lundi 10 mars 2025

Quand les profits d’EDF révèlent la (nouvelle) rente de l’électricité

Le service public de l’électricité a été pendant des décennies une force de notre pays, nous assurant l’accès à une énergie abondante et bon marché, aussi qu’une vraie indépendance nationale. Las, tout le bloc central, du PS et des Verts à LR, ont accepté de saboter cet actif majeur en créant un pseudo marché, qui n’est que la constitution de rentes juteuses, comme le montrent les comptes d’EDF

 


Toujours plus de profits, malgré l’ARENH

 

Il est important de lever tout possible malentendu : la France a la chance d’avoir une entreprise comme EDF, qui réalise près de 120 milliards de chiffre d’affaires en 2024, et un résultat avant impôt de 17,4 milliards. Nous avons construit un pôle d’excellence majeur pour notre pays, et il est légitime que, dans une activité qui nécessite autant d’investissements, EDF génère des profits. Cela est d’autant plus méritoire que l’entreprise subventionne ses concurrents sur le marché français en leur vendant à 42 euros le MWh une portion non négligeable de sa production nucléaire, à la demande de l’UE et de l’Allemagne, demande acceptée par le bloc central, sans que l’on puisse comprendre pourquoi nous l’avons acceptée. Sachant qu’EDF est contraint de vendre 120 TWh, et que les estimations du prix de production varient entre 60 et 70 euros le MWh, c’est une subvention de 2,2 à 3,4 milliards pour ses concurrents ! Et je serais curieux de connaître les mécanismes de rachat de l’énergie renouvelable d’opérateurs privés…

 

Pire, pour qui prend plus de recul sur les résultats du groupe, les chiffres sont assez stupéfiants. Si l’activité dite régulée en France est assez stable (20,1 milliards de chiffre d’affaires en 2024, contre 16 milliards en 2018, pour un EBITDA passé de 4,9 à 5,6 milliards), les chiffres de la production et la commercialisation en France sont révélateurs. En 2018, la première filiale d’EDF dégageait 26,1 milliards de CA et 6,3 milliards d’EBITDA. Après le sommet de 2023 (64,2 et 24,7), les chiffres de 2024 (51 et 21 milliards) indiquent un quasi doublement du chiffre d’affaires et plus qu’un triplement de l’EBITDA. En clair, l’EBITDA est passé de 24% du CA à 41% en seulement 6 ans. Les règles délirantes de la pseudo libéralisation ont permis à EDF d’augmenter son niveau de marge de 70% en à peine 6 ans, alors même qu’EDF est pénalisée par une ARENH qui plombe ses comptes, et sans doute d’autres règles…

 

En clair, la pseudo libéralisation du marché de l’électricité est en réalité la constitution d’une rente bien plus lucrative, partagée avec des acteurs privés. Il faut rappeler ici que rien ne justifiait la hausse des prix de l’électricité en France, alors que plus de 90% de notre production est décarbonée, et donc à coût relativement constant. Pourtant, j’ai pu constater sur ma facture EDF une hausse de 92% du prix des heures creuses de 2020 à 2024 et de 79% du prix des heures pleines (avant la baisse du début d’année). Bref, les technocrates qui nous gouvernent ont créé des rentes juteuses, dont les prix sont fixés par d’autres technocrates (le miracle de la libéralisation, c’est qu’il faut créer une entité pour fixer les prix), qui a assuré une hausse des prix bien supérieure aux coûts, et permet une hausse constante des marges, qui marque la transformation de ce qui était un service public en une rente de plus en plus juteuse.

 


D’ailleurs, les comptes d’EDF révèlent d’autres pépites assez extraordinaires. D’abord, il est frappant de constater qu’en France, comme en Italie ou en Grande-Bretagne, le pourcentage d’EBITDA progresse, que le CA monte (comme en 2023) ou descende (en 2024). Cette « libéralisation » très régulée a une capacité assez stupéfiante à permettre une hausse des profits des opérateurs de ce « marché »… Autre pépite : le niveau extravagant de rentabilité des énergies renouvelables, filiale prodigieusement profitable. L’entité globale réalise un EBITDA de 54% sur son chiffre d’affaires (47% en 2023). La filiale EDF Renouvelables est passé de 46 à 64% en un an… Même si le modèle d’affaires des renouvelables est particulier, on peut penser que ce qui aurait pu être un simple, mais performant, service public, est devenu une rente si juteuse qu’elle interroge sur les compétences ou l’agenda de ceux qui l’ont décidé.

 

La France a de la chance d’avoir EDF et nous pouvons remercier tous ses salariés d’avoir construit et d’opérer une entreprise aussi performante et forte. En revanche, les performances financières d’EDF montrent à quel point toutes les règles effarantes négociées et mises en place par les dirigeants du bloc central (du PS et des Verts jusqu’à LR, en passant par Macron), sont aberrantes pour l’intérêt général : elles ont mis en place des rentes faramineuses, dont EDF n’est qu’une illustration…

2 commentaires:

  1. Etes vous au courant que 100% des actions EDF sont détenues par l'Etat français ?

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  2. Ce serait évidemment tellement mieux si EDF perdait des milliards chaque année!

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