samedi 25 janvier 2025

Trump : l’oligarchisme tempéré par du populisme incorrect

Lundi, Donald Trump a été investi et a immédiatement signé une avalanche de décrets (dont certains ne sont pas vraiment de son ressort…). Malheureusement, la couverture médiatique de son investiture ne souffre guère de nuance, entre le panégyrique en mode Fan de Sarah Knafo, et une certaine gauche qui fait des parallèles avec Hitler. La réalité me semble plus subtile.

 


Ni complaisance, ni caricature

 

Donald Trump est extrêmement éloigné de mes idéaux politiques : sa vulgarité, ses incohérences, ses provocations inutiles, et finalement, une grande partie de son agenda politique, sont à l’opposé de mes convictions. En revanche, je peux lui reconnaître une vraie habileté dans son positionnement politique, qui repose sur de nombreux recyclages. D’abord, il a conservé, et accentué l’hostilité naturelle d’une partie des Républicains à l’égard de l’immigration. Même The Economist a été contraint de reconnaître que la baisse de l’immigration sous son premier mandat a contribué à faire progresser les bas salaires. Il tient un discours très protectionniste, mais qui n’a pas souvent été concrétisé entre 2016 et 2020. Enfin, il a su faire un virage à 180 degrés en matière de politique étrangère après les années Bush, en revenant à un relatif isolationnisme, et défendant la paix par rapport à des Démocrates plus va-t’en guerre. Ses dernières provocations sur Panama et le Groenland resteront sans doute au stade d’outrances.

 

L’habileté de Trump, c’est d’avoir très bien exploité les faiblesses des Démocrates, et d’avoir su prendre leur contre-pied dans certains domaines, pour marquer sa différence, et incarner une meilleure option. Au discours corseté, « bien pensant », et autoritaire du camp démocrate, qui prétend parfois imposer sa vérité au point de remettre en cause la liberté d’expression, Trump s’en est fait le défenseur, un narratif qui a pris Kamala Harris à revers. Certes, Trump dit beaucoup d’énormités, mais il s’oppose aussi à une vision orwellien de la politique que les oligarchistes bien pensant adoptent trop souvent, voulant effacer des discours qui ne leur conviennent pas, même s’ils sont vrais. Il y avait donc beaucoup de raisons pour préférer Trump : l’international, l’immigration, le protectionnisme, la défense de liberté d’expression, la gestion calamiteuse et bien trop tardive de la passasion Biden / Harris et le rebond inflationniste ignoré par l’administration sortante. De vrais arguments pour compenser les limites de ce personnage…

 

Et au final, une partie des limites de Trump nourrissait son narratif, notamment sur la liberté d’expression. Malgré tout, je ne me fais pas d’illusion. S’il est du bon côté sur ce sujet aujourd’hui, par rapport à une partie des démocrates et des oligarchistes bien pensant aux penchants de plus en plus autoritaires, il faudra qu’il le reste dans la durée, alors qu’il a varié sur certains sujets (le salaire minimum, ou le protectionnisme). Plus fondamentalement, une partie de son agenda pose de graves problèmes. La baisse de l’impôt sur les sociétés est une hérésie alors que les profits sont à des plus hauts historiques, et qu’ils ont déjà beaucoup baissé depuis Reagan (rappelons ici qu’il était à 50% sous Nixon, pas vraiment un communiste). Les baisses d’impôt risquent de déséquilibrer plus encore les finances publiques, et peser sur les programmes sociaux et les services publics qui restent, malgré de vrais besoins…

 

Autre point problématique : la dérégulation, notamment en matière financière, et pour les pseudos actifs appelés crypto-monnaies, va encore amplifier une bulle déjà importante. Si les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, les actions et le Bitcoin s’en rapprochent dangereusement, avec un Dow Jones qui a triplé depuis le pic de 2008, quand le CAC40 fait à peine un peu mieux. Certes, les entreprises étasuniennes génèrent beaucoup de croissance et de profits, mais bien des indicateurs montrent que nous sommes proches de la cote d’alerte. Avec Trump, le risque est que la bulle continue de gonfler complètement inconsidérément, notamment dans le domaine des pseudo-actifs, le nouveau président ne s’étant pas géné pour créer la sienne, démontrant le caractère profondément artificiel du secteur. Et quand les bulles gonflent trop, nous savons comment cela se termine. Un krach financier d’ampleur pourrait bien se préparer.

 

Bref, il faut reconnaître que les premiers jours de cette seconde présidence gardent un certain équilibre avec de nombreuses annonces favorables aux classes populaires (protectionnisme, immigration). Mais avec les ralliements visibles de grands patrons, Trump pourrait bien finir par mener des politiques d’abord favorables aux oligarques de son pays et finir comme un simple oligarchiste incorrect. 

7 commentaires:

  1. C’est clair quand faisant du protectionnisme et en réduisant l’immigration, on ne peut qu’obtenir le soutien enthousiaste des classes populaires peu performantes, paresseuses et racistes!

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  2. Le xénophobe social est de retour...

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    1. La xénophobie ne concerne par définition que les personnes de nationalité étrangère.

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    2. Stricto sensu, la xénophobie, c'est la peur de ce qui est étranger, différent. La populophobie est une xénophobie des élites à l'égard des classes populaires. Le racisme est une xénophobie spécifiquement tournée vers les personnes étrangères.

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    3. Absolument faux, comme d’habitude ! Le racisme n’a strictement rien à voir avec la nationalité d’une personne, mais avec sa race. Un français blanc ne peut pas être raciste envers un suisse blanc mais peut tout à fait l’être envers un français noir!

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    4. Sauf que le concept de « race » n'est pas pertinent pour caractériser les différents sous-groupes géographiques de l'espèce humaine car la diversité génétique est beaucoup plus importante entre les individus d'une même population qu'entre groupes différents. Le consensus scientifique actuel rejette, en tout état de cause, l’existence d'arguments biologiques qui pourraient légitimer la notion de « race »

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  3. HERBLAY
    " La baisse de l’impôt sur les sociétés est une hérésie "

    Proposer une hausse des impôts sur les sociétés signifie croire qu'une partie au moins de l'argent en main aux entreprises serait mieux dépensé par l'état.
    L' histoire récente de la France prouve l'exact contraire.
    Parmi les exemples, qui sont légions, il suffit de comparer les évolutions respectives de Bull et Microsoft
    1980 : chiffre d'affaire de Bull $1milliard, Microsoft $7.5millions
    2025 : chiffre d'affaire de Atos (dont Bull n'est plus qu'une filiale) 9.7 milliards (et cotation boursière 0,2 centimes d'Euro) Microsoft $278milliards (et cotation boursière $444).

    Que dire de plus?

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