convaincre ceux qui souhaitent une politique plus musclée contre l’islamisme ?
Marine Le Pen a manqué d’assurance, mais ce défaut n’est pas forcément rédibitoire, surtout face à un jeune loup trop sûr de lui. Certes, elle manque de maîtrise des chiffres, ne défendant que mollement son chiffre de plus de 400 000 entrées sur le territoire, qui semble additionner titres de séjour, mineurs non accompagnés et demandeurs d’asile. Elle a souvent manqué de répartie, ne rebondissant par par exemple sur les statistiques d’entrées sur le territoire, en hausse constante, qui lui offraient un angle d’attaque aisé pour attaquer Darmanin. Sa distinction entre l’islam politique et la religion musulmane était peut-être trop subtile, même si cela distingue la majorité des musulmans de la minorité, non négligeable, d’activistes dangereux. Elle a aussi passé des messages forts sur l’immigration et le voile. Et son manque d’assertivité peut être rassurant pour une Le Pen et nourrir la dédiabolisation.
L’impression qui domine à la fin, c’est que si Le Pen n’a pas gagné le débat, car toujours trop légère et manquant souvent de répartie, la prestation de Darmanin est peu convaincante. Incarnant un « en même temps », techno et goguenard finalement très macronien, il tient une position peu lisible en critiquant à la fois la mollesse ou le manque de mesure de son opposante. Sans résultats à brandir, ne prend-il pas le risque de fâcher la droite et la gauche en même temps, au point de les perdre tous les deux ?
Je n'ai pas regardé cette émission, ça ne m'intéresse pas. Dans ce genre de débat, les postures sont plus importantes que le fond. Chacun essaie de se positionner pour améliorer son image : Le Pen tente de se remettre de son échec face à Macron et change de ton, et Darmanin fait son Sarkozy. Si cela préfigure le duel Macron/Le Pen en 2022, je ne sais pas lequel a gagné mais je pense que la politique a perdu.
RépondreSupprimerEt puis j'en ai assez de ces sujets sur l'immigration, le voile, etc. J'aimerais qu'on parle d'autre chose. Tant que nous resterons dans l'UE et dans Schengen, il n'y aura aucune politique alternative possible, que ce soit dans ce domaine ou dans d'autres.
Je ne regarde jamais les débats à la télévision : mauvaise qualité et perte de temps.
RépondreSupprimerSur la base des programmes, il me semble évident que le programme de Marine Le Pen en 2017 était plus proche de ce que vous souhaitez que celui de Macron (plus proches sur certains points, privatisations par exemple, neutre sur d'autres).
Il me semble aussi que, dans la mesure où elle n'aurait pas disposé d'une majorité à l'assemblée, elle aurait pour l'essentiel neutralisé la fonction présidentielle pendant son mandat. Ce qui est mieux que les divers transferts de souveraineté en cours vers l'UE, la repentance algérienne, etc, et aurait aussi évité ceci :
https://www.lefigaro.fr/vox/culture/isabelle-barberis-l-opera-de-paris-abandonne-l-universalisme-pour-une-approche-racialiste-venue-des-etats-unis-20210212
"et la nomination par le Président de la République d’un nouveau directeur - qui veut bien faire, mais qui a d’abord été choisi pour mettre en place une politique multiculturaliste. "
Entre deux maux, il faut savoir choisir le moindre, et arrêter de se défausser, me semble-t-il...
Je profite par ailleurs du thème de ce billet pour vous donner un extrait du livre de Fourquet, l'Archipel français.
SupprimerVoici un extrait de la fameuse statistique sur les prénoms masculins arabo-musulmans donnés à des nouveaux-nés en métropole. Les données sont fournies jusqu'en 2016.
"Ainsi, de 1900 à 1950, la proportion de nouveau-nés en métropole portant un prénom arabo-musulman va de manière constante rester proche de 0 %. Un premier frémissement de la courbe se fait sentir à partir du milieu des années 1950, date d’arrivée des premiers contingents de travailleurs immigrés en métropole. La courbe franchit symboliquement la barre des 2 % en 1964, soit deux ans après la fin de la guerre d’Algérie, période marquée par de nouvelles vagues de travailleurs venus des
anciennes colonies pour participer au développement économique et industriel du pays, mais aussi par l’arrivée des harkis. La pente de la courbe s’accentue ensuite dans les années 1970, notamment après 1976 et l’institutionnalisation du regroupement familial. La dynamique démographique est alors
alimentée par l’accroissement de la population issue de l’immigration en âge de procréer ayant grandi sur notre territoire et par la poursuite de l’immigration, soit des hommes et des femmes majoritairement jeunes.
Au terme de cette première phase de hausse, un premier pic (autour du seuil de 7 % des naissances) sera atteint entre 1983 et 1984, période au cours de laquelle la population issue de l’immigration acquiert une visibilité à l’occasion notamment de la Marche des beurs et de grèves importantes dans le secteur de
l’automobile. Un léger tassement s’ensuit au milieu des années 1980, période marquée par une politique migratoire plus restrictive et la mise en place de dispositifs d’aide au retour. La marche en avant reprend à la fin des années 1990, le seuil des 8 % des naissances étant atteint en 1997 pour s’accélérer considérablement depuis lors – et approcher, donc, de la proportion d’une naissance sur cinq ces dernières années. "
Le graphique associé est frappant, avec une courbe en forte hausse de 8% en 1997 à 18% en 2016.
Comme l'ont souligné divers intervenants, par exemple un ex directeur de la DGSE dans un colloque de Chevènement déjà cité en commentaires ici, ce sujet est donc fondamental pour l'avenir du pays, or tout est fait pour qu'il ne soit pas traité.
On discute, on discute...
RépondreSupprimerOn hésite, on tergiverse, on tortille du derrière...
On se braque, on dit "j'veux pas !"...
On stratégise, on théorise qu'il y aura bien, un jour, un candidat herblayiste pas RN...
Pendant ce temps-là, les affaires continuent :
https://twitter.com/frdossant/status/1362741366049144833
Salutations herblayblicaines.
@ Moi
RépondreSupprimerD’accord sur l’UE et Schengen
@ Anonyme (s ?)
Quel programme ? Celui du premier tour, ou du second (s’il y en avait un…) Et puis, comment croire ce qui est écrit de sa part quand il peut y avoir de tels reniements en quelques jours (sur l’euro) ?
Réfléchir à une présidence MLP en 2017 alors qu’elle a perdu de 10 millions de voix, c’est un exercice très théorique. Sans majorité, il y aurait eu cohabitation avec une majorité UMPS, et donc Macron Premier Ministre (ce qui n’aurait peut-être pas déplu à MLP). Aucun changement donc, y compris pour EDF ? Votre démonstration de l’intérêt d’un vote MLP au second tour en 2017 est assez bancale…
Intéressant point de Jérôme Fourquet.