mardi 27 avril 2021

La révoltante interview de Macron à CBS

Il y a quelques jours, en pleine pré-campagne pour sa réélection, le président, pourtant avare d’interviews en France, a accordé trente minutes à la chaine étatsunienne. Comme trop souvent, il a dérapé en évoquant un « besoin de déconstruire notre histoire », suscitant une vague d’indignations. Malheureusement, il n’y a pas que cette phrase qui pose problème dans cette interview.

 


L’agent étatsunien politiquement correct

 

Cette interview est un extraordinaire révélateur de bien des choses qui ne vont pas avec Macron. D’abord, il est tout de même pénible qu’un président si avare des interviews en France, au point d’avoir poussé Piketty à souligner que Trump, au moins, se confrontait aux journalistes, accorde trente minutes à une chaine de télévision étatsunienne. C’est par des journalistes français qu’il devrait pouvoir être questionné sur sa stratégie sanitaire, pas par une journaliste étrangère ! Décidément, Macron choisit toujours la voie de la facilité dans ses confrontations. En effet, la journaliste n’est pas allée très loin dans son questionnement, ce qui semblait l’intéresser princpalement étant de savoir si les touristes de son pays pourraient venir passer leurs vacances cet été en France dans de bonnes conditions…

 

Voici le verbatim complet qui a mené au passage sur la déconstruction : « Je crois que les Etats-Unis et l’Europe affrontent des challenges communs : augmentation des inégalités, discours de haine et tensions dans la société. La question raciale arrive en plus de cela parce que nous n’avons pas réglé les problèmes. Dans votre société, vous aviez la ségrégation et vous avez réagi en réorganisant votre société dans les années 60 avec la discrimination positive et de nouvelles politiques pour gérer ce phénomène. Notre histoire est très différente parce que nous avions de colonies et en même temps, nous sommes des pays d’immigration avec beaucoup de personnes qui viennent de nos anciennes colonies, notamment des pays africains. Et nous avons cette question raciale au cœur de notre société qui créé beaucoup de tensions quand les gens sont victimes de discrimination. Ma conviction est que nous devons traiter ce problème d’abord par la transparence et une évaluation juste. Ensuite, nous devons mener un dialogue apaisé et ouvert pour comprendre comment cela a pu arriver, et, dans une certaine mesure, déconstruire notre propre histoire, sans la moindre confusion, nos histoires étant très différentes ».

 

Sur la forme, outre un anglais tout juste passable, qui dénote probablement d’un manque de préparation, le discours est totalement révoltant : le croisement improbable d’un consultant peu inspiré  et d’un étudiant médiocre de Sciences Po. Du premier, le résident de l’Elysée reprend un plan d’action impersonnel et sans aucune vision, décrit dans un jargon insipide qui pourrait être utilisé pour n’importe quelle réorganisation d’entreprise, entre transparence et dialogue. Du second, on a la thèse et l’anti-thèse, fusionnées dans un « en même temps » illisible, entre les « challenges communs » des deux côtés de l’Atlantique et le rappel d’une histoire différente. Et encore, l’étudiant en sciences politiques devrait en réalité se voir corrigé en rouge une copie aussi indigente tant les parallèles sont des raccourcis abusifs. Les discours de haine et les tensions dans les sociétés ne sont pas du tout de la même force et de la même nature aux Etats-Unis et dans les pays européens, où il y a aussi bien des différences.

 

En effet, le satisfecit accordé aux Etats-Unis sur la question raciale est totalement aberrant. Dans les grandes villes, le taux d’homicide des noirs est dix fois plus élevé que pour les non-noirs, au point qu’ils représentent 50% des victimes pour 10% de la population. Ils représentent 40% de la population carcérale. Pire, la mixité raciale recule puisqu’alors qu’à la fin des années 80, plus de 40% des élèves noirs étaient dans des écoles où ils n’étaient pas majoritaires, aujourd’hui, ce chiffre a été divisé par deux ! Même s’il ne faut pas fermer les yeux sur les actes racistes, qui existent en France, la situation n’a absolument rien à voir de part et d’autre de l’Atlantique, où la ségrégation semble s’être réinventée. On rappellera ici qu’il y a un siècle, bien des noirs étasuniens qui venaient en France (Joséphine Baker, les soldats de la première guerre mondiale) étaient émerveillés par l’indifférence des Français à leur couleur, chose qui perdure largement aujourd’hui, même si cela contredit le discours de certains activistes.

 

Bref, il est totalement ridicule de faire le moindre parallèle sur la question raciale entre les deux côtés de l’Atlantique, qui n’ont absolument rien à voir sur le sujet. En outre, il est particulièrement révoltant d’entendre notre président dire à une journaliste étatsunienne qu’il faudrait « déconstruire notre histoire » pour traiter la question raciale. Par-delà l’aspect choquant de ces déclarations qui mériteraient d’être faites face à un journaliste français qui pourrait le questionner, comme l’a bien pointé Sonia Mabrouk, ce faisant, il reprend la dialectique communatariste d’un pays qui n’a rien à voir avec le nôtre. Au moins, Macron monte de quel côté il penche. Il est aussi assez effarant de voir le président français embrayer de la sorte avec la position des Etats-Unis sur la Russie, dans un suivisme qui rappelle Tony Blair.

 

Ce faisant, Macron montre bien qu’il n’est que l’expression la plus décomplexée et irréfléchie de ces élites françaises totalement fascinées par l’Allemagne et les Etats-Unis. Il est tellement nulle part qu’il se contente d’adapter des shémas importés de l’étranger, de préférence outre-Rhin ou outre-Atlantique pour gérer notre pauvre pays. Son analyse est aussi fausse que ses propositions.

6 commentaires:

  1. @ Troll

    Comme toujours, trop d'assertions fausses, et logiquement non sourcées. Je veux bien débattre, mais sur des faits et pas sur des fantasmes.

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    1. Vous lui avez coupé le micro ?

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    2. Je supprime les commentaires qui ne relèvent pas du débat et se limitent à des insultes ou des accusations complètement farfelues.

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    3. Sa majesté Herblay Ier s'offusque qu'on lui dise que son billet est émotif et peu réfléchi.

      Il y voit, fort opportunément, une bonne raison de supprimer trois commentaires réduisant à néant son laborieux argumentaire.

      Sire, êtes-vous encore un disciple d'Asselineau ? Ou a-t-il déjà rejoint la liste de vos choix (non émotifs et très réfléchis) de dirigeants précédents ?

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  2. Dites donc Herblay, vous râlez contre l'usage de mots anglais et vous avez truffé votre article avec le mot "interview", en français il y a le mot "entretien" qui n'est pas que pour les chiens.

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  3. "En effet, le satisfecit accordé aux Etats-Unis sur la question raciale est totalement aberrant. Dans les grandes villes, le taux d’homicide des noirs est dix fois plus élevé que pour les non-noirs, au point qu’ils représentent 50% des victimes pour 10% de la population. Ils représentent 40% de la population carcérale."

    Sire,

    Vous souhaitiez des références. En voici une :

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2008/04/29/en-france-les-detenus-musulmans-sont-surrepresentes-selon-le-washington-post_1039616_3224.html

    Vous agrée-t-elle ?

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