Dans la bulle de certains, le pouvoir d’achat progresserait. Une simple comparaison du revenu moyen et de l’inflation moyenne pourrait peut-être l’indiquer. Mais la moyenne peut être extraordinairement trompeuse. Nous le savions sur les revenus avec l’effarant cas étatsunien, mais, dans une étude de référence, l’OFCE montre que la moyenne est mauvaise conseillère sur l’inflation également. Pas étonnant qu’il y ait un grand écart entre des moyennes trop grossières et le sentiment des Français.
Inflation des salaires en haut, et des prix, en bas
Même au niveau du décile, les écarts sont énormes puisque l’inflation n’est que de 2,3% pour les moins touchés, et monte à 6,3% pour les 10% les plus touchés par l’inflation des prix de l’énergie ! Pour les 5% les plus touchés, on atteint 7,3%, et même 9,8% pour les 1% les plus touchés ! Bref, l’inflation moyenne n’est qu’un indicateur assez imparfait pour représenter la réalité. Quand le prix de biens ou services qui pèsent nettement plus lourds dans le panier des classes populaires s’envole, l’inflation moyenne est une indication très imparfaite. Mais plus globalement, cela amène à se poser sérieusement la question de la mesure de l’évolution du pouvoir d’achat, car une moyenne imparfaite pour l’évolution des salaires et une moyenne tout aussi imparfaite de l’inflation transforme la moyenne en chiffre purement théorique, qui peut être très éloigné de la réalité de la grande majorité des Français.
On rappelera ici le cas de l’évolution des salaires aux Etats-Unis, sur quatre décennies, ou même trois ans seulement, où la moyenne est bien mauvaise conseillère. Emmanuel Saez avait montré que de 1973 à 2012, si les revenus moyens avaient progressé de 17%, pour 90% de la population, ils avaient baissé de 13%, du fait de l’envolée des revenus des plus riches, les 1% triplant quasiment les leurs ! Idem de 2009 à 2012, où plus de 90% de la hausse des revenus était allée aux 1% les mieux payés. Le problème est que bien des dirigeants ou des analystes à courte vue, s’arrêtent à ces moyennes imparfaites, faisant comme si une moyenne était un chiffre qui s’appliquait à tous uniformément. Pourtant, si les salaires progressent plus en haut et moins en bas, et que l’inverse est vrai pour l’inflation, alors les statistiques moyennes surévaluent très fortement le pouvoir d’achat des classes populaires.
L’actualité récente nous a justement montré que les salaires du haut de la pyramide sociale n’évoluent pas vraiment à la même vitesse que la moyenne. D’une part, les salaires des patrons du CAC40 se sont envolés, à 8,7 millions d’euros en moyenne en 2021, en hausse de 60% sur deux ans. On peut également rappeler que leur rémunération atteignait 4,2 millions d’euros en 2014, et qu’elle a donc plus que doubler en seulement sept ans… On peut également penser à la polémique sur le salaire du patron de Stellantis, Carlos Tavares, à 19 millions, auquel une majorité d’actionnaires s’est opposée, ce qui n’aura aucune influence puisque ce vote n’est que consultatif… Il fait mieux que Carlos Ghosn et rejoint la moyenne des patrons des grandes entreprises étatsuniennes, même s’il démeure un peu en-dessous de certains de ses homologues. Mais jusqu’où les plus hauts salaires pourraient bien aller ?
Finalement, ils sont le reflet de cette époque fondamentalement injuste, qui ne cesse d’accroître le fossé entre les hommes. Qu’il est loin le capitalisme des Trente Glorieuses, où un patron ne gagnait pas plus que 30 ou 40 fois le salaire minimum ! Aujourd’hui, c’est plus de 400 fois le salaire minimum en France ! Et aux Etats-Unis, toujours en pointe pour la montée des inégalités, nous dépassons le cap des 1000 !
@LH:
RépondreSupprimerAutant je veux bien taper sur JLM pour la candidature Bouhafs (et ce qu'elle dit sur le flou de JLM par rapport à l'idéal républicain), autant je suis effaré par certaines contre-vérités:
-Pour Camba JLM c'est la sortie de l'UE, l'OTAN et l'OMC. Sur l'UE c'est faux, il y a juste une bien floue désobéissance.
