lundi 20 décembre 2021

Macron sur TF1 : Narcisse candidat

Alors que Les Républicains profitent du traditionnel rebond sondagier consécutif à la primaire, avec le choix d’une candidate idéologiquement proche de lui, et qui semble une vraie menace, Macron a décidé de répliquer par une offensive médias tous azimuts : conférence de presse pour la présidence française de l’UE et très longue émission sur TF1, avant la traditionnelle intervention de fin d’année. Las, les Français ne semblent vraiment pas avoir été intéressés et convaincus par sa prestation

 


Bavardage égocentrique depuis sa bulle

 

L’intervention du président-candidat n’a pas été brillante. D’abord, elle n’a pas attiré beaucoup de Français : à peine 16% de la population l’a regardé, contre 64% pour celle de novembre et 71% celle de juin. Et encore, 9% déclarent l’avoir regardée en entier… Et seulement 37% de ceux qui l’ont regardé l’ont trouvé convaincant, soit à peine plus de 5% de tous les Français. Pire, 79% l’ont trouvé mauvais sur l’immigration, 76% sur le pouvoir d’achat et même 61% sur le chômage. Bref, non seulement cette émission n’a pas fait l’évènement, mais une claire majorité de ceux qui l’ont vu n’ont pas été convaincus par le président-candidat, ce qui génère en outre des commentaires largement négatifs…

 

Bref, l’émission est un flop. Il faut dire que rien n’allait dans l’opération de communication présidentielle. Le fait de l’enregistrer longtemps avant la diffusion était étrange alors que l’actualité est si riche et va totalement à l’encontre des comptes que doit rendre un président de la République. Et cela est d’autant plus vrai que les journalistes et le ton de l’émission étaient extraordinairement complaisants : d’ailleurs, eux et le président se sont beaucoup sourris pendant les presque deux heures de cette opération. Bien sûr, certaines questions qui fâchent ont été posées, comme sur les déclarations offensantes ou une photo embarassante, mais tout n’a pas été montré, les questions étaient finalement bien modérées, et il n’y avait guère de relance quand le président bavard noyait le poisson dans sa réponse.

 

Même son mea culpa sur ses dérapages ne pesait pas bien lourd tant il a en relativisé la portée entre une prétendue décontextualisaton, le fait qu’elles ne seraient que la conséquence de sa vitalité, sa volonté de transgresser ou de ne pas céder à un conformisme. Mais en quoi ces précisions devraient modérer la critique ? La précision du contexte (devant des start ups) où Macron a parlé de « ceux qui ne sont rien », aggrave plutôt son cas, en renvoyant à nouveau l’image de ce président des riches et des « premiers de cordée ». Même s’il a admis qu’il tâcherait de ne pas recommencer, il a bien trop fait sentir que les médias et les Français abusaient de lui reprocher ces écarts de langage pour ne pas conforter tous ceux qui pensent que ce sont des dérapages inacceptables. Il n’y avait pas circonstance atténuante.

 

Toute l’émission a manqué de contradiction. Quand il a vanté son prétendu investissement historique dans la santé, pourquoi les journalistes ne lui ont pas répliqué en soulignant la poursuite des fermetures de lits ou comparé avec les investissements autrement importants faits outre-Manche ? Les deux journalistes ont été d’une complaisance digne de la Pravda, passant les plats pour faire briller le roitelet-soleil, sans presque jamais questionner ses affirmations effarantes. Il faut dire que laisser passer son discours sur le pouvoir d’achat est grotesque, lui le président des Gilets Jaunes, contraint de donner une obole de 100 euros ce mois-ci pour tenter de calmer la population.  Idem sur le chômage, qui n’est au plus bas depuis plus de 10 ans que dans les statistiques trafiquées pendant le mandat Hollande.

 

Et que dire de l’exemple démocratique qu’a vanté le locataire de l’Elysée pour la gestion de la crise sanitaire, alors que son gouvernement n’a cessé de se contredire et de mentir, le tout pour exploiter politiquement la crise sanitaire, dans un jeu trouble avec bien des médias, perfusés aux campagnes de pub gouvernementales, derrière le secret du conseil de défense et après des débats tronqués à l’Assemblée. Le ponpon a été atteint quand Darius Rochebin, ultra-oligarchiste, a osé présenter les Gilets Jaunes comme des « manifestations de haine » alors qu’il s’agissait seulement d’une révolte démocratique essentiellement pacifique contre l’abandon des citoyens par l’Etat, et d’une volonté de justice sociale et de démocratie. Les manifestations de violence ont été ultra minoritaires et souvent le fait d’éléments extérieurs.

 

Au final, Arnaud Benedetti a bien raison de parler d’une « introspection complaisante de lui-même ». Cet exercice de communication était bien trop grossier pour être réussi : un président satisfait de lui-même au mépris du sentiment des Français, jamais contredit dans un exercice destiné à faire briller son bilan tout en lui permettant de déjà roder son discours de campagne, tout en disant qu’il ne fait pas de politique est ridicule. A force de nier la réalité, la réalité finira par le rattraper, en avril.

2 commentaires:

  1. @LH:
    On ne brigue pas l'Elysée sans une part de narcissisme. Le problème n'est pas là. Macron n'est pas plus suffisant et déconnecté du pays réel que pas mal de ses prédécesseurs. Les Français veulent du changement. Sauf que pour le moment Pécresse n'incarne pas une idée du changement susceptible de séduire une majorité de Français. Ciotti incarne leur souhait sur le régalien mais après la rigueur version Hollande et la posture pro-business de Macron veulent-ils vraiment un coup d'accélérateur de rigueur et de dérégulation? Est-ce vraiment pertinent dans le contexte du COVID? Pour le moment Pécresse est dans la situation des Travaillistes au moment où les Anglais n'en pouvaient plus des années Thatcher mais n'étaient pas séduits par le changement qu'ils proposaient. Cela changera-t-il en cours de campagne?

    JZ

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  2. @LH encore:
    Effectivement intéréssant papier Marianne sur Pécresse et l'autonomie des universités montrant comment une Droite fascinée par le soi disant modèle américain finit par faire le lit du communautarisme et déplorer les effets dont elle a chéri les causes. On ne peut prétendre privatiser et régenter en même temps.

    JZ

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