vendredi 31 janvier 2025

Le talon-pointe très malhabile de la BCE

Jeudi, j’ai été invité à commenter la décision de la BCE de baisser son taux directeur de 0,25 point, à 2,75% par l’économiste Alexandre Lohmann dans un espace de discussion. Une série d’échanges qui permet de dépasser les compte-rendus insipides et superficiels de certains, alors que la politique monétaire menée par la BCE devrait être questionnée de manière beaucoup plus insistante.

 


Caresse sur l’accélérateur et gros coup de frein

 

Habituellement, les banques centrales modifient leurs taux directeurs pour agir sur la croissance ou l’inflation. Une hausse des taux permet de ralentir l’évolution des prix et de l’économie, quand une baisse des taux tend à redynamiser la croissance (en rendant les emprunts moins coûteux, pour investir, consommer ou placer) et tend à réduire l’inflation. Le caractère stimulant, ou non, des taux d’intérêts se mesure en général en les comparant au niveau de la croissance nominale du PIB (croissance + inflation). En passant à 2,75% son taux directeur, la BCE le rend un peu plus accommodant, puisque le PIB nominal progresse d’un peu plus de 3%, mais de manière encore très modérée sachant que la croissance est fortement retombée dès 2023. La priorité donnée à la maitrise de l’inflation pousse la BCE à fixer des taux souvent trop élevés pendant un peu trop longtemps, comme c’est le cas depuis les débuts de l’euro

 

En fait, cette très légère pression sur l’accélérateur ne se transmet bien à l’économie que quand elle se traduit par une baisse concomitante des taux longs, ce qui est le cas la plupart du temps, les économistes ayant montré une très forte corrélation entre taux directeurs et taux longs. Mais si les taux courts sont passés de 4% en juin 2024 à 2,75% aujourd’hui, les taux longs n’ont pas suivi. En juin 2024, les taux à 10 ans de la France tournaient autour de 3,2%. Ils sont aujourd’hui autour de 3,4%. Il en va de même pour l’Allemagne, où les taux à 10 ans étaient alors autour de 2,5%, comme aujourd’hui. Les taux à 10 ans italiens, eux, ont baissé de 3,9 à 3,6%. La courroie de transmission entre les taux directeurs de la banque centrale et les taux longs auxquels empruntent les Etats ne fonctionne pas comme d’habitude.

 

La raison est simple : parallèlement, la BCE a démarré en 2022 un programme de durcissement quantitatif, qui consiste à ne pas racheter les titres de dettes souveraines rachetées précédemment, lorsqu’ils viennent à échéance. D’abord partiel, depuis le 1er janvier, il est systématique aujourd’hui. Ce choix, fait dans d’autres pays, et qui s’explique par les règles européennes, affecte profondément le marché des dettes souveraines et les taux auxquels les États empruntent. En effet, cela produit à la fois une baisse de la demande, et une augmentation de l’offre (puisqu’une partie n’est plus thésaurisée dans les coffres des banques centrales), poussant à la hausse les taux auxquels les Etats empruntent. Bref, si la baisse des taux directeurs est un modeste coup d’accélérateur, le coup de frein de la démonétisation est beaucoup plus fort, au point de casser la transmission de la baisse des taux directeurs aux taux longs.

 

Ce faisant, alors même que la zone euro se porte mal, avec l’Allemagne dont le PIB a reculé pour la deuxième année, et une France proche de la récession (avec le recul du PIB au quatrième trimestre) et une inflation proche des objectifs, la politique de la BCE est encore une fois inadaptée au contexte économique et à contre-temps. A minima, le fort recul de la croissance et de l’inflation aurait dû mettre en pause la fin du programme de rachat partiel des dettes souveraines. Là, en réalité, l’action de la BCE en ce début d’année revient à freiner plus encore l’activité en poussant les taux longs à la hausse. Certes, la Fed fait de même, mais la croissance des Etats-Unis est forte, et les taux sont sensiblement inférieurs à la croissance nominale du PIB (4,25% vs 5,5%), indiquant une politique monétaire finalement accomodante.

 

Encore une fois, la BCE prend une mauvaise décision. Outre le problème d’une politique taille unique pour des réalités très différentes (qui reste accommodante pour l’Espagne), c’est l’ensemble de la politique monétaire de la BCE qui est une véritable faute, en faisant un choix globalement restrictif alors que tout devrait pousser à une politique plus accomodante. Un nouveau carton rouge pour la BCE.

4 commentaires:

  1. Je vote pour Herblay comme prochain président de la BCE, il est beaucoup plus compétent que tous les dirigeants de la BCE ensemble!

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    1. C'est vrai que les dirigeants de la BCE sont des cracks, pourquoi les critiquer?
      Ils sont en train de reussir a mettre le continent en recession, à le desindustrialiser et à le rendre incapable de toute innovation (vaccins, IA etc).
      Bon, ils sont un peu aidés par la commission quand meme, hein; c'est un travail d'équipe, tout ça.
      Bravo les gars (et les filles aussi d'ailleurs). Good job, continuez comme ça.

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    2. Les choses vont mal pour vous? C’est vraiment dommage pour vous. Pour moi, tout va très bien, y compris financièrement!

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  2. Troll de Bruxelles, ça comprend pas une formation minimale en macro-économie ou en rhétorique?
    Que ça aille bien pour vous les gars j'en doute pas, mais faites gaffe : à force de sortir des posts débiles, vous allez finir par vous faire lourder.

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