-Beaune critique le principe de désobéissance européenne de JLM en oubliant qu'il existe déjà dans les faits lorsqu'un pays s'appelle Allemagne ou est un pays ami de Berlin. Cf.Karlsruhe affirmant la primauté du droit allemand.
Le fait que les LFI ne contre-attaquent pas nourrit les raccourcis sur le souverainisme.
JZ
Je suis le premier à tirer à boulets rouges sur les éléments anti-républicains de la NUPES. Mais la focalisation de MLP et des LREM de ce début de campagne est assez ridicule. Faire d'une personne l'homme à abattre n'a pas toujours été couronné de succès (Sarko, Trump, Berlusconi...). MLP dit à propos de JLM : moi ou son chaos. Le genre d'arguments utilisé contre le RN et globalement l'argument des rois du statu quo. LREM qui voit dans l'eurofédéralisme dont Berlin ne veut pas un plan anti-JLM? Un peu de sérieux. Je pense que le danger JLM est surestimé: son périmètre géographique est celui du reliquat de gauche, soit les grandes villes et leurs banlieues. Du coup il est le candidat le plus exposé à la désillusion.
SupprimerJZ
JZ
En effet vous avez raison, M. Herblay.
RépondreSupprimerDans les entreprises, les différences de rémunération sont à des niveaux jamais atteint.
Le grand banquier JP Morgan, à fin 1800, estimait que le plus haut salaire ne devait pas dépasser 20 fois le plus salaire au sein de la même entreprise.
Et vu qu'il était actionnaire de référence des plus grandes entreprises américaines, il imposait cette pratique.
Aujourd'hui vous auriez du mal à me citer un personnage français recouvrant le même rôle. L'actionnariat des grandes entreprises est éclaté ou étatique (c'est à dire que personne n'est responsable). Donc les dirigeants salariés font la loi et s'octroient des salaires indécents.
L'ultra-libérisme de fin 1800 était plus égalitaire que la socialdémocratie du début 2000
@ JZ
RépondreSupprimerBien vu. Ce début de campagne est bien triste. Les macronistes qui passent du « péril brun » au « péril rouge ». Il est frappant de constater que les extrémistes du centre reprennent les mêmes arguments pour dénoncer les radicaux de droite et de gauche. Et sur la désobéissance, bien d’accord également : l’Allemagne désobéit, l’UE se désobéit à elle-même (monétisation…) comme je l’avais développé dans un papier pour le FigaroVox. Et la défense de LFI est bien molle sur ce sujet
D’accord également sur la focalisation sur Mélenchon. Je pense qu’elle vient surtout pour tenter d’achever LR : s’il y un « péril rouge », alors une partie de l’électorat LR pourrait être tenté de voter Macron. Sans ce « péril », il pourrait les historiques LR bien implantés aux playmobils marcheurs
@ Anonyme
Merci. Mais je ne suis pas sûr que la situation fin 19ème ait été plus égalitaire qu’aujourd’hui. Il me semble même que nous étions dans une situation proche
En effet, les inégalités étaient très élevées au tournant fin 19ème / début 20ème : http://www.gaullistelibre.com/2015/06/la-critique-des-inegalites-des.html
RépondreSupprimer"En effet, les inégalités étaient très élevées au tournant fin 19ème / début 20ème"
SupprimerAttention! De quelle inégalités parle-t-on ? Le petit graphique dans le lien que vous reportez (Piketty tiré de Atkinson) présente, c'est vrai, un niveau d'inégalité comparable à l'actuel des REVENUS en 1900, donc on mélange salaires, dividendes, rentes foncières etc
Mais si on parle de seuls salaires, ils étaient plus égalitaires, avec un rapport 20 maximum du plus haut au plus bas, selon la règle de JP Morgan.
Aujourd'hui, l'actionnariat éclaté ou étatique, combiné à la création débridée de monnaie-dette, grâce aux taux d'intérêt minimes, permet aux dirigeants de s'octroyer des rémunérations qui font 100 ou 1000 fois celles de leurs collègues moins payés.
L'inégalité s'est donc invitée au sein de la classe des travailleurs, alors qu'en 1900 elle était plutôt entre la classe des rentiers / patrons et celle des travailleurs
Signé habsb
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